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DIRECTION DES PERSONNELS CIVILS : Sous-Direction de la coordination et de la réglementation générale

CIRCULAIRE N° B/2-A-6/P 9 du ministère de l'économie et des finances relative aux conditions d'application des articles L. 44 et L. 45 du code des pensions civiles et militaires de retraite (BOEM 363-0*) modifiés par la loi n o 75-617 du 11 juillet 1975 (n.i. BO ; JO du 12 juillet 1975, p. 7171).

Du 20 janvier 1976
NOR

Classement dans l'édition méthodique : BOEM  262-0.1.4.

Référence de publication : BOC, p. 688.

Sous l'empire des dispositions du code civil en vigueur lors de l'intervention de la loi du 14 avril 1924 (1), le divorce avait le caractère d'une sanction, prononcée par le tribunal contre l'époux coupable, ce qui avait conduit le législateur à lier la reconnaissance du droit à pension de la femme divorcée à la non-culpabilité de celle-ci.

Ce principe a été maintenu à l'occasion des réformes ultérieures du régime des pensions de l'Etat : aussi bien dans la loi du 20 septembre 1948 (art. 35) (2) que dans le code des pensions de retraite annexé à la loi 64-1339 du 26 décembre 1964 (art. L. 44) l'épouse divorcée ne peut prétendre à pension de réversion que si le divorce a été prononcé exclusivement en sa faveur.

La loi no 75-617 du 11 juillet 1975 a profondément réformé la législation relative au divorce en instituant deux nouveaux cas de divorce qui ne sont pas fondés sur des considérations de culpabilité : le divorce par consentement mutuel et le divorce pour cause de rupture de la vie commune. Il était logique que cette réforme s'accompagnât d'une modification des conditions de reconnaissance du droit à pension en cas de séparation de corps ou de divorce.

En outre, le législateur a estimé opportun, à cette occasion, d'étendre par souci d'équité le bénéfice de la pension de réversion au conjoint séparé de corps et à l'ancien conjoint divorcé de la femme fonctionnaire qui en étaient jusqu'alors privés.

Tel est le double objet de la modification apportée à l'article L. 44 du code des pensions de retraite par l'article 13 de la loi précitée du 11 juillet 1975.

Par ailleurs, pour préserver les droits du conjoint contraint au divorce à la suite d'une longue séparation de fait, l'article 14 de cette même loi a modifié l'article L. 45 dudit code relatif aux modalités de partage de la pension de réversion entre les ayants cause.

La présente circulaire a pour objet de définir les conséquences et les modalités d'application des nouvelles dispositions de ces articles L. 44 et L. 45 qui, en vertu de l'article 25 de la loi du 11 juillet 1975 , entreront en vigueur le 1er janvier 1976.

1. Bénéficiaires.

Conformément au principe général selon lequel les droits à pension s'apprécient en fonction de la législation en vigueur à la date d'ouverture de ces droits, les nouveaux articles L. 44 et L. 45 s'appliquent aux ayants cause de fonctionnaires ou de militaires décédés en position d'activité ou de retraite au plus tôt le 31 décembre 1975, et à eux seuls.

2. Conditions dans lesquelles la séparation de corps ou le divorce peut ouvrir droit à pension.

Sous l'empire des dispositions anciennes de l'article L. 44, l'épouse séparée de corps ou la femme divorcée et non remariée ne pouvait prétendre à pension de réversion que pour autant que le jugement avait été prononcé exclusivement en sa faveur.

Aux termes de cet article dans sa rédaction nouvelle, le conjoint séparé de corps ou l'ancien conjoint divorcé et non remarié peut dorénavant prétendre à pension de réversion lorsque la séparation de corps ou le divorce n'a pas été prononcé « contre lui ».

A cet égard, l'article 265 nouveau du code civil dispose que le divorce est réputé prononcé contre un époux lorsqu'il a été prononcé à ses torts exclusifs. Il est aussi réputé prononcé contre l'époux qui a pris l'initiative du divorce lorsqu'il a été obtenu en raison de la rupture de la vie commune.

Ce même article stipule en outre que les droits conférés par la loi à l'époux divorcé ne sont pas perdus en cas de partage des torts ou de divorce par consentement mutuel.

Toutefois, il résulte de l'article 24 de la loi précitée du 11 juillet 1975 qu'un jugement de divorce ou de séparation de corps rendu, même postérieurement au 1er janvier 1976, au titre des dispositions en vigueur avant le 1er janvier 1976 ne peut que produire les effets prévus par la loi ancienne.

A cet égard, invité à préciser les conséquences de ce texte sur l'article L. 44 nouveau du code des pensions de retraite, le ministre de la justice a indiqué notamment qu'il ne peut y avoir d'assimilation, au regard de la législation sur les pensions de réversion, entre le divorce aux torts réciproques régi par la loi ancienne et le divorce aux torts partagés prévu par la loi nouvelle.

Dans ces conditions, quelle que soit la date du décès de l'auteur du droit, les ayants cause dont la séparation de corps ou le divorce a été prononcé à la suite d'une action engagée avant le 1er janvier 1976 ne peuvent prétendre à pension, sous réserve de l'appréciation souveraine des tribunaux, si le jugement n'a pas été rendu à leur profit exclusif. Sont donc notamment écartés du droit à pension de réversion, comme précédemment, les ayants cause séparés de corps ou divorcés « aux torts et griefs réciproques des époux », « aux torts prépondérants » de l'auteur du droit ou encore « à la requête et au profit de chacun des époux », un tel jugement étant aussi fondé sur les torts réciproques des conjoints.

