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INSTRUCTION INTERMINISTÉRIELLE D'APPLICATION DE L'ORDONNANCE N° 45-2028 du 31 août 1945 relative aux avantages de démobilisation accordés à certains membres des forces françaises libres.

Du 18 septembre 1945
NOR

1. Contenu

La présente instruction a pour objet de préciser les modalités d'application des dispositions fixées par l' ordonnance du 31 août 1945 .

2. Militaires appartenant aux unités combattantes

Sont bénéficiaires tous les militaires des armées de terre, de mer et de l'air, qu'il s'agisse du personnel déjà mobilisé ou du personnel maintenu sous les drapeaux comme engagé pour la durée de la guerre ou des réservistes qui seront ultérieurement démobilisés (à l'exclusion des officiers généraux et supérieurs et assimilés et sous réserve des exceptions précisées ci-dessous à l'article 3) :

  • a).  Le grade à prendre en considération est le grade détenu à titre définitif ou temporaire à la date du départ en congé ;

  • b).  Il ne sera, en aucun cas, tenu compte du grade détenu à titre fictif.

Les bénéficiaires de l'ordonnance comprennent les deux catégories de militaires suivantes :

  • 1. Ceux qui ont appartenu aux forces françaises libres avant le 8 novembre 1942 et qui y ont servi avant le 6 juin 1944 dans une unité combattante pendant une période minimum de trois mois ;

  • 2. Ceux qui, entre le 8 novembre 1942 et le 6 juin 1944, se trouvant sur le territoire métropolitain, ont volontairement rallié l'Afrique du Nord ou la Grande-Bretagne et qui ont servi, entre ces deux dates, dans une unité combattante pendant une période minimum de trois mois.

La liste des unités combattantes relative à l'application de ladite ordonnance doit être incessamment fixée, pour chacune des trois armées de terre, de mer et de l'air, par décision du ministre intéressé. Elle sera publiée dans la presse (1).

3. Cas du personnel des services spéciaux (2)

En ce qui concerne les services spéciaux, le bénéfice des dispositions de l' ordonnance du 31 août 1945 s'applique aux agents énumérés ci-après :

  • a).  Agents engagés sous le régime du décret 221 du 11 avril 1942 , P 1 (3) ;

  • b).  Agents engagés sous le régime du décret no 366 du 25 juillet 1942, P 2 (4) ;

Les agents de la 1re catégorie sont considérés comme remplissant les conditions imposées de séjour dans une unité combattante, sous réserve qu'ils aient accompli au moins une mission en France occupée ou dans les territoires ennemis.

Les agents de la 2e catégorie sont considérés comme ayant appartenu à une unité combattante s'ils justifient avoir accompli au moins un acte de sabotage.

4. Avantages accordés aux bénéficiaires de l'ordonnance

  A. Exceptions au bénéfice du congé.

Ce congé est refusé aux agents des services publics tels qu'ils sont définis à l'article 15 de l'ordonnance du 11 mai 1945, c'est-à-dire aux personnels qui ont pris du service dans les administrations de l'État, des départements, des communes de l'Algérie, des territoires relevant de l'autorité du ministre des colonies et des cadres français du personnel local des territoires relevant du ministre des affaires étrangères ainsi que des établissements publics relevant des collectivités visées ci-dessus, des services exploités en régie, concédés ou affermés de ces mêmes collectivités ainsi que des entreprises ou établissements titulaires de privilèges ou de monopoles concédés par celles-ci.

Il faut entendre également que sont exclus du bénéfice de l'ordonnance 01/01/1999 les militaires de carrière qui sont maintenus au service par contrat.

L'objet de cette mesure de discrimination est de réserver le bénéfice du congé à ceux qui n'ont pas la garantie de retrouver immédiatement avec leur emploi dans un service public leurs ressources habituelles du temps de paix.

  B. Congé avec solde.

Les militaires de la 1re catégorie définie à l'article 1er ont droit à un congé d'une durée égale à :

  • un mois par semestre ou fraction de semestre de présence sous les drapeaux antérieurement au 8 novembre 1942 ;

  • deux mois pour la période s'étendant du 8 novembre 1942 au 6 juin 1944.

