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Archivé ÉTAT-MAJOR DE LA MARINE : division « plans » ; bureau « organisation-réglementation-administration »

INSTRUCTION N° 774/DEF/EMM/PL/ORA relative à l'organisation et au fonctionnement des conseils d'enquête concernant les militaires de la marine.

Du 19 décembre 2002
NOR D E F B 0 2 5 2 8 7 0 J

Autre(s) version(s) :

 

Préambule.

Le conseil d'enquête est un organisme administratif prévu par la loi et le décret cités en références. Seules lui sont applicables les règles propres au droit disciplinaire. Il n'est pas une juridiction. Il est consulté dans trois cas de figure :

  • les motifs justifiant le prononcé de sanctions statutaires ;

  • les motifs justifiant la suspension de droit à l'obtention ou à la jouissance de la pension de retraite ;

  • les motifs liés à l'aptitude physique du militaire.

L'avis du conseil d'enquête, obligatoirement recueilli, limite ou aide l'autorité compétente dans sa prise de décision. Cette autorité prononce alors, s'il y a lieu, une sanction adaptée au fait ou à la situation ayant donné lieu à l'envoi devant le conseil.

Est concerné par le conseil d'enquête, l'ensemble du personnel militaire de la marine dans toutes les positions ou situations statutaires (sauf position hors cadres, service détaché pour fonctions électives), dès lors qu'il est soumis au statut général des militaires. Sont également soumis au conseil d'enquête les militaires rendus à la vie civile et bénéficiaires des dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite, uniquement pour l'application de l'article L. 59 dudit code.

L'autorité compétente (le ministre de la défense ou une autorité militaire figurant dans une liste établie par arrêté du ministre de la défense) ordonne l'envoi du militaire concerné devant un conseil d'enquête au regard du rapport qui lui a été soumis. Ce conseil n'est composé que de militaires de la marine, sauf en cas de comparants multiples, si un ou plusieurs d'entre eux ne sont pas militaires de la marine.

Pour conserver à la sanction son caractère exemplaire, la procédure du conseil d'enquête doit être mise en œuvre dans les délais les plus brefs, suivant la faute constatée.

En conséquence, l'attention de l'ensemble des personnels participant à la constitution et au déroulement des conseils d'enquête doit porter sur le strict respect des procédures, l'institution du conseil d'enquête constituant une garantie fondamentale de l'état du militaire.

Il importe donc de respecter cette réglementation qui tend à garantir au mieux les droits de la défense sous peine de voir, en cas d'irrégularités substantielles et de recours contentieux, la décision intervenue annulée. La présente instruction a pour objet de préciser les modalités d'organisation et de fonctionnement des conseils d'enquête définies par la loi et le décret cités en références.

Dans certains cas, une gestion de proximité des dossiers sera nécessaire. Il appartiendra donc aux bureaux « justice et discipline » locaux d'apporter leur capacité d'expertise et de conseil local aux présidents de conseils d'enquête et aux officiers rapporteurs.

1. Motifs d'envoi devant un conseil d'enquête.

1.1. Les fautes justifiant une sanction statutaire.

Ces motifs sont énumérés à l'article 48 du statut général des militaires et dans les décrets particuliers relatifs aux catégories de militaires autres que les militaires de carrière :

  • insuffisance professionnelle : inaptitude générale ou incapacité notoire à occuper un emploi de son grade ;

  • inconduite habituelle : les manquements répétés qui portent atteinte à la réputation et à l'autorité personnelles ;

  • faute grave dans le service : tout manquement, négligence, irrégularité ou agissements graves contraires aux règles de fonctionnement du service ayant entraîné ou non des conséquences dommageables ;

  • faute grave contre la discipline : le non respect caractérisé des règles de la discipline militaire ;

  • faute contre l'honneur : tout manquement grave ou répété à ses devoirs d'homme, de citoyen ou de représentant de la force publique pouvant porter atteinte à des intérêts matériels ou moraux, à la probité ou aux bonnes mœurs.

Lorsqu'une de ces fautes a été commise par du personnel inscrit au tableau d'avancement, et que la sanction infligée est la mise en non activité par retrait d'emploi, la promotion est reportée jusqu'au retour à l'activité.

