DÉCRET portant règlement d'administration publique pour l'application de la loi du 11 juillet 1938 sur l'organisation générale de la nation pour le temps de guerre (en ce qui concerne les réquisitions).
Abrogé le 04 mars 2009 par : DÉCRET N° 2009-254 relatif à certaines dispositions réglementaires de la deuxième partie du code de la défense (Décrets en Conseil d'État et décrets simples). Du 28 novembre 1938NOR
RAPPORT AU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE.
Monsieur le Président,
L'organisation générale de la nation pour le temps de guerre, conçue en fonction de la guerre totale, exige la mise à la disposition du pays de toutes les ressources en personnel et en biens. Cette organisation suppose une préparation minutieuse dès le temps de paix de l'utilisation de ces ressources et un déclenchement instantané en temps de guerre des mesures prévues.
Jusqu'ici la législation existante ne permettait que la satisfaction rapide et méthodique des besoins des forces armées et n'attribuait qu'aux ministres militaires les pouvoirs nécessaires à cet effet. La loi du 11 juillet 1938 (BO/G, p. 2715 ; BO/M, p. 364 ; BOR/M, p. 2/13) a donné aux ministres civils le moyen de se procurer les ressources indispensables et cela de deux manières :
La première, basée sur l'accord du prestataire, permet d'obtenir le concours bénévole des personnes sous la forme d'engagements volontaires et d'assurer la fourniture des prestations de biens par la voie d'accords amiables ;
La seconde, basée sur la nécessité d'obtenir les prestations indispensables au pays, repose sur la réquisition, sous la réserve, en ce qui concerne les biens, qu'aucun accord, amiable n'ait pu être conclu ou poursuivi (2).
La réquisition est donc, actuellement, un pouvoir accordé à tous les ministres pour se procurer — par voie d'autorité — les prestations de services et de biens qui leur sont nécessaires pour poursuivre leur mission.
L'extension du droit de réquisition consacré par la loi du 11 juillet 1938 impose les mesures suivantes :
1. Possibilité de réaliser la mise sur pied et l'entretien des armées indépendamment des réquisitions civiles : ce qui a été réalisé en assurant à l'autorité militaire la priorité d'utilisation des ressources sous la réserve, cependant, que ces besoins soient considérés par cette autorité comme immédiatement nécessaires ;
2. Limitation, en général, du droit de réquisition donné aux ministres civils aux seules ressources dont ils sont responsables ;
3. Réglementation des conflits possibles entre autorités requérantes.
Dans ces conditions, la loi du 03 juillet 1877 (BO/M, p. 282) demeure, sans aucune modification de principe, applicable aux réquisitions militaires tandis que la loi du 11 juillet 1938 ne s'applique qu'aux réquisitions civiles.
Une seule exception : la procédure d'évaluation, le mode de calcul et le règlement des indemnités se feront dorénavant, quelle que soit la réquisition, selon les dispositions de la loi du 11 juillet 1938 (3) loi du 11 juillet 1938 ordonnance 59-63 du 06 janvier 1959 .
Le présent décret abroge et remplace sur ces points les dispositions contraires contenues dans le décret du 02 août 1877 (BO/M, p. 300).
En outre, pour éviter tout abus du droit de réquisition, il n'a pas semblé possible de laisser à tous les fonctionnaires civils l'exercice illimité de ce droit quoique restreint, par ailleurs, dans son objet. Des dispositions spéciales ont précisé l'exercice de ce droit en spécifiant les autorités habilitées à requérir de plein droit, tout en laissant, en vue de faire face aux situations imprévues, la possibilité de recourir à l'emploi de la délégation spéciale ou temporaire : ces dispositions éviteront toute réquisition abusive exercée par une personne non habilitée à cet effet.
La réquisition des personnes civiles est désormais fixée : bien que prévue par l'article 2 de la loi du 31 mars 1928 (4) loi du 30 novembre 1950 (BO/G, p. 3606) (BO/G, p. 1347, BO/M, p. 500) sur le recrutement de l'armée, cette disposition n'avait pas fait l'objet jusqu'ici d'instructions d'application.
La réquisition individuelle de toute personne du sexe masculin (5) non utilisée par l'autorité militaire et la réquisition collective, dans leur emploi, du personnel des deux sexes, ont été réglementées, ainsi que l'attribution des traitements et salaires et les contestations qui pourraient survenir à l'occasion de ces opérations.
La réquisition des biens n'a pas fait l'objet de dispositions différentes, dans l'ensemble, de celles régissant les réquisitions militaires : certaines précisions cependant ont été apportées pour définir notamment la réquisition de l'usage et de la propriété des biens et l'entrée en possession de ceux-ci (6).
En outre, pour permettre au ministre de la défense nationale de remplir la mission de contrôle qui lui est dévolue par l'article 4 de la loi du 11 juillet 1938 , compte tenu des dispositions de l'article 2 de la même loi, chaque ministre doit préparer dès le temps de paix un plan de réquisition des ressources dont il est responsable et le soumettre, pour approbation, au ministre de la défense nationale.
Tel est l'objet du présent règlement que nous vous prions, si vous en approuvez la teneur, de bien vouloir revêtir de votre signature.
Notes
Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'hommage de notre profond respect.
Le Président du conseil, ministre de la défense nationale et de la guerre,
Edouard DALADIER.
Le ministre de l'intérieur,
Albert SARRAUT.
Le ministre de la justice,
Paul MARCHANDEAU.
Le ministre de l'air,
Guy LA CHAMBRE.
Le ministre du travail,
Charles POMARET.
Le ministre des anciens combattants et pensionnés,
CHAMPETIER DE RIBES.
Le ministre du commerce,
Fernand GENTIN.
Le ministre de la santé publique,
Marc RUCART.
Le ministre de la marine marchande,
Louis DE CHAPPEDELAINE.
Le ministre des finances,
Paul REYNAUD.
Le ministre des affaires étrangères,
Georges BONNET.
Le ministre de la marine militaire,
C. CAMPINCHI.
Le ministre des travaux publics,
A. DE MONZIE.
Le ministre de l'économie nationale,
Raymond PATENOTRE.
Le ministre de l'éducation nationale,
Jean ZAY.
Le ministre de l'agriculture,
Henri QUEUILLE.
Le ministre des postes, télégraphes et téléphones,
Jules JULIEN.