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DIRECTION DES AFFAIRES JURIDIQUES :

CONVENTION pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé.

Du 14 mai 1954
NOR

Classement dans l'édition méthodique : BOEM  101-0.5.1.2.

Référence de publication : BOC n°60 du 28/11/2014

Les Hautes Parties contractantes,

Constatant que les biens culturels ont subi de graves dommages au cours des derniers conflits et  qu'ils  sont,  par  suite  du  développement  de  la  technique  de  la  guerre,  de  plus  en  plus menacés de destruction ;

Convaincues que les atteintes portées aux biens culturels, à quelque peuple qu'ils appartiennent, constituent des atteintes au patrimoine culturel de l'humanité entière, étant donné que chaque peuple apporte sa contribution à la culture mondiale ;

Considérant que la conservation du patrimoine culturel présente une grande importance pour tous les peuples du monde et qu'il importe d'assurer à ce patrimoine une protection internationale ;

Guidées par les principes concernant la protection des biens culturels en cas de conflit armé établis dans les Conventions de La Haye de 1899 et de 1907 et dans le Pacte de Washington du 15 avril 1935 ;

Considérant que, pour être efficace, la protection de ces biens doit être organisée dès le temps de paix par des mesures tant nationales qu'internationales ;

Résolues à prendre toutes les dispositions possibles pour protéger les biens culturels ;

Sont convenues des dispositions qui suivent :

CHAPITRE PREMIER

DISPOSITIONS GÉNÉRALES CONCERNANT LA PROTECTION

Article 1er

DÉFINITIONS DES BIENS CULTURELS

Aux fins de la présente Convention, sont considérés comme biens culturels, quels que soient leur origine ou leur propriétaire :

a) les biens, meubles ou immeubles, qui présentent une grande importance pour le patrimoine culturel des peuples, tels que les monuments d'architecture, d'art ou d'histoire, religieux ou laïques, les sites archéologiques, les ensembles de constructions qui, en tant que tels, présentent un intérêt historique ou artistique, les oeuvres d'art, les manuscrits, livres et autres objets d'intérêt artistique, historique ou archéologique, ainsi que les collections scientifiques et les collections importantes de livres, d'archives ou de reproductions des biens définis ci-dessus ;

b) les édifices dont la destination principale et effective est de conserver ou d'exposer les biens culturels  meubles  définis  à  l'alinéa  a),  tels  que  les  musées,  les  grandes  bibliothèques,  les dépôts d'archives, ainsi que les refuges destinés à abriter, en cas de conflit armé, les biens culturels meubles définis à l'alinéa a) ;

c) les centres comprenant un nombre considérable de biens culturels qui sont définis aux alinéas a) et b), dits « centres monumentaux ».

Article 2

PROTECTION DES BIENS CULTURELS

Aux fins de la présente Convention, la protection des biens culturels comporte la sauvegarde et le respect de ces biens.

Article 3

SAUVEGARDE DES BIENS CULTURELS

Les Hautes Parties contractantes s'engagent à préparer, dès le temps de paix, la sauvegarde des biens culturels situés sur leur propre territoire contre les effets prévisibles d'un conflit armé, en prenant les mesures qu'Elles estiment appropriées.

Article 4

RESPECT DES BIENS CULTURELS

1. Les Hautes Parties contractantes s'engagent à respecter les biens culturels situés tant sur leur propre territoire que sur celui des autres Hautes Parties contractantes en s'interdisant l'utilisation  de  ces  biens,  celle  de  leurs  dispositifs  de  protection  et  celle  de  leurs  abords immédiats à des fins qui pourraient exposer ces biens à une destruction ou à une détérioration en cas de conflit armé, et en s'abstenant de tout acte d'hostilité à leur égard.

2. Il ne peut être dérogé aux obligations définies au paragraphe premier du présent article que dans les cas où une nécessité militaire exige, d'une manière impérative, une telle dérogation.

3. Les Hautes Parties contractantes s'engagent en outre à interdire, à prévenir et, au besoin, à faire cesser tout acte de vol, de pillage ou de détournement de biens culturels, pratiqué sous quelque forme que ce soit, ainsi que tout acte de vandalisme à l'égard desdits biens. Elles s'interdisent de réquisitionner les biens culturels meubles situés sur le territoire d'une  autre Haute Partie contractante.

4. Elles s'interdisent toute mesure de représailles à l'encontre des biens culturels.

5. Une Haute Partie contractante ne peut se dégager des obligations stipulées au présent article, à l'égard d'une autre Haute Partie contractante, en se fondant sur le motif que cette dernière n'a pas appliqué les mesures de sauvegarde prescrites à l'article 3.

Article 5

OCCUPATION

1. Les Hautes Parties contractantes occupant totalement ou partiellement le territoire d'une autre Haute Partie contractante doivent, dans la mesure du possible, soutenir les efforts des autorités nationales compétentes du territoire occupé à l'effet d'assurer la sauvegarde et la conservation de ses biens culturels.

2. Si une intervention urgente est nécessaire pour la conservation des biens culturels situés en territoire occupé et endommagés par des opérations militaires, et si les autorités nationales compétentes ne peuvent pas s'en charger, la Puissance occupante prend, autant que possible, les mesures conservatoires les plus nécessaires en étroite collaboration avec ces autorités.

3. Toute Haute Partie contractante dont le gouvernement est considéré par les membres d'un mouvement de résistance comme leur gouvernement légitime, attirera si possible l'attention de ces membres sur l'obligation d'observer celles des dispositions de la Convention qui ont trait au respect des biens culturels.

Article 6

SIGNALISATION DES BIENS CULTURELS

Conformément aux dispositions de l'article 16, les biens culturels peuvent être munis d'un signe distinctif de nature à faciliter leur identification.

Article 7

MESURES D'ORDRE MILITAIRE

1. Les Hautes Parties contractantes s'engagent à introduire dès le temps de paix dans les règlements ou instructions à l'usage de leurs troupes des dispositions propres à assurer l'observation de la présente Convention, et à inculquer dès le temps de paix au personnel de leurs forces armées un esprit de respect à l'égard des cultures et des biens culturels de tous les peuples.

