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DIRECTION CENTRALE DU SERVICE DE SANTÉ DES ARMÉES : sous-direction « plans-capacités » ; bureau « médecine d'armée »

INSTRUCTION N° 509396/DEF/DCSSA/PC/BMA relative à la transfusion sanguine en situation d'exception.

Du 07 août 2015
NOR D E F E 1 5 5 1 5 3 8 J

Référence(s) :

Code de la santé publique.

Arrêté du 24 avril 2002 (n.i. BO ; JO n° 105 du 5 mai 2002, p. 8703, texte n° 129).

Arrêté du 12 janvier 2009 (n.i. BO ; JO n° 15 du 18 janvier 2009, p. 1067, texte n° 23).

Instruction N° 1900/DEF/DCSSA/AST/TEC/MDA du 09 juin 2004 relative aux attributions, à l'organisation et au fonctionnement du centre de transfusion sanguine des armées.

Décision du 6 novembre 2006 (n.i. BO ; JO n° 261 du 10 novembre 2006, p. 16925, texte n° 23).

Décision du 20 octobre 2010 (n.i. BO ; JO n° 276 du 28 novembre 2010, p. 21143, texte n° 12).

Décision du 11 mai 2015 (n.i. BO ; JO n° 111 du 14 mai 2015, texte n° 31).

Rapport technique du 27 novembre 2008 du comité consultatif des armées.

STANAG 2939, édition 5 2010.

Recommandations européennes de 2010 pour la prise en charge du polytraumatisé hémorragique.

Recommandations et argumentaire de l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé pour la transfusion de plasma thérapeutique, mise à jour 2012.

Pièce(s) jointe(s) :     Une annexe.

Classement dans l'édition méthodique : BOEM  510-0.3.

Référence de publication : BOC n°41 du 17/9/2015

Préambule.

La présente instruction définit les conditions de réalisation d'une transfusion sanguine en situation d'exception, les responsabilités des différents acteurs, la nature des produits et matériels utilisables ainsi que leurs modalités d'approvisionnement.

Un militaire blessé au cours d'une mission opérationnelle doit pouvoir bénéficier, dans la mesure du possible et dans le respect des bonnes pratiques médicales, des soins les plus appropriés à son état. Le contexte souvent dégradé dans lequel intervient le service de santé des armées (SSA) lui impose de mettre en place des procédures exceptionnelles pour des pratiques adaptées à des situations d'exception dont les seuls objectifs sont la survie du blessé et la prévention des séquelles de ses blessures.

Le choc hémorragique est la première cause de décès des blessés au combat et sa prise en charge repose notamment sur la transfusion sanguine (en plus des gestes de premiers secours et la chirurgie d'hémostase).

Cette instruction s'appuie sur :

  • la réglementation nationale en matière de transfusion sanguine et d'hémovigilance ;

  • les directives européennes en matière de transfusion sanguine et d'hémovigilance ;

  • les accords de standardisation de l'organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) en matière de transfusion sanguine et d'hémovigilance ;

  • les publications scientifiques récentes ;

  • les recommandations du rapport technique du comité consultatif des armées sur la transfusion en mission extérieure (MEXT) ;

  • les données de traçabilité des transfusions réalisées en opération extérieure (OPEX) et les questions soulevées dans le cadre des demandes de conseil transfusionnel formulées auprès du centre de transfusion sanguine des armées (CTSA).

Des notices, recommandations et fiches techniques (FT) sont également mises à jour régulièrement par le CTSA. Elles décrivent les modes opératoires garantissant au mieux l'hémovigilance, la traçabilité des actes et des produits utilisés, la maîtrise du bénéfice/risque de la transfusion. Elles sont consultables et téléchargeables sur le portail intranet du SSA (http://www.ctsa.sante.defense.gouv.fr).

Dans l'hypothèse où l'instruction et les FT associées nécessitent d'être adaptées au contexte, des procédures et modes opératoires doivent être écrits localement. Tous ces documents, ainsi que leurs modifications, doivent être ensuite validés par le responsable de la délivrance des produits sanguins labiles (PSL) décrit au point 3. de la présente instruction et le directeur du CTSA. Ces procédures et modes opératoires doivent être pris en compte à chaque changement d'équipe, sans être modifiés systématiquement.

