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DIRECTION GENERALE DE L'ARMEMENT :

DIRECTIVE N° 1476/DEF/CAB relative à la mise en œuvre d'une politique de recours au dispositif des enquêtes de coûts dans le cadre des acquisitions du domaine de l'armement.

Du 14 février 2014
NOR D E F A 1 4 5 1 1 3 1 X

Pièce(s) jointe(s) :     Une annexe.

Classement dans l'édition méthodique : BOEM  330.1.1.3.

Référence de publication : BOC n°35 du 18/7/2014

La mise en concurrence des entreprises est le moyen d'action nominal des acheteurs du secteur public pour réaliser leurs acquisitions dans les meilleures conditions d'économie et respecter les principes de la commande publique.

Cependant, dans le domaine de l'armement, notamment en matière de maintenance des matériels, la spécialité des techniques, le petit nombre de fournisseurs possédant les compétences requises, des motifs de secret ou des raisons d'urgence impérieuse ne permettent pas toujours de faire appel à la concurrence ou de la faire jouer efficacement.

En outre, par ses acquisitions et la politique qu'il mène en la matière le ministère de la défense a une influence déterminante sur le développement et le maintien de la base industrielle et technologique de défense (BITD) garantissant la permanence des capacités technologiques et industrielles nécessaires à la défense et la sécurité nationale.

Il résulte de cette situation complexe que les services acheteurs du ministère de la défense doivent impérativement disposer des informations adaptées et pouvoir agir avec un niveau de confiance suffisant lorsqu'ils négocient les conditions de prix avec les fournisseurs, et tout particulièrement lorsque ceux-ci sont en situation de pouvoir occuper une place importante dans la BITD, le cas échéant dans une position de monopole.

La présente directive pose les bases d'une politique visant la transparence des coûts avec les industriels. Elle définit le cadre général et le concept de recours aux enquêtes dans le domaine particulier de l'armement. Elle précise les attendus ministériels en matière de relations entre les pouvoirs adjudicateurs du ministère et le secteur industriel dans ce domaine particulier.

La législation en vigueur (1) permet aux services de l'État de mener auprès de ses fournisseurs, dans un cadre réglementaire et contractuel, des enquêtes de coût de revient a posteriori concernant des prestations [y compris celles de maintien en condition opérationnelle (MCO)] ayant fait l'objet de certains marchés publics. Les résultats issus de ces enquêtes constituent un référentiel important à la disposition des pouvoirs adjudicateurs du ministère dans la recherche d'un prix des prestations équilibré garantissant des rémunérations raisonnables aux entreprises tout en les encourageant à réduire leur coûts et à améliorer la qualité de leurs produits.

Ces enquêtes de coûts de revient a posteriori sont décidées par les pouvoirs adjudicateurs et sont réalisées par des agents spécialisés, les enquêteurs de prix du ministère de la défense, dûment formés et habilités, par arrêté du ministre, à effectuer des vérifications sur pièces ou sur place. Cette compétence très particulière est regroupée, au profit de l'ensemble du ministère, à la direction générale de l'armement (DGA) qui est chargée de son entretien et de son développement.

Il convient de disposer d'une vision globale des stratégies d'acquisition sur l'ensemble du cycle de vie afin de s'assurer de pouvoir disposer en temps utile des enquêtes adaptées aux enjeux des négociations. À cet effet, une programmation des enquêtes de coûts de revient sera réalisée, à partir d'un plan triennal actualisé annuellement selon un processus décrit en annexe. Elle s'appuiera sur une analyse des enjeux et un dialogue dynamique entre la direction générale de l'armement, l'état-major des armées et les pouvoirs adjudicateurs bénéficiaires des enquêtes.

Une des conditions de la réalisation d'enquêtes de coûts de revient a posteriori réside dans la présence de clauses d'obligations comptables (COC) adaptées dans les marchés.

Les pouvoirs adjudicateurs doivent donc, dès lors que cela est possible, y compris sur certains marchés passés après mises en concurrence, lorsque celle-ci ne joue pas efficacement (2), systématiser la mise au point et l'insertion de telles clauses dans leurs projets de marchés.

La DGA mettra à disposition les compétences de son service d'enquête afin de conseiller les pouvoirs adjudicateurs sur la rédaction de clauses comptables adaptées afin de garantir la faisabilité du contrôle et sa réalisation dans des délais compatibles avec son exploitation dans le cadre des négociations ultérieures.

Ces clauses seront adaptées à chaque marché. Elles prévoiront notamment l'extension possible des contrôles aux sous-traitants et tiendront compte de la situation particulière des petites et moyennes entreprises (PME). Pour ces dernières, comme le prévoit la réglementation en vigueur (3), des dispositions simplifiées pourront y être introduites.