En revanche, si l'envoi devant le conseil d'enquête est annulé ou si aucune sanction statutaire n'est prononcée, l'intéressé retrouvera ses droits à avancement de façon rétroactive [point 6.2 de l' instruction 80 /DEF/DPMM/2/A du 11 avril 2002 (BOC, p. 2638) relative à l'avancement des officiers mariniers, quartiers-maîtres et matelots, et loi portant statut général des militaires cité en référence].

Condamnation à une peine d'emprisonnement n'entraînant pas de droit à la perte du grade : toute condamnation à une peine d'emprisonnement avec ou sans sursis, devenue définitive, mais autre que celles prévues à l'article 79-2 de la loi portant statut général des militaires citée en référence.

Il est toutefois précisé qu'une condamnation prononcée par une juridiction et qui a fait l'objet d'une dispense d'une inscription au bulletin n2 du casier judiciaire ne peut servir de fondement à l'envoi d'un militaire devant un conseil d'enquête. Cependant, les faits qui ont fondé la condamnation pour lesquels il a été reconnu coupable par la juridiction peuvent servir de motif à cet envoi.

  Remarque.

Les faits reprochés motivant l'envoi devant un conseil d'enquête en vue d'une sanction statutaire peuvent également justifier l'intervention de la mesure administrative de suspension de fonctions prévue à l'article 51 du statut général des militaires. Les conditions d'application de cette mesure, qui ne concerne que les militaires de carrière et les officiers sous contrat, sont fixées par instruction interministérielle (1).

1.2. La faute justifiant la suspension du droit à l'obtention ou à la jouissance de la pension de retraite.

Cette mesure est prévue à l'encontre des militaires radiés d'office des cadres pour avoir été reconnus coupables de détournements de deniers ou de biens publics, de malversations relatives au service ou de démission de fonctions à prix d'argent (art. L. 59 du code des pensions civiles et militaires de retraite). Cette disposition est également applicable pour des faits qui auraient été de nature à entraîner la mise à la retraite d'office, lorsque les faits sont révélés ou qualifiés après la cessation d'activité. Dans ce cas, le conseil d'enquête n'est appelé à donner son avis que sur l'existence et la qualification des faits.

  Remarque.

Dans les cas notamment de destruction volontaire, détournements, faux et falsification, l'attention des destinataires est attirée sur la nécessité, dès lors que les faits le justifient, de procéder sans délai à la réunion d'un conseil d'enquête, en vue d'une sanction statutaire, sans attendre la résiliation d'un lien contractuel ou la mise à la retraite.

Des délais excessifs ne peuvent que nuire à la crédibilité des décisions proposées au commandement comme aux droits du militaire mis en cause.

1.3. L'aptitude physique insuffisante.

Ce motif ne peut être retenu qu'à l'encontre des seuls militaires de carrière ayant acquis droit à pension de retraite à jouissance immédiate. Il peut entraîner la mise à la retraite d'office. Au préalable, la constatation de l'état de santé est successivement faite :

  • par un médecin des armées spécialiste avant l'envoi devant un conseil d'enquête ;

  • par deux experts médicaux désignés par le ministre de la défense [direction centrale du service de santé des armées (DCSSA)] dans le cadre de l'enquête.

2. Finalité du conseil d'enquête.

Le conseil d'enquête a pour but d'émettre un avis sur le type de sanction ou de décision qui doit être prise par l'autorité militaire compétente, au regard des faits qui se sont passés. Sa finalité est donc de permettre que les intérêts de la marine et les droits du militaire soient respectés.

2.1. Les sanctions statutaires.

On distingue :

  • la radiation du tableau d'avancement, pour les militaires de carrière et pour les militaires servant en vertu d'un contrat, tels qu'ils sont définis par l'article 82 et 87 de la loi portant statut général des militaires [réf. a)] ;

  • le retrait d'emploi par mise en non activité, pour les militaires de carrière ;

  • la radiation des cadres par mesure disciplinaire, pour les militaires de carrière ;

  • la résiliation du contrat par mesure disciplinaire, pour les militaires servant en vertu d'un contrat tels qu'ils sont définis par les articles 82 et 98-1 du statut général des militaires ;

  • la résiliation de l'engagement, pour les militaires servant en vertu d'un contrat, tels qu'ils sont définis par l'article 87 du statut général des militaires.

2.2. La sanction de suspension du droit à l'obtention ou à la jouissance de la pension de retraite.

La sanction des fautes énumérées au point 1.2. est la suspension du droit à l'obtention ou à la jouissance de la pension de retraite (art. L. 59 du code des pensions civiles et militaires de retraite).

