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CONTRÔLE GÉNÉRAL DES ARMÉES :

INSTRUCTION N° 494/ARM/CAB relative à l'organisation, aux missions et aux modalités d'exercice des missions de la « cellule Thémis ».

Du 24 octobre 2018
NOR A R M C 1 8 5 1 9 0 0 J

La lutte contre le harcèlement, les discriminations et les violences sexuels (HDV-S) constitue l'une des priorités du ministère de la défense. Elle se décline selon quatre axes : l'accompagnement des victimes, la prévention de tels faits, la transparence de l'action du ministère et la sanction des auteurs.

Elle constitue une responsabilité de la hiérarchie.

Elle s'est traduite par la création de la cellule Thémis au sein du Contrôle général des armées (CGA), organisme en charge notamment de la sauvegarde des droits des personnes.

La cellule Thémis, cellule spécialisée de vigilance et d'accompagnement, est chargée de s'assurer du traitement adapté des cas de HDV-S commis en service, à l'occasion de l'exécution du service, ou dans les lieux soumis à l'autorité du ministre ou à sa tutelle. Elle travaille en liaison avec les inspecteurs généraux des armées.

Accessible hors hiérarchie, la cellule Thémis permet à chaque agent, civil ou militaire, homme ou femme, ressortissant du ministère des armées, victime ou témoin, de signaler des faits de HDV-S. Elle veille à ce que les victimes soient protégées et les auteurs sanctionnés. Elle respecte la présomption d'innocence et le devoir de discrétion.

Les éléments d'information et les documents demandés par la cellule Thémis, dans le cadre de sa mission et en application des prérogatives qui sont celles des membres du corps du contrôle général des armées et de leurs collaborateurs, lui sont communiqués dans les délais les plus brefs.

La présente instruction a pour objet de fixer l'organisation et les modalités d'exercice de la mission confiée à la cellule THEMIS vis-à-vis des personnels et vis-à-vis des armées, directions, services et établissements publics du ministère des armées.

1. Organisation et saisie de la Cellule THEMIS.

1.1. Organisation.

La cellule THEMIS est placée sous l'autorité d'un membre du corps militaire du contrôle général des armées ou d'un contrôleur général des armées en mission extraordinaire, désigné par le ministre de la défense sur proposition du chef du contrôle général des armées.

Elle se compose, outre son chef, d'un secrétariat et de trois postes de rapporteur, fonction impliquant des compétences de juristes ou de chancelier, tenus par des personnels militaires officiers ou civils de catégorie A.

Ces postes doivent être pourvus, y compris hors plan annuel de mutation, lorsqu'ils deviennent vacants en cours d'année.

1.2. Saisie - Coordonnées.

La cellule Thémis peut être saisie de façon directe par toute personne qui se dit victime de faits de harcèlement, discriminations et violences sexuels ou à connotation sexiste ou liés à l'orientation sexuelle des personnes. Elle peut être saisie de façon indirecte par un témoin ou un tiers pour les mêmes faits. La cellule peut également s'autosaisir.

La cellule Thémis reçoit les signalements des cas par tous moyens, téléphone, message électronique, courrier, remise en mains propres à un membre de la cellule ou à tout membre du CGA à l'occasion d'une visite dans un organisme.

Ses coordonnées :

Adresse postale :

Contrôle général des armées (CGA)

cellule Thémis

60, boulevard du général Martial Valin – CS21623

75509 Paris Cedex 15

Adresse courriel :

themis@intradef.gouv.fr

Téléphone :

09 88 68 55 55

1.2.1. Saisie directe.

La personne qui se dit victime contacte directement la cellule. La cellule Thémis prend l'appel ou a pour objectif de prendre contact aussi rapidement que possible avec la victime alléguée. La saisine directe peut se faire sous couvert de l'anonymat.