1. Définition des situations d'exception.

Cette instruction est applicable exclusivement hors du territoire de la République française lors des activités opérationnelles militaires hors du territoire national (MEXT) ou à bord des bâtiments et aéronefs militaires.

La réglementation française en matière de transfusion sanguine et d'hémovigilance s'applique strictement dans tous les autres cas.


2. Les grands principes de la prise en charge d'un blessé hémorragique en situation d'exception.

En situation d'exception, la prise en charge d'un blessé hémorragique repose sur quatre types d'actions :

  • des actions de premier secours pour limiter le saignement (garrot, pansement compressif d'urgence, pansement hémostatique, acide tranéxamique, etc.) ;

  • des mesures de remplissage ;

  • une réanimation transfusionnelle précoce, avec parfois la nécessité de recourir à une transfusion de sang total (ST) collecté sur le terrain ;

  • une hémostase chirurgicale pour contrôler le saignement (« damage control »).

3. Les acteurs de la transfusion sanguine en situation d'exception.

Le CTSA garantit le soutien transfusionnel de l'ensemble des MEXT. De nombreux professionnels de santé interviennent tout au long de la chaîne transfusionnelle, avec des actions et des niveaux de responsabilité différents.

3.1. Praticiens responsables de la transfusion en situation d'exception.

Partout où il y a une banque de sang, des kits de sang total ou des plasmas lyophilisés, des praticiens responsables doivent être désignés en début de mission ou de séjour. Leur nom, ainsi que leurs coordonnées téléphoniques et mails, sont obligatoirement communiqués par le directeur médical (DIRMED) au directeur du CTSA. Ces praticiens sont :

  • un médecin responsable du conseil transfusionnel, du traitement et du signalement des évènements indésirables liés à la transfusion sanguine. Dans les rôles 2 et 3, cette fonction est assurée par un médecin anesthésiste réanimateur (MAR), désigné par le médecin chef de l'unité médicale opérationnelle (UMO). Dans les rôles 1, elle est assurée par le médecin des forces prescripteur du sang total ou du plasma lyophilisé ;

  • un médecin (ou un pharmacien) responsable des conditions de stockage, de la gestion du stock et de la traçabilité de tous les produits sanguins délivrés par le CTSA ou collectés sur le théâtre. Dans les rôles 2, cette fonction est assurée en principe par un MAR ;

  • un médecin responsable de l'organisation et de la gestion de la collecte de sang total (sélection médicale, prélèvements, réalisation des tests de qualification rapide, envoi au CTSA des documents de traçabilité et des échantillons pour qualification biologique complète a posteriori, signalement des évènements indésirables liés à la collecte de sang).

Ces trois fonctions peuvent être cumulées, notamment dans les rôles 1 disposant de plasma lyophilisé et de kit de sang total.

3.2. Autres acteurs.

3.2.1. Médecins.

Les médecins du CTSA assurant le conseil transfusionnel ou organisationnel sur l'ensemble de la chaîne transfusionnelle.

Le DIRMED de théâtre et médecins chefs des UMO pour l'organisation de l'approvisionnement des produits sanguins labiles (PSL), des kits de ST et la collecte de ST.

Le MAR pour la prescription des collectes de ST, la prescription, l'utilisation, le stockage, l'hémovigilance et la traçabilité des PSL ainsi que pour la prescription, la traçabilité et la pharmacovigilance des médicaments dérivés du sang.

Les médecins de rôle 1 en MEXT pour la sélection médicale des volontaires au don de ST et, exceptionnellement, en situation d'isolement extrême, pour la prescription et la transfusion de ST, sa traçabilité et l'hémovigilance.

Les médecins des centres médicaux des armées (CMA) ou des antennes médicales, pour la présélection des donneurs volontaires pour un don de ST, le contrôle du groupage sanguin (GS) et de la plaque du combattant, avant le départ en OPEX, l'aide apportée aux collectes de sang organisées par le CTSA sur des emprises militaires.

