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SECRÉTARIAT GÉNÉRAL :

DÉCRET sur les participations financières de l'Etat (fabrication et commerce du matériel de guerre).

Du 26 janvier 1937
NOR

Classement dans l'édition méthodique : BOEM  107.3.

Référence de publication : BO/G, p. 337.

LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE,

Sur le rapport des ministres de la défense nationale et de la guerre, de la marine et de l'air et du ministre des finances,

Vu la loi du 11 août 1936(1) ;

Vu le décret-loi du 30 octobre 1935 (2) organisant le contrôle de l'Etat sur les sociétés, syndicats et associations ou entreprises de toute nature ayant fait appel au concours financier de l'Etat ;

Vu les décret du 17 août 1936 et décret du 18 août 1936 ;

Vu le décret du 16 janvier 1937 (3) ;

Le conseil des ministres entendu,

DÉCRÈTE :

Art. 1er.

 

Pour l'exécution de la loi du 11 août 1936 et dans la limite des crédits spécialement accordés à cet effet par la loi, les ministres intéressés et le ministre des finances sont autorisés à prendre, au nom de l'Etat, des participations financières dans les entreprises se livrant à la fabrication ou au commerce de matériels de guerre. En ce qui concerne les entreprises se livrant à la fabrication des matériels de guerre, les prises de participation seront, en outre, limitées à la valeur des éléments de l'entreprise qui sont spécialement affectés à la fabrication de ces matériels.

Ces prises de participation ne pourront toutefois être réalisées qu'à l'égard des établissements pour lesquels la fabrication ou le commerce des matériels de guerre revêt une importance justifiant cette forme de contrôle.

Art. 2.

 

Pour les entreprises dans lesquelles l'Etat prend une participation financière, l'autorisation prévue par l'article 2 de la loi du 11 août 1936 est accordée par décret contresigné du ministre intéressé et du ministre des finances.

Ce décret détermine les conditions auxquelles l'entreprise est autorisée à fabriquer ou à faire le commerce des matériels de guerre, et les conditions financières de la participation de l'Etat.

Art. 3.

 

Les entreprises dans lesquelles l'Etat aura pris une participation financière seront obligatoirement constituées en société anonyme sous le régime de la loi française.

Lorsqu'il est décidé, dans les conditions prévues à l'article premier du présent décret, de prendre une participation au nom de l'Etat dans une entreprise constituée sous une autre forme, cette entreprise doit, dans un délai qui sera fixé par le décret de participation prévu à l'article 2, se transformer en société anonyme.

Elle peut toutefois constituer une société nouvelle, dans la forme anonyme, dont l'objet est exclusivement la fabrication et le commerce des matériels de guerre, et dont le capital est souscrit par elle-même et par le ministre intéressé et le ministre des finances agissant au nom de l'Etat.

Art. 4.

 

La participation financière de l'Etat se réalise notamment selon l'une des modalités suivantes :

  • soit par le rachat amiable de la fraction du capital correspondant au montant de la participation de l'Etat ;

  • soit au moyen de la souscription par l'Etat d'une augmentation de capital correspondant au montant de sa participation ;

  • soit par l'apport, dans une société existante, ou dans une société nouvelle, de biens expropriés par l'Etat en vertu de la loi du 11 août 1936.

Art. 5.

 

La participation financière donne à l'Etat le droit d'exercer, par l'intermédiaire de ses représentants, les pouvoirs de gestion et les pouvoirs de contrôle prévus par le décret-loi du 30 octobre 1935 , organisant le contrôle de l'Etat sur les sociétés, syndicats et associations ou entreprises de toute nature ayant fait appel au concours financier de l'Etat, ainsi que les pouvoirs de contrôle prévus par les décret du 17 août 1936 et décret du 18 août 1936.

Les conditions dans lesquelles s'exercent ces pouvoirs sont fixées par le décret prévu par l'article 2 ci-dessus et par les statuts de la société.

