INSTRUCTION N° 226/DEF/DCCM/LOG/VIVRES relative aux ravitaillements opérationnels en vivres des forces de surface.
Du 12 septembre 2005NOR D E F B 0 5 5 2 2 0 4 J
Le régime des ravitaillements en vivres des forces de surface, isolées ou regroupées au sein d'une force navale (1) repose sur les principes suivants :
la liberté d'établissement des menus et de choix des denrées, sous réserve des exigences logistiques, sanitaires et financières ;
le ravitaillement par les services du commissariat de la marine dans les ports qui en sont pourvus ou par des fournisseurs choisis par leurs soins dans les autres ports.
Cette liberté d'approvisionnement doit être adaptée pour certaines activités opérationnelles. Un régime spécifique est alors mis en place, appelé ravitaillement opérationnel en vivres (ROV).
Ce régime comporte deux procédures distinctes :
le ravitaillement par unité(s) logistique(s) de vivres (RPU), généralement mis en oeuvre en mission ou en exercice ;
le système de ravitaillement automatique en vivres (SRAV), dans le cas d'opérations prolongées ou circonstances exceptionnelles.
Dans ces deux procédures, RPU et SRAV, le ravitaillement des bâtiments est effectué par lots prédéterminés de vivres, appelés « unités logistiques de vivres » (ULV).
1. Les unités logistiques de vivres.
1.1. Définition.
L'ULV est un ensemble normalisé et conditionné de denrées entrant dans la composition d'un menu décadaire, en quantité suffisante (2) pour assurer, en totalité ou en quasi-totalité, l'alimentation d'un effectif donné pendant dix jours.
Selon l'effectif soutenu, deux types d'ULV sont utilisés :
les ULV 150, destinées aux unités ayant un effectif de l'ordre de 150 personnes ;
les ULV 300, destinées aux unités ayant un effectif de l'ordre de 300 personnes ou plus.
Une quantité minimale d'eau en bouteilles est également intégrée dans l'unité logistique de vivres.
Il existe trois variantes d'ULV :
la variante ALFA comporte l'essentiel des denrées nécessaires à la préparation des menus prévus, mais nécessite, pour les réaliser, des approvisionnements complémentaires notamment en vivres frais (fruits, légumes) ou réfrigérés (produits carnés et laitiers…) ;
la variante BRAVO couvre la totalité des besoins nécessaires à la réalisation des menus, y compris les fruits et légumes frais ;
la variante CHARLIE assure la même couverture des besoins que la variante BRAVO, mais les fruits et légumes frais sont remplacés par leur équivalent en denrées de conservation.
L'unité ALFA est l'ULV de référence en matière de RPU. Les deux autres variantes sont employées dans le cadre du SRAV.
1.2. Les menus.
Un menu unique, comprenant des denrées, des plats protidiques, des garnitures, des fromages et des desserts, sert de référence à la constitution des ULV 150 et 300 ALFA. Pour les variantes BRAVO et CHARLIE, trois menus décadaires sont établis (3). Ces menus sont arrêtés par la commission des vivres des forces de surface [réf. c)].
Ils sont élaborés en tenant compte des exigences suivantes :
logistiques : ils doivent être compatibles avec les capacités de stockage des bâtiments, notamment celles des pétroliers ravitailleurs, et les conditions de ravitaillement à la mer (ex. : la hauteur des palettes). Ils doivent respecter les dispositions spécifiques à la chaîne d'approvisionnement, en particulier les règles de l'achat public (4), et les modalités d'expédition ;
nutritionnelles : le respect de l'équilibre alimentaire doit être recherché ;
financières : les menus doivent être compatibles avec les ressources financières des bâtiments ;
techniques : les menus sont conçus pour être préparés à bord de tous les types de bâtiments de la marine, en tenant compte des denrées disponibles à toute époque de l'année et adaptés d'une manière générale à tous les climats.
1.3. Les denrées.
Les denrées composant l'ULV sont conservées :
à température ambiante (appertisés, boissons, farine…) ;
au froid positif (denrées « réfrigérées » : fromages et produits laitiers ;
au froid négatif (denrées « congelées » : viandes, poissons, légumes, desserts).
La liste des denrées entrant dans la composition des deux ULV (5) est normalisée. Elle comprend les catégories génériques suivantes :
viandes et poissons ;
légumes ;
desserts ;
assaisonnements ;
boissons ;
produits laitiers ;
farine et sucre.
L'ordre de consommation des denrées est libre dans le cas du RPU ou imposé dans celui du SRAV.