3.2.2. Pharmaciens, techniciens de laboratoire et infirmiers.

Les pharmaciens du CTSA, des établissements de ravitaillement sanitaire des armées (ERSA), de la direction des approvisionnement en produits de santé des armées (DAPSA), de la direction centrale du service de santé des armées (DCSSA) et des unités de distribution des produits de santé (UDPS) en OPEX, outre-mer et à l'étranger pour la préparation, le ravitaillement et le transport des PSL.

Les techniciens de laboratoire (TLAB) des UMO des rôles 2 et 3 pour les contrôles de GS, les analyses d'hémostase des patients à transfuser et les tests de dépistage rapide sur le sang des donneurs de ST.

Les TLAB du CTSA pour les analyses de qualification biologique du don (QBD) a posteriori et le suivi sérologique et immuno-hématologique des receveurs de sang collecté sur le terrain d'OPEX.

Les infirmiers hospitaliers ou des forces pour l'acte transfusionnel et le prélèvement de ST.

Les infirmiers anesthésistes pour l'acte transfusionnel, le stockage et la traçabilité des PSL.

3.2.3. Chirurgiens-dentistes et vétérinaires.

En cas de nécessité absolue dictée par les circonstances, les chirurgiens-dentistes et les vétérinaires peuvent être sollicités pour la réalisation des tests de dépistage rapide sur les dons de ST, voire pour le prélèvement ou la sélection des donneurs, après une formation et une habilitation à ces nouvelles fonctions.

4. Rappel des principes d'approvisionnement en produits sanguins labiles et en kits de prélèvement de sang total.

4.1. Produits sanguins labiles.

En MEXT, les PSL sont disponibles sous deux formes préparées par le CTSA dans le respect des caractéristiques fixées par l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) :

  • les concentrés de globules rouges (CGR) ;

  • le plasma lyophilisé (PLYO), plasma thérapeutique sécurisé par Amotosalen® pour atténuation des agents pathogènes et lyophilisé.

La durée de validité des CGR est de 42 jours après le don. Exceptionnellement, le CTSA autorise l'utilisation des CGR jusqu'à 49 jours après le don en cas d'impossibilité ou de retard majeur d'approvisionnement et de besoins transfusionnels en urgence vitale non couverts par la dotation. Les CGR doivent donc être détruits après ce délai selon la procédure d'élimination des déchets d'activité de soins à risque infectieux (DASRI) en vigueur sur le théâtre.


4.2. Kits individuels de prélèvement de sang total.

Deux kits sont disponibles :

  • kit pour sang total - tout en un - pour rôle 1 (STR1) constitué et distribué par le CTSA aux rôles 1 exerçant en situation d'isolement extrême avec une situation à risque hémorragique identifiée et un délai d'évacuation supérieur à 6 heures. Sa mise à disposition est soumise à l'accord de la DCSSA après avis d'experts dans les conditions décrites au point 4.3.1. ;

  • kit pour prélèvement de sang total pour rôle 2/3 (STR2/3) constitué et distribué par la DAPSA aux rôles 2 et 3, selon la dotation.

Ces deux kits contiennent les consommables et les documents nécessaires à la sélection et au prélèvement de ST du donneur, à la traçabilité de la procédure et aux prélèvements des échantillons de sang permettant l'envoi des prélèvements indispensables à la qualification complète des dons a posteriori au CTSA.

Le kit STR1 contient, également, l'ensemble des réactifs et consommables nécessaires à la qualification rapide sur le terrain du sang prélevé et à sa transfusion.

En rôles 2 et 3, la qualification rapide du sang prélevé est réalisée à l'aide des réactifs et des consommables du laboratoire déployé. La transfusion de ST est réalisée avec les consommables de l'UMO.

4.3. Dotations initiales, recomplètements et dotations exceptionnelles.

Le choix et le conditionnement des PSL et des kits STR1 sont effectués par le CTSA.

