DÉCRET N° 81-972 relatif au marquage, à l'acquisition, à la livraison, à la détention, au transport et à l'emploi des produits explosifs.
Du 21 octobre 1981NOR
LE PREMIER MINISTRE,
Sur le rapport du ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de la décentralisation, du ministre d'Etat, ministre des transports, du garde des sceaux, ministre de la justice, du ministre de la défense, du ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget, et du ministre de l'industrie,
Vu la loi du 5 février 1942 (1) relative au transport de matières dangereuses ;
Vu la loi 63-760 du 30 juillet 1963 relative à la constatation des infractions à la législation sur les substances explosives ;
Vu la loi 70-575 du 03 juillet 1970 (2) portant réforme du régime des poudres et substances explosives, ensemble les décret 71-753 du 10 septembre 1971 (JO du 17, p. 9243), décret 71-754 du 10 septembre 1971 (3) et décret no 71-755 du 10 septembre 1971 (N.i. BO ; JO du 17, p. 9246) pris pour son application ;
Vu la loi 79-519 du 02 juillet 1979 (BOC, 1985, p. 5390) réprimant le défaut de déclaration de la disparition de produits explosifs, ensemble le décret 80-1022 du 15 décembre 1980 pris pour son application ;
Vu le décret du 20 juin 1915 (3) modifié réglementant la conservation, la vente et l'importation des dynamites et autres explosifs à base de nitroglycérine ;
Vu le décret du 20 juin 1915 (3) modifié réglementant la conservation, la vente et l'importation de diverses substances explosives autres que celles à base de nitroglycérine ;
Vu le décret du 18 avril 1939 (4) modifié fixant le régime des matériels de guerre, armes et munitions, ensemble les textes pris pour son application, et notamment le décret no 73-364 du 12 mars 1973 (5) ;
Vu le décret no 78-739 du 12 juillet 1978 (6) relatif au marquage, à la détention, au transport et à l'emploi de produits explosifs ;
Vu le décret no 79-846 du 28 septembre 1979 (BOC, 1981, p. 218) relatif à la protection des travailleurs contre les risques particuliers auxquels ils sont soumis dans les établissements pyrotechniques ;
Vu l'article R. 25 du code pénal ;
Le conseil d'Etat (section des travaux publics) entendu,
ARRÊTE :
Art. 1er.
(Modifié : décret du 16/02/1990 et décret du 01/10/1990.)
Le présent décret fixe les conditions auxquelles sont soumis le marquage, l'acquisition, la livraison, la détention, le transport et l'emploi des poudres et substances explosives ainsi que des produits ouvrés contenant sous quelque forme que ce soit des poudres et substances explosives. Ces poudres, substances et produits sont désignés dans la suite du présent décret par l'expression « produits explosifs ».
Toutefois, les dispositions du présent décret ne sont pas applicables :
Aux artifices de divertissement définis par le décret no 90-897 du 1er octobre 1990.
Aux produits explosifs placés sous la surveillance de l'autorité militaire.
Aux munitions et éléments de munitions des armées énumérées dans le décret du 12 mars 1973.
Aux produits explosifs, définis par arrêté conjoint du ministre de l'intérieur, du ministre de la défense et du ministre de l'industrie, qui ont les mêmes caractéristiques explosives que les munitions et éléments de munitions pour armes portatives et projectiles inertes des 1re, 4e, 5e et 7e catégories, telles qu'elles sont définies par le décret du 12 mars 1973.
Les produits autres que ceux définis ci-dessus qui peuvent être utilisés tels quels ou avec des modifications pour les effets de leur explosion, inscrits sur une liste établie par arrêté conjoint du ministre de l'intérieur, du ministre de la défense et du ministre de l'industrie sont réputés produits explosifs et soumis aux dispositions du présent décret.
Dans le présent décret, les termes « emploi » ou « utilisation » de produits explosifs désignent l'emploi ou l'utilisation par explosion.
Art. 2.
Tout produit explosif doit faire l'objet d'un marquage. Les produits explosifs autres que ceux mentionnés à l'article 3 ci-après doivent en outre comporter un marquage spécial permettant leur identification. Ces marquages sont effectués au lieu de la fabrication, sous la responsabilité du fabricant. Les produits explosifs importés ou en transit doivent être revêtus de ces marquages au moment de leur introduction sur le territoire douanier.
Le marquage doit être reproduit sur l'emballage contenant le produit et doit être suffisant pour permettre l'identification de cet emballage jusqu'à son dernier destinataire. L'obligation de marquage est limitée à l'emballage lorsque le produit, par sa consistance ou du fait de ses dimensions réduites, ne se prête pas lui-même à cette opération.
