LOI N° 66-409 portant amnistie.
Du 18 juin 1966NOR
L'ASSEMBLÉE NATIONALE ET LE SÉNAT ONT ADOPTÉ,LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE PROMULGUE LA LOI DONT LA TENEUR SUIT :
Chapitre CHAPITRE PREMIER. Amnistie de droit.
Art. 1er.
Sont amnistiées les infractions suivantes lorsqu'elles ont été commises antérieurement au 8 janvier 1966 :
1. Contraventions de police.
2. Délits prévus par les articles suivants du code pénal : 123, 222 à 224, 236, 238, alinéa premier (s'il y a eu négligence), 249, 250, 259, alinéa premier, 260, 271, 274, 275, 289, alinéa 2, 337 à 339, 414, 415 et 456.
3. Délits pour lesquels seule une peine d'amende est encourue.
Art. 2.
Sont amnistiées les infractions suivantes lorsqu'elles ont été commises antérieurement au 8 janvier 1966 ;
1. Délits en matière de réunions, de manifestations sur la voie publique, de conflits du travail et d'élections de toutes sortes, à l'exception, en ce qui concerne ces dernières infractions, des délits de fraude et de corruption électorale et des délits en matière de vote par correspondance et de vote par procuration.
2. Délits prévus par la loi du 29 juillet 1881 (n.i. BO/M ; BO/A, 1959, p. 1755), sur la liberté de la presse, à l'exception des infractions prévues aux articles 24, alinéas 1 à 3, 25, 26, 30, 31, 32, 33, alinéas 1 et 2, 36 et 37 ;
3. Délits prévus par la loidu 21 mai 1836 portant prohibition des loteries, par la loi du 15 juin 1907 réglementant le jeu dans les cercles et casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques, et par l'article 4 (3°) de la loi du 2 juin 1891 modifiée par le décret-loi du 30 octobre 1935 et par l'article 1er de la loi no 51-681 du 24 mai 1951.
4. Délits en matière forestière, de chasse et de pêche maritime (à l'exception des délits prévus aux articles 3 et 6 du décret du 9 janvier 1852), et fluviale à l'exception des délits prévus aux articles 434 et 434-1 du code rural.
5. Délits en matière de police des chemins de fer à l'exception des délits prévus à l'article 18 de la loi 15 juillet 1845.
6. Délits prévus par l'article premier de la loi du 1er août 1905 sur la répression des fraudes dans la vente des marchandises et des falsifications des denrées alimentaires et des produits agricoles, sauf le cas de récidive résultant d'une condamnation définitive antérieure au 8 janvier 1966.
7. Infractions commises à l'occasion de manifestations nées de conflits relatifs à des problèmes agricoles ou ruraux.
Art. 3.
Sont amnistiées les infractions prévues aux articles suivants du code de justice militaire pour l'armée de terre, lorsqu'elles ont été commises antérieurement au 1er janvier 1966 :
Articles 206 (sauf l'alinéa 1er), 207, 208, alinéas 6 et 7, 209, 210 (seulement lorsque les voies de fait envers un supérieur n'ont pas été exercées pendant le service ou à l'occasion du service et lorsque la peine prévue est correctionnelle), 211, 213 (seulement lorsque la peine prévue est correctionnelle), 214 (sauf l'alinéa 3), 218, 219, 225, 227 (sauf lorsque l'abandon de poste a eu lieu en présence de rebelles ou de l'ennemi), 228, 229 (sauf lorsque l'abandon de poste a eu lieu en présence de rebelles ou de l'ennemi), 230, 231 (lorsque la peine prévue est correctionnelle), 232 et 240.
Art. 4.