La DAPSA assure le ravitaillement des kits STR2/3. Elle assure le transport des PSL et kits STR1 et STR2/3.

4.3.1. Dotations initiales et recomplètements.

La réception des dotations est sous la responsabilité du pharmacien de l'UDPS ou du DIRMED.

La dotation initiale est fonction de l'importance des effectifs soutenus et de la nature de l'engagement, renouvelée selon une périodicité variable en fonction de la date de péremption et de la disponibilité des produits.

Le praticien responsable du stockage et de l'utilisation des PSL peut demander des adaptations de cette dotation par l'intermédiaire du DIRMED et du chef de l'UDPS.

La dotation en PSL (CGR + PLYO) et kits STR2/3 est réservée aux rôles 2 et 3 déployés en OPEX ou structures médico-chirurgicales équivalentes [exemple : groupement médico-chirurgical (GMC) Djibouti].

Certaines unités très isolées, comme les sous-marins nucléaires lanceurs d'engins (SNLE), les unités stationnées dans les terres antarctiques et australes françaises (TAAF) ou évoluant dans un environnement à risque sans possibilités d'évacuation médicale en moins de 6 heures, peuvent être approvisionnées en PLYO et kits STR1. La demande de kits STR1 doit être adressée à l'EMO santé et soumise à la validation de la DCSSA après avis d'experts.

Toutes les unités assurant des MEDEVAC de type tactique ou stratégique doivent être dotées de PLYO pour pouvoir assurer, si besoin une transfusion précoce, pré-hospitalière.


4.3.1.1. Approvisionnement en concentrés de globules rouges.

La dotation en CGR est évaluée en fonction du personnel soutenu (effectif et mission) et du risque attendu. Elle doit permettre de répondre à des transfusions en situation d'urgence et d'attendre la collecte de ST en cas de besoins massifs en CGR (plus de 5 CGR en 3 heures ou 10 CGR en 24 heures) ou de besoins en plaquettes. Une quantité minimale de CGR doit donc être définie en dessous de laquelle un réapprovisionnement s'impose tenant compte des délais de transport.

Le choix des GS de la dotation est déterminé en fonction des GS les plus représentés dans les armées, essentiellement des groupes A et O majoritairement rhésus positif. Sa composition pourra être modifiée en fonction de la population à soutenir et de la répartition des GS. Si les stocks ne permettent pas l'envoi de CGR rhésus négatifs, ils seront remplacés, par des CGR de même groupe ABO, rhésus positif.

Sauf besoin particulier, les réapprovisionnements ont lieu toutes les 3 semaines, avec des CGR à péremption longue, déclenchés depuis la métropole sans intervention du théâtre (flux poussé).

4.3.1.2. Approvisionnement en plasma lyophilisé et en kits pour sang total - tout en un - rôle 1.

La dotation en PLYO doit être au moins égale à celle des CGR sachant que les transfusions massives doivent se rapprocher d'un ratio de 1 CGR pour 1 PLYO.

Le nombre et la nature des kits de STR1 sont évalués en fonction du personnel à soutenir (effectif et mission) et du risque attendu. Sa mise à disposition est soumise à l'accord de la DCSSA après avis d'experts avec un minimum de 6 kits STR1.

4.3.2. Dotations exceptionnelles.

4.3.2.1. À la demande du médecin responsable de la dotation en produits sanguins labiles.

Le praticien responsable du stockage et de l'utilisation des PSL peut demander une dotation exceptionnelle si les circonstances l'exigent.

4.3.2.2. À la demande de l'état-major opérationnel santé.

Sur demande du DIRMED, l'état-major opérationnel santé (EMO santé) peut demander une dotation exceptionnelle en PSL afin de répondre aux besoins spécifiques d'une évacuation médicale (MEDEVAC) ou lors du déploiement d'un module de chirurgie vitale.

La dotation en PSL est fonction du type et des capacités d'évacuation : évacuation aérienne médicale stratégique pour les urgences vitales ou fonctionnelles, évacuation aérienne médicale tactique depuis une zone de combat ou une zone difficile d'accès, évacuation de blessés multiples sur une longue distance (« MORPHÉE »).

