> Télécharger au format PDF
DIRECTION DES AFFAIRES JURIDIQUES :

ACCORD de coopération dans le domaine de la défense entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, signé à Alger (1).

Du 21 juin 2008
NOR M A E J 1 3 0 9 1 1 9 D

Classement dans l'édition méthodique : BOEM  101-1.3.2.

Référence de publication : BOC n°55 du 31/10/2014

Le Gouvernement de la République française

et

le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire,

ci-après dénommés « les Parties »,

Considérant les liens d'amitié qui existent entre la République française et la République algérienne démocratique et populaire ;

Réaffirmant leur attachement aux principes et objectifs de la charte des Nations unies, notamment en ce qui concerne le respect de l'indépendance et de la souveraineté des États ;

Aspirant à l'établissement d'une coopération durable reposant sur le respect mutuel, la confiance et la prise en considération des intérêts de chaque Partie ;

Soucieux de contribuer au maintien durable de la stabilité régionale en coopérant dans les domaines de la lutte contre le terrorisme et la prévention des crises ;

Désireux de favoriser, par leurs efforts bilatéraux, le renforcement du dialogue et de la coopération en matière de défense entre les deux rives de la Méditerranée ;

sont convenus de ce qui suit :

Article 1er

Au sens du présent accord :

  • « Partie d'envoi » désigne la Partie dont relève le personnel militaire et civil qui se trouve sur le territoire de l'autre Partie ;

  • « Partie d'accueil » désigne la Partie sur le territoire de laquelle se trouve le personnel militaire et civil de la Partie d'envoi, en séjour ou en transit ;

  • « membre du personnel militaire » désigne le personnel appartenant aux forces armées de l'une des Parties qui se trouve pour l'exécution du service sur le territoire de l'autre Partie conformément au présent accord ;

  • « membre du personnel civil » désigne le personnel accompagnant les forces armées d'une Partie et employé ou lié par un contrat avec les forces armées ou le ministère de la défense pour une mission liée à la défense et qui ne peut être qu'un national de la Partie d'envoi ;

  • « personnel lié par contrat » désigne les spécialistes techniques représentant les fournisseurs des forces de défense et travaillant directement pour ces forces ;

  • « forces armées » désigne les unités ou formations des armées de terre, de mer ou de l'air ou de tout autre corps militaire de l'une des Parties ;

  • « membre de la famille » désigne les personnes qui ne sont ni des résidents ordinaires ni des ressortissants nationaux de la Partie d'accueil et qui sont uniquement les conjoints, enfants et ascendants du personnel militaire et civil.

TITRE PREMIER

OBJET ET FORMES DE LA COOPÉRATION

Article 2

1. Le présent accord a pour objet le développement de la coopération entre les Parties dans le domaine de la défense.

2. Dans le cadre du présent accord, les Parties conviennent de mettre en œuvre et de développer leur coopération selon les formes suivantes :

a) Le maintien et le développement des contacts et des relations entre les ministères chargés des questions de défense des Parties au moyen de visites de hautes autorités politiques et militaires et d'échanges de délégations ;

b) Le développement d'échanges stratégiques sous une forme appropriée en vue de faire face aux crises et facteurs de déstabilisation susceptibles d'affecter les Parties ;

c) La coopération en matière de lutte antiterroriste ;

d) La formation du personnel dans les établissements d'enseignement militaire supérieur et de formation spécialisée ;

e) L'organisation et l'exécution d'exercices conjoints et l'invitation d'observateurs militaires pour les manœuvres et/ou exercices nationaux ;

f) La tenue d'escales de navires de guerre, de visites dans les bases et les unités militaires ;

g) L'échange de vues dans le domaine de la défense et de la doctrine d'emploi des forces militaires, y compris l'échange de renseignements à caractère militaire sur des domaines déterminés par accord mutuel ;

h) La coopération dans le domaine de la santé militaire ;

i) La promotion et le développement de la coopération en matière de technologies spatiales, d'observation spatiale, de géographie militaire et d'hydrographie ;

j) L'acquisition de systèmes d'armes, d'équipements et de matériels de défense et des services afférents, leur modernisation ainsi que l'échange d'expérience en la matière ;

k) La promotion et le développement de la coopération dans le domaine de la recherche scientifique et de technologie de défense, ainsi que le partenariat en matière d'industrie de défense et de transfert de technologies ;

l) Toute autre activité décidée conjointement par les Parties afin de promouvoir une coopération plus étroite entre leurs services chargés des questions de défense.