2.3. La sanction en cas d'aptitude physique insuffisante.

La sanction consistera en la mise à la retraite pour aptitude physique insuffisante des militaires de carrière [art. 70 de la loi portant général des militaires de réf. a)].

3. Catégories de personnel justiciables du conseil d'enquête.

Cette catégorie regroupe les militaires dans toutes les positions ou situations statutaires (sauf position hors cadres, service détaché pour fonctions électives) dans lesquelles ils sont soumis aux obligations du statut général des militaires.

Ils sont justiciables d'un conseil d'enquête, dans les cas où sa consultation est prévue par le statut général des militaires ou par les décrets pris pour son application. Sont concernés (2) :

  • les militaires de carrière ;

  • les militaires servant en vertu d'un contrat et volontaires dans les armées :

    • officiers sous contrat (3) ;

    • officiers servant sous contrat au titre de l'article 98-1 du statut général des militaires ;

    • personnel non officier engagé ;

    • volontaires dans les armées ;

    • aumôniers militaires ;

  • les élèves des écoles militaires de la marine et le personnel suivant un cycle de formation requis pour l'admission dans un corps si les statuts particuliers et les règlements propres à ces cycles et écoles ne prévoient pas un organe analogue (4) ;

  • le personnel militaire de la marine rendu à la vie civile et bénéficiaire des dispositions du code des pensions civiles et militaires de retraite, uniquement pour l'application de l'article L. 59 dudit code.

Les militaires de carrière placés en position de retraite et les militaires servant en vertu d'un contrat et radiés des contrôles de l'activité sont également concernés, lorsqu'ils sont rappelés pour effectuer une période d'activité.

4. Avis émis par le conseil d'enquête.

4.1. La portée des avis émis par le conseil d'enquête.

Le conseil d'enquête constitue un organisme administratif consultatif dont l'avis doit être obligatoirement recueilli, avant que ne soient décidées par l'autorité compétente certaines mesures graves relatives à la situation statutaire des militaires.

L'avis du conseil d'enquête ne lie pas l'autorité compétente pour prononcer la mesure, mais il limite cependant son pouvoir de décision. Lorsque le conseil d'enquête n'a pas émis un avis favorable, les sanctions suivantes ne peuvent pas être prononcées par l'autorité compétente :

  • la radiation définitive des cadres par mesure disciplinaire d'un militaire de carrière ne réunissant pas vingt-cinq ans de services effectifs [art. 29 de la loi portant statut général des militaires, réf. a)] ;

  • la résiliation de l'engagement d'un militaire engagé (5) ;

  • la résiliation du contrat d'un officier sous contrat (6) ;

  • la résiliation du volontariat dans les armées  ;

  • la résiliation du contrat d'un aumônier militaire ne réunissant pas quinze ans de services effectifs (7).

4.2. Les avis liés à une décision de justice.

En application de l'article L. 59 du code des pensions civiles et militaires de retraite, dans le cas où les faits reprochés ont déjà été jugés, l'existence et la qualification des faits, établies par la juridiction saisie, s'imposent au conseil d'enquête réuni pour émettre l'avis requis.

Dans les autres cas, lorsqu'il y a une interférence entre une action disciplinaire et une action pénale, les faits reprochés constituent alors une infraction pénale donnant lieu à des poursuites judiciaires, et le prononcé de sanction statutaire peut être effectué :

  • sans attendre les résultats de l'action publique, si l'autorité militaire compétente l'estime opportun ;

  • après l'intervention d'une décision de justice portant condamnation, acquittement ou non-lieu, lorsqu'elle est devenue définitive et ne conteste pas la matérialité des faits sur laquelle repose l'action disciplinaire.

Dans les cas où aucune sanction pénale n'est prononcée, pour des motifs :

  • soit de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement : la qualification disciplinaire des fautes commises subsiste. Elle peut donc servir de base à l'action disciplinaire fondée sur la matérialité des faits, lesquels ne doivent cependant pas apparaître dans le dossier sous leur qualification pénale ;

  • soit d'amnistie de droit ou par mesure individuelle : pénalement, la matérialité des faits subsiste. Elle est effacée en matière disciplinaire, statutaire et professionnelle, et ne peut servir de justification à l'envoi devant un conseil d'enquête.

