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Archivé CABINET DU MINISTRE : Bureau correspondance et discipline générales

INSTRUCTION N° 32335/DEF/C/7 relative à l'application de la loi n o 74-643 du 16 juillet 1974 portant amnistie.

Du 08 juillet 1976
NOR

Autre(s) version(s) :

 

Précédent modificatif :  1er modificatif du 24 août 1976 (BOC, p. 2793).

Classement dans l'édition méthodique : BOEM  200.6.1.3.2.

Référence de publication :  BOC, p. 2460.

La loi du 16 juillet 1974 (1) amnistie de plein droit ou par mesure individuelle certaines infractions ou certains faits commis avant le 27 mai 1974 et précise les effets de cette mesure pour ce qui concerne la carrière, le statut ou le régime de retraite des personnels concernés.

Les infractions ou les faits commis en relation avec les événements d'Algérie ou la guerre d'Indochine ont déjà été amnistiés par les loi du 17 juin 1966 (2) et loi du 31 juillet 1968 (3). La loi du 16 juillet 1974 détermine les effets que cette loi entraîne, de plein droit, au profit des intéressés.

La présente instruction a pour objet de définir les conditions dans lesquelles les dispositions de cette loi, lorsqu'elles relèvent des attributions du ministère de la défense, seront appliquées aux personnels militaires de carrière ou engagés selon que les infractions ou les faits amnistiés sont étrangers ou en relation avec les événements d'Algérie et la guerre d'Indochine.

1. Amnistie des sanctions disciplinaires ou professionnelles qui se rapportent à des faits commis avant le 27 mai 1974 et qui ne sont en relation ni avec les événements d'Algérie ni avec la guerre d'Indochine.

1.1. Généralités.

Selon le règlement de discipline générale (art. 30) une même faute peut, en raison de sa nature ou de sa gravité, entraîner cumulativement :

  • une punition disciplinaire ;

  • une sanction professionnelle ;

  • une sanction statutaire ;

  • une sanction pénale.

Les punitions sanctionnent « le manquement au devoir ou à la négligence » (RDG, art. 30). Les unes sont purement morales (avertissement, réprimande), les autres sont privatives de liberté (consigne, arrêts, arrêts de rigueur), mais toutes aux termes de la jurisprudence du conseil d'Etat (arrêt Chenal, 13 juillet 1968) sont des « mesures d'ordre intérieur » dont le juge n'a pas à connaître au contentieux. Elles font « partie des sanctions diverses dont dispose l'autorité militaire, indépendamment des sanctions disciplinaires ayant un caractère administratif ».

Par contre, les sanctions statutaires s'appliquent au grade, à l'avancement ou à l'emploi. Leurs conditions de mise en œuvre, définies par le statut général, sont susceptibles de recours contentieux. Elles seules sont au nombre des « sanctions disciplinaires » visées par les lois portant amnistie.

En conséquence, la procédure prévue par les lois d'amnistie pour ce qui concerne les « sanctions disciplinaires ou professionnelles » n'est pas applicable aux punitions militaires. Le maintien ou l'effacement de ces punitions ne relève que du seul pouvoir du ministre de la défense qui, dans la pratique, assure explicitement la transposition de la loi d'amnistie aux punitions, par des instructions particulières qui ont pour effet de permettre une simple « rectification » du dossier des personnels intéressés.

C'est ainsi que dans le cadre de la loi no 69-700 du 30 juin 1969 (4), la circulaire du 31 juillet 1969 (5) a permis d'effacer les punitions prononcées antérieurement au 20 juin 1969, soit automatiquement, soit, sur demande des intéressés, par décision du ministre si ces punitions sanctionnaient des manquements à la probité, à l'honneur ou aux bonnes mœurs.

Les mêmes dispositions seront reconduites pour ce qui concerne l'application de la loi du 16 juillet 1974.

1.2. Application aux punitions.

Sauf si elles ont été prononcées pour des faits qui sont contraires à la probité, à l'honneur ou aux bonnes mœurs ou qui ont mis en danger la sécurité des personnes, les punitions sont amnistiées de plein droit. Elles doivent être effacées des dossiers, relevés, livrets ou fichiers à l'initiative des directions des personnels. Cet effacement doit être réalisé dans des conditions telles qu'aucune trace ne subsiste de la punition amnistiée.