Un arrêté conjoint du ministre de l'intérieur, du ministre des transports, du ministre de la défense, du ministre chargé du budget et du ministre de l'industrie fixe les modalités techniques des marquages prévus au présent article.
Art. 3.
L'acquisition, le transport et la détention d'une quantité de poudre de chasse ou de tir à usage civil au plus égale à 2 kilogrammes ainsi que sa mise en œuvre en vue de la confection de munitions de chasse ou de tir à usage civil sont libres.
L'acquisition, le transport et la détention d'artifices non détonants ne sont pas soumis à autorisation. Ces articles sont définis par arrêté conjoint du ministre de l'intérieur, du ministre de la défense et du ministre de l'industrie.
Art. 4.
(Modifié : décret du 16/02/1990.)
L'acquisition de produits explosifs est subordonnée à l'autorisation du préfet du département où ils seront conservés ou utilisés dès réception et, pour l'exploitation d'un dépôt mobile, du préfet du département du domicile du demandeur ou du siège social. L'autorisation prend la forme d'un certificat d'acquisition valable un an au plus et renouvelable par période d'un an au plus ou d'un bon de commande valable trois mois au plus.
Le certificat d'acquisition est délivré soit aux personnes autorisées en application de l'article 22 du décret 90-153 du 16 février 1990 (BOC, p. 780) portant diverses dispositions relatives au régime des produits explosifs à exploiter un dépôt ou un débit de produits explosifs, soit aux personnes autorisées à utiliser les produits explosifs dès réception en quantité supérieure à 25 kilogrammes, soit aux personnes qui justifient de l'acceptation d'un dépositaire ou d'un débitant de prendre en consignation les produits à acquérir. Il est exigé pour l'acquisition de plus de 500 détonateurs.
Le bon de commande est délivré aux personnes ne répondant pas aux conditions ci-dessus pour l'acquisition d'une quantité de produits explosifs au plus égale à 25 kilogrammes et d'un maximum de 500 détonateurs en vue d'utilisation dès réception. Il ne peut être délivré à la même personne plus de deux bons de commande par an.
Le préfet peut supprimer ou limiter temporairement la délivrance de certificats d'acquisition et de bon de commande.
Par dérogation aux dispositions du premier alinéa du présent article, les entreprises qui ont reçu une délégation ou une autorisation de production ou de vente en vertu du décret 71-753 du 10 septembre 1971 ainsi que les laboratoires agréés pour effectuer des épreuves d'agrément relatives aux produits explosifs n'ont pas à solliciter d'autorisation d'acquisition.
Un arrêté conjoint du ministre de l'intérieur, du ministre de la défense et du ministre de l'industrie fixe les modalités d'établissement des certificats d'acquisition et des bons de commande.
Art. 41.
(Ajouté : décret du 16/02/1990.)
Lorsqu'en application des articles 3 et 4 l'acquisition de produits explosifs est soumise à autorisation, le fournisseur doit s'assurer, avant de livrer les produits, que l'acquéreur possède un titre permanent de procéder à cette livraison.
Art. 5.
Toute personne qui transporte des produits explosifs par quelque moyen que ce soit doit avoir obtenu une autorisation préalable du préfet de son domicile ou de son siège social. L'autorisation est donnée pour une durée de cinq ans au plus et est renouvelable par période de cinq ans au plus.
Toutefois, les détenteurs d'une autorisation d'acquisition ou d'un bon de commande sont dispensés de cette autorisation pour le transport des produits afférents au titre qu'ils détiennent.
Un arrêté conjoint du ministre de l'intérieur, du ministre de la défense, du ministre des transports et du ministre de l'industrie fixe les modalités d'établissement des autorisations de transport.
Art. 6.
A l'exception des artifices non détonants, tout transport de produits explosifs est subordonné à l'établissement préalable d'un titre d'accompagnement, qui prend la forme soit d'un bon de transit, soit d'un bon d'accompagnement, soit d'une inscription sur un registre d'accompagnement.
Le bon de transit est destiné à l'accompagnement des produits explosifs en provenance et à destination de l'étranger qui transitent par le territoire français ; il est établi par le transporteur et visé par l'administration des douanes. Le bureau des douanes d'entrée sur le territoire informe de tout transit le bureau des douanes de sortie du territoire.
Le bon d'accompagnement est destiné à tous les autres transports de produits explosifs ; il est établi, selon le cas, soit par le producteur, soit par un dépositaire ou un débitant, soit par la personne qui consigne des produits explosifs, soit par leur utilisateur lors du retour en dépôt des produits non utilisés, soit par l'importateur autorisé.