Sont amnistiées les infractions prévues aux articles suivants du code de justice militaire pour l'armée de mer, lorsqu'elles ont été commises antérieurement au 1er janvier 1966 :
Articles 208 (sauf l'alinéa 1er), 209, 210 (seulement dans les cas où les voies de fait envers un supérieur n'ont pas été exercées à bord, ou pendant le service ou à l'occasion du service, hors du bord, et lorsque la peine prévue est correctionnelle), 211, 212 (seulement lorsque la peine prévue est correctionnelle), 213, 215 (seulement lorsque la peine prévue est correctionnelle), 216 (sauf l'alinéa 3), 219, (§ 1er et 2 et dernier alinéa), 220, 221, 227, 228 (lorsque la peine prévue est correctionnelle), 229, 231 (sauf lorsque l'abandon de poste a eu lieu en présence de rebelles ou de l'ennemi), 232, 233 (sauf lorsque l'abandon du quart ou de poste a eu lieu en présence de rebelles ou de l'ennemi), 234, 235, 236 (lorsque la peine prévue est correctionnelle), 237, 245, 246, 248 (sauf le § 1er), 249 (sauf l'alinéa 1er), 250 (lorsque la peine prévue est correctionnelle), 251 (alinéa 2), 252, 253 et 259.
Art. 5.
Sont amnistiées les infractions prévues aux articles suivants du code de justice militaire institué par la loi no 65-542 du 8 juillet 1965 (JO du 9, p. 5851) lorsqu'elles ont été commises antérieurement au 8 janvier 1966 :
Articles 398 (lorsque la peine prévue est correctionnelle), 309 (lorsque la peine prévue est correctionnelle), 402, 409, alinéa premier, 410, alinéa premier, 416, 418, 420, 432 (lorsque la peine prévue est correctionnelle), 433, 434 (seulement lorsque les voies de fait envers un supérieur n'ont pas été exercées pendant le service ou à l'occasion du service et lorsque la peine prévue est correctionnelle), 346 (sauf alinéa 1er), 437, 439, 440 (lorsque la peine prévue est correctionnelle), 441, 442 (lorsque la peine prévue est correctionnelle), 443 (sauf alinéa 3), 445, 447, 448, 449, 450, 451, 454, 455 et 456.
Art. 6.
Sont amnistiées toutes infractions commises après le 10 juin 1940 et avant le 1er janvier 1946 par des combattants volontaires de la Résistance dont la qualité a été reconnue dans les conditions prévues par le chapitre premier du titre II du livre III du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre (2e partie : règlement d'administration publique), ou qui justifient de cette qualité au moyen des documents ou attestations énumérés au 2° à 5° de l'article R. 266 du même code, validés par un liquidateur national de mouvement ou de réseau.
Art. 7.
Sont amnistiés les individus qui ont été condamnés définitivement pour avoir refusé d'accomplir leurs obligations militaires en raison de leurs convictions religieuses ou philosophiques et qui ont obtenu le bénéfice des dispositions de la loi no 63-1255 du 21 décembre 1963 (BO/M, p. 4237 ; BO/A, p. 2616) relative à certaines modalités d'accomplissement des obligations imposées par la loi sur le recrutement.
Art. 8.
Sont amnistiés :
1. Les faits d'insoumission commis par des individus qui se sont rendus volontairement avant le 8 janvier 1966 à condition que la durée de l'insoumission n'ait pas excédé un an.
2. Les faits de désertion à l'intérieur et de désertion à l'étranger en temps de paix et en temps de guerre, commis par les militaires des armées de terre, de mer ou de l'air, lorsque le délinquant s'est rendu volontairement avant le 8 janvier 1966 et que la durée de la désertion n'a pas excédé trois mois.
On droit également au bénéfice des dispositions du présent article les personnes condamnées pour insoumission ou désertion et qui ont été empêchées de se rendre volontairement dans les délais ci-dessus prévus par suite d'un cas dûment justifié de force majeure. Au cas où l'intéressé serait dans l'incapacité de faire valoir ses droits par suite de décès, absence ou pour toute autre cause, l'amnistie pourra être constatée à la demande de toute personne justifiant d'un intérêt légitime.