4.4. Le transport.

4.4.1. Responsabilités et moyens.

Pour le renouvellement des PSL sur les théâtres d'opérations, la DAPSA a la charge d'organiser leur acheminement par l'intermédiaire des ERSA. Leur transport est généralement assuré par voie routière depuis le CTSA, site de Clamart, puis par voie aérienne militaire ou civile. La voie maritime peut être utilisée pour ravitailler les rôles 2 ou 3 de la marine.


4.4.1.1. Demandes de routine.

La DAPSA déclenche la mission de transport auprès du centre du soutien des opérations et des acheminements (CSOA) de Villacoublay. Celui-ci définit la date retenue pour l'expédition. L'enlèvement de la dotation au CTSA (site de Clamart) vers la plateforme de départ se fait en liaison avec la DAPSA. La DAPSA prévient le théâtre des date et heure d'arrivée des colis.

4.4.1.2. Demandes en urgence.

Pour les demandes en urgence, le pharmacien de l'EMO santé (ou le pharmacien d'astreinte) doit être sollicité par le théâtre concerné pour accord. Il contacte ensuite le CTSA et la DAPSA afin de coordonner l'expédition avec le CSOA.

4.4.2. Transport des concentrés en globules rouges.

4.4.2.1. Modalités de transport.

Conformément à la réglementation, les CGR doivent être transportés entre +2 °C et +6 °C (tolérance jusqu'à +10 °C pour une durée maximale de 24 heures). Le CTSA peut, selon le contexte, procéder aux adaptations nécessaires pour permettre l'approvisionnement des forces en opérations extérieures.

Les CGR sont transportés dans des caisses isothermes spécifiques, dotées d'un enregistrement continu de la température. Elles sont scellées par le CTSA avant leur départ. Leur autonomie est variable selon les conditions climatiques du transport (5 à 6 jours).

Dans tous les cas, le transport doit se faire à température ambiante contrôlée et, pour la voie aérienne, en cabine ou en soute pressurisée. En cas d'escale, les caisses doivent être placées dans une zone de stockage ventilée et non exposée directement au soleil. Elles ne doivent pas être entreposées en chambre froide (température < 10 °C) durant les 72 premières heures. Durant le transport, elles ne doivent pas être ouvertes sauf en cas de nécessité d'utilisation.

4.4.2.2. Conduite à tenir en cas de retard important de l'acheminement.

Avant le départ de métropole, la caisse doit être renvoyée dans les plus brefs délais au CTSA pour reconditionnement.

Après le départ de métropole, l'avis du CTSA doit obligatoirement être sollicité. Après analyse de la situation, il peut exceptionnellement accorder l'autorisation de conserver la caisse non ouverte pendant 72 heures à température ambiante (+10 °C à +25 °C). Après la 72e heure, la caisse isotherme doit être placée dans une chambre réfrigérée entre +2 °C et +10 °C. Si l'on ne dispose pas de ce type de chambre, une procédure exceptionnelle de « déconditionnement et reconditionnement » pourra être mise en place après nouvel accord et contrôle du CTSA.

4.4.2.3. Conduite à tenir en cas de violation des scellés.

Les raisons et les circonstances de cette violation doivent être recherchées (auprès du service des douanes par exemple). Avant de se prononcer sur la validation de l'envoi, l'enregistrement de la température de conservation des CGR pendant le transport doit être analysé par le CTSA et chaque poche doit être examinée attentivement pour en vérifier l'intégrité.

Dans tous les cas, un compte-rendu est rédigé à l'arrivée, et l'avis du CTSA est requis avant de procéder à la destruction des CGR.


4.4.3. Transport du plasma lyophilisé.

Chaque PLYO est conditionné en kit individuel contenant l'ensemble des consommables nécessaires à son utilisation.

Deux types de conditionnement sont proposés : kit en boîte ou kit en sac.

Le transport s'effectue à température ambiante contrôlée (entre +2 °C à +25 °C de préférence) selon des modalités différentes en fonction des circonstances. Les températures négatives ne sont pas autorisées.

