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DIRECTION DES AFFAIRES ADMINISTRATIVES, JURIDIQUES ET CONTENTIEUSES : sous-direction de la propriété industrielle

INSTRUCTION INTERMINISTÉRIELLE N° 9062/DN/CAB relative aux inventions intéressant la défense nationale.

Du 13 février 1973
NOR

Précédent modificatif :  Erratum du 27 mars 1973 (BOC/SC, p. 512).

Texte(s) abrogé(s) :

Instruction n° 9047/CMG du 26 novembre 1939 (BOEM/G 433-0, p. 53 ; JO du 30, p. 13528), modifiée et complétée par l'instruction du 20 février 1940 (BOEM/G 433-0, p. 67 ; JO du 21, p. 1305 et rectificatifs JO du 25, p. 1397 et du 1er mars, p. 1532).

Classement dans l'édition méthodique : BOEM  331.1.3.1.2.

Référence de publication : BOC/SC, p. 250 ; BOC/M, p. 190.

Le développement sans cesse accru des échanges internationaux dans les divers domaines de la technique fait apparaître la nécessité de rappeler les obligations qui incombent aux détenteurs d'inventions intéressant la défense nationale au regard des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, notamment en ce qui concerne la communication de telles inventions à l'étranger.

Les instructions anciennement prises à ce sujet sont en effet devenues caduques en raison des modifications survenues d'une part dans la législation et la réglementation auxquelles elles se référaient, d'autre part dans l'organisation administrative en fonction de laquelle avaient été déterminées les autorités auxquelles il convenait de s'adresser pour obtenir les autorisations imposées par la loi avant toute livraison ou communication à l'étranger d'inventions intéressant la défense nationale, et notamment de tout dépôt à l'étranger de demande de brevet couvrant de telles inventions.

Cependant le fondement même de ces obligations est demeuré puisque l'article 77 du code pénal résultant de l'ordonnance no 60-529 du 4 juin 1960 (n.i. BO ; JO du 8, p. 5107) reprend, en ce qui concerne les faits incriminés, le texte même de l'ancien article 81, 3o de ce code tel qu'il résultait du décret-loi du 29 juillet 1939 (BOEM/G 433-0, p. 10 ; BOR/M, p. 47).

Aux termes de cet article 77 en effet :

« Sera puni de la détention criminelle à temps de dix à vingt ans (1) tout Français ou étranger qui, sans autorisation préalable de l'autorité compétente, livrera ou communiquera à une personne agissant pour le compte d'une puissance ou d'une entreprise étrangère soit une invention intéressant la défense nationale, soit des renseignements, études ou procédés de fabrication se rapportant à une invention de ce genre ou à une application industrielle intéressant la défense nationale. »

La présente instruction a pour objet de préciser à nouveau les conditions dans lesquelles doivent être demandées les autorisations préalables prescrites par les dispositions de cet article.

Ces autorisations étant nécessaires toutes les fois où l'invention intéresse la défense nationale, l'attention est appelée en premier lieu sur la portée qu'il convient de donner à cette expression dont l'acceptation est ici très large et s'étend au-delà des matériels de guerre entendus au sens strict du terme, c'est-à-dire tels que définis par la législation et la réglementation qui leur sont propres ; c'est ainsi que peuvent être considérées comme intéressant la défense nationale par exemple des techniques relatives aussi bien au génie ou à certains moyens de transport, qu'aux armes, munitions et matériels de guerre et assimilés proprement dits et même certaines obtentions végétales.

Bien entendu cette notion d'invention intéressant la défense nationale présente nécessairement un caractère évolutif compte tenu de l'état de la technique et des besoins des armées. Nombreux sont donc les cas où l'on peut et doit hésiter sur le point de savoir si une invention intéresse ou non la défense nationale ; aussi convient-il dans tous les cas douteux de procéder en vue d'obtenir l'autorisation requise préalablement à l'opération envisagée.

Il convient à cet égard de distinguer :

  • d'une part les demandes d'autorisation relatives au dépôt de demandes de brevets à l'étranger ;

  • d'autre part celles relatives à la livraison ou à la communication à l'étranger d'inventions ou d'informations techniques indépendamment du dépôt de toute demande de brevet.

1. Dépôt de demandes de brevet à l'étranger.

1.1.

1.1.1. Contenu

Sauf cas exceptionnels, aucune autorisation de dépôt à l'étranger d'une demande de brevet (2) ou certificat d'addition couvrant une invention intéressant la défense nationale n'est accordée avant le dépôt initial en France de la demande de brevet, certificat d'utilité ou certificat d'addition couvrant cette invention (3).