2. Elles s'engagent à préparer ou à établir, dès le temps de paix, au sein de leurs forces armées, des services ou un personnel spécialisé dont la mission sera de veiller au respect des biens culturels et de collaborer avec les autorités civiles chargées de la sauvegarde de ces biens.

CHAPITRE II

DE LA PROTECTION SPECIALE

Article 8

OCTROI DE LA PROTECTION SPÉCIALE

1. Peuvent être placés sous protection spéciale un nombre restreint de refuges destinés à abriter des biens culturels meubles en cas de conflit armé, de centres monumentaux et d'autres biens culturels immeubles de très haute importance, à condition :

a) qu'ils se trouvent à une distance suffisante d'un grand centre industriel ou de tout objectif militaire important constituant un point sensible, tel par exemple qu'un aérodrome, une station de radiodiffusion, un établissement travaillant pour la défense nationale, un port ou une gare de chemin de fer d'une certaine importance ou une grande voie de communication ;

b) qu'ils ne soient pas utilisés à des fins militaires.

2. Un refuge pour biens culturels meubles peut également être placé sous protection spéciale, quel que soit son emplacement, s'il est construit de telle façon que, selon toute probabilité, les bombardements ne pourront pas lui porter atteinte.

3. Un centre monumental est considéré comme utilisé à des fins militaires lorsqu'il est employé pour des déplacements de personnel ou de matériel militaire, même en transit. Il en est de même lorsque s'y déroulent des activités ayant un rapport direct avec les opérations militaires, le cantonnement du personnel militaire ou la production de matériel de guerre.

4. N'est pas considérée comme utilisation à des fins militaires la surveillance d'un des biens culturels énumérés au paragraphe premier, par des gardiens armés spécialement habilités à cet effet, ou la présence auprès de ce bien culturel de forces de police normalement chargées d'assurer l'ordre public.

5. Si l'un des biens culturels énumérés au premier paragraphe du présent article est situé près d'un objectif militaire important au sens de ce paragraphe, il peut néanmoins être mis sous protection spéciale si la Haute Partie contractante qui en présente la demande s'engage à ne faire, en cas de conflit armé, aucun usage de l'objectif en cause, et notamment, s'il s'agit d'un port, d'une gare ou d'un aérodrome, à en détourner tout trafic. Dans ce cas, le détournement doit être organisé dès le temps de paix.

6. La protection spéciale est accordée aux biens culturels par leur inscription au « Registre international des biens culturels sous protection spéciale ». Cette inscription ne peut être effectuée que conformément aux dispositions de la présente Convention et dans les conditions prévues au Règlement d'exécution.

Article 9

IMMUNITÉ DES BIENS CULTURELS SOUS PROTECTION SPÉCIALE

Les Hautes Parties contractantes s'engagent à assurer l'immunité des biens culturels sous protection spéciale en s'interdisant, dès l'inscription au Registre international, tout acte d'hostilité à leur égard et, sauf dans les cas prévus au paragraphe 5 de l'article 8, toute utilisation de ces biens ou de leurs abords à des fins militaires.

Article 10

SIGNALISATION ET CONTRÔLE

Au cours d'un conflit armé, les biens culturels sous protection spéciale doivent être munis du signe distinctif défini à l'article 16 et être ouverts à un contrôle de caractère international, ainsi qu'il est prévu au Règlement d'exécution.

Article 11

LEVÉE DE L'IMMUNITÉ

1. Si l'une des Hautes Parties contractantes commet relativement à un bien culturel sous protection spéciale une violation des engagements pris en vertu de l'article 9, la Partie adverse est,  aussi  longtemps  que  cette  violation  subsiste, dégagée de son obligation d'assurer l'immunité du bien considéré. Cependant, chaque fois qu'Elle le peut, Elle fait préalablement la sommation de mettre fin à cette violation dans un délai raisonnable.

2. En dehors du cas prévu au premier paragraphe du présent article, l'immunité d'un bien culturel sous protection spéciale ne peut être levée qu'en des cas exceptionnels de nécessité militaire inéluctable, et seulement aussi longtemps que cette nécessité subsiste. Celle-ci  ne peut être constatée que par le chef d'une formation égale ou supérieure en importance à une division. Dans tous les cas où les circonstances le permettent, la décision de lever l'immunité est notifiée suffisamment à l'avance à la Partie adverse.

3. La Partie qui lève l'immunité doit en informer dans le plus bref délai possible, par écrit et avec indication de ses motifs, le Commissaire général aux biens culturels prévu au Règlement d'exécution.

CHAPITRE III

DES TRANSPORTS DE BIENS CULTURELS

Article 12

TRANSPORT SOUS PROTECTION SPÉCIALE

1.  Un transport exclusivement affecté au transfert de biens culturels, soit à l'intérieur d'un territoire soit à destination d'un autre territoire, peut, à la demande de la Haute Partie contractante intéressée,  se  faire  sous  protection  spéciale,  dans  les  conditions  prévues  au Règlement d'exécution.

2. Le transport sous protection spéciale est réalisé sous la surveillance de caractère international prévue au Règlement d'exécution et muni du signe distinctif défini à l'article 16.

3. Les Hautes Parties contractantes s'interdisent tout acte d'hostilité à l'égard d'un transport sous protection spéciale.

Article 13

TRANSPORT EN CAS D'URGENCE

1.  Si une Haute Partie contractante estime que la sécurité de certains biens culturels exige leur transfert et qu'il y a une urgence telle que la procédure prévue à l'article 12 ne peut pas être suivie, notamment au début d'un conflit armé, le transport peut être muni du signe distinctif défini à l'article 16, à moins qu'il n'ait fait l'objet d'une demande d'immunité au sens de l'article 12 et que ladite demande n'ait été refusée. Autant que possible, notification du transport doit être faite aux Parties adverses. Un transport vers le territoire d'un autre pays ne peut en aucun cas être muni du signe distinctif si l'immunité ne lui a pas été accordée expressément.