En revanche, les ayants cause séparés de corps ou divorcés à la suite d'une action engagée depuis l'entrée en vigueur de la loi du 11 juillet 1975 peuvent prétendre à pension de réversion lorsque le jugement n'a pas été rendu contre eux, c'est-à-dire en fait lorsqu'il a été rendu :

  • aux torts exclusifs de l'auteur du droit ;

  • aux torts partagés ;

  • par consentement mutuel ;

  • à l'initiative de l'auteur du droit pour cause de rupture de la vie commune.

3. Droit à pension du conjoint ou ex-conjoint de la femme fonctionnaire.

Bien que l'article L. 50 du code des pensions de retraite relatif au droit à pension du « conjoint survivant non séparé de corps » d'une femme fonctionnaire ou d'une femme appartenant au personnel militaire féminin n'ait pas subi de modification, l'article L. 44 qui se réfère expressément à l'article L. 50 permet de reconnaître un droit à pension de réversion au conjoint séparé de corps ou à l'ancien conjoint divorcé et non remarié de la femme fonctionnaire décédée après le 30 décembre 1975, lorsque la séparation de corps ou le divorce remplit la condition définie au paragraphe II ci-dessus.

Dans la déclaration prévue au paragraphe 4o de l'article D. 25 dudit code, le postulant à pension devra préciser si à sa connaissance l'auteur du droit avait ou non contracté un précédent mariage et laissé ou non des enfants mineurs issus de cette union.

4. Modalités de partage de la pension en application de l'article L. 45.

4.1. Concours entre une veuve et une épouse divorcée.

La loi no 66-1013 du 28 décembre 1966 (3) qui a modifié une première fois l'article L. 45 du code des pensions de retraite a repris la règle instituée par la loi du 20 septembre 1948 du partage de la pension de réversion entre la veuve et l'épouse divorcée au prorata de la durée totale des années de mariage, en y ajoutant une clause particulière assurant à la veuve, en toute hypothèse, un « minimum garanti » égal à la moitié de la pension de réversion.

Ce minimum garanti est abandonné dans la nouvelle rédaction de l'article L. 45.

En conséquence, lorsque l'auteur du droit est décédé après le 30 décembre 1975, le partage de la pension de réversion entre la veuve et l'épouse divorcée doit s'effectuer au prorata de la durée respective de chaque mariage.

Comme par le passé, la part de pension attribuée à l'une des bénéficiaires est susceptible, au décès de celle-ci, d'accroître la part de l'autre, sauf réversion du droit au profit des enfants mineurs.

Il est rappelé que la règle de partage définie par l'article L. 45 ne trouve application que dans les situations expressément visées par ce texte, c'est-à-dire lorsqu'il existe, au décès de l'auteur du droit, une veuve en concours avec une ou plusieurs épouses divorcées.

Dans les autres cas, le partage s'effectue dans les conditions prévues par l'article L. 43, c'est-à-dire en parts égales entre chaque lit.

4.2. Concours entre un veuf et un époux divorcé.

Conformément aux termes du 3e alinéa de l'article L. 45 modifié, les modalités de partage de la pension de réversion définies par ce texte s'appliquent, en cas de concours entre un veuf et un ancien conjoint non remarié dont le divorce n'a pas été prononcé contre lui, à la pension de réversion allouée en vertu de l'article L. 50 aux ayants cause de la femme fonctionnaire ou de la femme appartenant au personnel militaire féminin, décédée après le 30 décembre 1975.

A cet égard, il est rappelé qu'en vertu des dispositions dudit article L. 50, qui ont été commentées par la circulaire de mon département F/1/25-003/SP du 20 juin 1974 (4), le droit à pension du conjoint survivant d'une femme fonctionnaire ou d'une femme appartenant au personnel militaire féminin s'ouvre au décès de celle-ci mais que, sauf en cas d'invalidité du postulant, la jouissance d'une telle pension est différée le cas échéant aussi longtemps qu'il existe des orphelins bénéficiaires du 1er alinéa de l'article L. 42, quel que soit le mariage dont ils sont issus, et en tout état de cause jusqu'à ce que l'intéressé atteigne l'âge de soixante ans.

Dans l'hypothèse considérée, il conviendra donc de concéder les deux parts de la pension de réversion, éventuellement avec jouissance différée, dans les conditions indiquées au paragraphe II-B de la circulaire précitée.

La mise en paiement de la part de pension attribuée à l'un des bénéficiaires sera sans influence sur celle de l'autre qui, par l'effet de la concession avec jouissance différée, demeurera réservée au profit de son titulaire et sera mise en service le jour où celui-ci deviendra lui-même invalide ou atteindra l'âge de soixante ans.

Conformément aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 45, en cas de décès de l'un des bénéficiaires sa part accroîtra la part de l'autre.

En outre, étant donné qu'en vertu du dernier alinéa de l'article L. 50 susvisé le conjoint survivant d'une femme fonctionnaire perd définitivement son droit à pension lorsqu'il se remarie ou vit en état de concubinage notoire, il est admis que le remariage ou le concubinage notoire de l'un des bénéficiaires pourra entraîner l'octroi de la totalité de la pension de réversion à l'autre sur demande présentée par ce dernier.

Les administrations sont invitées à saisir le département des difficultés que pourrait soulever l'application de la présente circulaire.

Notes

    4BOC 1974, p. 1865.

Pour le ministre de l'économie et des finances et par délégation :

Pour le directeur du budget :

Le sous-directeur,

Robert LESCURE.

Le chef du service des pensions,

J. LACRAMPE.