Le bon ne peut en aucun cas porter sur une quantité supérieure à celle que la personne qui l'établit est habilité à détenir.
L'arrêté prévu par le dernier alinéa du présent article fixe les cas particuliers dans lesquels le bon d'accompagnement peut être remplacé par une mention sur le registre d'accompagnement du moyen de transport utilisé.
Sous quelque forme qu'il soit établi, le titre d'accompagnement doit être détenu à bord du moyen de transport servant à l'acheminement des produits explosifs et doit être présenté à toute réquisition.
Un arrêté conjoint du ministre de l'intérieur, du ministre de la défense, du ministre chargé du budget, du ministre des transports et du ministre de l'industrie fixe les modalités d'établissement des titres d'accompagnement.
Art. 7.
(Modifié : décret du 16/02/1990.)
Le transport conjoint de détonateurs et de tout autre produit explosif dans un même véhicule routier, un même wagon, une même cale de bateau ou un même conteneur est interdit.
Les préfets peuvent toutefois autoriser de tels transports sur des parcours n'excédant pas 200 kilomètres et au profit de transporteurs déterminés, dès lors que le nombre de détonateurs n'excède pas 1 000 unités et que la masse d'explosifs est plus égale à 100 kilogrammes.
Tout transport routier de produits explosifs ne peut se faire qu'avec au moins deux personnes à bord du véhicule. Tout moyen de transport en stationnement doit, lorsqu'il contient des produits explosifs, faire l'objet d'une surveillance permanente du conducteur ou du convoyeur.
Des arrêtés conjoints des ministres chargés de l'intérieur, de la défense, des transports et de l'industrie fixent les caractéristiques particulières auxquelles doivent répondre les véhicules routiers, les conditions techniques d'application des deux alinéas précédents ainsi que les modalités de transport des artifices non détonants, auxquels les trois premiers alinéas du présent article ne sont pas applicables.
Art. 8.
Les dispositions des articles 5, 6 et 7 ci-dessus ne sont pas applicables aux transports de produits explosifs effectués sous le contrôle des forces de police.
Les dispositions des articles 6 et 7 ci-dessus ne sont pas applicables aux dépôts mobiles d'explosifs.
Art. 9.
L'utilisation, dès réception, de produits explosifs en quantité supérieure à 25 kilogrammes et à 500 détonateurs doit avoir été préalablement autorisée par le préfet du département où elle est prévue. Cette autorisation ne peut avoir une validité supérieure à deux ans et est renouvelable. La validité des autorisations suivantes peut aller jusqu'à cinq ans. Pendant la durée de validité d'une telle autorisation, le préfet peut l'assortir de conditions techniques nouvelles ou différer l'exécution des tirs prévus.
L'utilisation dès réception de produits explosifs en quantité inférieure ou égale à 25 kilogrammes et des détonateurs strictement nécessaires dans la limite de 500 unités n'est pas soumise à autorisation prévue. Toutefois, le préfet, peut, pour une durée limitée, décider qu'il y a lieu à autorisation dans ce cas. Les dispositions de l'alinéa précédent sont alors applicables.
Tout utilisateur dès réception doit tenir un registre de réception et de consommation des produits explosifs soumis à autorisation d'acquisition, même lorsque, conformément à l'alinéa qui précède, il n'y a pas lieu à autorisation d'utilisation.
Un arrêté conjoint du ministre de l'intérieur, du ministre de la défense et du ministre de l'industrie fixe les modalités d'établissement des autorisations d'utilisation dès réception et de tenue du registre.
Art. 10.
L'utilisation de produits explosifs dès réception, qu'elle soit ou non subordonnée à autorisation, implique l'obligation d'en faire usage au cours de la période journalière d'activité. A défaut, les autres explosifs qui n'ont pu être utilisés en totalité dans ce délai doivent être placés en dépôt.
Lorsque la mise en dépôt des produits explosifs non utilisés n'a pu être faite à la fin de la période journalière d'activité, l'utilisateur est tenu de prendre toutes mesures utiles pour en assurer la conservation et la protection contre tout détournement. Lorsqu'il s'agit de produits explosifs soumis à autorisation d'acquisition, il doit en outre avertir sans délai la gendarmerie ou les services de police. L'emploi, la destruction ou la mise en dépôt des produits ainsi conservés doit intervenir dans les trois jours.
Art. 10.1.
(Ajouté : décret du 16/02/1990.)
Les dispositions de l'article 10 s'appliquent également à l'utilisateur de produits explosifs qui est autorisé, en application de l'article 22 du décret 90-153 du 16 février 1990 portant diverses dispositions relatives au régime des produits explosifs, à exploiter un dépôt ou pour le compte duquel un dépositaire a accepté de prendre les produits en consignation.
