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CABINET DU MINISTRE : CM14

DIRECTIVE N° 9924/DEF/CAB/CSRM relative à la réserve citoyenne.

Du 04 octobre 2013
NOR D E F M 1 3 5 1 9 9 6 X

Préambule.

La réserve citoyenne constitue, avec la réserve opérationnelle, une des deux composantes de la réserve militaire. Le réserviste citoyen contribue à renforcer les capacités des forces armées et formations rattachées sans, pour autant, être totalement régi par le statut général des militaires. L\'agrément dans la réserve citoyenne et l\'engagement à servir dans la réserve opérationnelle (ESR) sont exclusifs l\'un de l\'autre (1).

« Ceux qui participent (à la réserve citoyenne) promeuvent l\'esprit de défense et diffusent leurs connaissance du monde de la défense dans le monde civil. Ils permettent à la défense de bénéficier de leur expertise et de leur capacité de rayonnement. Ces relais vers la société civile sont essentiels ; cette réserve doit être développée et son emploi optimisé au profit du ministère de la défense. » (extrait du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale du 29 avril 2013).

Agréé par une autorité militaire, sans lien contractuel, le réserviste citoyen est placé au service d\'une force armée ou une formation rattachée qu\'il sert volontairement. La sélection est fondée sur les priorités retenues par chaque force armée ou formation rattachée. Au-delà de ces critères individuels, les autorités militaires favoriseront les recrutements dans les lieux où la défense ne dispose pas d\'une implantation militaire et veilleront à ce que la réserve citoyenne représente la société française de manière équilibrée et adéquate sur le plan sociologique (âge, sexe, etc.). Il paraît opportun de recruter des personnes engagées dans la vie citoyenne (associations, organisations, élus, etc.).

Le réserviste citoyen inscrit son action dans le bénévolat et ne peut exercer d\'activité opérationnelle ni de commandement. Un grade honorifique lui est attribué à partir de critères établis par l\'autorité militaire et en lien avec ses responsabilités professionnelles, ses qualifications ou son expérience militaire.

Dans un esprit de convergence d\'intérêts, tout en respectant la spécificité de chacune des deux composantes de la réserve militaire, les autorités militaires favoriseront les contacts réguliers entre les forces d\'active, la réserve opérationnelle et la réserve citoyenne. Ces rencontres génèrent une connaissance mutuelle bénéfique et contribuent à faire reconnaître le réserviste citoyen comme relais entre le monde militaire et la société civile.

Les forces armées et formations rattachées s\'attacheront à manifester une réelle reconnaissance pour ces citoyens qui donnent bénévolement de leur temps à leur profit et pour une meilleure connaissance des domaines de la défense et de la sécurité nationale par le reste de la société.

La présente directive a pour objet de définir les enjeux de cette réserve, le type d\'activités qui peut lui être confié et l\'organisation pour la constituer et l\'animer. Les modalités d\'accès à la réserve citoyenne sont définies dans un arrêté.

1. Enjeux, rôles et activités des réservistes citoyens.

La réserve citoyenne constitue un soutien nécessaire aux autorités ministérielles et aux forces armées et formations rattachées pour relever cinq défis principaux : le rayonnement des « forces armées » dans la société civile, l\'enseignement de défense, la résilience de la Nation, l\'expertise et l\'aide au recrutement et à la reconversion.

Par son engagement volontaire, le réserviste citoyen se met à disposition pour entretenir l\'esprit de défense dans la société et renforcer le « lien entre la Nation et ses forces armées ». Ses activités s\'inscrivent généralement dans le cadre d\'une mission ou un projet propre à une force armée ou une formation rattachée, elles sont précisées dans une lettre de mission individuelle qui lui est remise lors de l\'agrément. Le réserviste citoyen effectue ses activités en qualité de collaborateur bénévole du service public, il ne peut donc prétendre à aucune rémunération.

Certaines actions peuvent être menées dans une démarche interarmées ou ministérielle. Elles sont alors soit convenues directement entre le responsable du recrutement et l\'employeur interarmées soit demandées par le chef d\'état-major des armées, le directeur général de la gendarmerie nationale ou le délégué général pour l\'armement afin d\'atteindre les objectifs fixés, en constituant si nécessaire un réseau pérenne ou conjoncturel. Elles peuvent également faire l\'objet d\'une demande ministérielle via le coordonnateur de la réserve citoyenne.

