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DIRECTION DE LA FONCTION MILITAIRE ET DES AFFAIRES JURIDIQUES : Sous-Direction des affaires administratives

CIRCULAIRE 11266 /DEF/DFAJ/AA/2 relative au témoignage en justice des personnels de la défense.

Du 06 décembre 1984
NOR

Classement dans l'édition méthodique : BOEM  240.9., 200.6.1.3.3.

Référence de publication : BOC, p. 6892.

Préambule.

Lors d'un litige administratif, d'une procédure judiciaire civile ou pénale (1), les magistrats de l'ordre administratif, ceux de l'ordre judiciaire et les officiers de police judiciaire agissant sur commission rogatoire (2) disposent de pouvoirs très étendus pour assurer leur mission qui consiste à faire la lumière sur les faits ou les infractions dont ils ont connaissance ainsi que, le cas échéant, sur la personnalité de leurs auteurs.

A cet effet, la loi leur donne la possibilité d'entendre toute personne, quelle qu'elle soit, susceptible de leur apporter des indications pouvant aider à la manifestation de la vérité.

Les personnels civils ou militaires de la défense, appelés à déposer sur des faits dont ils ont connaissance, n'échappent pas à cette règle générale de droit commun et sont tenus de déposer chaque fois que leur témoignage s'avère nécessaire.

En tant qu'agents publics de l'État, ils sont soumis aux mêmes devoirs et obligations que l'ensemble des fonctionnaires : ils doivent notamment respecter les prescriptions relatives :

  • à la discrétion professionnelle ;

  • au secret professionnel.

En tant que citoyens, ils sont tenus au secret de défense nationale protégé par le code pénal, notamment ses articles 75, 76 et 78, 79.

La présente circulaire s'applique à l'ensemble des personnels civils et militaires de la défense.

Par personnels civils, il faut entendre tous ceux qui sont liés par statut ou contrat au ministère de la défense ou qui y sont affectés : ouvriers, contractuels, fonctionnaires (que ces derniers soient en activité de service, en position de détachement ou de disponibilité).

Par militaires, il faut entendre tous ceux qui sont soumis au statut général des militaires : personnels de carrière, sous contrat et appelés.

Cette circulaire s'applique également aux anciens personnels civils ou militaires du ministère appelés à témoigner dans des affaires dont ils ont eu à connaître en tant que membres du ministère.

Après une brève étude des données juridiques qui régissent le témoignage en justice, elle rappelle et précise les règles d'application des prescriptions relatives à la discrétion professionnelle, au secret professionnel et au secret de défense ainsi que la conduite générale à tenir dans chaque cas.

1. Le témoignage en justice.

Le témoignage en justice est l'acte par lequel une personne atteste, à l'occasion d'une enquête préalable à la saisine d'un tribunal ou d'une instance devant une juridiction, l'existence d'un fait dont elle a eu personnellement connaissance.

Comme tout citoyen, le personnel de la défense doit la vérité à la justice. Le législateur a précisé, d'une part, les motifs pour lesquels les personnes sont susceptibles d'être entendues comme témoins et a énoncé, d'autre part, les obligations pesant sur ceux-ci.

1.1. Motifs pour lesquels des personnes peuvent être entendues comme témoins.

1.1.1.

Le code de procédure pénale prévoit les catégories de personnes qui peuvent être entendues au cours d'une instruction ou d'un procès pénal.

  • 1. Au cours d'une instruction : toutes les personnes dont la déposition paraît utile au juge d'instruction (ou à l'officier de police judiciaire agissant sur commission rogatoire).

  • 2. Au cours du procès pénal : toutes les personnes qui ont à déposer soit sur les faits reprochés au prévenu ou à l'accusé, soit sur sa personnalité et sur sa moralité.

1.1.2.

Le code civil dispose que « chacun est tenu d'apporter son concours à la justice en vue de la manifestation de la vérité ».

1.1.3.

Le code de procédure civile dispose également que « le juge qui procède à l'enquête peut, d'office ou à la demande des parties, convoquer ou entendre toute personne dont l'audition lui parait utile à la manifestation de la vérité ».

1.1.4.