1.2.2. Saisie indirecte.

La saisine de la cellule Thémis peut également être effectuée :

  • au nom de la victime alléguée par un tiers, relevant ou non du ministère des armées. L'examen du signalement ne pourra se poursuivre qu'après contact direct entre la cellule et la victime alléguée, et l'accord de cette dernière ;

  • par la hiérarchie à des fins d'examen de dossier ou de demande d'avis sur un cas entrant dans son champ de compétence : souci de cohérence interarmées, niveau de sanction disciplinaire par exemple. Dans cette situation, la cellule apporte un appui à l'autorité qui l'a sollicitée.

Lorsqu'elle est saisie en dehors de son champ de compétence, qu'il s'agisse de saisine directe ou indirecte, la cellule Thémis prévient sans attendre son interlocuteur de son incompétence. Elle lui indique systématiquement le bon correspondant au sein de la hiérarchie (services de ressources humaines, commission des recours des militaires, services locaux du contentieux, inspections, inspection du personnel civil, etc.) ou hors hiérarchie (inspection du travail dans les armées, inspecteurs généraux des armées). En fonction de la nature du cas qui lui est soumis, elle lui propose de transmettre sa demande et l'informe de l'exécution de cette transmission quand elle y a procédé.

1.2.3. Auto-saisie.

La cellule Thémis peut se saisir elle-même d'un signalement dont elle a eu connaissance par tous moyens, notamment par la procédure EVENGRAVE. Elle examine systématiquement les mesures de protection de la victime alléguée et les sanctions adoptées.  

Dans ce cas, elle en informe l'autorité hiérarchique directe, le chef d'état-major, le directeur ou le chef de service qui a autorité sur la formation concernée au moment des faits, ainsi que l'inspecteur général de la même armée, le cas échéant.

Dans le cas d'une auto-saisine, la première démarche de la cellule Thémis consiste à obtenir le dossier administratif constitué dans l'organisme considéré.

2. Mission et modalités d'exercice de la mission de la Cellule THEMIS pour le traitement des cas individuels.

La mission de la cellule THEMIS répond à quatre exigences de la politique ministérielle : la protection, l'accompagnement et le suivi ; la sanction ; la connaissance et la transparence.

Elle se décline en plusieurs domaines d'intervention :

  • vers la victime alléguée en :

    • l'écoutant et la conseillant, en la recevant au besoin au cours d'un entretien ;

    • l'accompagnant de manière générale, en particulier dans les domaines juridique, social et statutaire ;

    • l'orientant vers les services compétents, en particulier Ecoute Défense ;

    • veillant à ce que ses droits soient connus et respectés.

  • vers la hiérarchie en :

    • l'informant des saisines des victimes alléguées, après avoir reçu l'accord de ces dernières ;

    • s'assurant que :

      • les mesures conservatoires qu'elle peut être amenée à proposer sont adaptées et mises en œuvre ;

      • les enquêtes administratives sont bien menées (selon le cas, la cellule Thémis peut mener ses propres enquêtes) ;

      • les sanctions disciplinaires sont adaptées, en veillant aux droits de la défense ;

      • les signalements sont faits aux autorités judiciaires le cas échéant ;

    • la conseillant (en cas de suspicion de HDV-S dans un organisme, au cours des différentes étapes de traitement du dossier et en particulier sur la question des sanctions, pour permettre une harmonisation des pratiques).

En outre, la cellule Thémis peut procéder à des enquêtes, soit à la demande du ministre, soit en complément de l'enquête interne réalisée par l'autorité hiérarchique, soit de sa propre initiative.

Le processus de traitement des saisines comprend quatre étapes :

  • instruction, au sein de la cellule, du dossier sur déclaration de la victime alléguée ;

  • action de la hiérarchie une fois obtenu l'accord de la victime alléguée ;

  • suivi et accompagnement de la victime tant en interne défense que dans le cadre des procédures judiciaires ;

  • clôture du dossier.

La cellule Thémis est autorisée à mettre en œuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel.