Le spectre d\'activité des réservistes citoyens doit rester large. Ainsi, toute action menée par un réserviste citoyen au sein de la société française et valorisant la défense contribuera à renforcer les liens souhaités.

1.1. Rayonnement des forces armées et formations rattachées.

La réserve citoyenne offre au ministère de la défense et au ministère de l\'intérieur un réseau de volontaires, capacité qui donne un potentiel considérable de rayonnement vers la population et constitue un relais capital auprès de la société civile. Elle sert à la promotion de l\'esprit de défense dans la société en contribuant à la connaissance des forces armées, et formations rattachées par la société civile, en relayant leurs actions dans la société civile, et en participant au devoir de mémoire.

À cette fin, les autorités militaires s\'assureront du bon niveau de connaissances des réservistes citoyens sur les questions relevant de la défense et de la sécurité nationale et leur diffuseront régulièrement l\'information nécessaire à leur action.

Pour faciliter l\'implantation des réservistes citoyens et leur donner une meilleure visibilité, les autorités militaires locales veilleront à ce que :

  • les réservistes citoyens soient associés aux actions de relations publiques de la défense et de la sécurité nationale, aux opérations d\'information des concitoyens ainsi qu\'aux évènements ponctuels de communication ;
  • ils soient conviés formellement aux cérémonies militaires publiques de leur zone.

Lorsqu\'ils sont implantés à l\'étranger, ils peuvent être associés aux actions de rayonnement de la défense, en liaison avec la représentation militaire locale qui les réunit et les informe de la position française. L\'action internationale de la réserve citoyenne peut également se concrétiser par des actions auprès de militaires étrangers en formation ou en mission sur le territoire national.

Il convient donc de recruter des personnes influentes et reconnues, dont l\'activité professionnelle procure de nombreuses occasions de contacts.

1.2. Enseignement de défense.

Ils peuvent participer à la diffusion de l\'esprit de défense dans le cadre de l\'enseignement de défense, que ce soit au sein de l\'éducation nationale ou dans des centres dédiés tels que l\'institut des hautes études de la défense nationale (IHEDN).

Les réservistes citoyens peuvent également se voir confier par l\'autorité militaire des actions de formation dans le domaine de la citoyenneté, en particulier au profit des jeunes. Leur contribution à la mise en œuvre des actions déployées par le ministère pour les jeunes et particulièrement dans le cadre du plan d\'égalité des chances doit être recherchée [déploiement et mise en œuvre des classes de défense et de sécurité globale (CDSG), connaissance des opportunités de la défense dans les quartiers défavorisés et les zones rurales, développement d\'initiatives entre des organismes publics ou privés et les unités, etc.]. En tant que de besoin, et en fonction de leur lettre de mission, ils pourront notamment contribuer à l\'animation des journées défense et citoyenneté (JDC).

1.3. Contribution à la résilience de la nation.

Les réservistes citoyens, sélectionnés pour leur expertise, leur réseau et leur savoir être, font partie des acteurs qui peuvent être appelés à soutenir les actions de résilience menées aussi bien par les autorités militaires que par les autorités civiles.

À ce titre, il peut être utile de les associer, aux travaux de réflexion et d\'analyse des risques pouvant affecter la défense et la sécurité nationale. De même, en cas d\'évènement ou de crise majeure sur le territoire, il semble judicieux de les impliquer dans les actions de rassurance de la population, notamment par le biais de la diffusion d\'informations dans leur environnement professionnel (enseignements, collectivités territoriales, transports, etc.).

1.4. L'expertise au profil des forces armées et formations rattachées.

Le recours à la réserve citoyenne peut permettre d\'améliorer la performance des forces armées et formations rattachées en apportant des expertises et du savoir-faire dans des domaines présents dans la société civile.

En étant associé à des réflexions et des études, le réserviste citoyen peut aider les responsables militaires à mieux appréhender des problématiques pluridisciplinaires dans le domaine de la défense et de la sécurité nationale et les connecter aux réseaux adéquats. Il peut avoir un rôle de facilitateur et/ou d\'interface dans son domaine d\'expertise.

À l\'instar de ce qui a été fait pour la cyberdéfense (2), des réseaux de réservistes citoyens pourront être constitués selon le besoin sur diverses thématiques.