Le code des tribunaux administratifs rappelle que « toutes les personnes sont admises comme témoin, à l'exception de celles qui sont incapables de témoigner en justice ».

1.1.5.

Le code de justice militaire se réfère aux règles du code de procédure pénale. Il prévoit la convocation des témoins devant les juges d'instruction (et les officiers de police judiciaire agissant sur commission rogatoire de ces magistrats) ainsi que leur citation à comparaître devant les juridictions des forces armées.

1.2. Obligations des témoins.

Les témoins sont tenus de respecter un certain nombre d'obligations. Ces obligations ont pour but d'assurer la crédibilité de leurs dépositions.

Le témoin, régulièrement convoqué devant un juge d'instruction, un officier de police judiciaire agissant sur commission rogatoire ou un tribunal de l'ordre judiciaire, administratif, civil ou militaire, a l'obligation :

1.2.1. De comparaître à la date fixée.

S'il ne se présente pas sans pouvoir fournir d'excuse légitime, il encourt une amende importante indépendamment des mesures de contrainte à comparaître par la force publique qui peuvent être ordonnées (art. 109 du code de procédure pénale).

1.2.2.

De prêter serment, avant toute déposition, selon les formes prévues par la loi (3).

1.2.3. De déposer et de révéler tout ce qu'il sait.

Il est, en effet, tenu de dire, conformément au serment qu'il a initialement prêté, « toute la vérité et rien que la vérité ».

S'il dissimule la vérité ou fait une déclaration volontairement inexacte devant une juridiction de jugement, il s'expose aux peines correctionnelles ou criminelles prévues pour faux témoignage.

Telles sont les trois obligations que le législateur impose normalement à toute personne qui est appelée à témoigner en justice.

Pour le personnel de la défense, cependant, seules les deux premières obligations (comparution et prestation de serment) s'imposent totalement : l'obligation de déposer et de révéler tout ce qu'il sait est, en effet, limitée par les prescriptions résultant de la discrétion professionnelle, du secret professionnel et du secret de défense.

2. Les limitations à l'obligation de déposer.

2.1. La discrétion professionnelle.

L'ensemble du personnel de la défense est astreint à une obligation de discrétion.

Les militaires y sont tenus conformément à l'article 18 de leur statut général et le personnel civil conformément à l'article 26 de la loi 83-634 du 13 juillet 1983 (voir ANNEXE II) sur les droits et obligations des fonctionnaires (4). Cette obligation concerne les faits, les informations et les documents dont ils ont connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions. Ils ne peuvent être déliés de cette obligation de discrétion, sauf cas expressément prévus par la législation en vigueur (5), que par l'autorisation expresse du ministre.

Cette obligation de discrétion n'est sanctionnée disciplinairement qu'en cas de détournement ou de communication, contraire aux règlements, de pièces ou de documents de service à des tiers. Il s'agit donc uniquement d'une obligation imposée pour protéger le ministère contre la divulgation au public de renseignements non communicables parvenus à la connaissance du personnel à l'occasion de son service.

Cette obligation ne peut donc être opposée aux magistrats, sauf en cas de questions portant sur une activité administrative ne se rapportant manifestement pas aux faits sur lesquels la vérité est recherchée.

Pour éviter tout problème éventuel en la matière, toute personne appartenant au ministère de la défense citée à comparaître doit solliciter les directives de sa hiérarchie avant de fournir un document ou un renseignement de service (6).

Toutes ces dispositions, qui ont pour but essentiel de protéger les intérêts du ministère, n'empêchent pas les personnels du ministère de la défense d'être soumis, comme tous les autres citoyens, à la loi et d'être obligés de répondre aux autres questions que peuvent leur poser, durant leurs témoignages, les autorités citées au § 12 ci-dessus.

Dans ce cas, seules les règles relatives au secret professionnel et au secret de défense peuvent les libérer de l'obligation de déposer.

2.2. Le secret professionnel.

2.2.1. L'article 378 du code pénal.

L'article 378 du code pénal (voir ANNEXE II) a prévu des peines d'amende et d'emprisonnement à l'égard du personnel médical et de toutes personnes dépositaires par état ou profession, ou par fonctions temporaires ou permanentes, des secrets qu'on leur confie, qui auraient révélé ces secrets, hors le cas où la loi les oblige ou les autorise à se porter dénonciateurs.