4.5. Réception des produits sanguins labiles sur zone.

Le pharmacien responsable des approvisionnements ou le chef de l'UMO doit réceptionner les PSL dès leur arrivée sur zone, contrôler l'absence d'effraction et la conformité du nombre de caisses ou colis attendus.

Les caisses et colis contrôlés extérieurement doivent ensuite être confiés dans les meilleurs délais au praticien responsable de la banque de sang pour contrôle de la conformité de l'envoi des PSL et ouverture des caisses de transport.

Les CGR doivent être sortis rapidement de leur caisse de transport et placés dans une zone d'attente, thermostatée comprise entre +2 °C et + 6 °C (un tiroir de la banque de sang peut être réservé à cet usage), sans attendre que le contrôle de conformité soit totalement réalisé.

La conformité à réception des PSL est appréciée au vu :

  • du message de commande des PSL ; 

  • du bordereau de livraison et de traçabilité pour CGR et PLYO ;

  • des produits reçus (quantité et qualité) ;

  • de l'analyse de l'enregistrement des températures de transport des CGR. 

Toute anomalie doit être communiquée au CTSA, seul habilité à ordonner la destruction de produits sanguins labiles non périmés endommagés ou non.

5. Gestion de la banque de sang.

La gestion de la banque de sang relève de la responsabilité d'un praticien. Ses modalités pratiques sont détaillées dans les fiches techniques, notices et bordereaux de livraison diffusés par le CTSA et disponibles sur son site (http://www.ctsa.sante.defense.gouv.fr/).

6. Collecte de sang total en situation d'exception.

6.1. Principes fondamentaux du don du sang.

Le don de sang est effectué dans le respect des principes d'anonymat, bénévolat, volontariat, non-profit et des bonnes pratiques transfusionnelles, notamment en termes de sécurité et qualité, sur le territoire national comme en MEXT.


6.2. Pré-requis.

6.2.1. Détermination du groupage sanguin.

Tout militaire projeté est considéré comme étant potentiellement receveur et donneur de PSL. Il doit donc être titulaire d'un document médical de GS avec 2 déterminations ABO, Rh et Kell, conservés dans le livret médical réduit.

Le médecin procédant à la détermination de l'aptitude doit s'assurer de la concordance du GS inscrit dans les documents médicaux et celui inscrit sur la plaque patronymique du militaire.

6.2.2. Présélection des donneurs potentiels.

La présélection est réalisée, avant départ, par le médecin du centre ou de l'antenne médical(e) de rattachement ou par un médecin du CTSA à l'occasion d'un don de sang. Elle peut être exceptionnellement réalisée sur le terrain.

Elle doit être inscrite dans le livret médical réduit, en précisant l'éligibilité ou non du volontaire au don de sang total et, éventuellement, la date d'un don antérieur sans incident.

6.3. Prescription et traçabilité de la collecte de sang total.

6.3.1. Prescription.

En rôle 1, la prescription de la collecte de ST est de la responsabilité du médecin des forces confronté à une situation d'urgence hémorragique avec un délai d'évacuation supérieur à 6 heures.

En rôles 2 et 3, elle relève de la responsabilité du MAR.

6.3.2. Traçabilité.

La prescription d'une collecte de ST doit être tracée sur un document spécifique qui en assure la légitimité. Elle fait l'objet d'une fiche technique spécifique. Un document précisant le contexte du don et les précautions à prendre à l'issue est remis, après le don, à chaque donneur.

Le don de sang est inscrit dans le livret médical réduit et identifié avec une des étiquettes code-barres autocollantes du don.

Les documents de traçabilité et les échantillons nécessaires à la qualification complète a posteriori du don sont préparés et envoyés au CTSA, sous la responsabilité du médecin prescripteur ou du médecin responsable de l'organisation de la collecte de ST ou du responsable de l'hémovigilance et la sécurité transfusionnelle. Les deux types de kit de sang total contiennent les tubes et les contenants nécessaires à cet envoi.