2. Les Hautes Parties contractantes prendront, dans la mesure du possible, les précautions nécessaires pour que les transports prévus au premier paragraphe du présent article et munis du signe distinctif soient protégés contre des actes d'hostilité dirigés contre eux.

Article 14

IMMUNITÉ DE SAISIE, DE CAPTURE ET DE PRISE

1. Jouissent de l'immunité de saisie, de capture et de prise :

a) les biens culturels bénéficiant de la protection prévue à l'article 12 ou de celle prévue à l'article 13 ;

b) les moyens de transport exclusivement affectés au transfert de ces biens.

2. Rien dans le présent article ne limite le droit de visite et de contrôle.

CHAPITRE IV

DU PERSONNEL

Article 15

PERSONNEL

Le personnel affecté à la protection des biens culturels doit, dans la mesure compatible avec les exigences de la sécurité, être respecté dans l'intérêt de ces biens et, s'il tombe aux mains de la partie adverse, pouvoir continuer à exercer ses fonctions lorsque les biens culturels dont il a la charge tombent également entre les mains de la partie adverse.


CHAPITRE V

DU SIGNE DISTINCTIF

Article 16

SIGNE DE LA CONVENTION

1. Le signe distinctif de la Convention consiste en un écu, pointu en bas, écartelé en sautoir de bleu-roi et de blanc (un écusson formé d'un carré bleu-roi dont un des angles s'inscrit dans la pointe de l'écusson, et d'un triangle bleu-roi au-dessus du carré, les deux délimitant un triangle blanc de chaque côté).

2. Le signe est employé isolé ou répété trois fois en formation triangulaire (un signe en bas), dans les conditions prévues à l'article 17.

Article 17

USAGE DU SIGNE

1. Le signe distinctif répété trois fois ne peut être employé que pour :

a) les biens culturels immeubles sous protection spéciale ;

b) les transports de biens culturels, dans les conditions prévues aux articles 12 et 13 ;

c) les refuges improvisés, dans les conditions prévues au Règlement d'exécution.

2. Le signe distinctif ne peut être employé isolé que pour :

a) des biens culturels qui ne sont pas sous protection spéciale ;

b) les personnes chargées de fonctions de contrôle conformément au Règlement d'exécution ;

c) le personnel affecté à la protection des biens culturels ;

d) les cartes d'identité prévues au Règlement d'exécution.

3. Lors d'un conflit armé, il est interdit d'employer le signe distinctif dans des cas autres que ceux mentionnés aux paragraphes précédents du présent article ou d'employer à un usage quelconque un signe ressemblant au signe distinctif.

4. Le signe distinctif ne peut être placé sur un bien culturel immeuble sans que soit apposée en même temps une autorisation dûment datée et signée par l'autorité compétente de la Haute Partie contractante.

CHAPITRE VI

DU CHAMP D'APPLICATION DE LA CONVENTION

Article 18

APPLICATION DE LA CONVENTION

1. En dehors des dispositions qui doivent entrer en vigueur dès le temps de paix, la présente Convention s'appliquera en cas de guerre déclarée ou de tout autre conflit armé surgissant entre deux ou plusieurs des Hautes Parties contractantes, même si l'état de guerre n'est pas reconnu par une ou plusieurs d'entre Elles.

2. La Convention s'appliquera également dans tous les cas d'occupation de tout ou partie du territoire d'une Haute Partie contractante, même si cette occupation ne rencontre aucune résistance militaire.

3. Si l'une des Puissances en conflit n'est pas partie à la présente Convention, les Puissances parties à  celle-ci resteront néanmoins liées  par  elle  dans  leurs  rapports réciproques. Elles seront liées en outre par la Convention envers ladite Puissance, si celle-ci a déclaré en accepter les dispositions et tant qu'elle les applique.

Article 19

CONFLITS DE CARACTÈRE NON INTERNATIONAL

1. En cas de conflit armé ne présentant pas un caractère international et surgissant sur le territoire de l'une des Hautes Parties contractantes, chacune des parties au conflit sera tenue d'appliquer au moins les dispositions de la présente Convention qui ont trait au respect des biens culturels.

2. Les parties au conflit s'efforceront de mettre en vigueur par voie d'accords spéciaux tout ou partie des autres dispositions de la présente Convention.

3. L'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture peut offrir ses services aux parties au conflit.

4. L'application des dispositions qui précèdent n'aura pas d'effet sur le statut juridique des parties au conflit.

CHAPITRE VII

DE L'EXÉCUTION DE LA CONVENTION

Article 20

RÈGLEMENT D'EXÉCUTION

Les modalités d'application de la présente convention sont déterminées dans le Règlement d'exécution qui en est partie intégrante.

Article 21

PUISSANCES PROTECTRICES

La présente Convention et son Règlement d'exécution sont appliqués avec le concours des Puissances protectrices chargées de sauvegarder les intérêts des Parties au conflit.

Article 22

PROCÉDURE DE CONCILIATION

1. Les Puissances protectrices prêtent leurs bons offices dans tous les cas où elles le jugent utile dans l'intérêt des biens culturels, notamment s'il y a désaccord entre les Parties au conflit sur l'application ou l'interprétation des dispositions de la présente Convention ou de son Règlement d'exécution.

2. À cet effet, chacune des Puissances protectrices peut, sur l'invitation d'une Partie, du Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, ou spontanément, proposer aux Parties au conflit une réunion de leurs représentants et, en particulier, des autorités chargées de la protection des biens culturels, éventuellement sur un territoire neutre convenablement choisi. Les Parties au conflit sont tenues de donner suite aux propositions de réunion qui leur sont faites. Les Puissances protectrices proposent à l'agrément des Parties au conflit une personnalité appartenant à une Puissance neutre, ou présentée par le Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, qui est appelée à participer à cette réunion en qualité de président.

