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DIRECTION DES SERVICES FINANCIERS : Sous-Direction de la comptabilité centrale ; Bureau de la réglementation

INSTRUCTION N° 41930 du ministre délégué chargé du budget relative à la consultation du comité du contentieux sur les projets de décisions opposant la prescription quadriennale à un créancier de l'Etat ou le relevant de la prescription encourue.

Du 23 octobre 1981
NOR

Classement dans l'édition méthodique : BOEM  310.8.

Référence de publication : BOC, p. 4990.

1. Contenu

 

La présente instruction précise et complète les indications contenues dans la circulaire B /2-B/81 du 11 mai 1981 émise par le ministre du budget (BOC, p. 4989).

 

2. Contenu

Le décret no 81-174 du 23 février 1981 relatif à l'application de la loi 68-1250 du 31 décembre 1968 (BOC/SC, p. 1257) a imposé la consultation préalable du comité du contentieux placé auprès de l'agent judiciaire du Trésor avant toute décision tendant à opposer à un créancier de l'Etat la prescription quadriennale établie par la loi 68-1250 du 31 décembre 1968 ou à le relever de la prescription encourue, lorsque la créance concernée est étrangère à l'impôt et au domaine.

Ces dispositions ont pour but de réaliser une unité de doctrine au sein de l'administration en ce qui concerne l'application de la loi et, par là-même, de mieux assurer l'égalité de traitement des citoyens.

Il avait été constaté, en effet, que les services compétents n'appréciaient pas toujours de la même manière la réalité des causes interruptives et suspensives de la prescription et, lorsque celle-ci était effectivement encourue, utilisaient d'une manière plus ou moins large la faculté de relever le créancier de la prescription, prévue à l'article 6 de la loi du 31 décembre 1968 .

La présent instruction a pour objet, sous réserve de l'appréciation souveraine des tribunaux, de préciser les modalités d'application du décret dont il s'agit, en ce qui concerne particulièrement :

  • le domaine de la compétence du comité du contentieux ;

  • la procédure de la saisine.

3. Domaine de la compétence du comité.

3.1. Créances concernées.

Aux termes de l'article premier de la loi du 31 décembre 1968 la prescription quadriennale est applicable, sans préjudice des déchéances particulières résultant d'autres dispositions législatives, aux créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics dotés d'un comptable public.

Le décret du 23 février 1981 ne concerne pas l'ensemble de ces créances, il ne vise que les créances sur l'Etat, étrangères à l'impôt et au domaine.

L'avis préalable du comité n'a donc pas à être requis :

  • pour les créances sur l'Etat qui intéressent l'impôt et le domaine ;

  • pour les créances sur les départements, les communes et les établissements publics.

En outre, il y a lieu de rappeler que, conformément à l'article 4 de la loi du 31 décembre 1968 , la prescription quadriennale n'est pas applicable en matière de remboursement de dépôts et consignations, non plus qu'aux intérêts des sommes déposées et consignées. Le comité n'aura donc pas à être consulté en la matière.

3.2. Nature des décisions à soumettre au comité.

Le décret du 23 février 1981 concerne deux catégories de décisions différentes :

  • les décisions opposant la prescription (art. 1er) ;

  • les décisions relevant un créancier de la prescription encourue (art. 2).

Il convient de souligner que ces deux catégories de décisions sont différentes par leur nature, et que l'avis donné par le comité du contentieux ne sera pas, en conséquence, fondé sur les mêmes considérations.

Dans le premier cas, il appartient au comité d'examiner si la décision opposant la prescription est fondée en droit ; il devra notamment vérifier qu'aucune des causes d'interruption ou de suspension de la prescription prévues par la loi du 31 décembre 1968 n'est applicable en l'espèce.

Il s'agit d'éviter que la décision de l'administration puisse ultérieurement faire l'objet d'une contestation justifiée.

Dans le second cas, il s'agit d'un acte purement discrétionnaire, justifié par des circonstances particulières et notamment par la situation du créancier. Le comité peut seulement en apprécier l'opportunité et veiller à ce que les décisions prises par les diverses administrations intéressées ne présentent pas des divergences contraires à l'équité.

Il apparaît qu'aux termes du décret, l'intervention du comité n'est requise que dans l'hypothèse où l'administration envisage de donner une suite favorable à une demande de relevé de forclusion. Il n'a pas à être consulté si cette demande est rejetée.