La lettre de mission du réserviste citoyen et la formation à laquelle il est rattaché, devront, dans la mesure du possible, mettre en cohérence les missions attendues avec les compétences professionnelles ou spécifiques du réserviste citoyen.

À cet égard, un effort particulier sera conduit pour attirer vers la réserve citoyenne des personnes disposant d\'une compétence utile aux forces armées et formations rattachées afin d\'améliorer leur contribution aux activités des unités. Ces compétences sont à rechercher dans les domaines duaux, pour lesquels les armées n\'ont pas l\'exclusivité du savoir-faire et où la plus-value de réservistes issus de la société civile est potentiellement forte.

Afin d\'assurer la compatibilité avec les règles de concurrence des missions confiées au réserviste citoyen qui est employé au sein d\'une entreprise susceptible de conclure des contrats avec le ministère de la défense, l\'autorité militaire d\'emploi recueille de celui-ci une attestation permettant de s\'assurer qu\'il ne communiquera à son employeur aucune information qui serait susceptible de fausser le jeu de la concurrence. Cette attestation comportera les engagements suivant du réserviste citoyen :

  • il ne participera pas à une procédure de marché public lancée par le ministère de la défense, pour une affaire dont il a eu à connaître dans l\'exercice de ses fonctions de réserviste ; plus généralement, il ne communiquera à la société qui l\'emploie aucune information de nature à fausser le jeu de la concurrence ou à méconnaître les grands principes de la commande publique ;
  • il s\'abstiendra d\'intervenir, à l\'occasion de l\'exercice de ses fonctions de réserviste, dans l\'exécution d\'un marché public du ministère de la défense dont l\'entreprise qui l\'emploie est titulaire.

1.5. Relais avec la société civile.

La réserve citoyenne peut servir de relais à certaines actions non opérationnelles des forces armées et formations rattachées en interface avec la société civile. À titre d\'exemple, selon leur positionnement professionnel, ils peuvent aider au recrutement de jeunes français au sein de l\'institution militaire ou faciliter la reconversion de militaires. Ils contribuent ainsi à renforcer le lien entre la société française et ses « forces armées ».

2. ORGANISATION.

2.1. Au niveau central.

2.1.1. Coordonnateur de la réserve citoyenne.

Le secrétaire général du conseil supérieur de la réserve militaire (CSRM) est le coordonnateur de la réserve citoyenne auprès du ministre de la défense et du ministre de l\'intérieur en ce qui concerne la gendarmerie nationale. Il est un interlocuteur privilégié des responsables des forces armées et formations rattachées en charge de la réserve citoyenne. Pour une plus grande cohérence de la politique dans ce domaine, il peut être consulté sur les textes relatifs à la réserve citoyenne.

Sans se substituer aux autorités d\'emploi et selon les principes énoncés supra, il assure les tâches suivantes :

  • à partir d\'une base de compétence élaborée avec les employeurs militaires, il a la connaissance du spectre des compétences détenues par les employeurs à travers leur réserve citoyenne et de la répartition sociétale des effectifs ;
  • il transmet, annuellement et ponctuellement, aux autorités militaires d\'emploi, les thèmes d\'intérêt qui peuvent être confiés à des réservistes citoyens (ou à des réseaux de réservistes citoyens) et, en particulier ceux qui intéressent le niveau ministériel ;
  • sur demande du ministère de la défense, il constitue, par l\'intermédiaire des employeurs militaires, un réseau de réservistes citoyens.

Il coopère avec les responsables du ministère de la défense impliqués :

  • dans la promotion de l\'esprit de défense (IHEDN, etc.) pour coordonner les actions menées ;
  • dans les politiques de jeunesse [commission armées-jeunesse (CAJ), délégué ministériel à la jeunesse et à l\'égalité des chances (DMJEC), direction de la mémoire, du patrimoine et des archives (DMPA), direction du service national (DSN), etc.] et ceux de l\'éducation nationale, de l\'enseignement agricole et l\'enseignement supérieur et de la recherche pour favoriser l\'action de la réserve citoyenne au profit de la jeunesse.

Il intègre dans le rapport annuel sur l\'état de la réserve militaire, préparé par le CSRM, un chapitre dédié à la réserve citoyenne (effectifs, répartition, bilan de l\'activité, etc.) et dresse un état des lieux de la réserve citoyenne lors des assemblées plénières du CSRM.