Art. 9.
Sont, en outre, amnistiées les infractions commises avant le 8 janvier 1966, qui sont ou seront punies, à titre définitif :
a). De peines d'emprisonnement inférieures ou égales à trois mois assorties ou non d'une amende.
b). De peines d'emprisonnement inférieures ou égales à un an avec application de sursis simple, assorties ou non d'une amende.
c). De peines d'amende.
Art. 10.
Sont ou seront amnistiées les infractions commises avant le 8 janvier 1966 qui sont ou seront punies, à titre définitif, d'une peine d'emprisonnement inférieure ou égale à un an avec application du sursis avec mise à l'épreuve, assortie ou non d'une amende, lorsque le condamné aura accompli deux années d'épreuve, sans avoir fait l'objet d'une mesure de révocation.
Art. 11.
Cesseront d'être mentionnées au casier judiciaire les condamnations prononcées par des juridictions étrangères pour infractions de la nature de celles visées au présent chapitre commises avant le 8 janvier 1966.
Art. 12.
Des contestations relatives à l'amnistie de droit prévue par la présente loi, si elles concernent des condamnations pénales définitives, sont soumises aux règles de compétence et de procédure prévues par l'article 778, alinéas 2 et 3, du code de procédure pénale.
Si une condamnation pénale a été prononcée par une juridiction dont le siège était établi dans les départements algériens ou sahariens, les contestations relatives à l'amnistie sont soumises à la chambre d'accusation de la cour d'appel métropolitaine ou des départements d'outre-mer dans le ressort de laquelle réside le requérant ou, à défaut de résidence de l'intéressé en métropole ou dans les départements d'outre-mer, à la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris.
Si la décision a été rendue par un tribunal permanent des forces armées siégeant dans la métropole ou dans les départements d'outre-mer, la requête sera soumise à la chambre d'accusation
de la cour d'appel dans le ressort de laquelle était établi le siège de ce tribunal.
Dans le cas où la requête est rejetée, le requérant est condamné aux frais.
En l'absence de condamnation définitive, les contestations sont soumises à la juridiction compétente pour statuer sur la poursuite.
Chapitre CHAPITRE II. Amnistie par mesure individuelle.
Art. 13.
Le Président de la République peut admettre par décret au bénéfice de l'amnistie les délinquants primaires, mineurs de 21 ans au moment de l'infraction, condamnés à des peines correctionnelles pour des faits commis antérieurement au 8 janvier 1966.
La demande peut être présentée par toute personne dans le délai d'un an à compter, soit de la promulgation de la présente loi, soit de la condamnation définitive, soit de la date à laquelle le condamné a atteint la majorité de 21 ans.
Art. 14.
Le Président de la République peut, en outre, admettre par décret au bénéfice de l'amnistie les délinquants primaires condamnés pour des délits commis antérieurement au 8 janvier 1966, appartenant aux catégories suivantes :
1. Père, mère, veuve, enfants mineurs d'anciens combattants de la guerre 1914-1918 ou de militaires de la guerre 1939-1945 ou des théâtres d'opérations extérieurs tués à l'ennemi ou morts en captivité ou décédés par suite de leur captivité ou de blessures de guerre.
2. Père, mère, conjoint, enfants mineurs de toute personne qui a été exécutée comme otage ou qui est morte en déportation ou qui est décédée des suites de traitements subis du fait de l'ennemi ou de ses complices.
3. Prisonniers de la guerre 1914-1918 ou de la guerre 1939-1945, déportés résistants ou politiques, internés résistants ou politiques et leur conjoint, leurs enfants mineurs ainsi que les Mosellans et Alsaciens qui se sont soustraits à l'ordre d'incorporation de leur classe dans l'armée allemande et les Mosellans et Alsaciens qui, incorporés dans l'armée allemande, ont déserté avant la libération du territoire ou ont été condamnés par les tribunaux militaires allemands pour désertion, trahison ou sabotage.
