> Télécharger au format PDF

CONVENTION ANNEXE relative à l'emploi du personnel judiciaire, signée à Abidjan.

Du 04 décembre 1959
NOR

Classement dans l'édition méthodique : BOEM  101-1.3.12.

Référence de publication : RGTF 2ème série Vol 11 n° 68 bis.

Contenu.

 

Entre le Gouvernement de la République française, représenté par M. Robert Lecourt, Ministre d'État chargé de l'Aide et de la Coopération avec les États de la Communauté, et

Le Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire, représenté par M. Félix Houphouet-Boigny, Premier Ministre de la Côte-d'Ivoire,

Il est convenu ce qui suit :

Art. 1.

 

La présente Convention a pour objet de déterminer dans le cadre de l'article 18 de la Convention générale relative au concours en personnel apporté par la République française au fonctionnement des services publics, des Républiques membres de la Communauté, les conditions particulières de la coopération entre la République française et la République de Côte-d'Ivoire en ce qui concerne le personnel judiciaire.

Les prescriptions de la Convention générale sont applicables à ce personnel, dans la mesure où il n'y est pas dérogé par les dispositions de la présente Convention.

Art. 2.

 

Le Gouvernement de la République française s'engage à assurer, au « Centre National d'Études Judiciaires », la formation professionnelle des candidats aux fonctions judiciaires originaires de la République de Côte-d'Ivoire dans les conditions qui seront fixées par échange de lettres.

Art. 3.

 

Le Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire s'engage à ne nommer à des fonctions judiciaires que des candidats licenciés en droit, ayant reçu la formation professionnelle que le Gouvernement de la République française s'engage à leur donner.

Art. 4.

 

En vue de permettre au Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire d'assurer le fonctionnement de ses juridictions et l'administration de la Justice, le Gouvernement français s'engage, dans toute la mesure de ses possibilités, à mettre à la disposition du Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire les magistrats et fonctionnaires des greffes et secrétariats de Parquet qui lui sont nécessaires.

De son côté, le Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire s'engage à consulter le Gouvernement de la République française sur toute modification à l'organisation judiciaire qui serait susceptible d'avoir des répercussions sur la coopération judiciaire telle qu'elle est définie par la présente Convention.

Art. 5.

 

En ce qui concerne les fonctionnaires des greffes et secrétariats de Parquet, leur mise à la disposition sera réglée selon les modalités prévues par la Convention générale de coopération administrative et technique.

Art. 6.

 

Les deux Gouvernements arrêtent la liste des emplois de magistrats à pourvoir.

Le nom du magistrat proposé pour chaque catégorie d'emploi par le Gouvernement français est soumis à l'agrément du Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire.

Le Premier Ministre de cette République procède aux nominations des magistrats mis à sa disposition qui reçoivent l'affectation correspondant à leur grade.

Art. 7.

 

Les magistrats sont mis à la disposition de la République de Côte-d'Ivoire en vue d'exercer des fonctions dans une catégorie d'emploi déterminée pendant une durée de deux ans, renouvelable par tacite reconduction, sous réserve d'un préavis de six mois donné, soit par le Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire, soit par le Gouvernement français.

En cas de mise à la disposition d'un magistrat en cours d'année judiciaire, le point de départ de ce délai est fixé au début de l'année judiciaire suivante.

Les magistrats mis à la disposition de la République de Côte-d'Ivoire ne peuvent, sans leur accord, recevoir une nouvelle affectation, sauf pour assurer l'indispensable continuité du service, dans le cas d'une délégation ou dans celui d'un intérim. Ils ne peuvent être délégués dans d'autres fonctions, pour une durée supérieure à trois mois que sur l'avis conforme de la Commission prévue à l'article 12 ci-dessous.

En aucun cas, si ce n'est à titre de délégation, un magistrat ne peut se voir confier de fonctions lui donnant autorité sur les magistrats appartenant à un grade supérieur au sien, dans sa carrière d'origine.

Art. 8.

 

Les deux Gouvernements peuvent mettre fin à la mise à la disposition ou à l'emploi, avant l'expiration de la période normale, après avis de la Commission définie à l'article 12, s'il s'agit d'un magistrat du Parquet, ou sur l'avis conforme de cette Commission, s'il s'agit d'un magistrat du siège.

La décision de saisir la Commission doit être notifiée à l'autre Gouvernement et au magistrat quinze jours avant la réunion. L'audition de l'intéressé est de droit s'il la demande. Le dossier de la procédure lui est intégralement communiqué, au moins huit jours francs avant la réunion de la Commission. L'avis de la Commission est transmis aux deux Gouvernements.

La décision de mettre fin à la mise à disposition d'un magistrat, avant l'expiration de la période normale, ne constitue pas une mesure disciplinaire et n'est susceptible d'aucun recours par l'intéressé.