Les punitions prononcées pour des faits qui sont contraires à la probité, à l'honneur ou aux bonnes mœurs ou qui ont mis en danger la sécurité des personnes pourront être amnistiées par décision individuelle du ministre.

A cet effet, les directions des personnels voudront bien transmettre, pour décision, à la sous-direction des bureaux du cabinet (bureau correspondance et discipline générales) toutes les demandes, qui leur parviendraient, d'amnistie des punitions pour des faits contraires à la probité, à l'honneur, aux bonnes mœurs ou ayant mis en danger la sécurité des personnes. Ces demandes seront regroupées sur l'état, dont modèle ci-joint, qui comportera la nature de cette sanction et les divers avis hiérarchiques motivés.

Lorsqu'une condamnation pénale aura été également prononcée, il conviendra d'annexer à cet envoi l'avis d'amnistie de cette condamnation qui pourra être obtenu auprès de la juridiction qui a rendu le jugement.

1.3. Application aux sanctions statutaires.

1.3.1. Réintégration dans les fonctions ou l'emploi.

D'une manière générale, l'amnistie qui a pour objet de faire tomber dans l'oubli certaines infractions et les condamnations qui ont été prononcées à leur occasion, n'a pas pour objet d'en réparer, rétroactivement, toutes les conséquences préjudiciables.

C'est pourquoi, l'amnistie n'entraîne pas, de plein droit, la réintégration dans la fonction ou l'emploi. Elle ne donne pas lieu à reconstitution de carrière.

Dans ces conditions, bien que le caractère disciplinaire de la sanction statutaire puisse être amnistié de plein droit ou par décision individuelle, la position statutaire ne s'en trouve pas modifiée automatiquement.

Les demandes d'amnistie, par mesures individuelles, des sanctions statutaires prononcées pour des faits contraires à la probité, à l'honneur, aux bonnes mœurs ou ayant mis en danger la sécurité des personnes seront transmises à la sous-direction des bureaux du cabinet (bureau correspondance et discipline générales) dans les conditions exposées ci-dessus (n° 1.2) y compris la justification de l'amnistie préalable de la sanction pénale.

1.3.2. Réintégration dans le grade.

Pour les mêmes raisons que ci-dessus, l'amnistie n'entraîne pas, de plein droit, la réintégration dans le grade.

Dans ces conditions, toutes les demandes de réintégration seront transmises à la sous-direction des bureaux du cabinet (bureau correspondance et discipline générales) comme il est dit ci-dessus.

Les officiers de réserve qui, au 27 mai 1974, auraient dépassé la limite d'âge de leur grade (limite d'âge des cadres d'active augmentée de cinq ans) ne pourront en aucun cas être réintégrés dans leur grade ni, par voie de conséquence, être admis dans l'honorariat.

1.4. Droits à pension.

1.4.1.

La loi du 16 juillet 1974 permet aux militaires qui bénéficient de l'amnistie de plein droit ou par décision individuelle, d'être réintégrés dans leurs droits à pension appréciés en fonction de la législation en vigueur à la date de leur radiation des cadres, pour compter :

  • du 17 juillet 1974 (date de publication de la loi) si l'amnistie est de plein droit ;

  • du jour de la décision individuelle d'amnistie dans le cas contraire.

1.4.2.

Cas particulier des militaires déchus de leurs droits à pension ou dont les droits à l'obtention ou à la jouissance de la pension ont été suspendus.

En cas de déchéance des droits à pension prononcée au titre des dispositions en vigueur avant le 1er décembre 1964, ou de suspension de ces mêmes droits accompagnant une mesure de mise à la retraite d'office en raison des faits définis à l'article L. 59 du nouveau code des pensions civiles et militaires de retraite (détournement de fonds, malversation ou démission à prix d'argent), l'amnistie de la sanction statutaire et, le cas échéant, de la sanction pénale, ne permet pas, à elle seule, le rétablissement des droits à pension.

Seule l'amnistie des faits reprochés, prononcée par décret individuel en raison de la nature même de ceux-ci (art. 10, 3e alinéa de la loi du 16 juillet 1974), peut permettre à l'intéressé de recouvrer l'intégralité de ses droits à pension.

