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direction centrale du service des essences des armées : sous-direction « opérations »

INSTRUCTION N° 6000/ARM/DCSEA/SDO/SDO2 relative à l'exploitation (approvisionnement, stockage et distribution) des carburants par le service des essences des armées.

Du 13 juillet 2018
NOR A R M E 1 8 5 1 3 5 9 J

1. Généralités.

1.1. Objet.

Le Service des Essences des Armées (SEA) a pour mission principale la fourniture de produits pétroliers (carburants (1), ingrédients, produits divers et emballages) en tous lieux et en tout temps pour les forces armées. Cette mission est principalement portée par la fonction exploitation pétrolière.

Cette fonction gère les flux physiques de carburants et les informations s'y rapportant : de leur acquisition à leur cession aux clients, en respectant le degré de qualité de service attendu, les conditions légales, ainsi que les conditions de sécurité et de sureté réputées satisfaisantes.

La présente instruction a pour objet de décrire les principes et les définitions qui s'appliquent à la fourniture de carburants aux clients du SEA. Ses clients sont les états-majors, directions, services et les organismes qui leur sont rattachés, relevant du ministère des armées, des organismes publics, voire dans certaines circonstances d'intérêt général, des organismes de droit privé.


1.2. Champ d'application.

Cette instruction s'applique aux formations administratives (2) et aux unités du SEA (3) sur le territoire métropolitain, en outre-mer et à l'étranger (y compris en opération extérieure). Elle concerne principalement les flux physiques. Les flux logiques (4) associés sont précisés dans des mémentos spécifiques.

1.3. Principe général.

La chaîne logistique pétrolière est caractérisée par la « discontinuité » des flux d'acheminement qu'il convient de maîtriser pour assurer la satisfaction du client final. La maîtrise de ces flux constitue l'enjeu de l'exploitation pétrolière.

L'organisation des flux discontinus d'acheminement « amont » est appelée « approvisionnement ». L'organisation des flux de fourniture « aval » au plus près de l'utilisateur final est appelée « distribution ». La constitution de réserves de carburants permettant d'absorber la « discontinuité » de ces flux est appelée « stockage ».

L'approvisionnement, le stockage et la distribution forment les trois processus de la fonction exploitation pétrolière.

1.4. Responsabilités de l'exploitation.

La répartition des responsabilités de l'exploitation pétrolière s'effectue à trois niveaux : la Direction centrale du Service des Essences des Armées (DCSEA), les Autorités d'exploitation de tutelle (AET) et les unités du SEA.

1.4.1. La Direction centrale du service des essences des armées .

La DCSEA élabore et conduit la politique de l'exploitation pétrolière, elle est autorité fonctionnelle des AET.

1.4.2. Les autorités d'exploitation de tutelle.

L'AET est responsable de la conduite de l'exploitation pétrolière dans sa zone géographique de compétence. L'AET est l'autorité fonctionnelle des unités du SEA relevant de sa responsabilité. Cette responsabilité peut être déléguée (5).

Les différentes AET sont :

  • le directeur de la DELPIA pour les dépôts pétroliers situés sur le territoire national métropolitain Corse incluse ;

  • les directeurs de détachement du SEA, pour les unités du SEA implantées hors du territoire national métropolitain, dans leurs zones géographiques de responsabilité ;

  • les adjoints Interarmées du Soutien Pétrolier (AISP), pour les unités déployées lors des opérations ; 

  • le directeur de la BPIA pour ses unités en formation ainsi que celles déployées lors d'exercices et manœuvres et pour l'utilisation des carburants à l'issue des opérations de maintenance des véhicules pétroliers relevant de sa compétence ;

  • les autorités désignées par la DCSEA pour les unités déployées lors d'exercices et manœuvres hors du territoire national.


1.4.3. Les unités du service des essences des armées.

Les unités du SEA sont chargées de la mise en œuvre des moyens permettant de répondre aux besoins des clients. Elles assurent en particulier la manipulation des carburants. Dans ce cadre, elles en sont détentrices (6) à partir de l'entrée dans leurs stocks jusqu'au transfert des risques (7) à un client ou un autre détenteur du SEA.

1.5. Facteurs de variation des flux physiques de carburants.

1.5.1. Le flux amont.

Le flux des approvisionnements en carburants varie :

  • en fonction du mode de transport retenu ;

  • en cas de perturbations des approvisionnements dues à une crise nationale, internationale ou à des raisons techniques.