Article 23

CONCOURS DE L'UNESCO

1. Les Hautes Parties contractantes peuvent faire appel au concours technique de l'Organisation  des  Nations  Unies  pour  l'éducation,  la  science  et  la  culture  en  vue  de l'organisation de la protection de leurs biens culturels, ou à propos de tout autre problème dérivant de l'application de la présente Convention et de son Règlement d'exécution. L'Organisation accorde ce concours dans les limites de son programme et de ses possibilités.

2. L'Organisation est habilitée à faire de sa propre initiative des propositions à ce sujet aux Hautes Parties contractantes.

Article 24

ACCORDS SPÉCIAUX

1. Les Hautes Parties contractantes peuvent conclure des accords spéciaux sur toute question qu'il leur paraît opportun de régler séparément.

2. Il ne peut être conclu aucun accord spécial diminuant la protection assurée par la présente Convention aux biens culturels et au personnel qui leur est affecté.

Article 25

DIFFUSION DE LA CONVENTION

Les Hautes Parties contractantes s'engagent à diffuser le plus largement possible, en temps de paix et en temps de conflit armé, le texte de la présente Convention et de son Règlement d'exécution dans leurs pays respectifs. Elles s'engagent notamment à en incorporer l'étude dans les programmes d'instruction militaire et, si possible, civile, de telle manière que les principes en puissent être connus de l'ensemble de la population, en particulier des forces armées et du personnel affecté à la protection des biens culturels.

Article 26

TRADUCTIONS ET RAPPORTS

1. Les Hautes Parties contractantes se communiquent par l'intermédiaire du Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, les traductions officielles de la présente Convention et de son Règlement d'exécution.

2. En outre, au moins une fois tous les quatre ans, Elles adressent au Directeur général un rapport  donnant  les  renseignements  qu'Elles  jugent  opportuns  sur  les  mesures  prises, préparées ou envisagées par leurs administrations respectives en application de la présente Convention et de son Règlement d'exécution.

Article 27

RÉUNIONS

1. Le Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture peut, avec l'approbation du Conseil exécutif, convoquer des réunions de représentants des Hautes Parties contractantes. Il est tenu de le faire si un cinquième au moins des Hautes Parties contractantes le demandent.

2. Sans préjudice de toutes autres fonctions qui lui sont conférées par la présente Convention ou son Règlement d'exécution, la réunion a pour attributions d'étudier les problèmes relatifs à l'application de la Convention et de son Règlement d'exécution, et de formuler des recommandations à ce propos.

3. La réunion peut en outre procéder à la revision de la Convention ou de son Règlement d'exécution si la majorité des Hautes Parties contractantes se trouve représentée, et conformément aux dispositions de l'article 39.

Article 28

SANCTIONS

Les Hautes Parties contractantes s'engagent à prendre, dans le cadre de leur système de droit pénal, toutes mesures nécessaires pour que soient recherchées et frappées de sanctions pénales ou disciplinaires les personnes, quelle que soit leur nationalité, qui  ont  commis ou donné l'ordre de commettre une infraction à la présente Convention.

DISPOSITIONS FINALES

Article 29

LANGUES

1. La présente Convention est établie en anglais, en espagnol, en français et en russe, les quatre textes faisant également foi.

2. L'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture fera établir des traductions dans les autres langues officielles de sa Conférence générale.

Article 30

SIGNATURE

La présente Convention portera la date du 14 mai 1954 et restera ouverte jusqu'à la date du 31 décembre 1954 à la signature de tous les États invités à la Conférence qui s'est réunie à La Haye du 21 avril 1954 au 14 mai 1954.

Article 31

RATIFICATION

1. La présente Convention sera soumise à la ratification des États signataires conformément à leurs procédures constitutionnelles respectives.

2. Les instruments de ratification seront déposés auprès du Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture.

Article 32

ADHÉSION

À dater du jour de son entrée en vigueur, la présente Convention sera ouverte à l'adhésion de tous les États visés à l'article 30, non signataires, de même qu'à celle de tout autre Etat invité à y  adhérer  par  le  Conseil  exécutif  de  l'Organisation des  Nations  Unies pour  l'éducation,  la science et la culture. L'adhésion se fera par le dépôt d'un instrument d'adhésion auprès du Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture.

Article 33

ENTRÉE EN VIGUEUR

1.  Le présente Convention entrera en vigueur trois mois après que cinq instruments de ratification auront été déposés.

2. Ultérieurement, elle entrera en vigueur, pour chaque Haute Partie contractante, trois  mois après le dépôt de son instrument de ratification ou d'adhésion.

3. Les situations prévues aux articles 18 et 19 donneront effet immédiat aux ratifications et aux adhésions déposées par les Parties au conflit avant ou après le début des hostilités ou de l'occupation. Dans ces cas le Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture fera, par la voie la plus rapide, les communications prévues à l'article 38.

Article 34

MISE EN APPLICATION EFFECTIVE

1. Les États parties à la Convention à la date de son entrée en vigueur prendront, chacun en ce qui le concerne, toutes les mesures requises pour sa mise en application effective dans un délai de six mois.

2. Ce délai sera de six mois à compter du dépôt de l'instrument de ratification ou d'adhésion, pour tous les États qui déposeraient leur instrument de ratification ou d'adhésion après la date d'entrée en vigueur de la Convention.

ARTICLE 35

EXTENSION TERRITORIALE DE LA CONVENTION

Toute Haute Partie contractante pourra, au moment de la ratification ou de l'adhésion, ou à tout moment ultérieur, déclarer par une notification adressée au Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, que la présente Convention s'étendra à l'ensemble ou à l'un quelconque des territoires dont elle assure les relations  internationales.  Ladite  notification  prendra  effet  trois  mois  après  la  date  de  sa réception.