La durée du congé ne peut être inférieure à trois mois ni supérieure à six mois.

Les militaires de la 2e catégorie ont droit à l'attribution d'un congé d'une durée de quinze jours par semestre ou fraction de semestre de présence sous les drapeaux antérieurement au 6 juin 1944, ce congé ayant une durée minimum d'un mois et maximum de deux mois.

Le bénéfice de ce congé s'ajoute, le cas échéant, à celui des congés ou permissions qui auront pu être accordés aux bénéficiaires de l'ordonnance au moment de leur renvoi effectif dans leurs foyers. Il se cumule également avec la prime de démobilisation de 1 000 F.

Le décompte de la solde de congé est précisé en annexe I.

Lorsque l'appréciation exacte des droits à la solde et aux indemnités, en fonction de l'ancienneté ou de la situation de famille, nécessitera des délais, il sera procédé au payement immédiat d'une avance forfaitaire, applicable à la totalité de la durée du congé, et calculée sur les bases suivantes :

Officiers subalternes

4 000 F par mois

Aspirant, adjudant-chef, maître principal, adjudant, premier maître et assimilés

3 000 F par mois

Sergent-major, maître, sergent-chef, second maître de 1re classe, sergent, second maître de 2e classe et assimilés

2 400 F par mois

Caporal-chef, quartier-maître de 1re classe, caporal, quartier-maître de 2e classe, soldat, matelot et assimilés

2 000 F par mois

 

Aucune déduction pour impôt ne sera effectuée sur cette avance.

  C. Habillement.

Tous les militaires démobilisés sont déjà autorisés :

  • a).  A conserver en toute propriété : un caleçon, une chemise, un mouchoir, une paire de chaussettes et une paire de brodequins pour les militaires des armées de terre et de l'air, le sac dont ils ont la propriété dans la marine ;

  • b).  A n'effectuer le reversement des effets militaires qui leur sont laissés pour rejoindre leur foyer qu'au moment où ils auront pu se procurer des vêtements civils.

Les bénéficiaires de l'ordonnance du 1er janvier 1999 sont, en outre, susceptibles d'obtenir une collection d'habillements civils ou, à défaut, un bon leur permettant d'acquérir ces effets dans la limite d'un maximum de 3 000 F.

Toutefois, la délivrance de la collection d'habillements civils est subordonnée à l'existence de ces collections et la remise du bon ne peut être avantageuse qu'autant que ce bon puisse être honoré dans le commerce. Les bons ne pourront donc être remis qu'aux démobilisés retirés sur un territoire français où ce bon puisse être validé.

Quand les intéressés n'auront pu recevoir en nature le costume civil, ils pourront prétendre, sur décision de la commission, au payement d'une indemnité représentative de 3 000 F payable également par imputation provisoire sur les chapitres habituels de solde du budget normal, à charge de réimputation au compte spécial.

Des vestiaires spéciaux pourront être organisés pour délivrer l'habillement prévu et régler les cas les plus urgents.

5. Commission de vérification

L'octroi du congé prévu par l'ordonnance est prérogative ministérielle.

A cet effet, les ministres de la guerre, de l'air, de la marine et, éventuellement, de la marine marchande, des colonies, exercent leur pouvoir de décision au moyen d'une commission interministérielle de vérification créée pour l'examen des demandes formulées par les ayants droit et composée d'officiers des trois armées choisis de préférence parmi ceux qui ont appartenu aux forces françaises libres.

La composition de cette commission figure en annexe à la présente instruction (5).

6. Questionnaire à remplir par les ayants droit.

Les bénéficiaires de l'ordonnance appartenant à l'armée de terre doivent adresser leur demande :

  • au CAT correspondant au lieu de leur résidence pour les militaires se trouvant dans la métropole ou en Afrique du Nord ;

  • à l'intendance la plus proche de leur domicile pour les militaires se trouvant aux colonies ou au Levant ;

  • à l'agence consulaire la plus proche de leur domicile pour les militaires résidant à l'étranger.