3. La mise en œuvre de la coopération prévue par le présent accord relève principalement de la compétence des ministres de la défense des Parties. Si nécessaire, les modalités de mise en œuvre peuvent être précisées par voie d'arrangement.

Article 3

1. Il est institué une commission mixte franco-algérienne, ci-après désignée « la commission », chargée :

  • d'établir la conception générale de la coopération bilatérale dans les domaines définis à l'article 2 du présent accord, ainsi que d'organiser et de coordonner cette coopération ;

  • d'étudier les nouvelles propositions de coopération.

2. La commission est co-présidée par un représentant désigné par le ministère de la défense de chacune des Parties. Elle est, en outre, composée de représentants des Parties dont la participation s'avère nécessaire.

3. La commission se réunit au moins une fois par an alternativement en France et en Algérie. Elle dresse un bilan de la coopération de l'année écoulée, exerce le suivi des actions en cours, fixe le plan de coopération pour l'année à venir et examine les échéances ultérieures. Le plan de coopération comporte les actions décidées en commun, leur objet et leurs modalités.

4. La commission fonctionnera sur la base des principes établis conjointement par les co-présidents et conformément au règlement qu'ils auront adopté.

Article 4

1. La commission mixte franco-algérienne comprend quatre sous-commissions, dénommées respectivement :

  • la « sous-commission stratégique » ;

  • la « sous-commission militaire » ;

  • la « sous-commission armement » ;

  • la « sous-commission santé militaire ».

Chaque sous-commission est chargée d'un aspect particulier de la coopération bilatérale relevant des domaines de l'article 2 du présent accord.

Les sous-commissions présentent l'avancement de leurs travaux au cours de la réunion de la commission mixte franco-algérienne. Chaque sous-commission est co-présidée par un représentant du ministère de la défense de chaque Partie.

2. La « sous-commission stratégique » définit un cadre permettant les échanges de vues et d'analyses sur la notion de défense et sur toute question relative à la sécurité et à la stabilité dans un environnement régional comme dans une perspective globale.

3. La « sous-commission militaire » définit un cadre permanent de coopération militaire étendue en vue de mener les actions de coopération militaire permettant d'assurer un rapprochement des forces de défense françaises et algériennes.

4. La « sous-commission armement » définit un cadre permettant d'aborder de manière régulière les projets d'intérêt commun dans le domaine de l'armement.

5. La « sous-commission santé militaire » définit un cadre permettant d'aborder les objectifs et perspectives à développer dans le domaine de la santé militaire.

TITRE II

STATUT DES MEMBRES DU PERSONNEL MILITAIRE ET CIVIL

Article 5

1. Les membres du personnel militaire et civil de la Partie d'envoi sont tenus de respecter la législation et la réglementation de la Partie d'accueil. La Partie d'envoi informe les membres de son personnel de la nécessité de respecter les lois et règlements de la Partie d'accueil.

2. Les membres du personnel militaire et civil de l'une des Parties présents sur le territoire de l'autre Partie dans le cadre du présent accord ne peuvent en aucun cas être associés à la préparation ou à l'exécution d'opérations de guerre ni à des actions de maintien ou de rétablissement de l'ordre, de la sécurité publique ou de la souveraineté nationale, ni intervenir dans ces opérations.

3. Dans le cas d'échanges de membres du personnel militaire entre les unités des forces armées des deux Parties effectués dans le cadre du présent accord, l'activité du personnel échangé est soumise aux règlements militaires en vigueur dans l'unité d'accueil.

Article 6

1. Durant leur séjour sur le territoire de la Partie d'accueil, les personnels concernés par la mise en œuvre du présent accord restent soumis, notamment au plan disciplinaire, à leurs autorités militaires d'origine, par la voie de :

  • l'Attaché de défense près l'ambassade de la République française à Alger, pour les personnels français ;

  • l'Attaché de défense près l'ambassade de la République algérienne démocratique et populaire à Paris, pour les personnels algériens.