Alors que l'obligation de discrétion professionnelle vise à protéger le ministère de l'action éventuelle de ses agents, le secret professionnel de l'article 378 a pour but de protéger les particuliers à l'égard des tiers, qu'il s'agisse de secrets « acquis » dans l'exercice des fonctions médicales ou de secrets « confiés » par les intéressés à certaines catégories de personnes.

Au titre de l'article 378, le secret professionnel couvre donc deux grandes catégories d'informations :

  • les informations connues dans l'exercice des professions médicales dont tous les actes sont considérés comme confidentiels et secrets ;

  • les informations confiées sous le sceau du secret par des particuliers aux titulaires de certaines fonctions.

L'article 378 ne détermine pas expressément ces fonctions qui ont été, par la suite, définies par des textes particuliers : c'est ainsi, par exemple, que tous les militaires sont soumis au secret professionnel au titre de l'article 18 de la loi 72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires et tous les fonctionnaires civils au titre de l'article 26, premier alinéa de la loi 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations de fonctionnaires (voir ANNEXE II)(7).

En résumé, l'article 378 du code pénal s'applique (8) à tous ceux auxquels leur état ou leur profession impose de ne pas divulguer les secrets qui leur sont confiés, soit que la connaissance de ces faits provienne de l'exercice d'une profession aux actes de laquelle la loi, dans un intérêt général et d'ordre public, a imprimé le caractère confidentiel et secret (intérêt public), soit que les faits qu'ils apprennent ainsi sous le sceau du secret leur aient été confiés par des particuliers (intérêt des administrés).

Toutes les personnes tenues au secret professionnel doivent, lorsqu'elles sont régulièrement citées, déférer à la convocation et prêter le serment requis. En revanche, elles ont dans certains cas non seulement le droit, mais même le devoir, de ne pas révéler les faits dont elles ont eu connaissance dans l'exercice de leurs fonctions.

2.2.2. Secret professionnel absolu et secret professionnel relatif.

La jurisprudence considère que le secret professionnel est, selon les fonctions du confident, plus ou moins contraignant. Elle juge, en effet, que certains secrets sont absolus et dispensent de déposer en justice (secret professionnel absolu), alors que d'autres secrets ne s'imposent pas avec une rigueur absolue et constituent seulement une simple défense de divulgation aux tiers, tout en permettant de déposer en justice (secret professionnel relatif).

2.2.3. Le personnel de la défense soumis au secret professionnel absolu.

Le secret professionnel n'est absolu que pour les catégories suivantes de personnel :

  • le personnel des armées assujetti au secret professionnel médical (9) ;

  • les aumôniers des armées (10) ;

  • les magistrats militaires et les membres du greffe des juridictions des forces armées ;

  • les officiers et les sous-officiers de la gendarmerie, mais seulement à l'égard de l'identité des personnes leur fournissant au cours d'une enquête des renseignements sous le sceau du secret. Dans ce cas, ils ne peuvent être relevés de leur obligation de silence que par les intéressés eux-mêmes (11) ;

  • les assistants ou assistantes de service social agissant d'initiative ou sur demande de l'autorité militaire.

Le personnel astreint au secret professionnel absolu par la jurisprudence pénale doit refuser de déposer sur un fait au sujet duquel son témoignage est requis en affirmant, sous la foi du serment, l'existence des conditions qui l'obligent à se taire :

  • 1. Si ce fait est parvenu à sa connaissance dans l'exercice de sa profession ou de son ministère.

  • 2. Si, au moment de sa communication, le secret lui a été expressément demandé.

  • 3. Ou si le fait est en lui-même confidentiel par nature (12).

En imposant expressément à tout le personnel désigné ci-dessus l'obligation du secret comme un devoir absolu de son état, la jurisprudence a voulu affirmer solennellement que la confiance des interlocuteurs de ces personnes était indispensable à l'exercice de leur profession ou de leur ministère.

2.2.4. Le personnel de la défense soumis au secret professionnel relatif.

Pour les autres catégories de personnel, le secret professionnel est relatif parce qu'il s'applique à l'égard des tiers et non des magistrats.

