CIRCULAIRE INTERMINISTÉRIELLE N° 23/F/55-10-25/56-13 et N° 322/FPapportant certaines précisions sur les modalités d'application de la législation en matière de rappels et de majorations d'ancienneté pour services militaires.
Du 29 novembre 1955NOR
L'application de la législation sur les rappels d'ancienneté pour services militaires et de celle sur les majorations d'ancienneté attribuées au titre de certains services militaires a fait l'objet d'une circulaire 122 /B/4 du 12 novembre 1946 (1) en ce qui concerne les rappels et des circulaire du 11 juin 1954 (BO/G, p. 2360), circulaire du 12 novembre 1954 (BO/G, 1958, p. 2249 ; BO/A, p. 2258) et circulaire du 12 décembre 1954 (n.i. BO ; n.i. JO) en ce qui concerne les majorations. Diverses questions ont été, cependant, soulevées à l'occasion des récentes mesures d'application de ces législations et la présente circulaire a pour objet de leur donner une réponse.
1. Rappels d'ancienneté pour services militaires.
1.1. Conditions d'âge.
En ce qui concerne les militaires des armées de terre et de l'air qui sont régis par les dispositions de la loi du 31 mars 1928 (BO/G, p. 1347 ; BO/M, p. 500) sur le recrutement de l'armée, seuls, en principe, les services rendus à partir de l'âge de 18 ans sont susceptibles d'être rappelés pour l'avancement et, le cas échéant, de donner lieu à l'octroi de majorations d'ancienneté.
Cependant, l'article 65 de la loi du 31 mars 1928 autorise le rappel des services effectués à compter de l'âge de 17 ans pour les engagés volontaires en cas de guerre continentale. Tel est le cas, pendant la période 1939-1945, des engagés volontaires pour les campagnes contre les puissances de l'Axe et des combattants de la résistance.
En revanche, les engagements dans l'armée de mer peuvent être souscrits, en vertu de l'article 7 de la loi du 13 décembre 1932 sur le recrutement de l'armée de mer, à partir de l'âge de 17 ans, que ce soit en temps de paix ou en temps de guerre. En conséquence, les services effectués après 17 ans dans cette arme donnent droit aux rappels et majorations d'ancienneté.
1.2. Services accomplis en Afrique du nord postérieurement au 1 er août 1940 par certains militaires des réserves maintenus ou rappelés en situation d'activité.
La circulaire 122 /B/4 du 12 novembre 1946 prévoit dans son titre II que les services militaires accomplis au-delà de la durée légale au cours de la guerre 1939-1945 par les engagés, rengagés et militaires de carrière ne peuvent donner lieu à rappels d'ancienneté lorsque les intéressés deviennent fonctionnaires civils que dans la mesure où ils sont antérieurs au 1er août 1940. Cette date n'est bien entendu opposable qu'aux militaires qui relevaient du gouvernement de Vichy et ne concerne donc ni les militaires retenus en captivité ni ceux qui ont rejoint dès l'origine les forces françaises libres.
Dans ces conditions, les militaires en service en Afrique du Nord, postérieurement au 1er août 1940, ne peuvent voir, aux termes de la circulaire susvisée, leurs services rappelés qu'à compter du 8 novembre 1942, date du débarquement allié en Afrique du Nord.
Ces dispositions nous paraissent cependant devoir être modifiées pour tenir compte de la situation de certains militaires des réserves qui ont été maintenus ou rappelés en situation d'activité pour servir en Afrique du Nord postérieurement au 1er août 1940.
Nous ne visons pas ainsi la situation des militaires de la métropole qui sont demeurés volontairement sous les drapeaux alors qu'ils étaient dégagés de toutes obligations légales. Mais un certain nombre de réservistes d'Afrique du Nord ont été soit maintenus obligatoirement, soit même rappelés sous les drapeaux en application d'une décision ministérielle prise en vertu des dispositions de l'article 40 de la loi du 31 mars 1928. Il s'agit donc bien d'un temps de service obligatoire qui doit donner lieu à rappel d'ancienneté.
Nous avons décidé de modifier en conséquence les dispositions de la circulaire 122 /B/4 du 12 novembre 1946 afin de permettre ce rappel. Il reste bien entendu que ces services, s'ils sont rappelables, ne peuvent donner lieu à majoration puisqu'ils ont été accomplis sous l'autorité du gouvernement de Vichy.
1.3. Déportés et internés politiques.
L'article 20 de la loi no 55-356 du 3 avril 1955 (BO/G, p. 2225) a introduit dans le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre un article L. 295 ainsi conçu : « En ce qui concerne les internés et déportés politiques, le temps passé en détention, internement ou déportation, dans les conditions prévues aux articles L. 286 à L. 289, est pris en considération dans le calcul de l'ancienneté de service exigé pour la retraite, ainsi que pour l'avancement lorsqu'il n'en a pas été tenu compte au titre d'autres dispositions. »
Le temps dont il s'agit sera donc pris en considération dans les mêmes conditions que les services militaires en temps de paix. Pour l'application de cette disposition législative, il conviendra d'appliquer les instructions contenues dans la circulaire du 19 avril 1955 (BO/A, p. 746) prise sous les timbres du secrétaire d'Etat à la présidence du conseil (direction de la fonction publique no 306/F/8), du secrétaire d'Etat aux finances et aux affaires économiques (direction du budget no 23/F/55-04-19/20/4), du ministre des anciens combattants et victimes de la guerre (no 509/AG/4/B), qui concerne les modalités du rappel des périodes de réfractariat et du service du travail obligatoire.