1.5.2. Le flux aval.

Le flux des distributions de carburants varie :

  • en fonction des consommations des clients, notamment en cas d'engagement des forces armées sur court préavis ou en fonction de l'évolution de la localisation des sites de stationnement des clients (évolution du plan de rattachement) ;

  • en fonction du mode de transport utilisé pour réaliser les distributions.

2. L'APPROVISIONNEMENT DES CARBURANTS.

2.1. Généralités.

L'approvisionnement et l'achat sont deux processus bien distincts et complémentaires intervenant lors de l'acquisition des produits pétroliers. Le processus « acheter » ne relevant pas de l'exploitation pétrolière, il est hors du périmètre de la présente instruction.

Pour une unité du SEA, l'approvisionnement des carburants regroupe l'ensemble des activités ayant pour but la préparation de la constitution des ressources en carburant. La décision d'acceptabilité clôt ce processus. Elle correspond à la décision d'acceptation (8) d'entrée en stock du détenteur.

Les activités sont regroupées au sein des procédures suivantes :

  • la conception des plans d'approvisionnement à partir de l'analyse des besoins annuels et pluriannuels des clients ;

  • la mise en œuvre de ces plans jusqu'à l'acceptation des carburants lors de la procédure de réception.

2.2. Définitions.

Les approvisionnements sont assurés à partir de différentes sources :

  • les raffineries, usines et dépôts des sociétés fournissant des produits au SEA (9) ;

  • le réseau des oléoducs de l'OTAN pour certains carburants seulement ; ce réseau constitue à la fois un moyen de transport et un moyen de stockage, ses points d'enlèvement sont des sources d'approvisionnement ;

  • tout autre réseau d'oléoducs ;

  • les propres dépôts du SEA ou des dépôts contrôlés par lui (il s'agit de  transfert) ;

  • les aéronefs ou navires de client, dans les cas d'opérations de defuelling ou de reprise en général dans un cadre opérationnel ;

  • les installations des armées étrangères, notamment alliées ou des organisations internationales.

Les approvisionnements sont réceptionnés :

  • dans les capacités de stockage du SEA ou des capacités civiles et militaires louées ;

  • dans le réseau des oléoducs de l'OTAN. Celui-ci est donc à la fois source et destinataire des approvisionnements.

Pour clarifier le transfert des risques entre un fournisseur et le SEA, les modalités des approvisionnements sont décrites par des INCOTERMS [DDP (10)  (pour des ventes à l'arrivée), EXW (11) (pour les ventes au départ), CIF (12) (pour les approvisionnements par voie maritime) sont les plus utilisés].

3. Le stockage des carburants.

3.1. Généralités.

Le stockage est l'ensemble des activités permettant l'entrée en stock, l'entretien, la gestion, la transformation des produits pétroliers après une décision d'acceptabilité et avant distribution.

Les activités relatives au stockage sont regroupées au sein des procédures suivantes :

  • l'introduction des carburants dans les stocks ;

  • après la décision d'exploitation (13) , la gestion du stock (transfert interne, transformation, inventaires, gestion de la fin de vie des produits).

La décision d'exploitation est prononcée par l'AET.

Le stockage peut être assuré soit dans les installations fixes ou mobiles appartenant au SEA, soit dans celles d'un opérateur pétrolier militaire étranger ou civil après contractualisation.

3.2. Les stocks en métropole et hors du territoire métropolitain.

Les stocks sont des volumes de carburants entretenus par le SEA. Ils sont articulés en stocks autorisant l'absorption des variations de flux d'approvisionnement et de distribution :

  • les stocks outils sont les stocks nécessaires aux besoins fonctionnels en temps de paix comme en temps de crise. Ils sont liés aux consommations locales ainsi qu'aux moyens, à la fréquence et aux délais d'approvisionnement. Leur niveau, variable entre deux approvisionnements, doit permettre également de surmonter les aléas techniques d'exploitation. Ces stocks sont définis par l'AET en liaison avec les unités du SEA ;

  • les stocks réservés sont des stocks de précaution destinés à garantir les ressources en produits pétroliers des forces en toutes circonstances notamment en cas de rupture majeure de la chaîne logistique ou de hausse importante et inattendue des consommations des forces armées due à des circonstances exceptionnelles.