2.1. L'instruction du dossier.

En cas de saisine directe, lors du premier contact avec la victime alléguée, la cellule :

  • s'informe de la nature et du contexte de sa demande ;

  • prend les coordonnées de la personne, sauf si celle-ci veut conserver 1'anonymat ;

  • l'informe des autres dispositifs étant ou pouvant être concernés par sa demande (voie hiérarchique, saisine des inspecteurs généraux, dépôt de plainte, numéro d'appel national 3919, autres associations agréées, etc.) ;

  • l'encourage, si possible, à lui transmettre par messagerie les principales informations ;

  • s'assure de sa bonne compréhension du rôle de la cellule, en particulier par rapport au commandement et par rapport à la justice ;

  • l'oriente vers Ecoute Défense si elle n'a pas accès à un soutien psychologique.

La cellule Thémis constitue un dossier comprenant les pièces permettant d'établir sa compétence à partir des éléments rapportés par la victime alléguée.

Cette dernière est informée que la procédure ne pourra être poursuivie qu'en levant son anonymat. Son consentement est alors explicitement demandé.

En cas de saisine indirecte ou d'auto-saisine, elle est informée de la démarche de la cellule, qui lui propose d'assurer le suivi de son dossier.

Dans tous les cas, les suites à donner, en particulier la réalisation d'une enquête ou d'un complément d'enquête, peuvent être évoquées préalablement avec les inspecteurs généraux des armées.

2.2. Le suivi et l'accompagnement de la victime alléguée.

Quel que soit le mode d'investigation retenu, la cellule Thémis met en place des actions de suivi de la victime alléguée, et notamment :

  • s'assure que les mesures de protection immédiates et nécessaires de la victime sont mises en place ; à défaut, elle demande à l'autorité compétente de les prendre ;

  • l'informe sur ses droits, notamment en matière de recours, d'aide sociale et de protection fonctionnelle ;

  • la met en contact avec l'ensemble des services du ministère des armées compétents pour lui apporter l'assistance nécessaire au regard de sa situation ;

  • 1'accompagne en fonction de sa demande pendant le déroulement de 1'enquête interne ;

  • suit, dans la durée, sa situation administrative sur une période déterminée par la cellule en fonction des circonstances, en se faisant notamment communiquer la copie des bulletins de notations, des ordres de mutation, ainsi que des bulletins de sanctions disciplinaires éventuelles.

2.3. Les actions vers la hiérarchie.

Après avoir obtenu l'accord de la victime alléguée ou en cas d'autosaisine, la cellule Thémis informe l'autorité hiérarchique concernée (chef d'état- major, directeur ou chef de service) et lui remet un dossier à fin d'enquête interne. Cette remise a lieu en veillant, d'une part, à préserver les droits de la victime alléguée et la présomption d'innocence de l'auteur présumé et, d'autre part, en respectant un devoir de discrétion.

En toutes circonstances, la cellule Thémis :

  • s'assure que l'autorité hiérarchique a procédé à la réalisation d'une enquête interne et a mis en œuvre, le cas échéant, ses prérogatives en matière disciplinaire ; si elle constate une anomalie dans la réalisation de cette enquête ou estime que la sanction retenue est inadaptée, elle en avise le chef d'Etat-major, le directeur ou le chef de service concerné et en rend compte au besoin au cabinet du ministre

  • reçoit copie du rapport et de l'ensemble des pièces de l'enquête (pièces jointes, procès-verbal d'audition, compte-rendu, bulletins de sanctions éventuellement prises, indication des mesures conservatoires prises, etc.) ;

  • informe l'autorité hiérarchique qu'elle accompagnera la victime alléguée pendant le déroulement de l'enquête et que sa situation fera ensuite l'objet d'un suivi dans la durée.

2.4. La cloture du dossier.

Elle intervient lorsque le chef de la cellule Thémis estime que toutes les diligences concernant un dossier ont été accomplies.

