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Archivé DIRECTION DES AFFAIRES ADMINISTRATIVES, JURIDIQUES ET CONTENTIEUSES : Mission domaniale

CIRCULAIRE N° 922/MA/DCG/D pour l'application de l'instruction n o 1525/MA/CC/8 du 14 janvier 1974 relative aux occupations précaires et révocables du domaine militaire.

Abrogé le 14 février 2013 par : INSTRUCTION N° 302/DEF/SGA/DMPA/SDIE relative à la politique immobilière du ministère de la défense. Du 27 mars 1974
NOR

Classement dans l'édition méthodique : BOEM  400.2.3.1.1.

Référence de publication : BOC, p. 2629.

L' instruction 1525 /MA/CC/8 du 14 janvier 1974 (1) prévoit un contrôle périodique de la régularité des conditions d'emploi des immeubles militaires occupés à titre provisoire par des personnes physiques ou morales étrangères aux armées.

L'efficacité de ce contrôle suppose qu'à l'origine la précarité de telles occupations apparaisse sans ambiguïté possible dans les conventions. En effet, dans la mesure où l'acte initial ne ferait pas ressortir les conditions élémentaires de la précarité, le contrôle prescrit par l'instruction ministérielle de référence, deviendrait inopérant.

Il convient donc de rappeler, avant tout autre développement, les conditions nécessaires et sine qua non dont doit être assortie une occupation pour qu'elle revête un caractère précaire et révocable.

Sous l'empire de la législation propre aux baux ruraux [loi du 30 décembre 1963 (JO du 31, p. 11895)] et aux baux commerciaux (décret du 30 septembre 1953 (JO du 1er octobre, p. 8654) dans leur teneur initiale, la jurisprudence et la doctrine ont longtemps considéré que l'existence de règles dérogatoires et d'ordre public régissant les contrats de louage laissait la possibilité de conclure des conventions d'occupation précaire échappant à leur application. Cette faculté dérogatoire a ensuite été contestée, après la promulgation de la loi du 12 mai 1965 réduisant à deux ans la durée des occupations dérogeant aux dispositions légales des baux. Il a donc fallu attendre un arrêt de la cour de cassation pour résoudre cette divergence.

La cour de cassation a admis que le titre du contrat de louage, quelle qu'en soit d'ailleurs la qualification donnée par les parties, n'est pas un bail mais une simple concession de jouissance précaire, dès lors qu'il comporte des clauses révélant l'intention des co-contractants de ne pas créer de jouissance durable assortie des droits et obligations du contrat de louage.

De cette interprétation il ressort que la précarité tient moins à la durée limitée et, donc, provisoire de l'occupation qu'à la fragilité à laquelle les parties ont, par volonté commune, entendu la soumettre. Parmi les clauses révélatrices de cette fragilité, il faut inclure la faculté reconnue au propriétaire d'exiger à tout moment, sans préavis, ni indemnité, le départ de l'occupant. Mais les dispositions relatives aux baux étant d'ordre public, la précarité doit répondre, pour le propriétaire, à un motif sérieux et légitime, connu et accepté par l'occupant. Faute de cette volonté partagée, légitime et non déguisée, la clause de précarité serait nulle et réputée non écrite quelle qu'en soit la forme (cf. article 35 de la loi no 71-585 du 16 juillet 1971) (JO du 17, p. 7063).

En ce qui concerne l'occupation des casernements et des terrains militaires, partiellement ou momentanément inutilisés, la volonté de l'Etat de ne pas amodier de façon durable les immeubles qui lui sont affectés paraît tout à fait légitimée, d'une part par le motif que les armées sont susceptibles d'en recouvrer l'utilisation à tout moment pour l'hébergement et le fonctionnement de leurs unités, d'autre part et en sens contraire par l'obligation qui leur est faite de remettre aux domaines pour aliénation les immeubles dont elles ont définitivement perdu l'emploi.

Néanmoins, il est à craindre que les personnes ou les organismes qui sollicitent l'occupation de ces immeubles ne soient pas toujours conscients de ces impératifs. Aussi, on ne saurait trop recommander aux services locaux du génie de bien préciser aux amodiataires actuels et futurs du domaine militaire la fragilité des concessions qui leur sont accordées en raison des possibilités d'emploi (ou d'aliénation) de ces immeubles par les armées elles-mêmes et de veiller avec la plus grande attention à ce que les conventions d'occupation précaire, préparées en liaison avec les domaines et soumises à leur signature, ne soient pas présentées comme des baux de location, même provisoires.