Une révélation à des tiers de faits connus à l'occasion de leurs fonctions peut entraîner des poursuites devant un tribunal correctionnel.

En revanche, convoqués comme témoins devant une juridiction, ils ont l'obligation de dire tout ce qu'ils savent.

2.3. Le secret de défense nationale.

Trois sortes de renseignements, objets, documents ou procédés peuvent être considérés comme secrets de défense au titre de l'article premier du décret n81-514 du 12 mai 1981 relatif à l'organisation de la protection des secrets et des informations concernant la défense nationale et la sûreté de l'État (voir ANNEXE II) :

  • ceux intéressant la défense nationale et la sûreté de l'État ;

  • ceux dont la divulgation à des personnes non qualifiées est de nature à nuire à la défense nationale et à la sûreté de l'État ;

  • ceux qui pourraient conduire à la découverte d'un secret intéressant la défense nationale et la sûreté de l'État.

La protection de ces renseignements, objets, documents ou procédés est pour le pays d'une importance vitale, ce qui justifie l'attention toute particulière dont elle est l'objet.

En conséquence, toute personne détentrice d'un secret de défense nationale ne peut le divulguer, même à une juridiction. Ce principe qui résulte des articles 75, 76, 78 et 79 du code pénal (ANNEXE II) est applicable devant toutes les juridictions.

2.3.1. Les juridictions administratives.

Le conseil d'État a admis dans les arrêts Coulon du 11 mars 1955 et Houhou du 2 octobre 1963 les conclusions suivantes :

  • 1. Il appartient uniquement à l'autorité responsable de désigner les personnes qui peuvent être dépositaires de secrets de défense nationale.

  • 2. Le juge administratif ne peut obtenir d'informations pour lesquelles l'autorité compétente affirme que leur divulgation, même opérée sous les garanties et dans les formes juridictionnelles, est exclue par les nécessités de la défense nationale. Dans ce cas, le refus de témoignage opposé par le représentant du ministère de la défense dépositaire d'un secret de défense nationale ne peut être commandé que par les nécessités de la défense nationale, confirmées par les autorités responsables. La juridiction qui se trouve placée devant un tel refus peut soit l'admettre, soit s'assurer auprès du ministre compétent de la légitimité. Si le refus initial est confirmé, elle ne peut qu'en prendre acte.

  • 3. Il incombe à l'autorité militaire responsable de fournir au juge administratif toutes indications susceptibles de lui permettre, sans porter aucune atteinte directe ou indirecte aux secrets garantis par la loi, de se prononcer en pleine connaissance de cause.

  • 4. En cas de refus de l'administration de fournir de telles indications, le juge doit « joindre cet élément de décision en vue du jugement à rendre à l'ensemble des données fournies par le dossier ».

Ces deux arrêts mettent en évidence la position très ferme du conseil d'État en matière de secret de défense nationale. La protection de ce secret est considérée comme absolue et prioritaire et peut aller jusqu'au refus de communiquer au juge administratif de simples renseignements ne portant aucune atteinte directe ou indirecte aux secrets garantis par la loi, à charge évidemment pour l'administration d'en supporter les conséquences éventuelles, notamment sur le plan pécuniaire.

2.3.2. Les juridictions judiciaires (civiles ou pénales).

Deux avis du conseil d'État du 19 juillet et du 29 août 1974 ont confirmé les deux arrêts précédents du conseil d'État et étendu leurs dispositions à toutes les juridictions françaises. Dans ces deux avis, le conseil d'État, saisi par le Premier ministre, a exprimé les opinions suivantes :

  • 1. Le secret de défense nationale s'applique à toutes les juridictions, aussi bien judiciaires qu'administratives.

  • 2. Quiconque est détenteur d'un secret de défense nationale ne peut le divulguer. Cette obligation doit être opposée même à la juridiction.

  • 3. Dans le cas où une juridiction estime nécessaire, à l'occasion d'un litige dont elle est saisie, la communication de pièces couvertes par le secret de défense nationale ou l'audition de personnes appartenant à des services dont l'organisation et le fonctionnement sont couverts par le même secret, c'est l'autorité responsable qui décide des communications à faire et désigne, le cas échéant, les personnes qui répondront aux convocations.