3. Les exigences de prévention, connaissance et transparence.

3.1. Les actions de formation au profit de l'ensemble des agents du ministère.

La cellule Thémis participe au plan de formation pour la prévention des harcèlements, discriminations et violences sexuels (P/HDV-S) mis en place par le ministère en direction de tous ses agents dans le but de les sensibiliser au cours de leur formation initiale ou dans le cadre de leur parcours professionnel.

3.2. Rapport d'activité annuel de la cellule THEMIS.

La cellule Thémis participe à l'exigence de transparence définie par le plan d'action ministériel contre le harcèlement, les discriminations et les violences sexuels (HDV-S) au ministère des armées.

Elle est amenée à élaborer et à alimenter des séries statistiques qui, d'une part, lui permettent à tout moment d'avoir une visibilité sur l'état d'avancement et le contenu des dossiers qu'elle traite, et d'autre part, de disposer d'une image fidèle des « harcèlements, discriminations et violences sexistes ou sexuelles » portés à sa connaissance.

A cet effet, toute autorité ou instance saisie de ces faits potentiels et non portés à la connaissance de la cellule Thémis doit l'en avertir.

Elle établit un bilan annuel d'activité. Celui-ci est diffusé auprès des armées et services, en particulier auprès de la direction des ressources humaines du ministère de la défense (DRH-MD), en vue de l'élaboration du bilan social du ministère. Il est transmis également au Haut comité d'évaluation de la condition militaire, en vue de la rédaction de la revue annuelle de la condition militaire.

Dans le bilan d'activité de la cellule Thémis sont présentées en particulier les statistiques suivantes :

  • les « dossiers ouverts » : il s'agit des affaires portées à la connaissance de la cellule, selon qu'elles relèvent ou non, de son champ de compétence ;

  • les « dossiers en cours de traitement, traités ou archivés » : ces statistiques concernent le stock des dossiers suivis par la cellule, selon leur statut ;

  • les « harcèlement, discriminations et violences sexistes ou sexuels » : cette série statistique est élaborée à partir du matériau recueilli au sein de deux corpus : les dossiers de saisines et les messages EVENGRAVE qui ont fait l'objet d'une auto-saisine : les « harcèlement, discriminations et violences sexistes ou sexuels » recensent le nombre de « manquements » déclarés par les victimes ;

  • les statistiques des « victimes et des auteurs présumés » : cette série statistique est élaborée à partir du matériau issu des messages EVENGRAVE déclarés par les armées, directions et services.

3.3. Les relations avec le ministre et son cabinet.

Le chef de la cellule Thémis rend compte au ministre de la défense ou à son cabinet de toute difficulté dans l'application de cette instruction, ainsi que de tout dossier qu'il juge nécessaire de porter à sa connaissance.

Le bilan d'activité de la cellule Thémis et les propositions d'amélioration de la lutte contre les HDV-S sont présentés annuellement au ministre de la défense, qui peut notamment les examiner au cours d'un comité de pilotage sous sa présidence.

3.4. Les relations avec l'extérieur du ministère.

Dans le cadre de ses fonctions, le chef de la cellule Thémis peut être amené à répondre aux sollicitations d'organismes extérieurs à la Défense afin de mieux faire connaître la politique du ministère en matière de HDV-S.

Les demandes d'intervention par ou auprès des médias sont traitées en liaison avec le cabinet du ministre.

Le chef de la cellule Themis participe enfin à tout groupe de travail mis en place au niveau interministériel traitant de son domaine de compétence et tient régulièrement informé le cabinet du ministre de l'avancement de ces travaux.

4. Abrogation.

La décision n° 6877/DEF/CAB du 21 juillet 2014 relative à la création de la cellule Thémis au sein du Contrôle général des armées est abrogée.

5. Publication.

La présente instruction est publiée au Bulletin officiel des armées.

La ministre des armées,

Florence PARLY.