INSTRUCTION N° 2003-11/INT pour l'établissement des « états des lieux » et « inventaires mobiliers », entrée et sortie, des immeubles occupés à la suite de réquisitions ou de conventions amiables.
Du 19 décembre 1950NOR
Les occupations d'immeubles effectuées, soit en vertu de réquisitions, soit en vertu d'accords amiables, doivent faire l'objet, à la prise de possession comme en fin d'occupation, d'états des lieux et d'inventaires mobiliers.
La présente instruction, rédigée à l'intention des personnels chargés à tous les échelons de l'accomplissement desdites formalités ou de leur étude en vue de la détermination des indemnités dues, rappelle brièvement les directives à suivre et fixe certaines règles précises pour éviter dans la mesure du possible des litiges dus, soit au non-accomplissement des formalités prescrites, soit au manque de précisions des documents.
Ceux-ci sont indispensables pour établir les indemnités de privation de jouissance et, lors du règlement final, les droits des prestataires, tout en sauvegardant ceux de l'Etat. Les besoins des troupes ou services occupants peuvent, en effet, nécessiter des transformations ou des aménagements aux immeubles et les travaux exécutés par ou pour le compte de l'Etat pouvant être susceptibles d'apporter auxdits immeubles une plus-value ou, au contraire, leur occasionner une moins-value.
1. Caractère juridique des documents à établir.
Les états des lieux et inventaires doivent porter la signature d'un représentant accrédité de l'autorité requérante ou occupante accompagnée de celle du prestataire ou de son représentant.
Les états des lieux et inventaires ont pour objet de préconstituer la preuve de faits matériels (consistance et état des locaux ou du mobilier) dont, de droit commun, la preuve peut être administrée par tous les moyens possibles. Sauf au cas où ils seraient dressés par un officier public, ils constituent des actes sous-seing privé qui font foi jusqu'à preuve contraire.
Pour en contester par la suite le contenu il faudra apporter la preuve, soit de la négligence des signataires dans l'établissement des documents, soit d'erreurs manifestes, soit d'inexactitude quant à la date mentionnée, etc. Mais cette preuve est souvent difficile à rapporter et c'est pourquoi les documents en cause doivent être établis avec le plus grand soin.
Du reste, en cas d'anomalies graves constatées, les signataires de ces documents s'exposent à des poursuites judiciaires (article 145 et suivants du code pénal).
La caractéristique principale des états des lieux et inventaires est qu'ils doivent être établis contradictoirement entre l'administration et le prestataire (ou son représentant) düment convoqué.
Le terme « contradictoirement » postule unereconnaissance effective des locauxau jour de la prise de possession ou de la restitution par les parties en présence.
Il est rappelé que l'absence d'état des lieux fait tomber l'administration requérante ou agissant en tant que preneur, sous le coup de la présomption simple de l'article 1731 du code civil. L'immeuble étant alors réputé en bon état d'entretien et normalement meublé, cette présomption est souvent très défavorable aux intérêts du Trésor.
Si, pour une cause quelconque, le prestataire ne peut ou ne veut pas assister, ou se faire représenter à l'établissement des états des lieux et inventaires, l'administration requérante devra en aviser immédiatement la municipalité et procéder aux opérations en présence du maire de la commune (ou de son représentant) qui signera au lieu et place du prestataire absent ou défaillant.
2. Directives pour l'établissement des états des lieux «entrée ».
Les états des lieux « entrée » devront décrire aussi complètement et soigneusement que possible l'état général d'entretien et les dégradations existantes à la prise de possession, tant des immeubles par nature que des immeubles par destination ou pouvant être considérés comme tels.
La prise de possession d'un immeuble pouvant s'échelonner par fractions et à des dates différentes, chacune de ces fractions donnera lieu à l'établissement au jour de la prise de possession d'un état des lieux afférent à la fraction en cause.
La description des dégradations devra s'effectuer dans l'ordre suivant :
2.1. Immeubles bâtis.
a). Extérieurs : façades, murs, pignons, toitures, cheminées, portes, croisées, volets, motifs d'architecture, seuils, etc.
b). Intérieurs :
escaliers, cages d'escaliers, ascenseurs, canalisations communes d'eau, de gaz, d'électricité, de téléphone, vitrerie, peintures, papiers peints, etc. ;
étage par étage et dans chaque étage, pièce par pièce : portes, peintures, papiers peints, plafonds, placards, serrurerie et quincaillerie, appareillages sanitaire, électrique, de chauffage, vitrerie, glaces, cheminées, robinetterie, etc.