En tout état de cause, chaque cas particulier doit être examiné avec le double souci :

  • de la sauvegarde des intérêts de l'institution ;

  • de la sauvegarde des droits légitimes du militaire mis en cause.

5. Modalités d'élaboration de l'ordre d'envoi devant un conseil d'enquête.

5.1. Le rapport et le dossier de l'autorité militaire de premier niveau.

Le déclenchement d'une procédure de conseil d'enquête suppose que l'autorité habilitée pour en décider possède tous les éléments d'appréciation nécessaires : cela implique qu'un rapport administratif soit établi par l'autorité militaire de premier niveau dont relève le marin concerné, à son initiative ou à celle d'une autorité supérieure.

Rédigé dès la découverte des faits reprochés, le rapport de l'autorité militaire de premier niveau :

  • relate les faits et les circonstances qui les ont entourés ;

  • rend compte des résultats de l'enquête, et des mesures prises éventuellement sur le plan administratif (suspension) ;

  • fait connaître, le cas échéant, les procédures en cours sur le plan pénal pour les mêmes faits ;

  • contient, éventuellement, les propositions utiles pour la suite à donner à l'affaire sur le plan statutaire.

Ce document peut être la demande de punition disciplinaire établie lors de la constatation de la faute. Il est complété par :

  • une copie de l'état des services (état signalétique et des services) ;

  • un relevé des punitions ;

  • le relevé des notes des cinq dernières années ;

  • éventuellement, les déclarations et plaintes recueillies ;

  • une copie du contrat d'engagement en cours ;

  • une copie de la (ou des) lettre(s) de mise en garde, en cas d'envoi devant le conseil d'enquête pour inconduite habituelle ;

  • le cas échéant, une copie de la décision judiciaire intervenue, sous réserve qu'elle soit devenue définitive et qu'elle soit inscrite au bulletin n2 du casier judiciaire. En cas de dispense d'inscription au bulletin n2 du casier judiciaire, le simple rappel de la condamnation infligée par une juridiction est à proscrire dans la rédaction du rapport, il sera cependant possible de faire état des faits mentionnés dans la décision judiciaire.

S'il s'agit d'une mise à la retraite d'office pour aptitude physique insuffisante, le rapport détaillé établi est complété par :

  • une copie de l'état des services (état signalétique et des services) ;

  • le relevé des notes des cinq dernières années ;

  • le rapport établi par deux experts médicaux désignés par le ministre de la défense [chef d'état-major de la marine (CEMM)].

5.2. Autorité compétente pour délivrer l'ordre d'envoi.

L'ensemble du dossier établi par l'autorité militaire de premier niveau est transmis à l'autorité compétente pour délivrer l'ordre d'envoi devant un conseil d'enquête :

  • pour les officiers et les officiers mariniers, le CEMM par délégation du ministre de la défense (8) ;

  • pour les quartiers-maîtres et matelots des formations sous leur commandement organique ou direction :

    • les commandants de région maritime ;

    • les commandants d'arrondissement maritime ;

    • les commandants de la marine en un lieu déterminé ;

    • le commandant de la marine à Paris ;

    • les commandants de force maritime indépendant ;

    • les commandants supérieurs dans les départements et territoires d'outre-mer ;

    • le commandant des forces françaises du Cap-Vert ;

    • le commandant des forces françaises stationnées à Djibouti ;

    • les directeurs centraux de service ;

    • le CEMM, pour les autorités ou organismes qui lui sont directement subordonnés.

Une copie de l'ensemble du dossier est adressée à la direction du personnel militaire concernée.

Pour chacune des autorités précitées, la compétence conférée est personnelle.

En cas d'absence ou d'empêchement du titulaire, l'autorité exerçant, par suppléance ou par intérim, le commandement en cause peut signer l'ordre d'envoi, à l'exclusion, en tant que tels, des adjoints ou délégataires éventuels.

En tout état de cause, il est rappelé que le ministre de la défense (CEMM) possède une compétence de principe à l'égard de tous les militaires, quels que soient leur grade et le lieu où les faits justifiant l'envoi sont intervenus.

Une copie de l'ordre d'envoi éventuellement délivrée par les autorités maritimes locales est adressée à la direction du personnel dont relève le militaire de la marine.

5.3. Contenu de l'ordre d'envoi.

Se référer à l'instruction de référence, point 4.3.