Il est rappelé qu'en application de la loi no 68-1 du 2 janvier 1968 (BOC/SC, p. 15 ; abrogé par la loi 92-597 du 01 juillet 1992 BOC, p. 2997) modifiée, et du décret no 68-1100 du 5 décembre 1968 abrogé et remplacé par le décret 79-822 du 19 septembre 1979 (BOC, p. 4211) modifié, les délégués du ministre chargé de la défense nationale prennent connaissance, à titre strictement confidentiel, de toutes les demandes de brevets déposées à l'institut national de la propriété industrielle, afin de déterminer, parmi les inventions couvertes par ces demandes de brevets :

  • d'une part celles dont la divulgation et la libre exploitation peuvent être d'emblée autorisées ;

  • d'autre part celles qui nécessitent un examen plus approfondi d'une durée ne pouvant excéder cinq mois à compter du dépôt de la demande de brevet, et dont la divulgation et la libre exploitation sont, à l'issue de cet examen, soit autorisées, soit interdites pour une période d'un an renouvelable (4).

Comme il est exposé au paragraphe b) ci-dessous, le dispositif de contrôle ainsi institué permet précisément que les déposants soient informés dans les meilleures conditions de la décision prise relativement à leurs inventions.

Si toutefois, pour des raisons très particulières, l'autorisation exceptionnelle d'effectuer hors du territoire français le dépôt initial d'une demande de brevet intéressant la défense nationale était sollicitée, la demande devrait en être formulée auprès du ministère chargé de la défense nationale, délégation ministérielle pour l'armement (A) bureau des brevets et inventions. Cette demande d'autorisation devrait être accompagnée du mémoire descriptif et des dessins et comporter l'énoncé des revendications. Si des documents sont établis en langue étrangère, leur traduction doit être jointe à la demande d'autorisation.

1.1.2. Contenu

De telles livraisons ou communications, dès lors que l'invention ou l'application industrielle à laquelle elles se rapportent concernent un « matériel de guerre ou assimilé », sont soumises aux règles propres à l'exportation de ces matériels.

Toute demande d'autorisation en ce qui les concerne doit être adressée au ministère chargé de la défense nationale, sous le timbre de la délégation ministérielle pour l'armement (A) direction des affaires internationales.

1.2.

1.2.1. Contenu

Dans le cas général où la demande de brevet est initialement déposée en France, l'autorisation de déposer à l'étranger est contenue implicitement dans l'autorisation plus générale de divulgation et de libre exploitation de l'invention objet de ladite demande de brevet, notifiée automatiquement au déposant par le ministre chargé de la propriété industrielle sur avis du ministre chargé de la défense nationale (5).

Cette autorisation peut aussi faire suite à une demande qui doit être formulée à cet effet par le déposant auprès de l'institut national de la propriété industrielle et qui, ainsi que le précise l'article 15 du décret no 68-1100 du 5 décembre 1968 (B) peut l'être dès le dépôt de la demande de brevet (6).

Enfin, sauf intervention d'un arrêté d'interdiction de divulgation et de libre exploitation, cette autorisation est acquise de plein droit au terme d'un délai de cinq mois à dater du dépôt de la demande de brevet (art. 25 de la loi no 68-1 du 2 janvier 1968).

Il importe de noter que l'interdiction de divulgation et de libre exploitation de l'invention objet de demande de brevet ne met pas nécessairement obstacle au dépôt d'une demande de brevet correspondante à l'étranger. Une requête particulière à l'effet de bénéficier de l'application des accords internationaux sur la sauvegarde mutuelle du secret des inventions intéressant la défense et objet de demandes de brevet peut être adressée au ministère chargé de la défense nationale sous le timbre susvisé de la délégation ministérielle pour l'armement (A) bureau des brevets et inventions, qui peut accorder l'autorisation de déposer une demande de brevet correspondant à la demande initialement déposée en France dans un ou plusieurs des pays parties à ces accords, à condition que soient respectées les mesures de sécurité particulières imposées par les procédures établies pour l'application desdits accords.

1.2.2. Contenu

Si les opérations susvisées ne se rapportent pas à des inventions concernant des matériels de guerre et matériels assimilés susvisés, mais si les inventions en cause intéressent cependant la défense nationale, toute demande d'autorisation doit être adressée au ministère chargé de la défense nationale sous le timbre de la délégation ministérielle pour l'armement (A), bureau des brevets et inventions susvisé.

1.3.

Les interdictions de divulgation et de libre exploitation établies par les dispositions de la loi no 68-1 du 2 janvier 1968 et du décret no 68-1100 du 5 décembre 1968 (7) pendant la durée de ces interdictions, « une demande d'autorisation particulière en vue d'accomplir des actes déterminés d'exploitation peut être adressée directement par le titulaire de la demande de brevet au ministre chargé de la défense nationale (8). Celui-ci, s'il accorde l'autorisation sollicitée, précise les conditions auxquelles ces actes d'exploitation sont soumis ».

2. Livraison ou communication à l'étranger de renseignements, études ou procédés de fabrication se rapportant à une invention ou à une application industrielle intéressant la défense nationale.

Notes

    5Cette notification intervient dans un délai moyen d'un mois à dater du dépôt de la demande de brevet.6Toutefois, cette procédure est à utiliser seulement en cas d'extrême urgence.

Le ministre d'Etat chargé de la défense nationale,

Michel DEBRE.

Le garde des sceaux, ministre de la justice,

René PLEVEN.

Pour le ministre du développement industriel et scientifique et par délégation :

Le directeur du cabinet,

Bernard RAULINE.