3.3. Stade d'intervention du comité.

Les dispositions du décret du 23 février 1981 impliquent que la consultation du comité est préalable à la décision de l'administration.

Il en résulte que le comité n'a pas, en principe, à être saisi des contestations qui pourraient être élevées après l'intervention de la décision.

Toutefois, il y a lieu d'envisager le cas où le créancier conteste une telle décision, par la voie d'un recours gracieux, notamment en invoquant une cause d'interruption ou de suspension de la prescription qui n'était pas connue au moment où le projet de décision a été examiné.

L'ordonnateur a alors la possibilité d'annuler sa décision, s'il reconnaît que la prétention du créancier est fondée. Conformément à la règle du parallélisme des formes, cette nouvelle décision devra également être soumise à l'avis préalable du comité du contentieux.

Par ailleurs, il est rappelé que l'article 7 de la loi du 31 décembre 1968 dispose que, si la créance fait l'objet d'un litige, la prescription doit être invoquée avant que la juridiction saisie au premier degré ne se soit prononcée sur le fond. Le même article dispose en outre, que l'administration ne peut, en aucun cas, s'opposer à l'exécution d'une décision passée en force de chose jugée.

Dans cette hypothèse, l'ordonnateur devra donc prendre toutes mesures pour que le comité du contentieux soit saisi en temps utile. A cet égard le décret du 23 février 1981 a prévu que, s'il représente lui-même l'Etat, c'est-à-dire en règle générale lorsque la contestation relève des tribunaux de l'ordre administratif, il devra solliciter de la juridiction compétente le délai nécessaire pour recueillir l'avis du comité. Dans les autres cas, notamment si l'instance est engagée devant les tribunaux de l'ordre judiciaire, il devra demander à l'agent judiciaire du Trésor de solliciter ce délai.

4. Procédure de la saisine.

4.1. Autorité compétente.

La comité doit être saisi par les services de l'ordonnateur compétent pour prendre la décision, c'est-à-dire le ministre sur les crédits duquel la dépense serait imputable.

Dans le cas où la décision est relative à un relevé de prescription, elle doit, conformément à l'article 6 de la loi du 31 décembre 1968 , être prise conjointement par le ministre ordonnateur et par le ministre de l'économie et des finances (direction de la comptabilité publique).

4.2. Examen individuel des projets de décision.

Le comité du contentieux est tenu de se prononcer sur chaque projet de décision ; un avis donné sur une décision déterminée ne pourrait valablement dispenser l'ordonnateur de le consulter à propos d'autres affaires semblables.

Cette règle ne s'oppose pas à ce qu'un ensemble de projets de décisions, portant sur des affaires de même nature, soit soumis simultanément au comité.

4.3. Présentation du projet de décision.

Le dossier du projet de décision doit contenir toutes les pièces permettant de vérifier, selon le cas :

  • soit que la prescription est opposée à bon droit ;

  • soit que le relevé de prescription est justifié.

4.3.1. Projets de décisions opposant la prescription.

Le dossier soumis au comité du contentieux doit comprendre :

  • la ou les demandes de paiement formulées par le créancier ;

  • les précisions nécessaires quant à la nature et au montant de la créance ;

  • les pièces permettant d'établir la date à laquelle les droits éventuels auraient été acquis ;

  • l'attestation qu'aucune des causes d'interruption ou de suspension de la prescription prévues par la loi du 31 décembre 1968 n'a été invoquée par le créancier et qu'aucune d'elles n'est connue de l'administration,

    ou, dans le cas contraire :

    • toutes pièces concernant les faits interruptifs ou suspensifs de la prescription (nature, date, effets, sur le cours de la prescription) ;

    • éventuellement, toutes indications utiles sur les recours contentieux exercés par l'intéressé et la confirmation qu'aucun jugement sur le fond n'est intervenu ;

  • le projet de décision opposant la prescription.

La décision doit être établie dans la forme sous laquelle le ministre se propose de la notifier au créancier. Conformément à la loi 79-587 du 11 juillet 1979 (BOC, p. 3098) relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, la décision opposant la prescription doit être motivée. La motivation doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision.

La décision doit intervenir même lorsque le créancier a introduit une action devant les tribunaux compétents ; le décret no 81-174 du 23 février 1981 (BOC, p. 738 ; abrogé par le décret no 98-81 du 11 février 1998 BOC, p. 1046) a d'ailleurs prévu, dans son article 3, que le délai nécessaire pour recueillir l'avis du comité du contentieux sur cette décision serait demandé à la juridiction saisie. Les éléments de la décision seront ensuite repris dans les conclusions ou le mémoire.