5.4. Nomination du rapporteur et notification de l'ordre d'envoi.

5.4.1. Nomination du rapporteur.

Le rapporteur est choisi parmi les officiers de marine ou de la marine :

  • d'un grade supérieur à celui du comparant et non exclu au titre de l'une des incompatibilités suivantes :

    • parent ou allié, jusqu'au quatrième degré inclusivement, du comparant ;

    • ayant émis un avis au cours de l'enquête ;

    • auteur de la plainte ou des comptes rendus sur les faits en cause ;

    • ayant connu l'affaire comme commissaire du gouvernement, juge d'instruction ou membre d'une juridiction des forces armées ou comme officier ou agent de police judiciaire ;

    • ayant fait partie d'un conseil d'enquête appelé à connaître de la même affaire, sauf en cas de pluralité de comparants [article 8 du décret du 22 avril 1974 cité en référence b)] ;

  • ayant, si possible, des connaissances en matière de statuts du personnel militaire ou une compétence en matière administrative.

La nomination du rapporteur fait l'objet d'une décision qui invite également le militaire soumis à l'enquête et son défenseur, s'il en est désigné un, à se tenir à la disposition du rapporteur.

5.4.2. Notifications.

L'ordre d'envoi et la décision désignant le rapporteur sont notifiés en même temps au militaire soumis à l'enquête, qui en accuse réception et déclare par écrit s'il désigne un défenseur de son choix, parmi les militaires de carrière ou servant en vertu d'un contrat qui sont toujours en activité, ou parmi les avocats inscrits au barreau. Ces récépissés et la déclaration de prise ou non d'un défenseur doivent être immédiatement retournés à l'autorité ayant délivré l'ordre d'envoi.

Toutes les notifications prévues par la procédure des conseils d'enquête doivent être faites dans les mêmes conditions, conformément à l' instruction 235 /DEF/DAJ/CX du 01 juillet 1980 (BOC, 1982, p. 3953) modifiée, relative au contentieux, titre II, chapitre II, section II.

La notification des documents ci-dessus est faite par l'intermédiaire de l'autorité militaire de premier niveau dont relève le personnel concerné (voie directe).

Dans les cas où cette procédure n'est pas possible, la notification est faite par lettre recommandée avec accusé de réception, exceptionnellement par la gendarmerie qui en dresse le procès-verbal.

Si le destinataire n'a pu être contacté ou s'il refuse de recevoir les documents notifiés, un compte rendu constatant le fait est établi par les soins de l'autorité chargée de la notification.

Les copies des documents ci-dessus accompagnées de l'ensemble du dossier (rapport de l'autorité militaire de premier niveau et pièces annexes) ayant permis d'aboutir à l'ordre d'envoi sont adressées directement au rapporteur.

5.5. Dispositions particulières applicables aux comparants multiples.

Lorsque plusieurs militaires de la marine sont impliqués dans une même affaire, ils comparaissent impérativement devant un seul conseil d'enquête, quel que soit leur grade ou leur statut, pour les faits connus au jour de la délivrance des ordres d'envoi. Il en est de même si un ou des militaires d'une autre armée ou formation rattachée sont impliqués dans cette même affaire.

Un ordre d'envoi collectif peut être établi, mais cette procédure n'est pas impérative et il peut être établi autant d'ordres d'envoi que de militaires concernés.

L'envoi est ordonné par le ministre de la défense (CEMM) [réf. c)], quel que soit le grade du militaire concerné, sauf lorsque parmi les militaires mis en cause certains n'appartiennent pas à la marine. Dans ce cas, l'envoi est ordonné par le ministre (cabinet).

5.6. Disponibilité du comparant.

Par message, l'autorité ayant délivré l'ordre d'envoi prescrit au commandant de la formation du comparant de soumettre à l'officier rapporteur toute information relative à la disponibilité du militaire concerné (demande de permission, congés de maladie,…).

6. Modalités de composition et de constitution du conseil d'enquête.

6.1. Composition du conseil et établissement des listes.

6.1.1. Autorités chargées de composer le conseil d'enquête.

La détermination de la composition du conseil d'enquête et l'établissement des listes des militaires correspondants, pour chaque membre à désigner, sont effectués par l'autorité ayant ordonné l'envoi (cf. point 5.2 ci-dessus).