2. Les autorités de la Partie d'envoi sont seules compétentes en matière de discipline. Les autorités compétentes de la Partie d'accueil informent le supérieur hiérarchique concerné de la Partie d'envoi des comportements qu'elles considèrent comme passibles de sanctions disciplinaires.

Article 7

1. Les infractions commises par un membre du personnel militaire ou civil ainsi que celles commises par un membre de sa famille sont de la compétence des juridictions de la Partie d'accueil, sous réserve des dispositions prévues au paragraphe 2 du présent article.

2. Par dérogation aux dispositions du paragraphe 1 du présent article, les autorités de la Partie d'envoi exercent par priorité leur juridiction sur les membres de leur personnel militaire ou civil dans les cas suivants :

  • les infractions portant uniquement atteinte à la sécurité de la Partie d'envoi, aux biens de la Partie d'envoi ou à la personne d'un autre membre du personnel militaire ou civil de la Partie d'envoi ; ou

  • les infractions résultant de tout acte ou négligence accompli en service ou à l'occasion du service. La Partie d'envoi détermine si l'infraction a été commise en service ou à l'occasion du service.

3. Dans les cas visés au deuxième paragraphe, les autorités de la Partie d'envoi peuvent renoncer à leur droit de juridiction prioritaire, après notification de leur intention aux autorités de la Partie d'accueil et acceptation de celle-ci.

4. Les autorités de la Partie d'accueil notifient sans délai aux autorités de la Partie d'envoi toute arrestation d'un membre du personnel militaire ou civil ou d'un membre de sa famille.

5. S'agissant des infractions commises en service par un membre du personnel militaire ou civil de la Partie d'envoi, la Partie d'accueil s'engage à examiner avec diligence la demande de remise formulée par la Partie d'envoi.

Article 8

Les Parties complèteront, en tant que de besoin, le statut des membres de leur personnel militaire et civil.

TITRE III

CONTENTIEUX ET RÈGLEMENT DES DIFFÉRENDS

Article 9

1. Chaque Partie renonce à toute demande d'indemnité à l'encontre de l'autre Partie ainsi qu'à l'encontre des membres du personnel militaire ou civil pour les dommages causés à son personnel ou à ses biens résultant des activités liées à la mise en œuvre du présent accord, sauf en cas de faute lourde ou intentionnelle. Par faute lourde, il est entendu l'erreur grossière ou la négligence grave. La détermination de l'existence d'une faute lourde est de la compétence des autorités de la Partie dont relève l'auteur de la faute.

2. La Partie d'accueil se substitue dans l'instance à la Partie d'envoi pour toute action qu'engageraient les tiers ou leurs ayants droits.

3. La charge des indemnités versées pour la réparation des dommages causés à des tiers à la suite d'une procédure amiable est répartie entre les Parties de la façon suivante :

  • lorsque le dommage est imputable à une seule Partie, cette Partie assure le règlement du montant total des indemnités ;

  • lorsque le dommage est imputable aux deux Parties ou quand il n'est pas possible d'en attribuer la responsabilité à l'une ou l'autre des Parties, le montant des indemnités est réparti à parts égales entre les Parties.

4. Les indemnités pour la réparation des dommages causés à des tiers à la suite d'une procédure contentieuse sont à la charge de la Partie que la décision de justice a déterminée et dans les proportions qu'elle a fixées.

Article 10

Tout différend qui naîtrait de l'application ou de l'interprétation des dispositions du présent accord est réglé par les Parties à l'amiable par voie de consultations et de négociations.


TITRE IV

SOUTIEN DE LA PARTIE D'ACCUEIL

Article 11

Les modalités de soutien financier et logistique des activités de coopération sont, le cas échéant, précisées selon les prescriptions de l'article 2 du présent accord, en respectant les principes suivants :

  • chaque Partie supporte les frais de déplacement des membres de son personnel militaire ou civil vers et à partir du territoire de l'État de la Partie d'accueil. Tout transport effectué par des moyens militaires à l'intérieur du territoire d'une Partie est à la charge de cette dernière ;

  • lors des visites et des échanges, chaque Partie supporte les frais d'alimentation et d'hébergement des membres de son personnel militaire ou civil ;

  • lors des exercices et entraînements conjoints, la Partie d'accueil prend à sa charge, à titre gracieux, l'hébergement dans ses installations militaires ainsi que la mise à disposition des infrastructures d'entraînement pour les membres du personnel militaire ou civil de la Partie d'envoi.