ARTICLE 36

RELATION AVEC LES CONVENTIONS ANTERIEURES

1. Dans les rapports entre Puissances qui sont liées par les Conventions de La Haye concernant les lois et coutumes de la guerre sur terre (IV) et concernant le bombardement par des forces navales en temps de guerre (IX), qu'il s'agisse de celles du 29 juillet 1899 ou  de celles du 18 octobre 1907, et qui sont Parties à la présente Convention, cette dernière complétera la susdite Convention (IX) et le Règlement annexé à la susdite Convention (IV) et remplacera le signe défini à l'article 5 de la susdite Convention (IX) par le signe défini à l'article 16 de la présente Convention pour les cas dans lesquels celle-ci et son Règlement d'exécution prévoient l'emploi de ce signe distinctif.

2. Dans les rapports entre Puissances liées par le Pacte de Washington du 15 avril 1935 pour la  protection  d'institutions  artistiques  et scientifiques  et  de  monuments  historiques  (Pacte Roerich)  et  qui  sont  Parties  à  la  présente  Convention,  cette  dernière  complétera  le  Pacte Roerich et remplacera le drapeau distinctif défini à l'Article III du Pacte par le signe défini à l'article 16 de la présente Convention, pour les cas dans lesquels celle-ci et son Règlement d'exécution prévoient l'emploi de ce signe distinctif.

ARTICLE 37

DÉNONCIATION

1. Chacune des Hautes Parties contractantes aura la faculté de dénoncer la présente Convention en son nom propre ou au nom de tout territoire dont elle assure les relations internationales.

2. La dénonciation sera notifiée par un instrument écrit déposé auprès du Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture.

3. La dénonciation prendra effet une année après réception de l'instrument de dénonciation. Si toutefois, au moment de l'expiration de cette année, la Partie dénonçante se trouve impliquée dans un conflit armé, l'effet de la dénonciation demeurera suspendu jusqu'à la fin des hostilités et en tout cas aussi longtemps que les opérations de rapatriement des biens culturels ne seront pas terminées.

ARTICLE 38

NOTIFICATIONS

Le Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture informera les États visés aux articles 30 et 32, ainsi que l'Organisation des Nations Unies, du dépôt de tous les instruments de ratification, d'adhésion ou d'acceptation mentionnés aux articles 31, 32 et 39, de même que des notifications et dénonciations respectivement prévues aux articles 35, 37 et 39.

ARTICLE 39

REVISION DE LA CONVENTION ET DE SON REGLEMENT D'EXECUTION

1. Chacune des Hautes Parties contractantes peut proposer des amendements à la présente Convention et à son Règlement d'exécution. Tout amendement ainsi proposé sera communiqué au Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, qui en transmettra le texte à toutes les Hautes Parties contractantes auxquelles il demandera en même temps de faire connaître dans les quatre mois :

a) si Elles désirent qu'une conférence soit convoquée pour étudier l'amendement proposé ;

b) ou si Elles sont d'avis d'accepter l'amendement proposé sans qu'une conférence se réunisse ;

c) ou si Elles sont d'avis de rejeter l'amendement proposé sans la convocation d'une conférence.

2. Le Directeur général transmettra les réponses reçues en application du premier paragraphe du présent article à toutes les Hautes Parties contractantes.

3. Si toutes les Hautes Parties contractantes qui ont, dans le délai prévu, fait connaître leurs vues au Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture conformément à l'alinéa b) du paragraphe premier du présent article, informent le Directeur général qu'Elles sont d'avis d'adopter l'amendement sans qu'une conférence se réunisse, notification de leur décision sera faite par le Directeur général conformément à l'article 38. L'amendement prendra effet, à l'égard de toutes les Hautes Parties contractantes, dans un délai de 90 jours à dater de cette notification.

4. Le Directeur général convoquera une conférence des Hautes Parties contractantes en vue d'étudier l'amendement proposé, si la demande lui en est faite par plus d'un tiers des Hautes Parties contractantes.

5. Les amendements à la Convention ou à son Règlement d'exécution soumis à la procédure prévue au paragraphe précédent n'entreront en vigueur qu'après avoir été adoptés à l'unanimité par les Hautes Parties contractantes représentées à la conférence et avoir été acceptés par chacune des Hautes Parties contractantes.

6. L'acceptation par les Hautes Parties contractantes des amendements à la Convention ou à son Règlement d'exécution qui auront été adoptés par la conférence visée aux paragraphes 4 et 5, s'effectuera par le dépôt d'un instrument formel auprès du Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture.

7. Après l'entrée en vigueur d'amendements à la présente Convention ou à son Règlement d'exécution, seul le texte ainsi modifié de ladite Convention ou de son Règlement d'exécution restera ouvert à la ratification ou à l'adhésion.

ARTICLE 40

ENREGISTREMENT

Conformément à l'article 102 de la Charte des Nations Unies, la présente Convention sera enregistrée au Secrétariat des Nations Unies à la requête du Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture.

En foi de quoi les soussignés dûment autorisés ont signé la présente Convention.

Fait à La Haye, le 14 mai 1954, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, et dont les copies certifiées conformes seront remises à tous les États visés aux articles 30 et 32, ainsi qu'à l'Organisation des Nations Unies.

RÈGLEMENT D'EXÉCUTION DE LA CONVENTION POUR LA PROTECTION DES BIENS CULTURELS EN CAS DE CONFLIT ARMÉ

CHAPITRE PREMIER

DU CONTROLE

Article 1er

LISTE INTERNATIONALE DE PERSONNALITÉS

Dès l'entrée en vigueur de la Convention, le Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture établit une liste internationale composée de toutes les personnalités désignées par les Hautes Parties contractantes comme étant aptes à remplir les fonctions de Commissaire général aux biens culturels. Cette liste fera l'objet de revisions périodiques, sur l'initiative du Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, d'après les demandes formulées par les Hautes Parties contractantes.

Article 2

ORGANISATION DU CONTRÔLE

Dès qu'une Haute Partie contractante est engagée dans un conflit armé auquel s'applique l'article 18 de la Convention :

a) Elle nomme un représentant pour les biens culturels situés sur son territoire ; si Elle occupe un autre territoire, Elle est tenue de nommer un représentant spécial pour les biens culturels qui s'y trouvent ;

b) la Puissance protectrice de chaque Partie adversaire de cette Haute Partie contractante nomme des délégués auprès de cette dernière, conformément à l'article 3 ci-après ;

c) il est nommé, auprès de cette Haute Partie contractante, un Commissaire général aux biens culturels, conformément à l'article 4 ci-après.

