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DIRECTION CENTRALE DU COMMISSARIAT DE LA MARINE : Bureau des réquisitions, prises et événements de mer

LOI N° 67-545 relative aux événements de mer.

Du 07 juillet 1967
NOR

Précédent modificatif :  Loi n° 84-1173 du 22 décembre 1984 (BOC, p. 7337).

Texte(s) abrogé(s) :

Loi du 29 avril 1916 (BOR/M, p. 218).

Classement dans l'édition méthodique : BOEM  362.1.3., 431.2.2.5.2.

Référence de publication : BOC/M, p. 806.

L'assemblée nationale et le sénat ont adopté,

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

Chapitre CHAPITRE PREMIER. Abordage.

Art. 1er.

En cas d'abordage survenu entre navires de mer ou entre navires de mer et bateaux de navigation intérieure, les indemnités dues à raison des dommages causés aux navires, aux choses ou personnes se trouvant à bord sont réglées conformément aux dispositions du présent chapitre sans tenir compte des eaux où l'abordage s'est produit.

Tous engins flottants, à l'exception de ceux qui sont amarrés à poste fixe, sont assimilés selon le cas, soit aux navires de mer, soit aux bateaux de navigation intérieure pour l'application de l'alinéa précédent.

Art. 2.

Si l'abordage est fortuit, s'il est dû à un cas de force majeure, ou s'il y a doute sur les causes de l'accident, les dommages sont supportés par ceux qui les ont éprouvés, sans distinguer le cas où, soit les navires, soit l'un d'eux, auraient été au mouillage au moment de l'abordage.

Art. 3.

Si l'abordage est causé par la faute de l'un des navires, la réparation des dommages incombe à celui qui l'a commise.

Art. 4.

S'il y a faute commune, la responsabilité de chacun des navires est proportionnelle à la gravité des fautes respectivement commises. Toutefois, si d'après les circonstances, la proportion ne peut être établie ou si les fautes apparaissent comme équivalentes, la responsabilité est partagée par parties égales.

Les dommages causés, soit aux navires, soit à leur cargaison, soit aux effets ou autres biens des équipages, des passagers ou autres personnes se trouvant à bord, sont supportés par les navires en faute, dans ladite proportion, sans solidarité à l'égard des tiers.

Les navires en faute sont tenus solidairement à l'égard des tiers, pour les dommages causés par mort ou blessures, sauf recours de celui qui a payé une part supérieure à celle que, conformément à l'alinéa précédent du présent article, il doit définitivement supporter.

Art. 5.

La responsabilité établie par les articles précédents subsiste dans le cas où l'abordage est causé par la faute d'un pilote, même lorsque celui-ci est obligatoire.

Art. 6.

Les dispositions qui précèdent sont applicables à la réparation des dommages que, soit par exécution ou omission de manœuvre, soit par inobservation des règlements, un navire a causés, soit à un autre navire, soit aux choses ou personnes se trouvant à leur bord, alors même qu'il n'y aurait pas eu abordage.

Art. 7.

Les actions en réparation de dommages se prescrivent par deux ans à partir de l'événement.

Le délai pour intenter les actions en recours admises par l'alinéa 3 de l'article 4 est d'une année à partir du jour du payement.

Ces délais de prescription ne courent pas lorsque le navire n'a pu être saisi dans les eaux soumises à la juridiction française.

Art. 8.

Les dispositions du présent chapitre, à l'exception de celles de l'article 7, troisième alinéa, sont également applicables aux navires de mer et bateaux de navigation intérieure de l'Etat ou affectés à un service public.

Chapitre CHAPITRE II. Assistance.

Art. 9.

L'assistance des navires de mer en danger, ainsi que les services de même nature rendus entre navires de mer et bateaux de navigation intérieure, est soumise aux dispositions du présent chapitre, sans tenir compte des eaux où elle a été rendue.

Tous engins flottants sont assimilés, selon le cas, soit aux navires de mer, soit aux bateaux de navigation intérieure pour l'application de l'alinéa précédent.