Le relèvement de la déchéance ou de la suspension des droits à pension implique la suppression des droits qui avaient été accordés à la femme et aux enfants mineurs (art. L. 60) même si l'amnistie n'ouvre droit qu'à une pension à jouissance différée.

2. Effets de l'amnistie des infractions commises en relation avec les événements d'Algérie

(modifié : 1er modificatif du 24/08/1976).

Les loi 66-396 du 17 juin 1966 et loi no 68-697 du 31 juillet 1968 ont amnistié, sans aucune exclusive, d'une part les condamnations pénales et les infractions, d'autre part les sanctions professionnelles et les faits, en relation avec les événements d'Algérie.

Toute référence à ces condamnations, infractions, sanctions ou faits a donc dû disparaître des dossiers ou livrets matricules des militaires.

Les effets de ces mesures sont énumérés à l'article 24 de la loi du 16 juillet 1974. Leur mise en application est en principe immédiate.

2.1. Rôle des directions de personnels.

2.1.1.

Rechercher, en liaison avec tout autre organisme concerné, les personnels de carrière ou servant sous contrat, auxquels s'appliquent, de plein droit, les dispositions de l'article 24 de la loi du 16 juillet 1974. Certains de ces personnels peuvent être décédés depuis le 27 mai 1974.

Ces dispositions sont également applicables, sous réserve du reversement du pécule, aux militaires qui, pour des faits en relation avec les événements d'Algérie, ont été rayés des cadres sans droit à pension mais avec l'octroi d'un pécule, en vertu des articles 1 et 4 de la décision présidentielle du 7 juin 1961 (6) relative à la mise en congé spécial et à la radiation des cadres des personnels militaires. Il appartiendra, le cas échéant, aux personnels concernés d'apporter toute justification utile.

2.1.2.

Réintégrer, au 27 mai 1974, dans le grade qu'ils détenaient lors de leur exclusion des cadres, tous les militaires de carrière ou servant sous contrat et les admettre simultanément à la retraite, qui sera liquidée ou révisée conformément aux régles en vigueur à cette date.

2.1.3.

Cette mesure vise tous les militaires bénéficiaires de l'article 24 de la loi :

  • qu'ils aient, ou non, déjà obtenu la concession d'une pension ;

  • qu'ils possèdent, ou non, la nationalité française ;

  • qu'ils aient, ou non, dépassé la limite d'âge du grade qu'ils détenaient ;

  • qu'ils occupent, ou non, comme titulaire un emploi conduisant à pension ;

    • du code des pensions civiles et militaires de retraite ;

    • de la caisse nationale des agents des collectivités locales ;

    • du régime de retraite des ouvriers des établissements industriels de l'Etat.

  • Toutefois, en ce qui concerne les titulaires des emplois visés ci-dessus, il est précisé que :

  • ces personnels peuvent, dans tous les cas, être réintégrés dans leur grade ;

  • le rachat des annuités manquantes ne peut avoir pour effet de faire rémunérer une même période par deux régimes de retraite.

2.1.4.

Informer les militaires réintégrés et mis simultanément à la retraite (ou leurs ayants cause) qu'ils pourront, sous certaines conditions, demander à racheter les annuités manquantes pour leur permettre de parfaire les quinze années de services valables pour la retraite qui sont nécessaires pour l'ouverture des droits à pension de retraite.

Cette information leur sera fournie lors de la notification de la décision les réintégrant dans leur grade et les admettant à la retraite.

Ils seront invités à adresser leur demande de rachat au service des pensions des armées à La Rochelle et leur attention sera appelée sur l'incidence de l'option qu'ils feront, sous leur propre responsabilité, eu égard au régime de retraite obligatoire (sécurité sociale) ou complémentaire dont ils relèvent depuis la date de radiation des cadres de l'armée.

Les dispositions de l'article 24-5° de la loi du 16 juillet 1974 leur seront rappelées :

« En aucun cas les fonctionnaires civils et militaires… ne pourront obtenir que des services correspondant à la période rachetée soient rémunérés au titre d'un autre régime de retraite. Toutefois, les intéressés auront la faculté de choisir le régime qui leur serait le plus favorable. »

2.1.5.

Adresser les dossiers de réintégration et d'admission à la retraite au service des pensions des armées.

2.1.6.