4. Déportés résistants ou politiques et internés résistants ou politiques de nationalité étrangère justifiant d'une résidence en France de plus de vingt années au 8 janvier 1966 ainsi que leur conjoint, leurs enfants mineurs.
5. Anciens combattants de la guerre 1914-1918 et de la guerre 1939-1945.
6. Militaires de la guerre 1914-1918 et de la guerre 1939-1945 qui auront été blessés de guerre ou engagés volontaires, ou qui sont titulaires d'une citation homologuée, ou qui se sont évadés de la France métropolitaine ou des territoires d'outre-mer pour se mettre à la disposition de la France libre.
7. Combattants volontaires de la résistance, ainsi que leur conjoint et leurs enfants mineurs et les titulaires de la médaille de la résistance.
8. Anciens militaires de la France libre.
9. Anciens militaires des théâtres d'opérations extérieurs ou ayant participé à des opérations du maintien de l'ordre hors de la métropole.
10. Personnes bénéficiaires d'une pension à la suite de blessures reçues, soit sur des théâtres d'opérations extérieurs, soit au cours d'opérations du maintien de l'ordre hors de la métropole, soit par suite d'actes de terrorisme.
11. Père, mère, descendants, conjoint de toute personne tuée soit sur des théâtres d'opérations extérieurs, soit au cours d'opérations de maintien de l'ordre hors de la métropole, soit par suite d'actes de terrorisme.
12. Personnes qui se sont distinguées d'une manière exceptionnelle dans les domaines culturel ou scientifique.
La demande peut être présentée par toute personne dans le délai d'un an à compter, soit de la promulgation de la présente loi, soit de la condamnation définitive.
Les justifications à produire pour bénéficier des dispositions des 1° à 6° du présent article sont celles prévues par le décret no 47-1807 du 12 septembre 1947 (BO/G, p. 2768 ; n.i. BO/M ; BO/A, p. 1929) modifié, portant application de l'article 10 de la loi 47-1504 du 16 août 1947 (BO/G, p. 2671 ; n.i. BO/M ; BO/A, p. 1698 ; pour mémoire, BOEM/A 19, p. 204). Toutefois, en ce qui concerne les déportés, les seules pièces à fournir seront soit le certificat modèle A, soit la carte de déporté.
Les justifications à produire pour bénéficier des dispositions du 7° sont, en ce qui concerne la preuve de la qualité de combattant volontaire de la Résistance, celles prévues par l'article 6 de la présente loi.
Chapitre CHAPITRE III. Amnistie des sanctions disciplinaires ou professionnelles.
Art. 15.
Sans préjudice des dispositions de l'article 16, sont amnistiés les faits commis antérieurement au 8 janvier 1966, en tant qu'ils constituent des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles.
Toutefois, si ces mêmes faits ont donné lieu à une condamnation pénale, l'amnistie des sanctions disciplinaires ou professionnelles est subordonnée à l'amnistie de la condamnation pénale.
Sont exceptés du bénéfice de l'amnistie prévue par le présent article les faits constituant des manquements à la probité, aux bonnes mœurs ou à l'honneur.
Art. 16.
Sous réserve des dispositions de l'alinéa 2 de l'article 15, sont amnistiés les faits commis antérieurement au 8 janvier 1966 par les étudiants ou élèves des facultés ou écoles, ayant donné lieu ou pouvant donner lieu à des sanctions disciplinaires par les conseils de discipline ou toutes autres juridictions similaires.
Art. 17.
Les contestations relatives au bénéfice de l'amnistie des sanctions disciplinaires ou professionnelles définitives sont portées devant l'autorité ou la juridiction qui a rendu la décision.
L'intéressé peut saisir cette autorité ou cette juridiction aux fins de faire constater que le bénéfice de l'amnistie lui est effectivement acquis.