Art. 10.

Tout fait d'assistance ayant eu un résultat utile donne lieu à une équitable rémunération.

Aucune rémunération n'est due si le secours prêté reste sans résultat utile.

En aucun cas, le somme à payer ne peut dépasser la valeur des choses sauvées.

Art. 11.

N'ont droit à aucune rémunération les personnes qui ont pris part aux opérations de secours malgré la défense expresse et raisonnable du navire secouru.

Art. 12.

Le remorqueur n'a droit à une rémunération pour l'assistance du navire par lui remorqué ou de sa cargaison que s'il a rendu des services exceptionnels ne pouvant être considérés comme l'accomplissement du contrat de remorquage.

Art. 13.

Une rémunération est due encore que l'assistance ait eu lieu entre navires appartenant au même propriétaire.

Art. 14.

Le montant de la rémunération est fixé par la convention des parties et, à défaut, par le tribunal.

Il en est de même de la proportion dans laquelle cette rémunération doit être répartie, soit entre les sauveteurs, soit encore les propriétaires, le capitaine et l'équipage de chacun des navires assistants.

Si le navire est un navire étranger, la répartition entre le propriétaire, le capitaine et les personnes au service du navire est réglée conformément à la loi nationale du navire.

Art. 15.

Toute convention d'assistance peut, à la requête de l'une des parties, être annulée ou modifiée par le tribunal, s'il estime que les conditions convenues ne sont pas équitables, compte tenu du service rendu et des bases de rémunération indiquées à l'article 16 ou que le service rendu ne présente pas les caractères d'une véritable assistance, quelque qualification que les parties lui aient donnée.

Art. 16.

La rémunération est fixée par le tribunal selon les circonstances, en prenant pour base :

  • a).  En premier lieu le succès obtenu, les efforts et le mérite de ceux qui ont prêté secours, le danger couru par le navire assisté, par ses passagers et son équipage, par sa cargaison, par des sauveteurs et par le navire assistant, le temps employé, les frais et dommages subis et les risques de responsabilité et autres encourus par les sauveteurs, la valeur du matériel exposé par eux, en tenant compte, le cas échéant, de l'appropriation spéciale du navire assistant ;

  • b).  En second lieu, la valeur des choses sauvées, le fret et le prix du passage.

Les mêmes dispositions sont applicables aux répartitions prévues à l'article 14 (alinéa 2).

Le tribunal peut réduire ou supprimer la rémunération s'il apparaît que les sauveteurs ont, par leur faute, rendu l'assistance nécessaire ou qu'ils se sont rendus coupables de vols, recels ou autres actes frauduleux.

Art. 17.

Il n'est dû aucune rémunération pour les personnes sauvées.

Les sauveteurs des vies humaines qui sont intervenues à l'occasion des mêmes dangers ont droit à une équitable part de la rémunération accordée aux sauveteurs du navire, de la cargaison et de leurs accessoires.

Art. 18.

L'action en payement de la rémunération se prescrit par deux ans à partir du jour où les opérations d'assistance sont terminées.

Toutefois, ce délai de prescription ne court pas lorsque le navire assisté n'a pu être saisi dans les eaux soumises à la juridiction française.

Art. 19.

Tout capitaine est tenu, autant qu'il peut le faire sans danger sérieux pour son navire, son équipage ou ses passagers, de prêter assistance à toute personne, même ennemie, trouvée en mer en danger de se perdre.

Le propriétaire du navire n'est pas responsable à raison des contraventions à la disposition précédente sauf intervention effective et directe de sa part.

Art. 20.

Il n'est dû aucune rémunération d'assistance pour les envois postaux de toute nature.

Art. 21.

Les dispositions du présent chapitre sont également applicables aux navires de mer et bateaux de navigation intérieure de l'Etat ou affectés à un service public, à l'exception de l'article 18 (alinéa 2). Les articles 13 et 14 (alinéa 2) ne sont pas applicables aux navires de mer et bateaux de navigation intérieure de l'Etat.

