Préambule.

Le personnel navigant de l'aéronautique navale a vocation à mettre en œuvre les aéronefs de la marine. Il suit une phase de sélection puis un cycle de formation et d'entraînement, rigoureux et sélectif, pour exécuter les missions qui lui sont ordonnées. L'investissement humain et financier que consent la marine pour disposer de pilotes entraînés et aptes au combat ainsi que le coût des aéronefs mis en œuvre, imposent d'avoir un suivi exhaustif de la qualité du personnel navigant.

Cette instruction a pour objectif de définir le déroulement des carrières aéronautiques des pilotes, ainsi que les processus de gestion et de suivi de celles-ci.

1. DÉROULEMENT DES CARRIÈRES AÉRONAUTIQUES.

1.1. Formation professionnelle.

Cette période s'étend du début des sélections/évaluations en vol à l'école d'initiation au pilotage escadrille 50 S (EIP/50S) jusqu'à l'acquisition du brevet de pilote de deuxième degré.

Elle se déroule au sein des écoles de pilotage de l'aéronautique navale en quatre phases qui, selon les composantes, peuvent se chevaucher.

1.1.1. Sélection, évaluation et pré-orientation.

Cette phase se déroule au sein de l'EIP/50S. Son objectif est de sélectionner les candidats aptes à suivre une formation complète de pilote de l'aéronautique navale, d'évaluer leur potentiel à évoluer dans les différentes composantes et à les pré-orienter en fonction de leur aptitude. À l'issue de cette phase les élèves suivent une formation théorique.

---

 

1.1.2. Formation théorique.

Cette phase a pour objectif de donner le bagage théorique nécessaire pour suivre une formation en vol de pilote dans l'aéronautique navale.

1.1.2.1. Orientation « avions ».

Les élèves pré-orientés « avions » suivent une formation théorique au centre d'instruction sol du personnel navigant (CISPN) au sein de l'école de l'air. Elle donne lieu à l'attribution de l'ATPL (A) théorique [airline transport pilot licence (licence de pilote de transport de compagnie aérienne)].

1.1.2.2. Orientation « hélicoptères ».

Les élèves pré-orientés « hélicoptères » suivent une formation théorique au sein de l'école de l'aéronautique navale (EAN) de Dax. Elle donne lieu à l'attribution du CPL (H) théorique [commercial pilot licence (licence de pilote commerciale)].

À l'issue de cette phase et quelle que soit l'orientation retenue, les élèves suivent une formation initiale sur aéronef.

1.1.3. Formation initiale.

Au cours de cette phase, la formation aéronautique initiale sur aéronef est dispensée aux élèves-pilotes.

Elle vise à leur donner les bases du pilotage.

1.1.3.1. Orientation « avions ».

Les élèves suivent le cours « tronc commun » au sein de l'EAN Cognac. Cette phase est sanctionnée par l'attribution du brevet de pilote du premier degré.

1.1.3.2. Orientation « hélicoptères ».

Les élèves suivent le cours « pilote hélicoptère » au sein de l'EAN Dax puis de l'EAN Le Luc.

À l'issue de la formation initiale, les élèves sont orientés en vue de leur spécialisation.

1.1.4. Spécialisation.

La spécialisation est la dernière phase avant de pouvoir être affecté comme pilote breveté sur aéronef en flottille ou en escadrille.

La phase de spécialisation est sanctionnée par :

• l'attribution du brevet de pilote du deuxième degré avec la mention afférente ;

• l'attribution du brevet d'aéronautique et la spécialité d'aéronautique navale (AVIAT) pour les officiers de carrière ;

• l'attribution du brevet de pilote d'aéronautique et la spécialité de pilote d'aéronautique (PILAE) pour les officiers servant sous contrat.

On distingue les spécialisations suivantes :

• spécialisation « avion à réaction » (REACT) et « avion de guet embarqué » (GUETEMB) : les élèves-pilotes destinés à servir dans une flottille de chasse ou de guet aérien, suivent cette phase au sein de l'EAN Méridian.