2.1.2. Armées, directions générales et services.

Les forces armées et formations rattachées sont responsables du recrutement des réservistes citoyens, du cadre général de leurs activités (lettre de mission) et de leur rattachement à une autorité militaire. Il leur revient de décliner la politique définie dans la présente directive en l\'adaptant à leurs besoins propres et à leurs spécificités.

2.2. Aux niveaux zonal, régional et départemental.

Chaque réserviste citoyen, recruté par une force armée ou formation rattachée à une armée, est employé dans le cadre de sa lettre de mission. Toutefois, la notion de proximité est essentielle pour exercer efficacement le rayonnement des « forces armées » dans la Nation et la diffusion de l\'esprit de défense auprès de nos concitoyens. À ce titre, les autorités militaires territoriales tiennent une place importante dans leur sélection et leur animation.

En application des instructions qui leur sont adressées, les officiers généraux de zones de défense et de sécurité (OGZDS) concourent de façon directe ou iirecte au lien entre la société civile et les armées (3). À cet effet, ils s\'appuient notamment sur les réseaux de réservistes citoyens constitués par les délégués militaires départementaux dont ils coordonnent les actions. En tant que de besoin, les OGZDS peuvent solliciter les autorités militaires et, par leur truchement, les réservistes citoyens implantés dans leur zone de compétence afin d\'optimiser et de renforcer l\'impact des activités de rayonnement en s\'adossant sur cette ressource comme relais d\'information vers les principaux acteurs locaux (politiques, économiques, éducatifs, etc.).

En application des instructions des commandants pour la gendarmerie des zones de défense et de sécurité, les commandants de groupement de gendarmerie départementale coordonnent ce qui relève de l\'activité de rayonnement dans le département en s\'appuyant sur les réservistes citoyens du département. Ainsi, s\'attachent-ils à constituer un vivier de réservistes citoyens adaptés à leurs besoins et l\'animent localement en s\'appuyant sur cette ressource comme relais d\'information vers les acteurs locaux pertinents.

Pour la diffusion de l\'esprit de défense mais aussi la contribution au recrutement des militaires d\'active et de réserve, ces autorités militaires locales favoriseront les actions des réservistes citoyens vers les jeunes. Ils les associeront autant que possible aux initiatives locales de la CAJ, de la DSN et du plan égalité des chances (PEC) ; ils pourront les inciter à occuper un poste de réserviste local à la jeunesse et à la citoyenneté (RLJC).

2.3. À l'étranger.

Les représentations militaires françaises favoriseront le développement de la réserve citoyenne à l\'étranger et coopèreront directement avec les échelons centraux pour le recrutement des candidats implantés dans leur pays de résidence.

Elles animent la réserve citoyenne en leur dispensant les informations de nature à concourir au rayonnement de la défense française à l\'étranger.


3. Label « partenaire de la réserve citoyenne ».

Les associations de réservistes, d\'anciens militaires, ainsi que celles dont les activités contribuent à la promotion de l\'esprit de défense, peuvent se voir attribuer la qualité de « partenaire de la réserve citoyenne » pour une durée de trois ans, renouvelable.

Ce partenariat permet à ces associations d\'être parties prenantes des préconisations annuelles élaborées par le coordonnateur de la réserve citoyenne. Il donne une plus grande cohérence aux actions ministérielles.

L\'attribution de la qualité de partenaire de la réserve citoyenne, délivrée par arrêté du ministre de la défense publié au Journal Officiel de la République française, est subordonnée à l\'agrément de la candidature par le secrétaire général du conseil supérieur de la réserve militaire et à la signature par le représentant légal de l\'association d\'une charte d\'adhésion aux principes et aux missions de la réserve citoyenne et d\'engagement à des actions concrètes en faveur de la réserve citoyenne.

4. DISPOSITIONS DIVERSES.

L\'instruction n° 459/DEF/CAB/CRSM/SP du 27 juin 2008 relative à la réserve citoyenne est abrogée.

La présente directive sera publiée au Bulletin officiel des armées.

Le ministre de la défense,

Jean-Yves LE DRIAN.

 

Le ministre de l'intérieur,

Manuel VALLS.