Nommer dans les réserves les militaires réintégrés dans leur grade (et non décédés) qui seront alors, dans les conditions réglementaires habituelles, pourvus d'un emploi de mobilisation, maintenus disponibles pour recevoir un tel emploi ou admis à l'honorariat.

2.1.7.

Réintégrer dans leur grade tous les officiers de réserve sanctionnés en raison des événements d'Algérie à la seule exception de ceux qui, au 27 mai 1974, auraient dépassé la limite d'âge de leur grade telle que l'a défini l'article L. 9 du code du service national (limite d'âge des cadres d'active augmentée de cinq ans).

Après réintégration, les officiers de réserve seront gérés dans les conditions habituelles.

2.2. Rôle du service des pensions des armées.

2.2.1.

Recevoir les demandes de rachat des années de service manquantes pour parfaire les quinze années de services valables pour la retraite. Ces demandes peuvent émaner des militaires réintégrés ou, s'ils sont décédés depuis le 27 mai 1974, de leurs ayants cause.

2.2.2.

En liaison, le cas échéant, avec les organismes compétents de chaque armée ou service commun et, compte tenu des années de services valables pour la retraite déjà accomplies, déterminer le nombre d'annuités à racheter, le coût global de ce rachat et le montant des retenues à effectuer dans les conditions définies par la circulaire no 2/A-15/P/6 du 10 mars 1975 (7) du ministère de l'économie et des finances (direction du budget, service des pensions).

2.2.3.

Liquider la pension compte tenu le cas échéant de « l'interdiction de cumul » précisée par la même circulaire (p. 10-C).

2.2.4.

Eventuellement, faire reverser au Trésor le montant des retenues pour pension qui ont été remboursées en application des dispositions de l'article L. 65 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou de l'article L. 88 de l'ancien code (loi du 20 septembre 1948) (8).

2.2.5.

Remettre en paiement les pensions militaires d'invalidité dont bénéficient les militaires impliqués dans les événements d'Algérie, lorsque ces pensions n'ont pas été versées en application des dispositions de l'article L. 107 du code des pensions militaires d'invalidité, c'est-à-dire en raison de la condamnation à une peine afflictive ou infamante de leur bénéficiaire.

2.2.6.

Réviser les pensions (services et invalidité) conformément aux règles en vigueur au 27 mai 1974.

3. Effets de l'amnistie des infractions commises en relation avec la guerre d'Indochine.

3.1.

L'article 25 de la loi du 1er janvier 1999 permet aux officiers et sous-officiers exclus de l'armée par décret pour des faits relatifs à la guerre d'Indochine de bénéficier des dispositions de l'article 24 concernant les effets de l'amnistie des infractions commises en relation avec les événements d'Algérie.

3.2.

En conséquence, toutes les dispositions définies au titre 2 de la présente instruction sont, mutatis mutandis, applicables aux officiers et aux sous-officiers qui ont été exclus de l'armée, pour des faits relatifs à la guerre d'Indochine.

Les difficultés d'application des dispositions ci-dessus seront signalées sous le présent timbre.

Le ministre de la défense,

Yvon BOURGES.

Annexe

ANNEXE. AMNISTIE.

Loi du 16 juillet 1971

Punitions ou sanctions statutaires, réintégrations, événements d'Algérie, guerre d'Indochine.

 

Arme.

Grade.

Nom et prénom adresses civile et militaire.

Date de naissance.

Situation administrative.

Sanctions.

Objet de la demande (3).

Avis hiérarchiques motivés.

Proposition soumise au ministre et justification.

Décision du ministre.

Date.

Nature des faits reprochés.

Nature de la sanction.

 

A atteint ou atteindra la limite d'âge du grade le…

 

 

(Nombre d'années de service, position statutaire, date de radiation des cadres, reprises d'activité, pensions perçues, services ou invalidité au taux, gradé ou soldat.)

 

 

(En précisant éventuellement si l'intéressé a déjà bénéficié d'une amnistie précédente) (2).

 

 

 

 

(1) Le cas échéant, il sera établi un tableau par nature d'amnistie : punitions, sanctions statutaires, etc.

(2) Ces renseignements visent essentiellement les personnes susceptibles de bénéficier de l'article 24 de la loi du 16 juillet 1974 .

(3) Par exemple : pension services et rachat des années manquantes, pension d'invalidité ou taux du grade, décorations, nomination dans les réserves, etc.