  • 4. Cependant, toute personne nommément et régulièrement citée doit déférer à la convocation, sous peine de s'exposer aux contraintes et peines prévues par la loi.

  • 5. Cette obligation de déférer, à laquelle l'autorité administrative n'a le pouvoir de soustraire personne, ne fait obstacle ni à ce que le service intéressé désigne, en outre, toute autre personne qualifiée pour répondre aux questions, ni à ce que la personne citée oppose à toutes investigations le secret de la défense dont elle serait détentrice.

  • 6. La juridiction placée devant un refus de communication ou de témoignage peut s'assurer auprès du ministre compétent de la légitimité de ce refus.

  • 7. En cas de confirmation du refus, elle en prend acte et statue en conséquence.

Cette position du conseil d'État est confirmée par la doctrine pénale qui admet que quiconque détient un secret de la défense nationale doit le respecter même à l'égard de l'autorité judiciaire à laquelle il doit être opposé. Pour la doctrine pénale, le témoin ne peut être interrogé sur le secret qu'il détient.

Par conséquent, toute personne appartenant au ministère de la défense, nommément citée devant n'importe quelle juridiction, à l'occasion d'une enquête ou d'une instance en justice, doit déférer à la convocation mais, s'il y a lieu, opposer aux investigations du juge ou de l'officier de police judiciaire agissant sur commission rogatoire le secret de défense nationale dont elle est détentrice.

Elle doit, au préalable, en rendre compte à l'autorité hiérarchique et solliciter ses instructions. Elle se refuse à toute déclaration tant que le ministre de la défense saisi par l'autorité hiérarchique ou par la juridiction ne l'a pas autorisé à témoigner, car toute communication couverte par le secret de défense ne peut être décidée que par l'autorité responsable, c'est-à-dire par le ministre ou une autorité ayant reçu délégation en la matière.

3. Modalités particulières d'application.

Toute personne convoquée comme témoin, se trouvant dans l'impossibilité de comparaître, doit aviser au plus tôt l'autorité judiciaire devant laquelle elle doit déposer et en rendre compte aussitôt à son autorité hiérarchique.

Pour les militaires en activité de service, la détermination de la tenue est laissée à l'initiative des autorités hiérarchiques locales qui décident en fonction des circonstances.

Le cabinet du ministre (sous-direction des bureaux du cabinet) est saisi d'urgence, sous référence du présent texte, par le commandant de région (ou l'autorité hiérarchique équivalente) de tout cas d'application de cette circulaire présentant une difficulté ou un intérêt particulier. Cette saisine ne fait pas message avec copie à l'état-major (ou la direction) concerné.

4. Sanctions.

Le devoir de respecter l'obligation de discrétion professionnelle, le secret professionnel et celui de défense nationale est sanctionné, pour les personnes qui y sont astreintes, par l'engagement de leur responsabilité sur un triple plan :

  • disciplinaire (art. 18 du statut général des militaires et art. 26, 2e alinéa de la loi du 13 juillet 1983 sur les obligations des fonctionnaires) ;

  • civil (paiement de dommages et intérêts aux personnes lésées en vertu de l'art. 1382 du code civil qui dispose que « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ») ;

  • pénal (peines d'amende et d'emprisonnement prévues par les art. 75, 76, 78, 79 et 378 du code pénal ; le maximum des peines d'emprisonnement variant, selon les atteintes à la défense nationale, de vingt ans de détention criminelle à cinq ans d'emprisonnement).

Le ministre de la défense,

Charles HERNU.

Annexes

ANNEXE I. Témoignage des personnels de la défense dans le cadre d'enquêtes judiciaires.

En dehors des litiges administratifs, des procédures judiciaires civiles ou pénales, les personnels de la défense peuvent être entendus en qualité de témoins dans le cadre d'une enquête de police judiciaire, qu'elle soit préliminaire ou de flagrant délit, par des officiers ou des agents de police judiciaire de la police ou de la gendarmerie nationale (1).

Lors de ces enquêtes, ces derniers peuvent entendre toute personne susceptible de fournir des renseignements sur les faits ou les objets et documents saisis.

L'obligation de respecter les règles relatives à la discrétion professionnelle, au secret professionnel et à la protection du secret de défense s'impose de la même manière aux personnels de la défense.