Par dérogation aux dispositions de l'article 19, les obligations d'assistance qui peuvent être imposées aux commandants de force navale ou de bâtiment de la marine nationale sont fixées par l'article 455 du code de justice militaire.

Art. 21 bis.

(Ajouté : loi du 22/12/1984.)

La responsabilité de l'assistant, à raison des dommages corporels ou matériels en relation directe avec des opérations d'assistance ou de sauvetage, au sens de la convention sur la limitation de la responsabilité en matière de créances maritimes faite à Londres le 19 novembre 1976, ainsi qu'à raison de tous autres préjudices résultant de ces opérations, peut être soumise à limitation, quel que soit le fondement de la responsabilité.

Cette limitation est soumise aux mêmes conditions que celles applicables à la limitation de responsabilité du propriétaire de navire, prévue au chapitre VII de la loi no 67-5 du 3 janvier 1967 (1) portant statut des navires et autres bâtiments de mer.

Les préposés de l'assistant ont le droit de se prévaloir de la limitation de responsabilité dans les mêmes conditions que l'assistant lui-même.

Les limites de responsabilité de l'assistant agissant à partir d'un navire autre que celui auquel il fournit des services d'assistance sont calculées suivant les règles prévues pour le propriétaire de navire à l'article 61 de la loi no 67-5 du 3 janvier 1967 (1) susvisée.

Les limites de responsabilité de l'assistant n'agissant pas à partir d'un navire ou agissant uniquement à bord du navire auquel il fournit des services d'assistance sont calculées selon les mêmes règles et sur la base d'une jauge de 1 500 tonneaux au sens du 5 de l'article 6 de la convention mentionnée au premier alinéa du présent article.

Chapitre CHAPITRE III. Des avaries.

Art. 22.

Les avaries sont communes ou particulières.

A défaut de stipulations contraires des parties intéressées, elles sont réglées conformément aux dispositions ci-après.

L'option que dans un connaissement le transporteur se réserverait entre ces dispositions et toutes autres dispositions est réputée non écrite.

Art. 23.

Sont particulières toutes les avaries qui ne sont pas classées en avaries communes.

Elles sont supportées par le propriétaire de la chose qui a souffert le dommage ou par celui qui a exposé la dépense, sauf leurs éventuelles actions en responsabilité, en remboursement ou en indemnité.

Section Section 1. Du classement en avaries communes.

Art. 24.

Sont avaries communes les sacrifices faits et les dépenses extraordinaires exposées pour le salut commun et pressant des intérêts engagés dans une expédition maritime.

Art. 25.

Sacrifices et dépenses doivent avoir été décidés par le capitaine.

Art. 26.

Seront seuls admis en avaries communes les dommages et pertes atteignant matériellement les biens engagés dans l'expédition ainsi que les dépenses exposées pour ces biens lorsque ces dommages, pertes ou dépenses sont la conséquence directe de l'acte d'avarie commune décidé par le capitaine.

Art. 27.

Lorsque l'événement qui a donné lieu au sacrifice où la dépense est la conséquence d'une faute commise par l'une des parties engagées dans l'expédition, il n'y a pas moins lieu à règlement d'avaries communes sauf recours contre celui auquel cette faute est imputable.

Art. 28.

Toute dépense supplémentaire, volontairement exposée pour éviter une dépense ou une perte qui aurait été classée en avaries communes sera elle-même bonifiée comme telle, à concurrence du montant de la dépense économisée ou de la perte évitée.

Section Section II. De la contribution aux avaries communes.

Art. 29.

Les avaries communes sont supportées par le navire, le fret et la cargaison, évalués comme il est dit ci-après.

Art. 30.

Le navire contribue en proportion de sa valeur au port où s'achève l'expédition, augmentée s'il y a lieu du montant des sacrifices qu'il a subis.

Le fret brut et le prix du passage non acquis à tout événement contribuent pour les deux tiers.

Art. 31.

Les marchandises sauvées ou sacrifiées contribuent en proportion de leur valeur marchande réelle ou supposée au port de déchargement.