Les bénéficiaires de l'ordonnance appartenant aux armées de mer et de l'air adressent leur demande aux organes similaires relevant de leur département (région maritime, région aérienne, SLOM).

Au reçu de toute demande, l'organe désigné ci-dessus adresse aux intéressés un exemplaire du questionnaire (6). Les ayants droit le renvoient après l'avoir dûment rempli et l'accompagnent de toutes pièces justificatives en leur possession (certificat de cessation de payement essentiellement).

Le dossier ainsi constitué est transmis à la commission centrale dont le siège est établi à Paris, 2, avenue de Saxe (VII) (7).

7. Vérification et paiement.

La commission vérifie, après enquête s'il y a lieu, que le requérant entre (ou n'entre pas) dans le champ d'application de l' ordonnance du 31 août 1945 et fixe la durée du congé avec solde accordé. Elle indique notamment dans sa décision, en vue d'alléger la tâche des organes payeurs, tous les éléments permettant de déterminer rapidement les droits à solde de l'intéressé (grade, échelon, situation de famille…). L'original de cette décision est adressé directement à l'intéressé.

Copie de cette décision accompagnée du questionnaire est adressée à l'organe payeur qui fait suivre au bureau de recrutement de l'intéressé pour inscription sur les pièces matriculaires. Les organes payants sont ceux définis à l'article 5 ci-dessus.

La commission fixe également le droit et la priorité à accorder à la délivrance de l'habillement prévue par l'ordonnance.

Si l'organe payeur rencontre des difficultés pour déterminer le droit à certaines allocations basées sur la situation de famille, il doit néanmoins procéder à un premier paiement correspondant aux droits à la solde déjà connus, en appliquant le tarif forfaitaire donné à l'article 3, paragraphe B, le parfait paiement étant réglé ultérieurement.

Aucun retard ne saurait être admis à propos de ces paiements qui, par leur caractère alimentaire, devront toujours être effectués en priorité absolue, notamment en ce qui concerne le règlement de l'avance forfaitaire prévue à l'article 3.

8. Dispositions diverses.

Le montant de la solde payée pendant la durée du congé est soumis à l'impôt dans les conditions habituelles.

Si le militaire bénéficiaire des dispositions de l' ordonnance du 31 août 1945 contracte un engagement ou un rengagement avant l'expiration de ce délai, il devra reverser à l'Etat les sommes qu'il a perçues pour la période restant à courir.

Les dépenses résultant des dispositions ci-dessus seront imputées provisoirement sur les chapitres habituels de solde du budget normal. Ils donneront lieu à l'établissement de documents liquidatifs spéciaux mentionnant, à l'encre rouge, qu'il s'agit de « dépenses remboursables à la charge du compte spécial pour l'application de l' ordonnance 45-2028 du 31 août 1945 ».

Le ministre de la marine,

JACQUINOT.

Le ministre de la guerre,

DIETHELM.

Le ministre de l'air,

TILLON.

Annexe

ANNEXE. Composition de la commission interministérielle de vérification. (1)

Contenu

Un officier général ou supérieur (colonel, commandant l'organe FFL), président.

Un officier de chaque département ministériel, autant que possible FFL.

Un officier représentant la France combattante (DGER).

Un officier de réserve du ministère de la guerre, représentant les évadés.

Un officier, chef du secrétariat (organe FFL).

Six sous-officiers secrétaires (2 guerre, 1 marine, 1 air).

Six soldats secrétaires (2 guerre, 1 marine, 1 air).

Trois sténodactylos (1 par ministère).

Le matériel de bureau nécessaire sera fourni par les ministères intéressés.

308*/04 DEMANDE QUESTIONNAIRE.

Notes

    1Cette commission, dont les participants étaient membres de l'organe central des FFL, a été dissoute (cf. CM 2115/5S/INT du 7 maris 1955 (N.i. BO ; n.i. JO).