Leur témoignage est soumis aux mêmes règles que celles prévues pour le témoignage devant une juridiction, à l'exception de trois particularités qui le rendent nettement moins contraignant :

  • 1. Absence de serment préalable.

  • 2. Absence de condamnation pour faux témoignage.

  • 3. Absence de sanction (amende) en cas de non-comparution sans excuse légitime.

Notes

    1Ainsi que par certains fonctionnaires chargés de fonctions particulières de police judiciaire (fonctionnaires des douanes et des contributions, inspecteurs du travail, etc.) à l'occasion d'enquête relevant de leur compétence.

ANNEXE II. Dispositions législatives relatives à la discrétion professionnelle, au secret professionnel et au secret de défense.

I Discretion professionnelle.

11 Loi n o  72-662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires

(1).

Article 18.

Indépendamment des dispositions du code pénal relatives à la violation du secret de la défense nationale ou du secret professionnel, les militaires sont liés par l'obligation de discrétion pour tout ce qui concerne les faits et informations dont ils ont connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de leurs fonctions.

Tout détournement, toute communication contraire aux règlements, de pièces ou documents de service à des tiers sont interdits.

En dehors des cas expressément prévus par la réglementation en vigueur, les militaires ne peuvent être déliés de cette obligation de discrétion ou relevés de l'interdiction édictée à l'alinéa précédent qu'avec l'autorisation du ministre.

12 Loi n o  83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires

(2).

Article 26, deuxième alinéa.

Les fonctionnaires doivent faire preuve de discrétion professionnelle pour tous les faits, informations ou documents dont ils ont connaissance dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions. En dehors des cas expressément prévus par la réglementation en vigueur, notamment en matière de liberté d'accès aux documents administratifs, les fonctionnaires ne peuvent être déliés de cette obligation de discrétion professionnelle que par décision expresse de l'autorité dont ils dépendent.

Article 27.

Les fonctionnaires ont le devoir de satisfaire aux demandes d'information du public dans le respect des règles mentionnées à l'article 26 de la présente loi.

II Secret professionnel.

21 Loi n o  83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

Article 26, premier alinéa.

Les fonctionnaires sont tenus au secret professionnel dans le cadre des règles instituées dans le code pénal.

22 Code pénal.

Article 378.

Les médecins, chirurgiens et autres officiers de santé, ainsi que les pharmaciens, les sages-femmes et toutes autres personnes dépositaires, par état ou profession ou par fonctions temporaires ou permanentes, des secrets qu'on leur confie, qui, hors le cas où la loi les oblige ou les autorise à se porter dénonciateurs, auront révélé ces secrets, seront punis d'un emprisonnement d'un mois à six mois et d'une amende « de 500 francs à 8 000 francs ».

III Secret de défense nationale.

31 Code pénal.

Contenu

Article 75.

Sera puni de la détention criminelle à temps de dix à vingt ans, tout gardien, tout dépositaire par fonction ou par qualité d'un renseignement, objet, document ou procédé qui doit être tenu secret dans l'intérêt de la défense nationale ou dont la connaissance pourrait conduire à la découverte d'un secret de la défense nationale qui, sans intention de trahison ou d'espionnage, l'aura :

.................... 

Contenu

La peine sera celle de la détention criminelle à temps de cinq à dix ans si le gardien ou le dépositaire a agi par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou inobservation des règlements.

Article 76.

Sera puni de la détention criminelle à temps de cinq à dix ans tout Français ou étranger autre que ceux visés à l'article 75 qui, sans intention de trahison ou d'espionnage :

.................... 

Contenu

Article 78.

Sera puni d'un emprisonnement de un à cinq ans tout Français ou étranger qui, sans intention de trahison ou d'espionnage, aura porté à la connaissance d'une personne non qualifiée ou du public une information militaire non rendue publique par l'autorité compétente et dont la divulgation est manifestement de nature à nuire à la défense nationale.

Article 79.

Sera puni de la détention criminelle à temps de dix à vingt ans tout Français ou étranger qui :

.................... 