Art. 32.

Le montant des dommages et pertes à admettre en avaries communes est déterminé pour le navire au port où s'achève l'expédition.

Il est égal au coût des réparations consécutives aux sacrifices subis, coût réel si elles ont été effectuées, coût estimatif s'il n'y a pas été procédé.

Art. 33.

Le montant des dommages ou pertes à admettre en avaries communes est déterminé pour la marchandise au port de déchargement. Il est égal au coût des sacrifices faits, calculé sur la base de la valeur marchande de cette marchandise à l'état sain au même port.

Art. 34.

Les marchandises qui ont été déclarées pour une valeur moindre que leur valeur réelle contribuent à proportion de leur valeur réelle, mais leur perte ou leur avarie ne donne lieu à classement en avaries communes qu'à proportion de leur valeur déclarée.

Art. 35.

Les marchandises pour lesquelles il n'a pas été établi de connaissement ou de reçu du capitaine ne sont pas admises en avaries communes si elles sont sacrifiées. Elles contribuent néanmoins si elles sont sauvées.

Il en est de même des marchandises chargées en pontée, sauf dans le petit cabotage où elles sont traitées comme les marchandises de cale.

Art. 36.

En cas de jet à la mer des marchandises chargées en pontée de façon irrégulière au sens de l'article 22 de la loi 66-420 du 18 juin 1966 (2) sur les contrats d'affrètement et de transport maritimes, la valeur des marchandises jetées n'est pas admise en avaries communes.

Art. 37.

Les effets et bagages de l'équipage et des passagers pour lesquels il n'y a pas de connaissement ni reçu ainsi que les envois postaux de toute nature sont exempts de contribution s'ils ont été sauvés ; ils participent à la répartition, s'ils ont été sacrifiés dans les conditions des articles 24 et suivants.

Art. 38.

La répartition se fait au marc le franc.

En cas d'insolvabilité de l'un des contribuables, sa part est répartie entre les autres proportionnellement à leurs intérêts.

La valeur de sa contribution est pour chaque intéressé la limite de son obligation.

Section SECTION III. Du règlement des avaries communes.

Art. 39.

Il n'y a lieu à aucun règlement en cas de perte totale des intérêts engagés dans l'expédition.

Art. 40.

Toutes actions dérivant d'une avarie commune sont prescrites par cinq ans à partir de la date à laquelle l'expédition s'est achevée.

Art. 41.

Le capitaine peut refuser de délivrer les marchandises et demander leur consignation jusqu'au payement de la contribution qui leur incombe sauf caution suffisante de l'ayant droit.

Art. 42.

L'armateur est privilégié pour le payement des contributions en avaries communes qui lui sont dues, sur les marchandises ou le prix en provenant pendant quinze jours après leur délivrance, si elles n'ont passé en mains tierces.

Contenu

Dispositions générales.

Art. 43.

Sont abrogés les articles 397 à 429 et l'article 436 du code de commerce, la loi du 29 avril 1916 sur l'assistance et le sauvetage maritimes ainsi que toutes autres dispositions contraires à la présente loi.

Art. 44.

La présente loi prendra effet trois mois après la publication au Journal officiel de la République française du décret établissant les dispositions réglementaires relatives aux événements de mer.

Art. 45.

La présente loi est applicable aux territoires d'outre-mer.

La présente loi sera exécutée comme loi de l'Etat.

C. DE GAULLE.

Par le Président de la République :

Pour le Premier ministre et par délégation :

Le garde des sceaux, ministre de la justice,

Louis JOXE.

Le ministre d'Etat chargé des départements et territoires d'outre-mer,

Pierre BILLOTTE.

Le ministre des sceaux, ministre de la justice,

Louis JOXE.

Le ministre des armées,

Pierre MESSMER.

Le ministre de l'économie et des finances,

Michel DEBRE.

Le ministre des transports,

Jean CHAMANT.

Le ministre des postes et télécommunications,

Yves GUENA.