6.1.2. Composition du conseil.

La composition du conseil d'enquête doit être déterminée, par l'autorité ayant ordonné l'ordre d'envoi, en fonction du grade et du statut du militaire concerné, conformément aux règles édictées en la matière :

  • soit par les articles 3 et 9 du décret du 22 avril 1974 cité en référence b) ou, en cas de pluralité de comparants, par l'article 24 dudit décret ;

  • soit par les textes particuliers régissant certains corps ou catégories de personnels militaires, notamment les aumôniers [ décret 64-498 du 01 juin 1964 (BO/G, p. 2309, BO/M, p. 2133) modifié, relatif aux ministres du culte attaché aux forces armées].

Dans le cas où une décision individuelle modifiant le grade ou le statut du comparant intervient postérieurement à la constitution du conseil, il y a lieu de modifier en conséquence la composition de celui-ci, le conseil ne pouvant valablement délibérer que si sa composition est en rapport avec le grade et le statut effectivement détenus par l'intéressé à la date de la réunion du conseil d'enquête.

6.1.3. Établissement des listes.

Pour l'établissement de ces listes, il y a lieu, pour l'autorité ayant ordonné l'ordre d'envoi, de retenir les noms de militaires officiers et non officiers :

  • se trouvant en position d'activité, mais non bénéficiaires de l'un des congés relevant de cette position (art. 53 du statut général des militaires) ;

  • remplissant les conditions relatives au corps d'appartenance, au grade et à l'ancienneté dans le grade du comparant telles qu'elles ont été déterminées lors de l'établissement de la composition type du conseil (cf. point 6.1.2 ci-dessus) ;

  • non exclus au titre des incompatibilités prévues à l'article 8 du décret du 22 avril 1974 (cité en référence).

Aucune distinction ne doit être faite entre personnel masculin ou féminin, quel que soit le sexe du comparant ou la faute qu'il a commise.

Ces listes sont signées par l'autorité ayant ordonné l'envoi.

Elles doivent impérativement figurer dans le dossier établi par le président du conseil d'enquête (cf. point 7.2.3.3 ci-dessous).

6.2. Constitution du conseil d'enquête.

Les opérations de constitution du conseil d'enquête sont détaillées dans l'instruction rappelée en référence d). Elles comprennent le tirage au sort, la notification des résultats du tirage, l'exercice du droit de récusation. Elles aboutissent à une décision portant constitution du conseil qui est notifiée au militaire comparant et à son défenseur.

Ces opérations sont effectuées par l'autorité ayant ordonné l'envoi.

Cette compétence est personnelle et les principes énoncés au point 5.2 ci-dessus sont applicables.

Le récépissé de notification de la liste des membres du conseil d'enquête est retourné dans les meilleurs délais à l'autorité ayant ordonné l'envoi.

6.3. Notification de la décision constituant le conseil d'enquête.

Lorsque le droit de récusation a été exercé ou lorsque le délai imparti pour son exercice est écoulé, l'autorité ayant ordonné l'envoi établit une décision de constitution du conseil d'enquête qu'elle fait notifier au comparant et à son défenseur, s'il en est désigné un, en les invitant à se tenir à la disposition du président.

Une copie de cette décision est adressée :

  • par l'intermédiaire de l'autorité militaire du premier niveau (voie directe) à chacun des membres titulaires, en tant que décision de nomination ;

  • directement au rapporteur, qui la joint au dossier de l'affaire.

Cette décision est doublée d'un message adressé à tous les acteurs du conseil d'enquête, y compris les suppléants.

7. Modalités de fonctionnement du conseil d'enquête.

Les diverses opérations prévues par la réglementation doivent être effectuées, sous la responsabilité du rapporteur ou celle du président, pour ce qui concerne le rôle de chacun d'eux, dans les délais les plus courts.

7.1. Rôle du rapporteur.

Le rapporteur est chargé de présenter en toute impartialité au conseil d'enquête l'affaire dont il est saisi.

7.1.1. Établissement du procès-verbal.

Il procède à l'établissement d'un procès-verbal mentionnant les diverses communications et opérations effectuées et présentant les témoignages recueillis ainsi que la liste des personnes dont l'audition par le conseil est demandée.

Lorsque le conseil est consulté avant la mise d'office à la retraite d'un militaire pour aptitude physique insuffisante, le rapport dressé par les deux experts médicaux désignés (cf. point 1.3) est joint au procès-verbal. Ce rapport doit préciser l'état de santé du militaire comparant, notamment les conséquences de cet état sur l'aptitude à servir.