1.4. Rôle du service du commissariat de la marine (SCM) et de la force d'action navale (FAN).
Au sein de la commission des vivres des forces de surface, la direction du commissariat de la marine (DCM) à Toulon, en liaison avec la FAN, arrête la liste des denrées composant les ULV. La DCM Toulon est responsable de l'approvisionnement, de la constitution, du stockage et de la délivrance des ULV.
Le retour d'expérience est analysé par la DCM Toulon en liaison avec la FAN, pour améliorer le régime de ravitaillement opérationnel en vivres et la satisfaction des besoins des forces en tenant compte des exigences énoncées au point 1.2 ci-dessus.
La DCM Toulon est chargée de tenir à jour le référenciel des ROV, formalisé dans un dossier ROV comportant :
les menus de référence : un pour la variante ALFA et trois pour les variantes BRAVO et CHARLIE ;
la liste des denrées (articles, poids, volume et prix) composant les ULV 300 et 150, selon les trois variantes ;
le plan de palettisation des deux types d'ULV, pour les trois variantes ;
une estimation nutritionnelle des ULV.
Une foix par an, ce dossier ROV est adressé à la FAN et à la direction centrale du commissariat de la marine (sous-direction logistique).
2. Conditions d'emploi des unités logistiques de vivres.
L'unité logistique de vivres constitue le standard en matière de ravitaillement de vivres à la mer. Embarquée à bord des pétroliers ravitailleurs (PR), elle constitue avec éventuellement d'autres denrées non conditionnées dans l'ULV, destinées à être délivrées à une force navale, les vivres de fret.
Toute ULV embarquée à bord d'un PR ou d'un bâtiment, doit être consommée par les unités de la force navale. Les remises de denrées au service de soutien du port doivent rester exceptionnelles et justifiées ; elles entraînent en effet des pertes financières pour le chapitre alimentation de la marine.
Par ailleurs, les unités logistiques de vivres qui auraient été prépositionnées ou qui sont en cours d'expédition, dont la force navale n'aurait plus le besoin, peuvent être, avec l'accord des autorités militaires concernées, cédées pour une consommation sur place (forces françaises stationnées ou en renfort).
Tout au long du processus, les acteurs de la chaîne logistique veillent au respect :
de la réglementation relative à la traçabilité des denrées ;
des températures de stockage au froid, mais également à la protection des denrées stockées à température ambiante contre la chaleur excessive.
Les procédures administratives et comptables de transferts d'ULV sont régies par l'annexe 6 de l'instruction citée en référence b).
3. Le ravitaillement par unités logistiques de vivres.
La procédure RPU est mise en oeuvre dans les trois cas suivants :
activités programmées, pour le ravitaillement d'une force navale, à partir des vivres de fret embarqués sur des pétroliers ravitailleurs (PR) ;
soutien à partir d'un point d'appui, d'une force navale projetée effectuant une mission d'une certaine durée. Tant que les conditions sur zone d'activité le permettent, le RPU est mis en oeuvre de préférence au SRAV ;
au port base, pour effectuer un ravitaillement rapide et important, d'une force navale ou d'un bâtiment isolé appareillant avec un très court prévis.
Dans tous les cas, les bâtiments :
conservent la liberté d'établir leurs menus à leur convenance, le menu décadaire n'étant qu'une proposition ;
peuvent bénéficier de sources complémentaires de ravitaillement (escales, envoi de vivres sur zone).
En outre, le RPU permet également de répondre aux obligations de disponibilités logistiques qui découlent des normes de l'organisation du traité de l'Atlantique Nord et des directives nationales.
3.1. À partir de vivres de fret embarqués par pétrolier ravitailleur, à l'occasion d'activités programmées.
Le RPU est la procédure normale de soutien des forces navales ravitaillées par pétrolier ravitailleur sur zone. Les modalités de délivrance sont fixées par le commandant de la force navale.
Pour évaluer les besoins et organiser le ravitaillement des unités, la force tient compte pour chaque bâtiment, des effectifs embarqués, du niveau résiduel prévisible des stocks de denrées lors de la délivrance des ULV et des approvisionnements envisagés hors RPU, notamment au cours des escales programmées. À partir de ces données, sont déterminés le type d'ULV (ULV 150 ou ULV 300) et le nombre d'ULV nécessaires pour atteindre le niveau de stocks de vivres conformes à l'autonomie souhaitée.
La mise en oeuvre du RPU dans le cadre des activités programmées des forces navales ne justifie pas de prendre des dispositions administratives ou financières particulières.
3.2. À partir d'un point d'appui.
Le RPU est utilisé, depuis la métropole, pour le soutien prolongé sur zone d'opération d'une force navale effectuant une mission longue ou de durée indéterminée.