En ce qui concerne les causes d'interruption et de suspension de la prescription, il est rappelé que :

  • selon l'article 2 de la loi du 31 décembre 1968 , constituent des causes d'interruption de la prescription :

    • les réclamations formulées par le créancier, même si l'administration saisie n'est pas celle qui doit effectuer le règlement ;

    • les recours juridictionnels, même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance ;

    • la communication écrite d'une administration concernant le fait générateur, l'existence, le montant ou le paiement de la créance (par exemple lorsque cette communication est de nature à laisser croire au créancier que sa demande est accueillie et à le détourner d'exercer ses droits — cf. CE 11-1-78 veuve Audin, recueil Lebon, p. 8) ; la communication émanant de l'administration intéressée a un effet interruptif même si elle n'a pas été faite directement au créancier qui s'en prévaut ; tel peut être le cas notamment des correspondances échangées entre les ordonnateurs et le comptables ;

    • l'émission d'un moyen de règlement, même si ce règlement ne couvre qu'une partie de la créance ou si le créancier n'a pas été exactement désigné ;

  • selon l'article 3 de la même loi, les causes de suspension de la prescription sont :

    • l'empêchement légal d'agir (incapables non pourvus de représentants légaux) ;

    • l'empêchement matériel (force majeure) ;

    • l'ignorance légitime de l'existence de la créance.

Il convient, en outre, de tenir compte des dispositions de l'article 5 de la loi du 31 décembre 1968 selon lesquelles ne sont plus soumises à la prescription, à partir de la date de l'opposition, les créances au paiement desquelles il a été fait opposition entre les mains d'un comptable public.

4.3.2. Projets de décisions accordant un relevé de prescription.

Le relevé de prescription ne peut être proposé que dans le cas où une demande a été formulée en ce sens par le créancier, ou son représentant.

Conformément à l'article 6 de la loi 68-1250 du 31 décembre 1968 , il doit être justifié par des circonstances particulières et notamment par la situation du créancier.

4.3.2.1.

Si une décision opposant la prescription a déjà été prise, le dossier comprendra :

  • la copie de la demande de relevé de prescription formulée par le créancier ;

  • la copie de la décision opposant la prescription ;

  • l'exposé des circonstances particulières qui justifient le relevé de prescription, notamment en ce qui concerne la situation familiale ou pécuniaire du créancier ;

  • le projet de décision accordant le relevé de prescription, établi conjointement par le ministre ordonnateur et le ministre de l'économie et des finances.

4.3.2.2.

Si le ministre a été saisi d'une demande de relevé de prescription avant que celle-ci ait été effectivement opposée, il pourra établir un projet unique qui, après avoir constaté que la prescription est acquise, accordera en tout ou partie le relevé de celle-ci.

Dans ce cas, il conviendra de fournir :

  • une copie de la demande de relevé de prescription ;

  • toutes indications relatives à la nature et au montant de la créance ;

  • les renseignements énumérés au paragraphe C) 1 ci-dessus établissant que la prescription peut être opposée ;

  • l'exposé des circonstances particulières qui justifient le relevé de prescription, notamment en ce qui concerne la situation familiale ou pécuniaire du créancier ;

  • le projet de décision accordant le relevé de prescription, établi conjointement par le ministre ordonnateur de la dépense et le ministre de l'économie et des finances.

Contrairement à la décision opposant la prescription, la décision accordant le relevé de prescription, qui est un acte discrétionnaire, n'a pas à être motivée.

Il conviendra de faire parvenir les dossiers constitués comme il est dit ci-dessus :

  • au secrétariat du comité du contentieux, ministère de l'économie et des finances, service juridique et de l'agence judiciaire du Trésor, 41, quai Branly, 75700 Paris, lorsqu'il s'agit d'un projet de décision opposant la prescription quadriennale ;

  • à la direction de la comptabilité publique, ministère de l'économie et des finances, 93, rue de Rivoli, Paris, lorsqu'il s'agit d'un projet de décision accordant un relevé de prescription.

S'il y a lieu, le dossier sera ensuite transmis par cette direction au secrétariat du comité du contentieux.

Pour le ministre délégué chargé du budget et par délégation :

Le directeur de cabinet,

Louis SCHWEIZER.