7.1.2. Rédaction du rapport.

Rédigé après clôture de l'enquête, le rapport de conseil d'enquête, qui doit être impartial et circonstancié :

  • rappelle les faits reprochés ou constatés avec leurs conséquences en termes de sanctions disciplinaires, professionnelles et/ou statutaires et, le cas échéant, pénales. Toutefois, en cas de condamnation assortie de dispense d'inscription au bulletin n2 du casier judiciaire, le simple rappel de la décision prise est à proscrire ;

  • résume les états de services de l'intéressé, ainsi que les notes qui lui ont été attribuées annuellement ;

  • précise les conséquences sur la situation personnelle de ce dernier, en particulier au point de vue de l'avancement et des droits à pension, de la mesure statutaire principale mentionnée à l'ordre d'envoi, ainsi que des mesures de gravité moindre également applicables au comparant.

Le rapport de conseil d'enquête ne doit être communiqué, à ce stade de la procédure, ni au militaire comparant ni à son défenseur.

7.2. Rôle du président.

7.2.1. Préparation de la réunion du conseil d'enquête.

Dès réception de l'ensemble du dossier adressé par le rapporteur, le président du conseil d'enquête :

  • détermine le lieu et le jour de la réunion du conseil en tenant compte du fait que le comparant doit disposer d'un délai de huit jours francs entre la date de notification de la décision de convocation du conseil et la date de réunion de celui-ci (le délai franc court du lendemain du jour de la réception de la notification jusqu'au huitième jour suivant inclus) ;

  • convoque, soit d'office, soit sur demande du comparant, les personnes dont l'audition peut être utile pour l'examen de l'affaire ;

  • notifie au militaire comparant et à son défenseur la décision de convocation du conseil d'enquête ;

  • convoque les membres titulaires du conseil et le rapporteur, qui doivent lui accuser réception de cette convocation ;

  • ordonne un report de la réunion du conseil, si un fait nouveau susceptible d'influer sur la situation du militaire en cause nécessite un complément d'enquête de la part du rapporteur, ou pour tout motif dont il a seul l'appréciation.

7.2.2. Déroulement de la séance du conseil.

Les opérations relatives au déroulement de la séance du conseil d'enquête sont détaillées dans l'instruction rappelée en référence d).

Le strict respect de la procédure décrite doit être observé afin de garantir les intérêts des parties en présence et éviter tout vice procédural susceptible de remettre en cause le travail accompli.

7.2.3. Clôture du conseil d'enquête.

7.2.3.1. Rédaction du procès-verbal.

Le procès-verbal de la réunion est rédigé, dès les votes terminés, avant que le conseil ne se sépare. Ce document doit être établi avec exactitude et précision, car il servira de base à l'intervention de la décision qui règle, sur le plan statutaire ou de la pension, la situation du militaire soumis à l'enquête.

7.2.3.2. Communication de l'avis du conseil d'enquête.

Sur demande du comparant, le président du conseil d'enquête peut lui faire connaître l'avis émis par le conseil d'enquête.

7.2.3.3. Dissolution du conseil.

A cette occasion, le président doit bien rappeler aux membres qu'il leur est interdit de faire état des faits dont ils ont eu connaissance, lors de la séance du conseil d'enquête.

7.2.3.4. Envoi du dossier.

Le procès-verbal de la séance du conseil, accompagné de l'ensemble des dossiers de l'autorité militaire de premier niveau et documents reçus ou établis au cours de la procédure, est adressé, sans retard, directement à l'autorité ayant, en ce qui concerne le militaire comparant, pouvoir de décision pour la sanction ou la mesure envisagée. Une copie du bordereau d'envoi est adressée à l'autorité ayant constitué le conseil.

Lorsqu'au moins un des comparants est officier, le président du conseil d'enquête adresse une copie du procès-verbal directement au cabinet du ministre de la défense (sous-direction des bureaux des cabinets).

7.3. Intervention de la décision.

La décision prise à la suite d'une procédure de conseil d'enquête est notifiée par écrit au militaire intéressé avec référence expresse à l'avis émis « à la majorité des voix » par le conseil, étant rappelé que, sauf les exceptions signalées dans l'introduction à la présente instruction, l'avis du conseil ne lie pas l'autorité qui décide de la mesure à prendre.