6.4. Organisation et déroulement de la collecte de sang total.

6.4.1. Responsabilités.

L'organisation d'une collecte de sang total relève d'une procédure transversale qui fait intervenir les acteurs des rôles 1, 2 et/ou 3 du théâtre d'opérations. Cette procédure doit être initiée dès la constitution de la force projetée.

Le DIRMED, responsable de cette organisation, vérifie auprès des médecins des rôles 1 que les listes des donneurs volontaires par GS, par unité et par site de déploiement sont à jour. Le choix des donneurs doit se porter préférentiellement sur les volontaires présélectionnés avant le départ en OPEX ou sur le théâtre. Ce choix doit être réalisé en dehors de tout contexte d'urgence hémorragique afin d'éviter l'omission de déclaration des situations à risque.

6.4.2. Sélection et aptitude médicale des donneurs.

La sélection des donneurs fait l'objet d'une fiche technique. Elle est réalisée préférentiellement par un médecin, le prélèvement par un infirmier et la qualification rapide du don par un technicien de laboratoire. Cette répartition des fonctions peut toutefois varier en fonction du contexte et des personnels présents.

Le médecin responsable de la sélection doit disposer du livret médical réduit où se trouvent inscrits l'éligibilité du donneur et son GS.

En cas de collecte de ST, les donneurs prélevés seront sélectionnés dans l'ordre de préférence suivant :

1.  les militaires français (la détermination du GS, la sélection des donneurs et l'information des donneurs ont été anticipées avant la mission et sécurisent le don) ;

2.  les donneurs étrangers appartenant à des nations qui appliquent les directives européennes ou les exigences de l'OTAN en matière de transfusion sanguine ;

3. uniquement en cas de besoin avéré, toutes autres personnes répondant aux critères d'éligibilité aux dons.

L'aptitude médicale au don du sang, qui fait l'objet d'une fiche technique, est vérifiée juste avant le prélèvement.

6.4.3. Prélèvement.

Le prélèvement est réalisé par un infirmier (ou un praticien) à l'aide des kits de prélèvement de ST délivrés par le CTSA ou la DAPSA. Le ST prélevé en situation d'exception est un sang veineux prélevé chez un donneur adulte, isogroupe vis-à-vis du receveur (sans prise en compte du rhésus). L'asepsie doit être rigoureusement réalisée.

Le ST est recueilli dans une poche stérile spécifique, contenant un volume approprié de solution anticoagulante et de conservation pour un volume de ST prélevé compris entre 400 et 500 millilitres (fiche technique). Dans le cadre de son utilisation spécifique en situation d'exception, il n'est pas déleucocyté.

6.4.4. Conservation du sang total prélevé.

Le ST prélevé se conserve à température ambiante pour une durée maximale de 6 heures. Il peut être conservé entre +2 °C et +6 °C jusqu'à l'évacuation du patient dans la limite de la 48e heure post prélèvement. Le ST gardera une efficacité transfusionnelle même si les plaquettes transfusées ne recirculeront pas et certains facteurs de coagulation seront diminués.

6.4.5. Qualification rapide des dons.

La qualification rapide du don est préférentiellement réalisée par un TLAB. Le sang est testé sur le terrain pour contrôler le groupe sanguin A, B, O, Rh, réaliser le dépistage rapide du VIH, du VHB et du virus de l'hépatite C (VHC) (fiche technique).

Dans le même temps, des tubes échantillons sont conditionnés pour être envoyés au CTSA pour la réalisation a posteriori de la qualification biologique complète du don.

Les poches de ST qualifiées sont immédiatement délivrées au médecin prescripteur (fiche technique).


7. Analyses à réaliser avant transfusion en situation d'exception.

7.1. Groupage sanguin.

7.1.1. Urgence vitale immédiate.

Il est possible de transfuser des CGR de banque de groupe O et du PLYO sans connaître le GS du receveur.

Cependant, des prélèvements destinés au groupage sanguin a posteriori du receveur doivent être réalisés impérativement avant toute transfusion pour être interprétables.