En l'absence de décision définitive, les contestations sont soumises à l'autorité ou à la juridiction compétente pour statuer sur la poursuite.
Art. 18.
Si les sanctions disciplinaires ou professionnelles définitives ont été prononcées par une autorité ou une juridiction dont le siège était établi sur le territoire d'un Etat alors placé sous la souveraineté, le protectorat ou la tutelle de la France, et ayant accédé depuis à l'indépendance, il sera procédé conformément aux alinéas suivants.
Les sanctions prononcées contre les personnes n'ayant pas la qualité de fonctionnaires ou d'agents de l'Etat ou des collectivités locales seront réputées avoir été prononcées par l'autorité qui aurait été qualifiée ou par la juridiction qui aurait été compétente en dernier ressort si les faits ayant donné lieu à ces sanctions avaient été commis à Paris.
Les contestations relatives au bénéfice de l'amnistie des sanctions prononcées contre des fonctionnaires ou agents de l'Etat ou des collectivités locales seront soumises à l'autorité dont dépendent ces fonctionnaires ou ces agents. Lorsqu'ils ne dépendent d'aucune autorité, les contestations seront soumises à celle dont dépend leur ancien corps ; si les membres de ce corps ont été intégrés dans plusieurs corps relevant d'autorités différentes, le ministre chargé de la fonction publique désignera l'autorité compétente.
Chapitre CHAPITRE IV. Effets de l'amnistie.
Art. 19.
L'amnistie entraîne, sans qu'elle puisse jamais donner lieu à restitution, la remise de toutes les peines principales, accessoires et complémentaires, notamment de la rélégation ainsi que de toutes incapacités ou déchéances subséquentes. Elle établit l'auteur de l'infraction dans le bénéfice du sursis qui a pu lui être accordé lors d'une condamnation antérieure.
Toutefois, sauf en matière de contravention de police, l'amnistie prévue par la présente loi ne sera acquise qu'après le paiement, par le bénéficiaire éventuel, de l'amende à laquelle il a été ou sera personnellement et définitivement condamné ou qu'après l'exécution de la contrainte par corps dans les conditions prévues par le titre VI du code de procédure pénale. Dans ce dernier cas, l'amnistie ainsi acquise ne fait pas obstacle au recouvrement ultérieur de l'amende.
Art. 20.
En cas de condamnation pour infractions multiples, le condamné est amnistié si l'infraction amnistiée est légalement punie de la peine la plus forte ou d'une peine égale à celles prévues pour les autres infractions poursuivies.
Art. 21.
L'amnistie s'étend aux faits d'évasion punis des peines de l'article 245 du code pénal, commis au cours de l'exécution d'une condamnation effacée par l'amnistie, ainsi qu'aux infractions à l'interdiction de séjour accessoire ou complémentaire d'une condamnation effacée par l'amnistie.
Art. 22.
L'amnistie n'entraîne pas de droit la réintégration dans les fonctions, emplois, professions, grades, offices publics ou ministériels. En aucun cas, elle ne donne lieu à reconstitution de carrière.
Elle entraîne la réintégration dans les divers droits à pension, à compter de la date de promulgation de la présente loi en ce qui concerne l'amnistie de droit, et à compter du jour où l'intéressé est admis à son bénéfice en ce qui concerne l'amnistie par mesure individuelle.
L'amnistie ne confère pas la réintégration dans l'ordre de la Légion d'Honneur, dans l'ordre de la libération, dans l'Ordre national du Mérite, ni dans le droit au port de la Médaille Militaire.
Toutefois, la réintégration peut être prononcée, pour chaque cas individuellement, à la demande du garde des sceaux, ministre de la justice et, le cas échéant, du ministre intéressé, par décret du Président de la République, pris sur la proposition du grand chancelier compétent, après avis conforme du conseil de l'ordre.
Art. 23.