A cet effet, il devra être fait mention, dans les conventions d'occupation précaire à intervenir, des projets de l'armée quant à l'utilisation prévue des immeubles concédés, telle qu'elle figure au programme immobilier des armées, au schéma directeur d'implantation des unités ou sur tout autre document non confidentiel. Dans l'hypothèse où l'utilisation d'un immeuble n'est pas prévue par tel ou tel de ces documents ou lorsque le projet d'utilisation revêt un caractère confidentiel interdisant une telle évocation, cette mention pourrait être remplacée par une allusion aux impératifs de la défense nationale.

Sous cette réserve, rien ne s'oppose à ce que des immeubles militaires soient concédés à titre précaire à des personnes ou organismes étrangers aux armées, à la condition toutefois qu'une des clauses de la convention d'occupation reconnaisse expressément à l'Etat la possibilité d'y mettre fin à tout moment sans congé préalable ni indemnité et d'exiger le départ de l'occupant, dans un délai aussi court que possible.

Il reste bien entendu qu'avec l'accord du service des domaines, ces dispositions exorbitantes du droit commun s'accompagneront, comme par le passé, d'une contrepartie financière pour le concessionnaire, la redevance d'occupation étant fixée à un taux nettement inférieur à celui qui résulterait d'une véritable location. Cette contrepartie n'exclut pas pour autant la possibilité d'insérer dans la convention une clause prévoyant la révision par les domaines des conditions financières de l'occupation, conformément aux dispositions de l'article L. 33 du code du domaine de l'Etat.

Compte tenu de ces précisions, on peut estimer qu'en cas de contestation, de telles conventions auraient toutes chances de voir leur caractère précaire confirmé par les tribunaux, alors et surtout qu'il apparaîtrait clairement que la précarité n'est pas destinée à éluder les dispositions légales des baux mais justifiée par la préoccupation constante des armées de préserver les biens de l'Etat dont elles ont la charge. Toutefois, eu égard aux dispositions restrictives en la matière, on peut craindre que les juges ne soient plus exigeants encore que par le passé dans l'interprétation des conventions d'occupation précaire, pour admettre leur licéité.

Dans le but d'éviter de telles contestations et l'éventualité d'un recours contentieux, l'instruction déjà citée prescrit aux services chargés de la gestion du domaine militaire d'accroître la surveillance des immeubles momentanément concédés au secteur civil. L'expérience prouve que, fréquemment, une fois l'autorisation accordée et la convention signée, l'immeuble concédé est perdu de vue, ce qui encourage parfois une utilisation à des fins autres que celles pour lesquelles l'autorisation d'occupation a été accordée.

C'est pourquoi, il est apparu nécessaire que chaque année les conditions d'emploi de ces immeubles soient contrôlées et au besoin rappelées aux occupants qui s'en écarteraient. La visite annuelle systématique prévue à cet effet par l'instruction ministérielle visée en objet, doit être comprise et organisée dans ce sens. Le plus souvent ces reconnaissances des lieux pourront être effectuées à l'occasion de visites de chantiers sans qu'il soit besoin de prévoir des déplacements particuliers.

Cette charge s'exerçant en liaison avec le service des domaines qui reste seul juge des conditions financières de toute opération domaniale, il convient que, parallèlement au contrôle des conditions d'utilisation, un réajustement des conditions financières soit également examiné. A cet effet l'instruction ministérielle prévoit l'envoi chaque année au service des domaines, en vue d'une révision éventuelle de l'indemnité d'occupation, d'une liste des conventions d'occupation conclues depuis au moins trois ans ou arrivant à échéance dans l'année. Cette liste, qui devra mentionner toutes observations utiles, sera établie annuellement à la date du 15 janvier et une copie adressée sous le présent timbre à titre de compte rendu.

Ainsi donc, en l'état actuel de la jurisprudence, il est possible de conclure que les conventions d'occupation précaire ne sont pas comprises dans le champ d'application de la législation sur les baux, en particulier en ce qui concerne les dispositions sur le droit à la « propriété locative ».

Néanmoins, le législateur et le juge ayant considérablement limité la notion de précarité, les conventions d'occupation précaire doivent, pour être reconnues comme telles, répondre à des conditions très précises.

Face à ces restrictions législatives et jurisprudentielles, le cahier des clauses et conditions générales des concessions du domaine militaire en date du 2 mars 1948 ne peut plus suffire, à lui seul, à garantir les droits de l'Etat-propriétaire. D'où la nécessité de pallier cette carence par l'organisation d'un contrôle périodique des conditions d'emploi, afin d'éviter que le juge ne restitue auxdites conventions le caractère d'un bail.

Notes

    1BOC, p. 338.

Pour le ministre des armées et par délégation :

Le général de division, directeur central du génie,

BRUGE