Enfin, les clauses d'obligations comptables rappelleront les sanctions dont disposent réglementairement les pouvoirs adjudicateurs (4) si les entreprises titulaires ne fournissent pas aux dates prévues les renseignements demandés ou fournissent des renseignements inexacts.

Les enquêtes de coûts de revient permettent de déterminer a posteriori les coûts de revient complets et réels des prestations relatives aux marchés entièrement ou partiellement exécutés.

Elles participent donc d'une connaissance plus fine de la réalité comptable, industrielle, commerciale et structurelle des entreprises avec lesquelles le ministère contractualise fréquemment, favorisant ainsi les négociations, rationnelles et équilibrées, des prix des nouveaux marchés et de leurs formules de révision.

Cette connaissance ne peut être précise que si les entreprises respectent leurs obligations comptables réglementaires et contractuelles.

Compte tenu des enjeux stratégiques de la maîtrise des coûts et de la relation entre le ministère et la BITD, je demande, d'une part, au service d'enquête des coûts de la DGA, de relever tout manquement des entreprises à leurs obligations comptables réglementaires et contractuelles et, d'autre part, aux pouvoirs adjudicateurs, de sanctionner ces manquements conformément aux dispositions en vigueur. De plus, mon cabinet veillera à se faire présenter annuellement les constats de conformité des procédures de contrôle des coûts de revient établis par les fonctionnaires coordonnateurs conformément à l'article 9. de l'arrêté du 20 décembre 2000.

Dans le domaine peu concurrentiel de l'acquisition de matériels d'armement et de leur maintien en condition opérationnelle la sauvegarde des intérêts respectifs de l'administration et de ses fournisseurs est basée sur la confiance réciproque et notamment sur la transparence en matière de coûts de revient constatés mais aussi prévisionnels.

En matière de contrôle des coûts a posteriori celle-ci est imposée par les textes législatifs et réglementaires en vigueur. En matière de négociation, en l'absence de concurrence effective, la transparence sur les coûts prévisionnels proposés par les entreprises relève de la volonté commune des parties d'aboutir à une situation équilibrée satisfaisant les objectifs de la politique de défense nationale.

Ainsi, en l'absence de données suffisantes sur la convenance des prix, les pouvoirs adjudicateurs demanderont pour les marchés à forts enjeux, le concours du service d'enquête des coûts de la DGA pour la réalisation d'analyses de coûts a priori (5) qui seront exécutées par les enquêteurs de prix habilités.

L'exigence de transparence dans le cadre des enquêtes de coûts a priori pourra être un préalable à la notification d'un marché.

Compte tenu des enjeux stratégiques, l'absence de transparence dans le cadre de la recherche de conditions rationnelles et équilibrées de négociation dans les situations ne permettant pas de faire appel à la concurrence ou de la faire jouer efficacement, me sera rapportée.

Mon cabinet sera chargé de convoquer la direction des entreprises concernées pour instruire la situation. Si nécessaire, j'en déterminerai les conséquences avec mes services dans le cadre du comité ministériel des investissements (CMI).

Les pouvoirs adjudicateurs veilleront par ailleurs, en cas de projets d'achats sans concurrence à l'étranger directement auprès des fournisseurs, à demander des avis sur les prix avant toute contractualisation aux services compétents de la DGA qui mettront en œuvre et veilleront à équilibrer les accords d'enquêtes réciproques avec nos partenaires étatiques internationaux.

La mise en œuvre des principes généraux définis ci-dessus concernant les analyses de coûts a posteriori et a priori doit contribuer à consolider et améliorer la maîtrise des prix relatifs aux marchés d'armement sur l'ensemble du cycle de vie des systèmes, et favoriser le maintien, le développement et la compétitivité du secteur industriel de la défense.

J'attache, en conséquence, le plus grand intérêt à ce que vous donniez aux services placés sous votre responsabilité les instructions nécessaires pour qu'ils appliquent les principes du présent document.

Notes

    Décret-loi du 30 octobre 1935 organisant le contrôle administratif des marchés relatifs aux matériels de guerre et article 54. de la loi de finances pour 1963 instituant un droit de contrôle de revient pour certains marchés et son instruction d'application du 15 octobre 1964. 1Pour l'un des motifs évoqués plus haut.2Article 10. de l'arrêté du 20 décembre 2000.3Cf. article 289. du décret n° 2011-1104 du 14 septembre 2011 relatif à la passation et à l'exécution des marchés publics de défense ou de sécurité.4Cf. circulaire du 26 juillet 1971 relative à la pratique des analyses de coûts dans les marchés publics.5

Le ministre de la défense,

Jean-Yves LE DRIAN.

Annexe

Annexe. Processus de validation et d'exécution du plan triennal d'enquêtes de coûts de la division enquêtes de coûts.