L'amnistie ne préjudicie pas aux droits des tiers. En cas d'instance sur les intérêts civils, le dossier pénal est versé aux débats et mis à la disposition des parties.
Si la juridiction de jugement a été saisie de l'action publique avant la promulgation de la présente loi, cette juridiction reste compétente pour statuer, le cas échéant, sur les intérêts civils.
L'amnistie n'est pas applicable aux frais de poursuite et d'instance avancés par l'Etat. La contrainte par corps ne peut être exercée contre les condamnés ayant bénéficié de l'amnistie.
Art. 24.
L'amnistie ne peut en aucun cas mettre obstacle à l'action en révision devant toute juridiction compétente en vue de faire établir l'innocence du condamné.
Art. 25.
Il est interdit à toute personne en ayant eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions de rappeler sous quelque forme que ce soit ou de laisser subsister dans tout document quelconque, les condamnations pénales, les sanctions disciplinaires ou professionnelles et des déchéances effacées par l'amnistie. Les minutes des jugements, arrêts et décisions échappent toutefois à cette interdiction.
Art. 26.
L'amnistie reste sans effet sur les mesures ou décisions prises en vertu de la loi du 24 juillet 1889 relative à la protection des enfants maltraités ou moralement abandonnés. Toutefois, pour l'application de l'article 15 de ladite loi, l'amnistie est assimilée à la réhabilitation.
Elle reste aussi sans effet sur les décisions prononcées par application des articles 8, 15, 16 et 28 de l'ordonnance no 45-174 du 2 février 1945 (JO du 4, p. 530 ; pour mémoire, BOEM/A 19, p. 204) relative à l'enfance délinquante. Toutefois, les fiches relatives à ces décisions prononcées pour tous faits antérieurs au 8 janvier 1966, sont supprimées du casier judiciaire lorsque le mineur atteint l'âge de vingt et un ans.
Chapitre CHAPITRE V. Dispositions diverses.
Art. 27.
Sont exclus du bénéfice des dispositions de la présente loi :
1. Les infractions à la législation et à la réglementation en matière fiscale ou douanière ainsi qu'en matière de changes.
2. Les infractions constituées par le détournement ou l'utilisation illicite de tout ou partie de sommes destinées à la construction de locaux d'habitation, ainsi que les infractions prévues, réprimées et sanctionnées par les articles 59 et 60 de la loi no 57-908 du 7 août 1957 (JO du 10, p. 7906).
3. Les délits prévus par les articles 312, alinéas 6, 7 et 8, 334 à 335-6, 349, 350, 351, alinéa 1, 352, 353, alinéa 1, 357-1, 3°, du code pénal.
4. Les crimes et faits de complicité criminelle, sous réserve, en ce qui concerne les mineurs de vingt et un ans, des dispositions de l'article 13, ainsi que les délits prévus par les articles 62 et 63, alinéa 1, du code pénal.
Art. 28.
Sont réhabilités de plein droit les commerçants non banqueroutiers qui ont été déclarés en état de faillite ou de règlement judiciaire par une juridiction siégeant sur le territoire d'un Etat précédemment placé sous la souveraineté, le protectorat ou la tutelle de la France et ayant, postérieurement au jugement déclaratif, accédé à l'indépendance.
Dans tous les cas, les droits des créanciers sont expressément réservés.
Art. 29.
Est amnistiée toute personne condamnée avant le 1er janvier 1926 pour des faits ayant entraîné une peine quelle qu'elle soit, à condition qu'elle n'ait, depuis cette date, subi aucune condamnation à une peine criminelle ou correctionnelle.
Art. 30.
I. Sont amnistiés de plein droit tous crimes ou délits commis en liaison avec les événements consécutifs à l'insurrection vietnamienne et antérieurement au 1er octobre 1957.