• spécialisation « avion multimoteurs » (MULTIMOT) : les élèves-pilotes destinés à servir dans une flottille de patrouille maritime, ou de surveillance maritime suivent les cours de l'EAN Avord.

• spécialisation « hélicoptère embarqué » (HELIEMB) : ses élèves destinés à servir dans une flottille d'hélicoptères suivent les cours au sein de l'école de spécialisation sur hélicoptères embarquées (ESHE)/22S.

1.2. Progression opérationnelle.

Au cours de sa carrière aéronautique, un pilote suit une instruction/entraînement au sol et en vol en vue d'obtenir des qualifications supérieures ou des mentions particulières qui lui permettront d'exécuter des missions opérationnelles de complexité croissante.

Cette période débute après l'acquisition du brevet de pilote du deuxième degré. Cette instruction/entraînement peut avoir lieu en flottille/escadrille opérationnelle ou au sein d'un groupement d'entraînement et d'instruction. Il donne lieu à l'attribution des qualifications aéronautiques suivantes qui sanctionnent la compétence en matière de pilotage et de gestion de mission :

• équipier opérationnel (EO) pour les pilotes de chasse ;

• pilote opérationnel (PO) pour les pilotes d'hélicoptères, de Hawkeye et d'avions basés à terre.

Elle s'achève avec l'acquisition de qualifications tactiques supérieures :

• chef de patrouille (CP) pour les pilotes de chasse ;

• commandant d'aéronef confirmé (CAC) pour les pilotes de Hawkeye et d'avions basés à terre ;

• chef d'hélicoptère opérationnel pour les pilotes d'hélicoptère (CHO).

Selon les composantes, des qualifications intermédiaires ou supplémentaires peuvent sanctionner une aptitude à effectuer une partie des missions de l'unité, une liste non exhaustive est présentée
ci-dessous :

• sous-chef de patrouille (SCP) pour les pilotes de chasse ;

• commandant d'aéronef opérationnel (CAO) pour les pilotes de Hawkeye ;

• commandant d'aéronef (CDA) pour les pilotes d'avions basés à terre ;

• chef d'hélicoptère élémentaire (CHE) pour les pilotes d'hélicoptère.

Ces qualifications peuvent être complétées par des qualifications aéronautiques ou techniques particulières (instructeur, mission particulière, armement spécifique, etc.).

2. GESTION DE LA CARRIÈRE AÉRONAUTIQUE.

2.1. Caractérisation de la carrière.

Le coût de la formation des pilotes de l'aéronautique navale, des aéronefs mis en œuvre et de leur létalité potentielle impose d'avoir un suivi quantitatif et qualitatif rigoureux de la carrière aéronautique du personnel pilote.

Le suivi quantitatif fait l'objet d'instructions de l'amiral, commandant la force de l'aéronautique navale (ALAVIA).

Le suivi qualitatif est fait selon trois domaines  :

• compétences aéronautiques : il s'agit d'évaluer l'aptitude au pilotage en sécurité de son aéronef, en respectant les consignes et procédures édictées. La précision de pilotage, le sens de l'air sont des critères qui font aussi partie de ce domaine ;

• compétences tactiques et opérationnelles : il s'agit d'évaluer l'aptitude à exécuter les missions de la formation en appliquant les doctrines et procédures en vigueur. La capacité à évaluer la situation, à prendre des décisions tactiques pertinentes, à conseiller les états-majors opérationnels et la combativité sont des éléments pris en compte dans ce domaine ;

• compétences de l'officier : ce domaine est commun à tous les autres officiers des armes et fait l'objet d'un suivi propre (notation, etc.).

2.2. Compétences aéronautiques.

La compétence aéronautique d'un pilote est évaluée tout au long de sa carrière, lors de la phase de formation professionnelle dans les écoles de pilotage et lors des phases d'acquisition de qualification ou de contrôle dans les formations de l'aéronautique navale.