Contenu

Toutefois en temps de paix, les auteurs des infractions prévues aux alinéas 3°, 4°, 5° et 6° ci-dessus seront punis d'un emprisonnement de un à cinq ans et d'une amende de 3 000 francs à 80 000 francs.

2

Porté ou laissé porter à la connaissance d'une personne non qualifiée ou du public.

3

Portera ou laissera porter à la connaissance d'une personne non qualifiée ou du public un tel renseignement, objet, document ou procédé, ou en aura étendu la divulgation.

6

Communiquera à une personne non qualifiée ou rendra publics des renseignements relatifs soit aux mesures prises pour découvrir et arrêter les auteurs et les complices de crimes ou délits définis aux sections I et II du présent chapitre, soit à la marche des poursuites et de l'instruction, soit aux débats devant les juridictions de jugement.

32 Décret n o  81-514 du 12 mai 1981 relatif à l'organisation de la protection des secrets et des informations concernant la défense nationale et la sûreté de l'État

(3).

Article premier.

La protection des renseignements, objets, documents ou procédés intéressant la défense nationale et la sûreté de l'État, dont la divulgation à des personnes non qualifiées est de nature à nuire à la défense nationale et à la sûreté de l'État ou pourrait conduire à la découverte d'un secret intéressant la défense nationale et la sûreté de l'État, est organisée dans les conditions définies ci-après.

ANNEXE III. Tableau récapitulatif sur le témoignage en justice.

Obligations.

Personnels concernés.

Conduite à tenir.

Références.

Discrétion professionnelle (1).

Totalité des personnels du ministère.

Répondre normalement aux questions des magistrats, des officiers (et des agents) de police judiciaire, sauf en cas de demandes portant sur une activité administrative ne se rapportant manifestement pas aux faits sur lesquels la vérité est recherchée.

Paragraphe 21.

Secret professionnel (2).

Personnel médical.

Aumôniers.

Magistrats et membres du greffe.

Personnels soumis au secret professionnel absolu qui doivent refuser de déposer en justice sur tout fait parvenu à leur connaissance dans l'exercice de leur profession ou de leur ministère.

Paragraphes 221, 222 et 223.

 

Officiers et sous-officiers de gendarmerie.

Personnels soumis au secret professionnel absolu :

  • 1. Vis-à-vis des magistrats, en ce qui concerne l'identité des personnes leur fournissant au cours d'une enquête des renseignements sous le sceau du secret.

  • 2. Vis-à-vis des tiers, autres que les magistrats, en ce qui concerne les faits appris dans l'exercice de leurs fonctions d'auxiliaires de la justice.

Personnels soumis au secret professionnel relatif pour leurs autres activités.

 
 

Assistants, assistantes et auxiliaires de service social.

Personnels soumis au secret professionnel absolu agissant d'initiative ou sur demande de l'autorité militaire.

 
 

Autres personnels du ministère.

Personnels soumis au secret professionnel relatif :

  • 1. Ne doivent rien révéler à des tiers, sous peine de sanctions pénales.

  • 2. Doivent, par contre, témoigner en justice.

Paragraphes 221, 222 et 224.

Secret de défense (3).

Toute personne du ministère :

  • ayant reçu une autorisation préalable du niveau requis ;

  • et ayant besoin de connaître des informations protégées de ce niveau pour l'accomplissement de sa fonction ou de ses missions.

  • 1. Rendre compte à l'autorité supérieure pour solliciter ses instructions.

  • 2. Déférer à la réquisition.

  • 3. Agir selon les directives reçues :

    • a).  En cas d'autorisation de témoignage ordonnée par l'autorité compétente, témoigner.

    • b).  En cas d'interdiction de témoignage ordonnée par l'autorité compétente, refuser de répondre sur toute question relative à des informations protégées.

    • c).  En cas de désignation d'une autre personne qualifiée pour répondre, se taire.

Paragraphes 231 et 232.

(1) Obligation destinée à protéger le ministère contre la divulgation (éventuelle) d'information de la part de ses personnels.

(2) Obligation destinée à protéger les tiers contre la divulgation (éventuelle) d'informations par des personnels du ministère de la défense.

(3) Obligation destinée à protéger la défense nationale contre la divulgation (éventuelle) d'informations par des personnels du ministère, détenteurs d'informations classifiées.