Les stocks réservés sont déterminés par l'état-major des armées (EMA) : ils recouvrent les stocks stratégiques de défense, les stocks d'engagement et les stocks de crise. Ils sont définis comme suit :

  • un stock stratégique de défense est constitué pour faire face à une crise d'approvisionnement internationale ;

  • un stock d'engagement est un stock de produit pétrolier pour soutenir l'engagement d'une force sur très court préavis. Il garantit l'autonomie de cette force dès le début de l'engagement jusqu'à ce qu'une chaîne de soutien pétrolier soit mise en œuvre ;

  • un stock de crise est destiné à être distribué en toute situation opérationnelle qui le nécessiterait. Il doit garantir l'autonomie de fonctionnement des forces armées et de l'ensemble des organismes relevant du ministère des armées.

Les stocks réservés sont entretenus en priorité en infrastructure militaire pour offrir les meilleures conditions de disponibilité. L'emploi de ces réserves n'est autorisé que sur ordre d'une autorité dûment définie par l'EMA.

  • les stocks spéciaux permettent de répondre à un besoin ponctuel défini par des plans particuliers qui ne seraient pas pris en compte par ailleurs. Leur mise en œuvre et leur volume sont arrêtés par la DCSEA ; ils n'ont pas vocation à être entretenus en permanence.

La somme de plusieurs stocks est appelée stock total. En fonction de la zone d'implantation des unités du SEA, le stock total est constitué par la somme :

  • du stock outil, du stock crise, du stock stratégique défense et éventuellement du stock spécial pour la France continentale et la Corse ;

  • du stock outil, du stock crise et du stock d'engagement hors du territoire métropolitain.

3.3. Stocks des opérations extérieures.

Les stocks à détenir au niveau stratégique, opératif et/ou des composantes sont précisés par l'EMA. Ils sont fonction de la composition de la force, du positionnement des sources d'approvisionnement, des élongations du dispositif de soutien et des hypothèses d'engagement. 

4. La distribution (et la reprise) de carburant.

4.1. Généralités.

La distribution et la gestion de la recette sont des processus bien distincts et complémentaires intervenant lors de la cession des carburants. Le processus de la gestion de la recette ne relevant pas de l'exploitation, il est hors du périmètre de la présente instruction.

La distribution est l'ensemble des activités effectuées à la sortie d'une installation de stockage appartenant à un détenteur militaire ou civil, avant la fourniture à un client ou à un autre détenteur du SEA. Ce processus comprend également les reprises de carburant aux clients.

La reprise de carburant est un ensemble d'opérations qui consistent à reprendre du carburant auprès d'un client.

Le processus de distribution (et de reprise) distingue trois modes de sortie différents :

  • les cessions : elles correspondent à la fourniture de carburant à des clients du SEA ;

  • les transferts : ils désignent les mouvements physiques de carburant entre deux détenteurs du SEA et induisent des transferts des risques. Un transfert correspond ainsi à une distribution pour un détenteur du SEA perdant et à un approvisionnement pour un autre détenteur gagnant (cf. point 2.2. supra) ;

  • les reprises.

Les activités de ce processus sont regroupées au sein des procédures suivantes :

  • la préparation des moyens en vue de distribuer, transférer ou de reprendre ;

  • l'exécution des distributions ;

  • l'exécution des reprises.

La connaissance du client est essentielle pour assurer ces activités.

4.2. Les reprises de carburant.

Le SEA assure aussi des reprises de carburant contenu dans les réservoirs d'aéronefs ou de bâtiments des armées. Si les reprises sont en règle générale des prestations assurées au profit de clients pour délester leur matériel d'un trop plein de carburant avant l'entrée de ce dernier en maintenance ou pour un ajustement de carburant avant un départ en mission, elles sont aussi, dans un cadre opérationnel, une source d'approvisionnement en carburant (cf. point 2.2 supra).

Les reprises sont des opérations spécifiques aux armées. Elles sont généralement réalisées par des moyens militaires. Les carburants repris entrent dans les stocks de l'unité du SEA qui reprend.

4.3. Les distributions de carburant.

La distribution peut être assurée à partir d'installations de stockage militaires ou civiles, avec un produit appartenant ou non au SEA, par des moyens civils ou militaires appartenant ou non au SEA, dans divers types de conditionnement.