II. En ce qui concerne les anciens combattants et prisonniers de guerre d'Indochine, les dispositions de l'article 29 bis de la loi 53-681 du 06 août 1953 (BO/G, p. 2967 ; BO/M, 1954, p. 1795 ; BO/A, p. 1740 ; BOEM/A 19, p. 329) modifiée par la loi n° 57-784 du 15 juillet 1957 (BO/G, p. 3721 ; n.i. BO/M ; BO/A, p. 1421 ; BOEM/A 19, p. 329) sont étendues aux infractions punies de peines correctionnelles commises en Indochine antérieurement au 1er octobre 1957.
Art. 31.
Les confiscations prévues à l'article 37 du code pénal et à l'article 47, alinéa 4, de l'ordonnance no 45-1484 du 30 juin 1945 (n.i. BO/G ; n.i. BO/M ; BO/A, p. 2301) tels qu'ils étaient rédigés antérieurement à l'ordonnance no 58-1298 du 23 décembre 1958 (n.i. BO/G ; n.i. BO/M ; BOEM/A 19, p. 251) ainsi qu'à l'article 79 de l'ordonnance du 28 novembre 1944, ne seront plus appliquées, à compter de la promulgation de la présente loi qu'aux biens présents.
Art. 32.
Les bénéficiaires de l'article 2 de la loi no 53-1244 du 17 décembre 1953 (JO du 18, p. 11247) qui auraient été déclarés irrecevables par une décision administrative ou juridictionnelle parce qu'ayant agi plus d'un mois après la date de la publication de ladite loi à Paris, seront recevables à agir à nouveau dan le délai franc de deux mois à compter du jour où le numéro du Journal officiel contenant la présente loi sera parvenu au chef-lieu d'arrondissement ou de territoire de leur domicile ou résidence.
Art. 33.
La présente loi est applicable aux territoires d'outre-mer.
Toutefois, pour leur application dans ces territoires, les articles 12 et 26 reçoivent la rédaction ci-après :
« Art. 12. Les contestations relatives à l'amnistie de droit prévue par la présente loi, si elles concernent des condamnations pénales définitives, sont soumises aux règles de compétence et de procédure prévues par l'article 597, alinéas 1 à 4, du code d'instruction criminelle.
Si une condamnation pénale a été prononcée par une juridiction dont le siège était établi dans les départements algériens ou sahariens et si l'intéressé a sa résidence dans un territoire d'outre-mer, les contestations relatives à l'amnistie sont soumises à la chambre des mises en accusation de la cour d'appel ou du tribunal supérieur d'appel dans le ressort duquel se trouve cette résidence.
Si la décision a été rendue par un tribunal permanent des forces armées siégeant dans les territoires d'outre-mer, la requête sera soumise à la chambre des mises en accusation de la cour d'appel ou du tribunal supérieur d'appel dans le ressort duquel était établi le siège du tribunal permanent des forces armées.
Dans le cas où la requête est rejetée, le requérant est condamné aux frais.
« En l'absence de condamnation définitive, les contestations sont soumises à la juridiction compétente pour statuer sur la poursuite. »
« Art. 26. L'amnistie reste sans effet sur les mesures ou décisions prises en vertu de la loi du 24 décembre 1889 relative à la protection des enfants maltraités ou moralement abandonnés. Toutefois, pour l'application de l'article 15 de ladite loi, l'amnistie est assimilée à la réhabilitation. »
La présente loi sera exécutée comme loi de l'Etat.
Fait à Paris, le 18 juin 1966.
C. DE GAULLE.
Par le Président de la République :
Le Premier ministre,
Georges POMPIDOU.
Le ministre d'Etat, chargé de la réforme administrative,
Louis JOXE.
Le ministre d'Etat chargé des départements et territoires d'outre-mer,
Pierre BILLOTTE.
Le garde des sceaux ministre de la justice,
Jean FOYER.
Le ministre de l'intérieur,
Roger FREY.
Le ministre des armées,
Pierre MESSMER.
Le ministre de l'économie et des finances,
Michel DEBRE.