Article 3

DÉSIGNATION DES DÉLÉGUÉS DES PUISSANCES PROTECTRICES

La Puissance protectrice désigne ses délégués parmi les membres de son personnel diplomatique ou consulaire ou, avec l'agrément de la Partie auprès de laquelle s'exercera leur mission, parmi d'autres personnes.

Article 4

DÉSIGNATION DU COMMISSAIRE GÉNÉRAL

1. Le Commissaire général aux biens culturels est choisi d'un commun accord, sur la liste internationale de personnalités, par la Partie auprès de laquelle s'exercera sa mission et par les Puissances protectrices des Parties adverses.

2. Si les Parties ne se mettent pas d'accord dans les trois semaines qui suivent l'ouverture de leurs  pourparlers  sur  ce  point,  Elles  demandent  au  Président  de  la  Cour  internationale  de Justice de désigner le Commissaire général, qui n'entrera en fonctions qu'après avoir obtenu l'agrément de la Partie auprès de laquelle il devra exercer sa mission.

Article 5

ATTRIBUTIONS DES DÉLÉGUÉS

Les délégués des Puissances protectrices constatent les violations de la Convention, font enquête, avec le consentement de la Partie auprès de laquelle ils exercent leur mission, sur les circonstances dans lesquelles elles se sont produites, effectuent des démarches sur place afin de les faire cesser et, en cas de besoin, en saisissent le Commissaire général. Ils le tiennent au courant de leur activité.

Article 6

ATTRIBUTIONS DU COMMISSAIRE GÉNÉRAL

1. Le Commissaire général aux biens culturels traite, avec le représentant de la Partie auprès de laquelle il exerce sa mission et avec les délégués intéressés, les questions dont il est saisi au sujet de l'application de la Convention.

2. Il a pouvoir de décision et de nomination dans les cas prévus au présent Règlement.

3. Avec l'agrément de la Partie auprès de laquelle il exerce sa mission, il a le droit d'ordonner une enquête ou de la diriger lui-même.

4. Il fait, auprès des Parties au conflit ou de leurs Puissances protectrices, toutes démarches qu'il juge utiles pour l'application de la Convention.

5. Il établit les rapports nécessaires sur l'application de la Convention et les communique aux Parties intéressées ainsi qu'à leurs Puissances protectrices. Il en remet des copies au Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, qui ne pourra faire usage que de leurs données techniques.

6. Lorsqu'il n'existe pas de Puissance protectrice, le Commissaire général exerce les fonctions attribuées à la Puissance protectrice par les articles 21 et 22 de la Convention.

Article 7

INSPECTEURS ET EXPERTS

1. Chaque fois que le Commissaire général aux biens culturels, sur demande ou après consultation des délégués intéressés, le juge nécessaire, il propose à l'agrément de la Partie auprès de laquelle il exerce sa mission une personne en qualité d'inspecteur aux biens culturels chargé d'une mission déterminée. Un inspecteur n'est responsable qu'envers le Commissaire général.

2. Le Commissaire général, les délégués et les inspecteurs peuvent recourir aux services d'experts, qui seront également proposés à l'agrément de la Partie mentionnée au paragraphe précédent.

Article 8

EXERCICE DE LA MISSION DE CONTRÔLE

Les Commissaires généraux aux biens culturels, les délégués des Puissances protectrices, les inspecteurs et les experts ne doivent en aucun cas sortir des limites de leur mission. Ils doivent notamment tenir compte des nécessités de sécurité de la Haute Partie Contractante auprès de laquelle ils exercent leur mission, et avoir égard en toutes circonstances aux exigences de la situation militaire telles que les leur fera connaître ladite Haute Partie Contractante.

Article 9

SUBSTITUT DES PUISSANCES PROTECTRICES

Si une Partie au conflit ne bénéficie pas, ou ne bénéficie plus, de l'activité d'une Puissance protectrice, un Etat neutre peut être sollicité d'assumer les fonctions de Puissance protectrice en vue de la désignation d'un Commissaire général aux biens culturels selon la procédure prévue à l'article 4 ci-dessus. Le Commissaire général ainsi désigné confie éventuellement à des inspecteurs les fonctions de délégués des Puissances protectrices déterminées par le présent Règlement.

Article 10

FRAIS

La rémunération et les frais du Commissaire général aux biens culturels, des inspecteurs et des experts, sont à la charge de la Partie auprès de laquelle s'exerce leur mission; ceux des délégués des Puissances protectrices font l'objet d'une entente entre Celles-ci et les États dont Elles sauvegardent les intérêts.

CHAPITRE II

DE LA PROTECTION SPÉCIALE

Article 11

REFUGES IMPROVISÉS

1. Si une Haute Partie contractante, au cours d'un conflit armé, est amenée par des circonstances imprévues à aménager un refuge improvisé et si Elle désire qu'il soit placé sous protection spéciale, Elle en fait immédiatement communication au Commissaire général qui exerce sa mission auprès d'Elle.

2. Si le Commissaire général est d'avis que les circonstances et l'importance des biens culturels abrités dans ce refuge improvisé justifient une telle mesure, il peut autoriser la Haute Partie contractante à y apposer le signe distinctif défini à l'article 16 de la Convention. Il communique sa décision sans délai aux délégués intéressés des Puissances protectrices, dont chacun peut, dans un délai de 30 jours, ordonner le retrait immédiat du signe.

3. Dès que ces délégués ont signifié leur accord ou si le délai de 30 jours s'écoule sans qu'il y ait opposition de l'un quelconque des délégués intéressés et si le refuge improvisé remplit, selon l'avis du Commissaire général, les conditions prévues à l'article 8 de la Convention, le Commissaire général demande au Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture l'inscription du refuge au Registre des biens culturels sous protection spéciale.