La carte de déporté et interné politique est le document que les intéressés doivent produire pour prétendre au rappel de la période passée en détention, internement ou déportation. Cette carte porte mention de la durée de cette période.
Il est rappelé enfin que conformément au principe de non-rétroactivité des lois, les reconstitutions de carrière et les rappels pécuniaires auxquels pourra donner lieu l'application de l'article 20 de la loi du 3 avril 1955 ne doivent être effectués qu'à compter du 5 avril 1955, date d'effet de la loi.
2. Majorations d'ancienneté pour services de guerre.
2.1. Services susceptibles de donner lieu à majorations.
Les articles 2, 3 et 4 du décret modifié du 28 janvier 1954 (2) énumèrent les services et les périodes qui sont susceptibles d'ouvrir droit à majorations.
Cependant, en ce qui concerne les dates limites applicables à chacune des catégorie d'intéressés, diverses précisions nous semblent devoir être apportées :
1. L'article 3 a) du décret du 28 janvier 1954 fixe au 25 juin 1940 la date limite applicable aux militaires démobilisés après l'armistice et qui n'ont pas servi sous les ordres du comité national français de Londres, du comité français de la libération nationale à Alger, ou du gouvernement provisoire de la République française.
Cette date a été choisie en tenant compte du fait qu'après l'armistice de 1940, il n'y avait plus, dans la très grande majorité des cas, d'unités combattantes.
Il convient de remarquer toutefois, que certaines unités du secteur fortifié de l'est de la France ont continué le combat au-delà du 25 juin 1940. L'autorité militaire a d'ailleurs accordé le bénéfice de la campagne double aux militaires de ces unités au-delà du 25 juin 1940 et jusqu'à la date de cessation effective de combat.
Il nous est donc apparu anormal de ne pas suivre sur ce point les indications portées sur les états signalétiques et des services. Aussi avons-nous décidé de considérer, pour des motifs d'équité, que les militaires dont il s'agit ont droit au bénéfice des majorations d'ancienneté pour les campagnes accomplies au-delà du 25 juin 1940 et jusqu'à la date où ils ont déposé les armes, date qui se situe dans la grande majorité des cas au 1er juillet 1940.
2. L'article 3 b) du décret du 28 janvier 1954 vise les organismes sous les ordres desquels les militaires doivent avoir servi pour prétendre postérieurement au 25 juin 1940 au bénéfice des majorations d'ancienneté.
Il convient de rappeler qu'avant l'organisation, par ordonnance du 3 juin 1943, du comité français de la libération nationale des autorités avaient, en Afrique française, mené le combat contre les puissances de l'Axe, notamment en Tunisie. Il s'agit, d'une part, du haut commissariat de France en Afrique française, organisme créé à Alger par ordonnance du 16 novembre 1942 et, d'autre part, du commandement en chef français civil et militaire, organisme créé par ordonnance du 5 février 1943 pour se substituer au précédent.
Il va de soi que les services qui ont été effectués sous les ordres des deux précédentes autorités ouvrent droit au bénéfice des majorations d'ancienneté au même titre que ceux qui ont été rendus sous l'autorité du comité français de la libération nationale.
3. Les campagnes effectuées outre-mer, postérieurement au 25 juin 1940, n'ouvrent droit au bénéfice des majorations d'ancienneté qu'à compter de la date de rentrée en guerre contre les puissances de l'Axe de chaque territoire considéré. Afin de faciliter le travail des services du personnel un tableau est joint en annexe à la présente circulaire portant la date de ralliement de chacun des territoires d'outre-mer à la France libre.
4. L'article 4 du décret du 28 janvier 1954 précise les droits des agents qui ont été blessés ou qui ont contracté une maladie dans une unité combattante. Les intéressés ont droit à une majoration de 5/10 pour les périodes effectives d'hospitalisation ou de convalescence antérieures à la date de la cessation légale des hostilités, sous réserve de la situation particulière des titulaires d'une pension d'invalidité égale ou supérieure à 40 p. 100 qui bénéficient en toute hypothèse d'une majoration égale à celle accordée aux plus favorisés des combattants non mutilés et qui, en outre, peuvent, le cas échéant, faire prendre en compte les périodes d'hospitalisation et de convalescence postérieures à la date du « cessez-le-feu ».
Il convient de préciser que le bénéfice des majorations d'ancienneté, qui est lié à l'existence d'une hospitalisation ou d'un congé de convalescence, ne peut être accordé que lorsque la preuve en est fournie par l'intéressé par la production de billets d'hôpital ou de certificats de congé de convalescence. C'est ainsi que l'article 4 susvisé ne peut conduire à accorder aux intéressés un avantage forfaitaire, tel celui qui permet, en matière de pension, de leur octroyer le bénéfice de campagne double pendant l'année qui suit la blessure. Ainsi, il n'y a pas lieu de suivre sur ce point les indications portées sur les états signalétiques et des services et il est nécessaire de demander aux intéressés les pièces justificatives de l'hospitalisation ou de la convalescence pour leur accorder les majorations afférentes aux seules périodes indiquées sur ces pièces.
