CIRCULAIRE relative à l'exercice du droit d'association dans l'armée.
Du 04 septembre 1912NOR
LE MINISTRE DE LA GUERRE,
à MM. les gouverneurs militaires et les généraux commandant les corps d'armée.
Les règles sur l'exercice du droit d'association dans l'armée, qu'il s'agisse de sociétés d'intérêts (financières, commerciales ou industrielles), de sociétés de secours mutuels ou d'associations relevant de la loi de 1901 (antérieurement de l'article 291 du code pénal), ont été formulées d'une façon précise par mes prédécesseurs, notamment dans les circulaire du 27 mai 1895 (1) et du circulaire du 15 novembre 1904 (1).
En ce qui concerne les officiers de l'armée active, les principes n'ont jamais varié.
Aux termes de la circulaire du 27 mai 1895 rappelée et confirmée par celle du 15 novembre 1904, « les règles de la discipline s'opposent à ce qu'un militaire entre, sous aucun prétexte, dans une association ayant un caractère politique ou religieux ; il ne peut, quel que soit son grade, faire partie d'une autre société quelconque sans l'autorisation expresse du ministre de la guerre » (2).
Ces dispositions, commandées par l'existence même d'une armée et corrélative de sa mission exclusive, n'ont pas cessé d'être en vigueur. Tout officier de l'armée active qui viendrait à les enfreindre, soit en faisant partie, sans y être autorisé, d'un groupement quelconque, soit en poursuivant, sous le couvert d'une association autorisée, un but autre que celui indiqué par les statuts de cette association, encourrait une punition exemplaire.
La situation des officiers de complément (3) diffère nécessairement, au point de vue du droit d'association, de celle de leurs camarades de l'armée active.
En dehors de leur participation au fonctionnement normal de l'armée, et notamment des périodes qu'ils accomplissent au titre des réserves, ils ne relèvent, d'une manière générale, que du droit commun.
Ce principe implique pour eux la stricte obligation de ne jamais se prévaloir, hors du service, de leur qualité d'officier que dans les cas où ils y sont autorisés par les règlements militaires. Encore l'indication du grade doit-elle être toujours suivie de la mention « de réserve ». Une réserve identique s'impose, d'ailleurs, strictement aux officiers en retraite ou en réforme.
La distinction, nécessaire encore que délicate, entre les droits du citoyen et les devoirs de l'officier des réserves trouve une application particulière dans l'exercice du droit d'association.
Il a été, à plusieurs reprises (en particulier à la séance de la chambre des députés du 14 mars 1911, JO du 15, p. 1177 et suivantes), fait allusion à des associations de la loi de 1901 qui se donneraient pour but, en intervenant sous des formes diverses, soit dans les corps de troupe, soit près des pouvoirs publics, de discuter les actes de l'autorité militaire et de s'immiscer dans l'administration de l'armée, notamment à propos des questions d'avancement.
Les membres des associations qui se seraient assigné un tel but, à titre principal ou accessoire, sont justiciables de la loi civile seule s'ils n'appartiennent pas à l'armée ou si, après lui avoir appartenu, ils ont vu définitivement rompre les liens qui les y rattachaient.
Il n'est pas besoin de dire, au contraire, que les officiers des réserves qui adhéreraient à une association de ce genre se rendraient coupables de la faute la plus grave contre la discipline.
Dans le cas où une telle infraction parviendrait à votre connaissance, vous ne manqueriez pas de me la signaler d'urgence, en me proposant, contre l'officier de réserve qui en serait l'auteur, la rigoureuse sanction qu'imposent le souci du maintien de la discipline et l'intérêt de l'armée.
L'excellent esprit qui anime notre corps d'officiers, aussi bien des réserves que de l'active, m'est d'ailleurs un sûr garant qu'il m'aura suffi de rappeler ces règles élémentaires pour en assurer, de la part de tous, le respect.
Notes
A. MILLERAND.