Art. 9.

 

Un magistrat peut, à titre exceptionnel, pour des raisons personnelles ou de famille, demander qu'il soit mis fin, avant l'expiration de la période normale, à sa mise à la disposition du Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire.

Sa demande est soumise à la Commission prévue à l'article 12 qui formule un avis motivé. Cet avis est transmis, pour décision, au Gouvernement français par le Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire.

Toutefois, lorsqu'à la suite d'une promotion de grade ou d'une nomination à un poste d'un nouveau groupe dans son cadre d'origine, le magistrat demande qu'il soit mis fin à sa mise à la disposition, il est fait droit d'office à sa demande, si le Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire ne peut lui confier un poste correspondant à ce nouveau grade ou à ce nouveau groupe.

Art. 10.

 

Les prescriptions de l'article 10 de la Convention générale ne s'appliquent aux magistrats que dans la mesure où elles sont compatibles avec les dispositions statutaires qui leur sont propres et avec leurs obligations professionnelles.

Les magistrats bénéficient de l'indépendance, des immunités, garanties, privilèges, honneurs et prérogatives auxquels les mêmes fonctions leur donneraient droit en France.

Le Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire les protège contre les menaces, outrages, injures, diffamations, attaques et contraintes de quelque nature que ce soit dont ils seraient l'objet dans l'exercice de leurs fonctions ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions. Il répare, le cas échéant, le préjudice qui en serait résulté.

Les magistrats ne peuvent être inquiétés d'aucune manière pour les décisions auxquelles ils participent, pour les propos qu'ils tiennent à l'audience ni pour les actes relatifs à leurs fonctions.

Art. 11.

 

En matière correctionnelle et criminelle, aucune poursuite ne peut être engagée à l'encontre des magistrats que sur avis conforme émis à la majorité des voix par la Commission prévue à l'article 12. Au cas où des poursuites sont engagées, le Gouvernement de la République française est tenu informé et le magistrat poursuivi bénéficie du privilège de juridiction prévu par la législation applicable au moment de l'entrée en vigueur de la présente Convention.

Art. 12.

 

La Commission dont la mission a été définie aux articles 7, 8, 9 et 11 ci-dessus est composée ainsi qu'il suit :

  • six membres, dont trois magistrats désignés par le Ministre de la Justice de la République de Côte-d'Ivoire et trois magistrats du siège mis à la disposition du Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire, les plus anciens dans le grade le plus élevé lorsque le nombre des magistrats mis à la disposition est supérieur à quarante ;

  • quatre membres, dont deux magistrats désignés par le Ministre de la Justice de la République de Côte-d'Ivoire et deux magistrats du siège, mis à la disposition du Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire, les plus anciens dans le grade le plus élevé lorsque le nombre des magistrats mis à la disposition est égal ou inférieur à quarante.

Dans les deux cas, la présidence est attribuée au magistrat du siège le plus ancien dans le grade le plus élevé, parmi ceux mis à la disposition du Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire.

En cas de partage égal des voix, celle du président est prépondérante.

Art. 13.

 

Les Chefs de Cour établissent et transmettent, suivant la procédure prévue à l'article 12 de la Convention générale, des appréciations sur la manière de servir des magistrats, dans les formes et délais prévus par le statut auquel ils sont soumis dans leur cadre d'origine.

L'examen des problèmes concernant la carrière des magistrats intéressés dans leur cadre d'origine fait l'objet, une fois par an, d'une mission dont les frais sont supportés par le budget de la République française. Le Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire facilite la tâche du titulaire de la mission.

Art. 14.

 

La rémunération des magistrats est à la charge de la République française.

La République de Côte-d'Ivoire verse à la République française, au titre de contribution à l'entretien du personnel en cause une allocation forfaitaire dont le montant sera déterminé dans les conditions prévues au paragraphe B de l'article 14 de la Convention générale.

Elle s'engage également à attribuer aux magistrats un logement dont l'affectation fera l'objet d'une décision notifiée au Ministère d'État chargé de l'Aide et de la Coopération, en même temps que l'acte de nomination prévue à l'article 5 de la Convention générale.

Art. 15.

 

Les magistrats en fonction à la Cour d'Appel d'Abidjan et dans les Tribunaux de Côte-d'Ivoire, à la date d'entrée en vigueur de la présente Convention, sont considérés, à compter de cette date, comme mis à la disposition du Gouvernement de Côte-d'Ivoire en vue de continuer à exercer les mêmes fonctions.

Pour le Gouvernement de la République française,

Par délégation de M. R. LECOURT,

Jean AUTIN.

Pour le Gouvernement de la République de Côte-d'Ivoire,

Félix HOUPHOUET-BOIGNY.