Article 12

1. Les membres du personnel militaire ou civil de la Partie d'envoi ont accès aux soins médicaux nécessaires auprès du service de santé des armées de la Partie d'accueil dans les mêmes conditions que pour les membres de son propre personnel.

2. Les actes médicaux délivrés par les services médicaux d'unité ou de garnison ainsi que les évacuations sanitaires d'urgence par aéronefs militaires sont gratuits.

3. Les évacuations sanitaires par moyens aériens civils, les hospitalisations, consultations, examens et soins en milieu hospitalier civil sont remboursés par la Partie dont relève le membre du personnel traité.

TITRE V

DISPOSITIONS FINALES

Article 13 

Le décès d'un membre du personnel militaire ou civil est déclaré aux autorités territorialement compétentes de la Partie d'accueil. Les autorités compétentes dont relève le défunt peuvent disposer du corps dès que l'autorisation leur en a été notifiée par l'autorité compétente de la Partie d'accueil. Le transport du corps est effectué conformément à la réglementation de la Partie d'accueil.

Article 14

1. Les Parties s'engagent à conclure dès que possible un accord de sécurité pour régir l'échange des informations classifiées entre elles.

2. Tant que cet accord de sécurité n'est pas entré en vigueur, les règles suivantes s'appliquent :

a) Les Parties protègent les informations classifiées auxquelles elles pourraient avoir accès dans le cadre du présent accord en conformité avec leurs lois et règlements nationaux ;

b) Les informations classifiées sont transmises uniquement par les voies officielles ou par des voies agréées par les services de sécurité désignés par les Parties ;

c) Aucune information ne peut être diffusée ou divulguée à des tiers, personnes ou entités non autorisés sans accord écrit préalable de la Partie d'envoi.

Article 15 

Les Parties s'accordent une pleine coopération et assistance pour l'exécution, par les industries et/ou organismes concernés, des protocoles d'accord et contrats conclus sur la base du présent accord. Elles veillent en particulier à faciliter la délivrance des documents nécessaires à l'exportation des équipements et matériels acquis. 

Article 16 

Les Parties exécutent, en toutes circonstances et conformément à leur ordre juridique interne respectif, les engagements pris dans le cadre du présent accord. 

Article 17 

1. Chaque Partie notifie à l'autre l'accomplissement des formalités requises sur son territoire pour l'entrée en vigueur du présent accord. Celui-ci entre en vigueur le premier jour du deuxième mois suivant le jour de la réception de la seconde notification.

2. Le présent accord peut être complété, modifié et amendé à tout moment, par écrit, d'un commun accord entre les Parties.

3. Le présent accord est conclu pour une durée de dix (10) ans, renouvelable chaque année par tacite reconduction. Il peut être dénoncé à tout moment, par notification écrite, par chacune des Parties. Dans ce cas, il cesse d'être en vigueur quatre-vingt-dix (90) jours à partir du jour de la réception de la notification par l'autre Partie.

4. L'expiration ou la dénonciation du présent accord ne dégage pas les Parties des obligations nées de son application.

En foi de quoi les représentants dûment autorisés des deux Parties ont signé le présent accord.

Fait à Alger, le 21 juin 2008, en deux exemplaires, chacun en langues française et arabe, les deux textes faisant également foi.

Déclaration

« Le Gouvernement de la République française précise que l'ordre juridique interne mentionné à l'article 16 de l'accord vise, en ce qui concerne la République française, tant la Constitution du 4 octobre 1958 que les accords et conventions internationaux auxquels la France est partie.

Sur le fondement de ces dispositions, les autorités françaises ne pourront pas remettre aux autorités algériennes, dans les différents cas prévus à l'article 7 de l'Accord, des personnels civils ou militaires ou des membres de leur famille suceptibles d'encourir la peine capitale au titre du droit algérien applicable. »

Pour le Gouvernement de la République française :

Hervé MORIN.

Ministre de la défense,


 Pour le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire :

Abdelmalek GUENAIZIA.

Ministre délégué auprès du ministre de la défense nationale.

Notes

    Le présent accord est entré en vigueur le 1er février 2013.1