5. Le ministre de la défense nationale et des forces armées vient de mettre fin aux campagnes de guerre, en Indochine aux dates suivantes :
a). Campagne double pour opérations de guerre, le 11 août 1954, date du « cessez-le-feu » ;
b). Campagne simple sur pied de guerre, le 31 mai 1955, date de l'évacuation de Haïphong.
En ce qui concerne la Corée, le bénéfice de campagne a pris fin à la date du 27 juillet 1953.
Les majorations d'ancienneté étant liées à l'existence d'opérations de guerre pouvant donner lieu à l'octroi du bénéfice de la campagne double, il ne sera plus possible d'en accorder au titre de la campagne d'Indochine après le 11 août 1954, sauf dans le cas des blessés et malades où elles pourront l'être jusqu'au 31 mai 1955, cette date constituant l'homologue de celle du 1er juin 1946 pour la campagne 1939-1945.
Cependant, en ce qui concerne les prisonniers, compte tenu des conditions particulières de la campagne d'Indochine, nous avons décidé que les majorations d'ancienneté de 4/10 du temps de captivité pourront être accordées, le cas échéant, jusqu'au 31 mai 1955.
2.2. Majorations d'ancienneté au titre de la loi du 26 septembre 1951.
L'article 41 de la loi no 55-366 du 3 avril 1955 (BO/G, p. 1973 ; BO/A, p. 588 ; BOEM/A 25, p. 1687) ayant ouvert un nouveau délai de trois mois, à compter de la date de promulgation de la loi pour permettre aux fonctionnaires de déposer les demandes de majorations instituées par l'article premier de la loi 51-1124 du 26 septembre 1951 (BO/G, p. 2994 ; BO/A p. 3179), les administrations ont reçu un certain nombre de demandes de l'espèce qui devront être instruites comme précédemment, c'est-à-dire être soumises à l'avis de la commission centrale compétente pour apprécier les titres de résistance.
Une fois précisées les périodes donnant droit aux majorations d'ancienneté, les administrations auront à déterminer dans les conditions prévues par la circulaire du 11 juin 1954 les reconstitutions de carrière auxquelles donnera lieu l'application de ces majorations.
La loi précisant que les majorations prennent effet du 1er janvier 1955, les reconstitutions de carrière devront être effectuées à la même date et les rappels pécuniaires qui en résulteraient seront donc limités à l'année en cours.
Conformément à la circulaire no 11-3/B/4 du 12 février 1954 (n.i. BO), les difficultés particulières d'application devront être réglées par consultations des contrôleurs des dépenses engagées, sauf dans les cas où elles poseront des problèmes d'interprétation générale dont devront être saisis le secrétaire d'Etat aux finances et aux affaires économiques sous le timbre de la direction du budget (6e bureau) et le secrétaire d'Etat à la présidence du conseil sous le timbre de la direction de la fonction publique.
Le ministre des finances, et des affaires économiques,
PFLIMLIN.
Le ministre de la défense nationale et des forces armées,
Pierre BILLOTTE.
Le ministre des anciens combattants et victimes de guerre,
Vincent BADIE.
Le secrétaire d'Etat aux finances et aux affaires économiques,
Gilbert JULES.
Le secrétaire d'Etat à la présidence du conseil,
Jean MEDECIN.
Annexe
ANNEXE I. ANNEXE
portant la date de rentrée des territoires non métropolitains dans la guerre contre les forces de l'Axe et destiné à compléter les instructions sur le bénéfice de campagne, pour l'application de l'article 6 de la loi no 52-843 du 19 juillet 1952.
Territoires | Dates |
---|---|
Afrique française du Nord | 14 novembre 1942 |
Afrique occidentale française et Togo | 25 novembre 1942 |
Afrique équatoriale française : |
|
Tchad | 26 août 1940 |
Congo | 28 août 1940 |
Oubangui-Chari | 28 août 1940 |
Gabon | 10 novembre 1940 |
Cameroun | 27 août 1940 |
Côte des Somalis | 28 décembre 1942 |
Madagascar : |
|
Région de Diégo-Suarez | 5 mai 1942 |
Tananarive et autres régions | 16 novembre 1942 |
La Réunion | 28 novembre 1942 |
Guyane | 17 mars 1943 |
Saint-Pierre-et-Miquelon | 23 décembre 1941 |
Antilles | 14 juillet 1943 |
États du Levant | 11 juillet 1941 |
Indochine | 9 mars 1945 |
Possessions de Chine | 9 mars 1945 |
Comptoirs des Indes | 9 septembre 1940 |
Nouvelle-Calédonie | 19 septembre 1940 |
Nouvelles-Hébrides | 22 juillet 1940 |
Océanie | 2 septembre 1940 |
Îles Wallis et Futuna | 27 mai 1942 |