Le moniteur/instructeur/examinateur doit s'assurer que les objectifs de formation/instruction ont été atteints. Il en rend compte lors du débriefing et le formalise par une feuille de débriefing qui est insérée dans le cahier de progression.

La fin d'une phase de formation ou d'acquisition de qualification fait l'objet d'un compte-rendu synthétique de fin de phase [cf. instruction citée en référence b)] et d'une décision d'attribution de qualification le cas échéant. Ceux-ci sont insérés dans le carnet de notes pour pilote (CNPP). Sont exclues de ce domaine les qualifications aéronautiques ou techniques particulières.

Lorsque le pilote exerce dans sa qualification (pilote en vieillissement), il est alors évalué au travers du feuillet annuel de note pour pilote.

2.3. Emploi opérationnel.

Le commandant d'unité dispose d'un certain nombre d'outils permettant de sanctionner, si nécessaire, ces vols : points positifs, points négatifs, lettre de félicitations, trophée de sécurité des vols, citations, etc.

Ces dispositifs peuvent par ailleurs s'appliquer dans le domaine de l'instruction lorsque les faits concernés ne sont pas directement sous la responsabilité de l'instructeur (ex. : un pilote en instruction qui n'exécute pas correctement une procédure de démarrage moteur ; un pilote qui réagit de façon efficace à une panne sur son aéronef).

2.4. Suivi de la progression aéronautique.

Le processus de suivi doit permettre aux autorités organiques, opérationnelles et à la direction du personnel militaire de la marine (DPMM) d'avoir une vision fidèle, continue et à jour de la qualité du personnel navigant de l'aéronautique navale.

Pour cela ce processus doit être rigoureux, standardisé et faire objet d'un suivi régulier.

Un suivi central est fait par la DPMM et ALAVIA et présente de façon synthétique le parcours professionnel des pilotes de l'aéronautique navale. Ce suivi est assuré par le CNPP.

Ce carnet regroupe :

• l'ensemble des feuillets annuels depuis l'obtention du brevet du deuxième degré ;

• les comptes-rendus de fin de phase/qualification ;

• les comptes rendus de conseils d'instruction ;

• les notifications de sanctions professionnelles :

  • dates et motifs de points positifs/négatifs et/ou des avertissements aéronautiques ;

  • citations, lettre de félicitations ;

  • trophée de sécurité des vols, etc.

La tenue et la mise à jour du CNPP fait l'objet de l'instruction citée en référence b).

Un suivi local est fait au niveau de la formation d'affectation et regroupe le domaine d'emploi direct de l'individu : échéances personnel navigant (PN), suivi des vols (SV), stages, cartes vol sans visibilité (VSV), fiches de progression. Les modalités de suivi sont mises en place par les unités sous le contrôle d'ALAVIA.

2.5. Interruptions de progression.

Les interruptions de progression peuvent être prononcées suite à :

• inaptitude médicale ;

• défaut de progression ;

• inaptitude à tenir un emploi opérationnel.

Les modalités d'interruption de progression pendant la phase de formation en école sont établies par le bureau « formation » de la DPMM (PM/FORM) et font l'objet d'instructions séparées.

Les modalités d'interruption de progression au sein des formations sont établies par ALAVIA dans une instruction séparée.

Une interruption de progression implique dans tous les cas la convocation d'un conseil d'instruction qui statue selon les cas sur :

• la poursuite des vols, assortis ou non d'un programme de réentraînement faisant mention des objectifs à atteindre impérativement ;

• une suspension de qualification ;

• l'arrêt de progression.

Dans ce dernier cas, il s'ensuit :

• la convocation de l'intéressé par le service local de psychologie appliquée (SLPA) Aéro ;

• la transmission du dossier par ALAVIA vers la DPMM [bureau « officiers » gestion « aéronautique navale » (PM1/AERO)] ;

• un entretien de réorientation avec la DPMM ;

• une décision de réorientation.

3. PUBLICATION.

La présente instruction est publiée au Bulletin officiel des armées.