Art. 10.2.
(Ajouté : décret du 16/02/1990.)
Sur les lieux d'emploi, les produits doivent rester sous la surveillance de l'utilisateur ou d'une personne désignée par lui.
Art. 10.3.
(Ajouté : décret du 16/02/1990.)
Lorsqu'ils ne sont ni en cours d'utilisation, ni en cours d'incorporation à un autre produit, ni en cours de transformation en un autre produit, ni en cours de transport, les produits explosifs doivent être conservés dans des dépôts, fixes ou mobiles, ou dans des débits.
Le présent article ne s'applique pas à la détention d'une quantité de poudre de chasse ou de tir à usage civil ne dépassant pas 2 kilogrammes.
Art. 10.4.
(Ajouté : décret du 16 février 1990 .)
Pour les travaux souterrains relevant du régime des mines et carrières, les prescriptions fixées par le ministre chargé des mines dans le cadre des règlements de sécurité prévus par le code minier pour l'entreposage des produits explosifs en vue de leur prochaine utilisation se substituent aux dispositions des articles 10 à 10-3.
Art. 11.
La personne qui n'a pas qualité pour détenir de titre d'acquisition et à qui sont confiés sur les lieux d'emploi, à quelque titre que ce soit, la garde, la mise en œuvre et le tir de produits explosifs, à l'exception des artifices non détonants, doit être habilitée par le préfet du lieu de son domicile. Cette habilitation n'est pas exigée pour l'emploi de fusées paragrêles et lorsqu'il s'agit de destruction des déchets de produits explosifs dans les entreprises qui ont reçu une délégation ou une autorisation de production ou de vente en vertu du décret 71-753 du 10 septembre 1971 non plus que dans les laboratoires agréés pour effectuer des épreuves d'agrément relatives aux produits explosifs.
La demande d'habilitation doit être présentée par la personne à qui seront confiés sur les lieux d'emploi la garde, la mise en œuvre et le tir de produits explosifs dont elle n'est pas propriétaire. A l'appui de sa requête, l'intéressé doit fournir une attestation d'emploi délivrée par une entreprise utilisant des produits explosifs ou un document certifiant qu'il apporte son concours, même à titre occasionnel, à une personne physique ou morale régulièrement détentrice d'un titre d'acquisition de produits explosifs. La validité de l'habilitation est liée à la durée des fonctions dans l'entreprise ou à la durée du concours que le titulaire de l'habilitation apporte à une même personne physique ou morale.
Un arrêté conjoint du ministre de l'intérieur, du ministre de la défense et du ministre de l'industrie fixe les modalités d'établissement de l'habilitation.
Art. 12.
(Nouvelle rédaction : décret du 16/02/1990.)
Les certificats d'acquisition et bons de commande prévus à l'article 4, les autorisations et habilitations prévues aux articles 5, 7, 9 et 11 du présent décret peuvent être retirés à tout moment sans mise en demeure ni préavis.
Art. 13.
(Modifié : décret du 16/02/1990.)
Toute personne qui n'aura pas marqué ou fait marquer, qui aura acquis ou fait acquérir, qui aura livré ou fait livrer, détenu ou fait détenir, transporté ou fait transporter, employé ou fait employer des produits explosifs en violation des prescriptions des articles 2, 4 à 7 et 8 à 11 du présent décret sera passible des peines prévues pour les contraventions de 5e classe.
Art. 14.
Tout détenteur à un titre quelconque d'un produit explosif non marqué dans les conditions prévues à l'article 2 ci-dessus est tenu, un an au plus après la date de publication du présent décret, d'en faire la déclaration au préfet. Le défaut de déclaration rendra ce détenteur passible des peines prévues à l'article 13 ci-dessus.
Art. 15.
Le décret 78-739 du 12 juillet 1978 est abrogé, à l'exception de son article 15.
Art. 16.
Le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de la décentralisation, le ministre d'Etat, ministre des transports, le garde des sceaux, ministre de la justice, le ministre de la défense, le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget, et le ministre de l'industrie sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 21 octobre 1981.
Pierre MAUROY.
Par le Premier ministre :
Le ministre de l'industrie,
Pierre DREYFUS.
Le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de la décentralisation,
Gaston DEFFERRE.
Le ministre d'Etat, ministre des transports,
Charles FITERMAN.
Le garde des sceaux, ministre de la justice,
Robert BADINTER.
Le ministre de la défense,
Charles HERNU.
Le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget,
Laurent FABIUS.