4.3.1. Secteurs de distribution.

Deux secteurs de distribution sont définis en fonction du propriétaire des carburants distribués : le secteur militaire et le secteur civil. Ils sont définis dans l'instruction générale de quatrième référence comme suit :

Le secteur militaire retrace les opérations d'achat de produits résultant de marchés, contrats ou accords techniques d'approvisionnement passés par le SEA. Le SEA assure la gestion de ces produits. Ces produits sont suivis dans le cadre de la comptabilité logistique des biens de l'Etat. Le SEA gère les commandes passées auprès des fournisseurs, le stockage (dans des capacités détenues en propre ou louées au moyen de contrat d'externalisation) et assure la distribution par ses moyens propres ou par des moyens externalisés).

Le secteur civil retrace les opérations d'achat de produits résultant de marchés, contrats ou accords techniques de distribution passés par le SEA. Les produits ne transitent pas dans les capacités de stockage détenues par le SEA ou louées par ce dernier.

4.3.2. Modes de distribution.

Deux modes de distribution existent :

  • le mode de distribution est un enlèvement lorsque le client vient se ravitailler au dépôt de l'opérateur pétrolier (SEA, civil ou autre) avec ses propres moyens ;

  • le mode de distribution est une livraison lorsque le client se fait livrer par un opérateur pétrolier (SEA, sous contrôle SEA, civil ou autre).

Ces modes de distribution portent le transfert des risques entre le prestataire de la distribution (SEA ou opérateur civil sous contrat du SEA) et le bénéficiaire de la prestation (client du SEA ou autre unité du SEA). Les modalités de ce transfert des risques sont définies :

  • de manière implicite lorsque le bénéficiaire de la prestation de distribution appartient au ministère des armées ;

  • de manière explicite dans un document contractuel pour les autres clients. Lorsque le client est une armée étrangère, le contrat qui explicite le transfert des risques respecte au minimum le STANAG 3149 (14) en ce qui concerne la qualité produit.

D'une manière générale, le transfert des risques a lieu au moment où le carburant passe des moyens de stockage ou de transport du prestataire aux moyens de stockage, de transport ou les réservoirs des matériels du bénéficiaire.

4.3.3. Autre mode de distribution - les unités ravitailleuses.

Des formations ou organismes ressortissant à l'une des trois armées, des directions ou services interarmées, voire des organismes publics clients du SEA, peuvent avoir le statut d'unité ravitailleuse. Ce statut leur octroie la possibilité de distribuer du carburant à d'autres clients du SEA à partir de leurs propres stocks et de faire l'objet, par la suite, d'un remboursement par le SEA.

4.3.4. Le conditionnement.

Les carburants sont distribués suivant différents conditionnements. Chacun d'eux caractérise les capacités contenant le produit en amont et en aval de la fourniture (à la partie prenante). Il en existe quatre types :

  • la distribution « bord-cuve » correspond à la fourniture de carburants en vrac dans une cuve appartenant à un client ;

  • la distribution « bord-réservoir » correspond au remplissage des réservoirs des matériels des clients ;

  • la distribution de carburants conditionnés correspond à la fourniture de carburants conditionnés, dans des emballages fournis par le SEA à un client ;

  • la distribution « bord-emballage » correspond au remplissage d'un emballage vide appartenant aux clients.

Les secteurs de distribution, les modes de distribution et les conditionnements peuvent se combiner.

5. Opérations particulières de fourniture de carburant.

Il existe deux types d'opérations de fourniture de carburant particulières couramment utilisées au SEA, les droitures et les livraisons directes. Ces deux opérations suivent chacune successivement des procédures d'approvisionnement, de stockage et de distribution.

Les droitures sont des livraisons de produit en secteur militaire, effectuées au profit des clients du SEA par des moyens SEA ou affrétés par lui, approvisionnés directement depuis les stocks de dépôts fournisseurs. Le carburant transite physiquement dans les stocks du SEA lors du transport.

Les livraisons directes sont des livraisons de produit effectuées au profit des clients du SEA par les moyens du titulaire ou affrétés par lui, depuis ses propres stocks.

6. Dispositions diverses.

La présente instruction abroge l'instruction n °6600/DCE/I/RD/ASO/RDO du 20 septembre 1973 relative aux modalités des gestions (approvisionnement, stockage et distribution) des carburants, produits associés et produits divers.

La présente instruction est publiée au Bulletin officiel des armées.

Pour la ministre des armées et par délégation :

L'ingénieur général hors classe,
directeur central du service des essences des armées,

Jean-Luc VOLPI.

Annexe

Annexe. . Schémas descriptifs des opérations de fourniture de carburant.