Dans ce cas, le port ravitailleur achemine vers un point d'appui les vivres de fret (ULV, et éventuellement, des vivres non conditionnés et de l'eau), selon les commandes de la force navale, par le vecteur le plus approprié en tenant compte du degré d'urgence, des contraintes opérationnelles et du coût du transport :
par pétrolier ravitailleur ou tout autre bâtiment de la marine ;
par navire affrété ou par voie maritime commerciale ;
par voie aérienne militaire ou civile en cas d'urgence.
La composition des ULV peut être ponctuellement modifiée à la demande du commandant de la force navale ou du commandant de zone maritime.
Les vivres de fret non acheminés par PR sont prépositionnés vers un point d'appui (port de la zone d'activité où la marine dispose ou peut disposer d'installations de transit ou autres). Ils sont ensuite, selon les ordres du commandant de la force navale, soit embarqués à bord du ou des pétroliers ravitailleurs et délivrés à la mer, soit délivrés aux bâtiments à l'occasion de leurs escales dans le port du point d'appui.
Les dispositions administratives et financières spécifiques, justifiées par un soutien prolongé d'une force navale par RPU, sont fixées au cas par cas par l'échelon central.
3.3. Le ravitaillement rapide au port base.
Le ravitaillement rapide et important d'une force ou d'unités isolées à partir d'ULV, appareillant avec un court préavis du port base, est mise en oeuvre sur décision de la force d'action navale.
En outre, certaines catégories de produits détenues en permanence dans le stock de fonctionnement courant des services de soutien peuvent être délivrées en urgence et un ravitaillement rapide peut également être organisé, en complément ou en remplacement d'ULV, selon des dispositions définies localement par la direction du commissariat, en partenariat avec les forces.
4. Le système de ravitaillement automatique en vivres.
Le SRAV est une modalité du ravitaillement opérationnel en vivres plus contraignante que le RPU compte tenu de l'activité opérationnelle et notamment des difficultés de ravitaillement en escale, voire de l'impossibilité de faire escale.
Ce système repose sur une normalisation des consommations qui se traduit par les exigences suivantes :
consommation obligatoire des menus décadaires préétablis, dans l'ordre prévu, pour tous les bâtiments de la force et pour tous les groupements d'alimentation des bâtiments ;
réapprovisionnement automatique des stocks de denrées, sans que les bâtiments aient ni à les définir, ni à les demander.
Compte tenu des circonstances et de la nécessité d'assurer un soutien intégral à la force, seules les ULV BRAVO ou CHARLIE peuvent être employées dans le cadre du SRAV.
La décision de mise en oeuvre du SRAV est prise par l'état-major de la marine sur proposition du commandant de la zone maritime ou du commandant opérationnel ; il désigne l'autorité chargé de régler avec le port ravitailleur l'acheminement sur zone (nombre d'ULV à expédier, variantes retenues BRAVO ou CHARLIE, calendrier des envois).
La date d'application effective du SRAV est fonction du niveau moyen des stocks de denrées de chaque bâtiment et peut donc varier d'un bâtiment à l'autre.
Les ULV sont délivrées aux bâtiments sur zone selon les modalités fixées par le commandant opérationnel de la force navale.
Une attention particulière sera portée à l'arrêt des expéditions des ULV. En effet, en raison de la continuité et de la régularité du flux logistique, cet arrêté doit être anticipé afin d'éviter les expéditions tardives, et donc inutiles. À cet égard, la date de cessation de la procédure de SRAV doit être fixée en liaison entre la force et les services de soutien.
Suivant la durée des missions, et afin d'améliorer le bien-être des équipages, la composition des ULV peut être adaptée au fur et à mesure des envois.
À l'occasion de la mise en oeuvre du SRAV, les dispositions administratives et financières particulières sont arrêtées par l'échelon central.
5. Textes abrogés.
L'instruction no 39/DEF/CMa/2 du 10 février 1989, relative au système de ravitaillement automatique en vivres et au ravitaillement par décades des bâtiments de la marine et la circulaire no 40/DEF/CMa/2 du 10 février 1989, relative au système de ravitaillement automatique en vivres et au ravitaillement par décades des bâtiments sont abrogées.
6. Texte modifié.
L'instruction permanente sur les procédures logistiques opérationnelles [instruction LOGOPS no 99/DEF/EMM/OPL du 27 octobre 2004 (n.i. BO) sera modifiée en fonction des dispositions nouvelles ci-dessus.
Pour la ministre de la défense et par délégation :
Le commissaire général, directeur central du commissariat de la marine,
Pierre-Marie ARRECKX.