Il y aura lieu de s'assurer du plus ou moins bon fonctionnement des diverses installations ou commodités.
2.2. Immeubles non bâtis.
a). Cours, avenues, chemins, parcs, pelouses, jardins potagers et autres, etc.
b). Dans le cas de propriété agricole, nature des terres (maraîchères, labours, bois, vergers, prairies naturelles ou artificielles, etc.). Une minutie particulière sera apportée dans la description des exploitations agricoles : type, nature des cultures, rendement, densité des plantations, nombre d'arbres fruitiers ou d'essence particulière.
3. Directives pour l'établissement des inventaires «entrée ».
Dans l'ordre indiqué au paragraphe 1o,b) pour l'établissement des états des lieux « entrée », l'inventaire « entrée » mentionnera tout le mobilier meublant ou matériel non considéré immeuble par destination, sans omission et de quelque nature soit-il.
L'état de ce mobilier ou matériel devra être détaillé par objet en indiquant sa qualité, sa vétusté, ses dégradations et son plus ou moins bon état d'entretien.
Il ne sera pas inutile, avant ou après l'énumération, de formuler un avis d'ensemble sur le mobilier (insuffisance, mobilier ordinaire, belle qualité, luxueux ou mobilier de style).
Lors de l'occupation, les objets de valeur tels que argenterie, bijoux, vêtements, tableaux, etc. devront être mis à l'abri, soit dans une pièce condamnée à l'occupant, soit de toute autre façon. En tout état de cause, toutes précautions seront prises pour éviter les pillages ou disparitions d'objets ne pouvant être pris en charge par l'unité ou le service occupant. Un inventaire spécial en sera dressé à toutes fins utiles.
L'omission de cette dernière prescription pourra, en effet, engager la responsabilité disciplinaire et, le cas échéant, pécuniaire, des occupants et des agents chargés d'établir l'état des lieux.
4. Directives pour l'établissement des documents à la «sortie ».
Les états des lieux et inventaires à la « sortie » devront reproduire, dans le même ordre, la nomenclature des postes inscrits sur les états des lieux et inventaires à l'« entrée » en mentionnant l'état exact des mêmes postes lors de la remise des lieux au prestataire.
Toutefois, par convention entre les parties dont mention sera portée en tête des documents « sortie », l'un ou l'autre de ces documents pourra se borner à la description des modifications subies à l'exclusion de la description de toutes les parties dont l'état est identique à celui constaté à l'entrée.
Si des travaux de transformation, d'aménagement ou même d'embellissement, si de nouvelles constructions ont été exécutés par les occupants, ces travaux et constructions devront être soigneusement décrits.
5. Recommandations importantes.
1. Les documents, aussi bien à l'entrée qu'à la sortie, doivent légalement être établis en deux exemplaires signés tous les deux par les parties en présence.
L'un des deux exemplaires sera remis au prestataire ou à son représentant. En cas d'absence de ces derniers, le maire de la commune en sera le dépositaire.
2. En cas de contestation entre les parties lors de l'établissement des documents, mention des observations faites sera portée sur les documents.
3. Les inventaires dressés à la prise de possession d'un établissement industriel ou commercial ou de toute exploitation de quelque nature qu'elle soit doivent être établis sous la forme descriptive et également estimative.
Les estimations pourront être faites après la prise de possession. En cas de contestation, il y aura lieu de demander au président du tribunal civil, statuant en référé, d'ordonner une expertise.
4. Il y a lieu de rappeler que, comme dans le droit commun, le propriétaire d'un immeuble réquisitionné ou loué dans l'intérêt de la nation, doit le clos et le couvert. Dans le cas où des réparations s'avéreraient indispensables pour atteindre ce but, le prestataire devra être mis en demeure d'effectuer d'urgence ces réparations, faute de quoi et dans un délai de quinze jours, l'Etat procédera aux travaux au lieu et place du prestataire à charge par ce dernier d'en rembourser le montant à l'Etat.
Ce remboursement pourra être effectué par précompte sur les indemnités dues au prestataire au titre de son immeuble.
L'attention des autorités requérantes, à tous les échelons, est instamment appelée sur la nécessité de se plier strictement aux directives ci-dessus, aussi bien pour la sauvegarde de leur propre responsabilité que dans l'intérêt de l'Etat et celui des prestataires.