Article 12

REGISTRE INTERNATIONAL DES BIENS CULTURELS SOUS PROTECTION SPÉCIALE

1. Il est établi un « Registre international des biens culturels sous protection spéciale ».

2. Le Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture tient ce registre. Il en remet des doubles au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies ainsi qu'aux Hautes Parties contractantes.

3. Le registre est divisé en chapitres, chacun d'eux au nom d'une Haute Partie contractante. Chaque chapitre est divisé  en  trois  paragraphes  intitulés  respectivement:  refuges,  centres  monumentaux,  autres biens culturels immeubles. Le Directeur général arrête les mentions contenues dans chaque chapitre.

Article 13

DEMANDES D'INSCRIPTION

1. Chacune des Hautes Parties contractantes peut faire au Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, des demandes d'inscription au registre de certains refuges, centres monumentaux ou autres biens culturels immeubles, situés sur son territoire. Elle donne dans ces demandes des indications quant à l'emplacement de ces biens, et certifie que ces derniers remplissent les conditions prévues à l'article 8 de la Convention.

2. En cas d'occupation, la Puissance occupante a la faculté de faire des demandes d'inscription.

3. Le Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture envoie sans délai une copie des demandes d'inscription à chacune des Hautes Parties contractantes.

Article 14

OPPOSITION

1. Chacune des Hautes Parties contractantes peut faire opposition à l'inscription d'un bien culturel par lettre adressée au Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture. Cette lettre doit être reçue par lui dans un délai de quatre mois à dater du jour où il a expédié copie de la demande d'inscription.

2. Une telle opposition doit être motivée. Les seuls motifs en peuvent être :

a) que le bien n'est pas un bien culturel ;

b) que les conditions mentionnées à l'article 8 de la Convention ne sont pas remplies.

3. Le Directeur général envoie sans délai une copie de la lettre d'opposition aux Hautes Parties contractantes. Il prend, le cas échéant, l'avis du Comité international pour les monuments, les sites d'art et d'histoire et les sites de fouilles archéologiques et, en outre, s'il le juge utile, de tout autre organisme ou personnalité qualifiés.

4. Le Directeur général, ou la Haute Partie contractante qui a demandé l'inscription, peut faire toutes démarches opportunes auprès des Hautes Parties contractantes qui ont formé l'opposition, afin que celle-ci soit rapportée.

5. Si une Haute Partie contractante, après avoir demandé en temps de paix l'inscription  d'un bien culturel au registre, se trouve engagée dans un conflit armé avant que l'inscription ait été effectuée, le bien culturel dont il s'agit sera immédiatement inscrit au registre par le Directeur général,  à  titre  provisoire,  en  attendant  que  soit  confirmée,  rapportée  ou  annulée  toute opposition qui pourra, ou aura pu, être formée.

6. Si, dans un délai de six mois à dater du jour où il a reçu la lettre d'opposition, le Directeur général   ne   reçoit   pas   de   la   Haute   Partie   contractante   qui   a   formé   l'opposition   une communication notifiant que celle-ci est rapportée, la Haute Partie contractante qui a fait la demande d'inscription peut recourir à la procédure d'arbitrage prévue au paragraphe suivant.

7. La demande d'arbitrage doit être formulée au plus tard une année après la date à laquelle le Directeur général a reçu la lettre d'opposition. Chacune des Parties au différend désigne un arbitre. Dans le cas où une demande d'inscription a fait l'objet de plus d'une opposition, les Hautes Parties contractantes qui ont formé l'opposition désignent ensemble un arbitre. Les deux arbitres choisissent un surarbitre sur la liste internationale prévue à l'article premier du présent Règlement; s'ils ne peuvent pas s'entendre pour effectuer ce choix, ils demandent au Président de la Cour internationale de Justice de nommer un surarbitre, qui ne doit pas nécessairement être choisi sur la liste internationale. Le tribunal arbitral ainsi formé détermine sa propre procédure; ses décisions sont sans appel.

8. Chacune des Hautes Parties contractantes peut déclarer, au moment où surgit une contestation dans laquelle Elle est partie, qu'Elle ne désire pas appliquer la procédure arbitrale prévue au paragraphe précédent. Dans ce cas, l'opposition à une demande d'inscription est soumise par le Directeur général aux Hautes Parties contractantes. L'opposition n'est confirmée que  si  les  Hautes  Parties  contractantes  en  décident  ainsi  à  la  majorité  des  deux  tiers  des votants. Le vote se fera par correspondance, à moins que le Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture, jugeant indispensable de convoquer une réunion en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par l'article 27 de la Convention, ne procède à cette convocation. Si le Directeur général décide de faire procéder au vote par correspondance, il invitera les Hautes Parties contractantes à lui faire parvenir leur vote sous pli scellé dans un délai de six mois à courir du jour où l'invitation à cet effet leur aura été adressée.

Article 15 

INSCRIPTION

1. Le Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture fait inscrire au registre, sous un numéro d'ordre, tout bien culturel pour lequel une demande d'inscription a été faite lorsque cette demande n'a pas, dans le délai prévu au premier paragraphe de l'article 14, fait l'objet d'une opposition.

2. Dans le cas où une opposition a été formée, et sauf ce qui est dit au paragraphe 5  de l'article  14,  le  Directeur  général  ne  procédera  à  l'inscription  du  bien  au  registre  que  si l'opposition a été rapportée ou si elle n'a pas été confirmée à la suite de la procédure visée au paragraphe 7 de l'article 14 ou de celle visée au paragraphe 8 du même article.

3. Dans le cas visé au paragraphe 3 de l'article 11, le Directeur général procède à l'inscription sur requête du Commissaire général aux biens culturels.

4. Le Directeur général envoie sans délai au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, aux Hautes Parties contractantes et, sur requête de la Partie ayant fait la demande d'inscription, à tous les autres États visés aux articles 30 et 32 de la Convention, une copie certifiée de toute inscription au registre. L'inscription prend effet trente jours après cet envoi.

