ACCORD entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord concernant les droits de pêche dans les parages des Ecrehous et des Minquiers, signé à Londres.
Du 30 janvier 1951NOR
Le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord,
Considérant qu'ils ont décidé de demander à la cour internationale de justice de la Haye de dire à laquelle des deux puissances doit être attribuée la souveraineté sur les flots inclus dans les groupes des Ecrehous et des Minquiers ;
Vu la convention signée par la France et la Grande-Bretagne le 2 août 1839 afin de définir les limites du droit exclusif de pêche aux huitres et autres pêches sur les côtes de France et de Grande-Bretagne (ci-après dénommée convention de 1839) ;
Contenu.
Désirant résoudre définitivement, quelle que doivent être la décision de la cour internationale de justice en ce qui concerne l'attribution de la souveraineté, certaines divergences de vues qui se sont produites entre eux au sujet des droits de pêche dans les parages des Ecrehous et des Minquiers ;
Sont convenus de ce qui suit :
Art. 1er.
Dans les relations des parties contractantes entre elles et sauf l'effet des articles 2, 3 et 4 ci-après, la convention de 1839 sera interprétée comme reconnaissant aux nationaux français et aux nationaux britanniques des droits égaux en matière de pêche dans tout l'espace compris entre la limite de trois milles, comptés à partir de la laisse de basse mer autour de l'île de Jersey et la limite à l'intérieur de laquelle le droit exclusif de pêche est réservé aux nationaux français par la convention de 1839, limite définie à nouveau par la déclaration concernant les limites des pêcheries françaises dans la baie de Granville, conclue entre la France, d'une part, et le Royaume-Uni et l'Etat libre d'Irlande, d'autre part, et signée le 20 décembre 1928.
Art. 2.
a). La partie contractante qui se verra attribuer la souveraineté sur la maîtresse île des Ecrehous aura le droit de concéder des établissements de pêche à l'intérieur d'une zone (ci-après dénommée zone A) d'un tiers de mille de rayon ayant pour centre la balise érigée au milieu de cette île, sous réserve des exceptions énumérées au paragraphe b) du présent article.
- b).
i). Les deux rochers isolés, situés entre le Colombier et la maîtresse île seront compris entièrement dans la zone A.
ii). L'île de Marmotier, dans son entier, avec les rochers de son extrémité Sud et le rocher isolé qui la déborde au Sud-Ouest, ainsi que la totalité du banc de la Bigorne, seront exclus de la zone A.
Art. 3.
a). La partie contractante qui se verra attribuer la souveraineté sur la maîtresse île des Minquiers aura le droit de concéder des établissements de pêche dans une zone (ci-après dénommée zone B) d'un demi-mille de rayon ayant pour centre l'emplacement occupé le 24 juillet 1950 par le mât de pavillon érigé dans la partie Nord de l'île, sous réserve des exceptions énumérées au paragraphe b) du présent article.
- b).
i). Le groupe de rochers dit « rocher du Sud » (mais non le groupe de rocher dit « rocher du Sud Bas » sera, tout entier, compris dans la zone B.
ii). Le banc dit « Banc de la Fourchi Rouge » restera, tout entier, en dehors de la zone B.
Art. 4.
a). Si la souveraineté sur les rochers dits « Rochers Pipette » est attribuée au Royaume-Uni, le gouvernement du Royaume-Uni aura le droit de concéder des établissements de pêche dans une zone (ci-après dénomée zone C) d'un demi-mille de rayon ayant pour centre la balise de Pipette érigée sur le rocher qui porte sur la carte française n° 4599 la cote 13,3. Il est cependant convenu que le groupe de rochers dit « La Carrée » sera compris en entier dans la zone C.
b). Si la souveraineté sur les rochers dits « Les Maisons » est attribuée à la France, le gouvernement de la République française aura le droit de concéder des établissements de pêche dans une zone (ci-après dénommée zone D) d'un demi-mille de rayon ayant pour centre la tourelle des maisons érigée sur le rocher qui porte sur la carte française n° 4599 la cote 20. Il est cependant convenu que le groupe de rochers dits « La Vision » sera compris en entier dans la zone D.
Art. 5.
a). Dans le présent accord, le terme « mille » signifie un mille marin égal à une minute de latitude.
b). Pour l'application des articles 2, 3 et 4, la surface des rochers et des grèves compris dans les zones A, B, C et D ou qui en sont exclus aux termes desdits articles, sera celle qui découvre aux plus grandes basses mers.
c). Les limites des zones A, B, C et D sont portées sur les deux cartes annexées à la présente convention. En cas de divergence entre les limites portées sur ces cartes et leur description dans les articles 2, 3 et 4, les limites portées sur les cartes feront foi.
Art. 6.
a). Les établissements de pêche concédés en vertu du présent accord devront être :
i). Contigus à une partie du relief qui ne couvre jamais.
ii). Clairement définis en ce qui concerne leur superficie et clairement marqués sauf difficultés trop sérieuses.
iii). Utilisés de bonne foi pour la pêche, la culture ou la conservation des poissons, crustacés ou coquillages.
b). Lesdites concessions ne seront accordées par le gouvernement de la République française qu'à ces nationaux français et par le gouvernement du Royaume-Uni qu'à des nationaux britanniques.
c). Il sera interdit aux nationaux de chacune des parties contractantes de se livrer à la pêche dans les limites d'un établissement de pêche concédé par l'autre. Cette interdiction s'applique à toutes les natures de pêche, y compris la pêche aux huitres dans les limites des concessions.
d). La partie contractante qui aura accordé une concession devra en aviser l'autre et l'interdiction prévue au paragraphe c) du présent article entrera en vigueur trois mois après réception dudit avis.
e). Les établissements de pêche concédés en exécution du présent accord ne feront pas obstacle :
i). Au libre accès des bateaux appartenant à des nationaux de l'une ou l'autre des parties contractantes au mouillage situé au Nord de la maîtresse ile des Ecrehous et au mouillage situé à l'Est de la maîtresse île des Minquiers.
ii). Au libre accès desdits bateaux aux points de débarquement de ces mouillages.
Art. 7.
Aux fins du présent accord :
a). L'expression « nationaux français » s'applique, qu'il s'agisse de personnes physiques ou de personnes morales, aux ressortissants de la République française et des pays ou territoires dont la République française assure les relations internationales.
b). L'expression « nationaux britanniques » s'applique :
i). Aux personnes physiques qui ont la qualité de sujets britanniques ou de protégés britanniques.
ii). Aux personnes morales qui tiennent leur existence de lois en vigueur dans le Royaume-Uni ou dans un territoire dont le Royaume-Uni assure les relations internationales.
Art. 8.
a). Le présent accord sera ratifié.
b). Les instruments de ratification seront échangés à Paris aussitôt que possible et le présent accord entrera en vigueur dès l'échange des ratifications.
En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés par leurs gouvernements respectifs, ont signé le présent accord et y ont apposé leurs sceaux.
Fait en double exemplaire, à Londres, le 30 janvier 1951 en français et en anglais, les deux textes faisant également foi.
Signé :
André GROS.
W. E. BECKETT.