Les statuts et toutes modifications aux statuts doivent être approuvées par le ministre intéressé et le ministre des finances.

Art. 6.

 

L'Etat est présenté dans les assemblées générales constitutives, ordinaires ou extraordinaires.

Le nombre de voix dont l'Etat dispose dans chacune de ces assemblées est fixé conformément aux lois sur les sociétés et aux dispositions statutaires.

Art. 7.

 

Les statuts doivent réserver à l'Etat, dans le conseil d'administration, deux ou plusieurs postes d'administrateurs. Parmi ces administrateurs figurent au moins un représentant du ministre des finances et un représentant des corps techniques des ministères intéressés. Ces administrateurs siègent et agissent ès qualités, avec les mêmes droits et pouvoirs que les autres membres du conseil d'administration, tant à l'égard de la société qu'à l'égard de tiers.

L'un des administrateurs représentant le ministre des finances a le pouvoir d'examiner sur pièces et sur place les documents sociaux, les écritures, les comptes et les bilans.

L'Etat est obligatoirement représenté au comité de direction ou autres organismes analogues.

Art. 8.

 

Les administrateurs représentant l'Etat sont désignés par décret contresigné par les ministres intéressés et le ministre des finances.

Art. 9.

 

Les administrateurs représentant l'Etat ne peuvent recevoir personnellement aucune rémunération de la société. Celle-ci doit verser au Trésor les jetons de présence et tantièmes afférents à leurs fonctions.

Ils ne peuvent, ni dans la société, ni dans ses filiales, remplir des mandats spéciaux, accepter des fonctions de direction telles que celles de président, de vice-président, d'administrateur délégué ou d'administrateur directeur, sans l'autorisation du ministre des finances et du ministre intéressé.

Art. 10.

 

Un fonctionnaire de contrôle est spécialement désigné pour suivre l'activité de la société. Il est régulièrement convoqué aux assemblées générales, aux séances du conseil d'administration et, s'il y a lieu, du comité de direction ou des organismes analogues.

Il possède les pouvoirs d'investigation les plus étendus, sur pièces et sur place, pour l'examen des documents sociaux, des écritures, des comptes et du bilan.

Art. 11.

 

Le fonctionnaire chargé du contrôle peut s'opposer aux décisions du conseil d'administration qui lui paraîtraient porter atteinte à l'indépendance de la société, aux intérêts financiers et aux droits de l'Etat, ou à la politique générale du Gouvernement, notamment en matière de défense nationale, et à celles qui seraient contraires aux dispositions légales ou réglementaires en vigueur.

Art. 12.

 

Lorsqu'une décision du conseil d'administration aura donné lieu à un veto du fonctionnaire chargé du contrôle, elle ne pourra recevoir son application que dans les conditions suivantes :

  • soit après une nouvelle délibération, pour laquelle la majorité des voix comprendra celle des administrateurs représentant l'Etat, cette délibération intervenant après réception des observations du ministre, et, à défaut, dans le délai de quinze jours après la première délibération ;

  • soit en exécution d'une sentence arbitrale qui devra être rendue dans le délai de deux mois.

Les statuts déterminent les cas où il est fait usage de l'un ou de l'autre de ces procédés, ainsi que les modalités de la procédure d'arbitrage.

Art. 13.

 

Les dispositions du présent décret ne sont pas applicables aux sociétés régies par le décret du 16 janvier 1937 .

Art. 14.

 

Le ministre de la défense nationale et de la guerre, le ministre de la marine, le ministre de l'air et le ministre des finances sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 26 janvier 1937.

Albert LEBRUN.

Par le Président de la République :

Le président du conseil,

Léon Blum.

Le ministre de la marine,

Gasnier-Duparc.

Le ministre de la défense nationale et de la guerre,

E. Daladier.

Le ministre de l'air,

Pierre Cot.

Le ministre des finances,

Vincent Auriol.