Article 16

RADIATION

1. Le Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture fait radier l'inscription d'un bien culturel au registre :

a) à la requête de la Haute partie contractante sur le territoire de laquelle le bien se trouve ;

b) si la Haute Partie contractante qui avait demandé l'inscription a dénoncé la Convention et lorsque cette dénonciation est entrée en vigueur ;

c) dans le cas prévu au paragraphe 5 de l'article 14, lorsqu'une opposition a été confirmée à la suite de la procédure visée au paragraphe 7 de l'article 14 ou de celle prévue au paragraphe 8 du même article.

2. Le Directeur général envoie sans délai au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies et à tous les États qui ont reçu copie de l'inscription une copie certifiée de toute radiation au registre. La radiation prend effet trente jours après cet envoi.

CHAPITRE III

DES TRANSPORTS DE BIENS CULTURELS

Article 17

PROCÉDURE POUR OBTENIR L'IMMUNITÉ

1. La demande visée au paragraphe premier de l'article 12 de la Convention est adressée au Commissaire général aux biens culturels. Elle doit mentionner les raisons qui l'ont suscitée et spécifier le nombre approximatif et l'importance des biens culturels à transférer, l'emplacement actuel de ces biens, leur nouvel emplacement prévu, les moyens de transport, le trajet à suivre, la date envisagée pour le transport et toute autre information utile.

2. Si le Commissaire général, après avoir pris les avis qu'il juge opportuns, estime que ce transfert est justifié, il consulte les délégués intéressés des Puissances protectrices sur les modalités d'exécution envisagées. À la suite de cette consultation, il informe du transport les Parties au conflit intéressées et joint à cette notification toutes informations utiles. 

3. Le Commissaire général désigne un ou plusieurs inspecteurs qui s'assurent que le transport contient seulement les biens indiqués dans la demande, qu'il s'effectue selon les modalités approuvées  et  qu'il  est  muni  du  signe  distinctif;  ce  ou  ces  inspecteurs  accompagnent  le transport jusqu'au lieu de destination.

Article 18

TRANSPORT A L'ÉTRANGER

Si le transfert sous protection spéciale se fait vers le territoire d'un autre pays, il est régi non seulement par l'article 12 de la Convention et par l'article 17 du présent Règlement, mais encore par les dispositions suivantes :

a) Pendant le séjour des biens culturels sur le territoire d'un autre Etat, celui-ci en sera le dépositaire. Il assurera à ces biens des soins au moins égaux à ceux qu'il donne à ses propres biens culturels d'importance comparable.

b) L'Etat dépositaire ne rendra ces biens qu'après cessation du conflit; ce retour aura lieu dans un délai de six mois après que la demande en aura été faite.

c) Pendant les transports successifs et pendant le séjour sur le territoire d'un autre Etat, les biens culturels seront à l'abri de toute mesure de saisie et frappés d'indisponibilité à l'égard du déposant aussi bien que du dépositaire. Toutefois, lorsque la sauvegarde des biens l'exigera, le dépositaire pourra, avec l'assentiment du déposant, faire transporter les biens dans le territoire d'un pays tiers, sous les conditions prévues au présent article.

d) La demande de mise sous protection spéciale doit mentionner que l'Etat vers le territoire duquel le transport s'effectuera accepte les dispositions du présent article.

ARTICLE 19

TERRITOIRE OCCUPÉ

Lorsqu'une Haute Partie contractante occupant le territoire d'une autre Haute Partie contractante  transporte  des  biens  culturels  dans  un  refuge  situé  en  un  autre  point  de  ce territoire, sans pouvoir suivre la procédure prévue à l'article 17 du Règlement, ledit transport n'est pas considéré comme un détournement au sens de l'article 4 de la Convention, si le Commissaire général aux biens culturels certifie par écrit, après avoir consulté le personnel normal de protection, que les circonstances ont rendu ce transport nécessaire.

CHAPITRE IV

DU SIGNE DISTINCTIF

Article 20

APPOSITION DU SIGNE

1. L'emplacement du signe distinctif et son degré de visibilité sont laissés à l'appréciation des autorités compétentes de chaque Haute Partie contractante. Le signe peut notamment figurer sur des drapeaux ou des brassards. Il peut être peint sur un objet ou y figurer de toute autre manière utile.

2. Toutefois, en cas de conflit armé, le signe doit, sans préjudice d'une signalisation éventuellement plus complète, être apposé, d'une façon bien visible le jour, de l'air comme de terre, sur les transports dans les cas prévus aux articles 12 et 13 de la Convention, et d'une façon bien visible de terre :

a) à des distances régulières suffisantes pour marquer nettement le périmètre d'un centre monumental sous protection spéciale;

b) à l'entrée des autres biens culturels immeubles sous protection spéciale.

Article 21

IDENTIFICATION DE PERSONNES

1. Les personnes visées à l'article 17 de la Convention, paragraphe 2, alinéas b) et c), peuvent porter un brassard muni du signe distinctif, délivré et timbré par les autorités compétentes.

2. Elles portent une carte d'identité spéciale munie du signe distinctif. Cette carte mentionne au moins les nom et prénoms, la date de naissance, le titre ou grade et la qualité de l'intéressé. La carte est munie de la photographie du titulaire et, en outre, soit de sa signature, soit de ses empreintes digitales, soit des deux à la fois. Elle porte le timbre sec des autorités compétentes.

3. Chaque Haute Partie contractante établit son modèle de carte d'identité en s'inspirant du modèle figurant à titre d'exemple en annexe au présent Règlement. Les Hautes Parties contractantes se communiquent le modèle adopté. Chaque carte d'identité est établie, si possible, en deux exemplaires au moins, dont l'un est conservé par la Puissance qui l'a délivrée.

4. Les personnes mentionnées ci-dessus ne peuvent être privées, sauf raison légitime, ni  de leur carte d'identité, ni du droit de porter leur brassard.