7.4. Cas particulier des militaires déserteurs.

7.4.1. Absence illégale et désertion en cours de procédure.

En abandonnant son poste, le militaire s'est, de son fait, placé en dehors du champ d'application des lois et règlements édictés en vue de garantir l'exercice des droits inhérents à son emploi. La procédure du conseil d'enquête peut donc se poursuivre, en l'absence du militaire, mention étant faite, autant que de besoin, dans les divers documents établis (notifications, convocations, rapport, procès-verbaux) de l'absence illégale ou de l'état de désertion de l'intéressé.

7.4.2. Désertion avant l'émission de l'ordre d'envoi.

Une sanction statutaire motivée, soit par la désertion elle-même, soit par une faute grave antérieure peut, pour les mêmes raisons que ci-dessus, être prononcée sans qu'une procédure de conseil d'enquête soit engagée.

Cependant, l'émission de l'ordre d'envoi doit être précédée de l'envoi d'une mise en demeure au militaire concerné l'enjoignant de rejoindre son poste et lui indiquant les conséquences statutaires de son abandon de poste (radiation des cadres ou résiliation de son contrat) sans mise en œuvre de la procédure du conseil d'enquête. En outre, la sanction statutaire ne peut être prononcée avant que la date limite de retrait du courrier au bureau de poste n'ait été atteinte.

Dans ce cas, le dossier de l'autorité militaire de premier niveau comporte :

  • le rapport motivé de l'autorité militaire de premier niveau ;

  • la copie de la lettre de mise en demeure et son accusé de réception ;

  • la copie actualisée de l'état des services ;

  • le relevé de punitions ;

  • la copie du signalement de désertion ;

  • le cas échéant, la copie du contrat d'engagement en cours ;

  • la copie de la dernière notation.

7.4.3. Autorité habilitée à prendre la décision.

Dans tous les cas où elles sont envisagées à l'encontre de déserteurs, les propositions de radiation des cadres ou de résiliation du contrat qui soulèvent un problème d'opportunité, doivent être soumises :

  • au ministre de la défense (cabinet du ministre par l'intermédiaire de la direction du personnel dont relève l'intéressé) pour décision, lorsqu'il s'agit d'officiers et d'officiers mariniers ;

  • au ministre de la défense (direction du personnel dont relève l'intéressé) pour avis préalable, lorsqu'il s'agit de militaires du rang de la marine servant en vertu d'un contrat.

Pour la ministre de la défense et par délégation :

L'amiral, chef d'état-major de la marine,

Jean-Louis BATTET.

Annexe

Annexe. Chronologie du déroulement de la procédure de conseil d'enquête.

Autorités concernées.

Opérations effectuées.

Délais.

Autorité militaire de premier niveau (cf. point 5.2 de la présente instruction).

Constitution du dossier, dès que les faits constatés sont susceptibles d'entraîner l'envoi devant le conseil d'enquête.

Dans les plus courts délais.

Ministre.

Autorités dont la liste est fixée par arrêté du ministre [réf. c)].

Délivrance de l'ordre d'envoi.

 

Autorité ayant ordonné l'envoi (point 5.2 de la présente instruction).

Notification au comparant de l'ordre d'envoi et de la décision désignant le rapporteur.

Transmission au rapporteur du dossier de l'affaire et instruction de l'affaire par le rapporteur.

Ordre à l'autorité qui détient le dossier individuel du comparant de l'adresser au rapporteur.

Établissement des listes nominatives des militaires susceptibles de faire partie du conseil d'enquête et tirage au sort.

Notification au comparant et à son défenseur de la liste des militaires désignés par le sort et exercice du droit de récusation.

Notification de la liste définitive des membres du conseil.

30 jours.

Rapporteur.

Après instruction de l'affaire dès réception du dossier (cf. ci-dessus), établissement du procès-verbal et du rapport et transmission du dossier complet au président du conseil d'enquête.

10 jours.

Président du conseil d'enquête.

Émission de l'ordre de convocation.

Réunion du conseil.

Transmission directe du dossier de l'autorité appelée à statuer.

20 jours.

 

Délai total : 60 jours.

 

Nota.

Les délais indiqués ci-dessus constituent un ordre de grandeur.

Toutefois, l'attention est appelée sur la nécessité d'instruire les procédures du conseil d'enquête dans les délais les plus courts possibles.