7.1.2. Hors urgence vitale immédiate.

Le contrôle du GS du receveur et du donneur est impératif avant la transfusion, quel que soit le groupe sanguin inscrit sur la plaque d'identité du receveur ou sur tout autre document. La transfusion de ST impose le respect de la règle de l'iso-groupe. La transfusion de CGR de groupe « non O » impose le respect de la compatibilité A B O. 

7.2. Recherche d'agglutinines irrégulières.

La recherche d'agglutinines irrégulières n'est pas pratiquée en OPEX car elle fait appel à un réactif fragile à péremption courte (4 semaines) difficile à conserver.

Cependant, pour une capacité de rôle 3 et en dehors de l'urgence vitale, il est recommandé de pratiquer un test de compatibilité au laboratoire, entre le sérum (ou le plasma) du receveur et les CGR à transfuser.

Ce test utilise des réactifs et consommables ayant une péremption longue (au moins 12 mois). Si le test montre une incompatibilité, de nouveaux CGR doivent être testés et un prélèvement du receveur [2 tubes éthylène diamine tétra acétique (EDTA)] est envoyé au CTSA pour identification de l'anticorps.

7.3. Sérologies pré et post-transfusionnelles.

Avant toute transfusion de ST et 3 mois après la transfusion, un dépistage des virus de l'immunodéficience humaine, de l'hépatite B, de l'hépatite C et de la leucémie T humaine doit être systématiquement réalisé chez le receveur.

Un échantillon de sérum du receveur est prélevé avant la transfusion et adressé au CTSA pour analyse. Le prélèvement de contrôle réalisé à 3 mois est adressé préférentiellement au CTSA.

7.4. Analyses d'hémostase.

Une surveillance biologique de la coagulation [taux de prothrombine, international normalized ratio (INR), dosage du fibrinogène] est recommandée au cours d'une transfusion massive pour juger du risque hémorragique et appliquer la meilleure réanimation transfusionnelle. Les résultats de ce suivi hémostatique doivent être reportés sur la fiche spécifique de prescription, de délivrance et de suivi clinico-biologique du PLYO (fiche technique).

8. ACTE TRANSFUSIONNEL EN SITUATION D'EXCEPTION.

8.1. Unité médicale opérationnelle de rôle 1.

Certains rôles 1 très exposés ou très isolés (délai d'évacuation supérieur à 6 heures) peuvent exceptionnellement être dotés de PLYO et/ou de kits STR1. Le médecin du rôle 1 est responsable de la prescription, de la sécurité, de l'hémovigilance et de la traçabilité de la transfusion.


8.2. Unités médicales opérationnelles de rôles 2 et 3.

Dans les rôles 2 et 3, le MAR est responsable de :

  • la prescription transfusionnelle ;

  • la réalisation du contrôle du GS du receveur et du contrôle ultime pré-transfusionnel de CGR au patient ;

  • la surveillance per et post-transfusionnelle.

Le recours au ST prélevé sur place interviendra dans une prise en charge globale intégrant :

  • la pratique d'une hémostase initiale précoce et une hémostase chirurgicale la plus complète possible ;

  • le recours à une autotransfusion per-opératoire chaque fois que ce sera possible ;

  • la gestion rigoureuse des stocks de concentrés de globules rouges et de plasma lyophilisé en provenance du CTSA.

9. Hémovigilance, sécurité transfusionnelle et traçabilité en situation d'exception.

L'hémovigilance comprend l'ensemble des procédures de traçabilité, de surveillance et d'évaluation :

  • des effets indésirables survenus chez les receveurs ;

  • des évènements indésirables graves survenus chez les donneurs ;

  • des incidents graves survenus dans la chaîne transfusionnelle.

9.1. Responsabilités du centre de transfusion sanguine des armées.

Le directeur du CTSA est responsable de la vigilance transfusionnelle au CTSA.

Le CTSA organise et conserve la traçabilité des PSL mis à disposition des UMO en MEXT.

Des fiches pré-imprimées (fiches techniques) sont mises à disposition des médecins prescripteurs pour faciliter le travail de recueil des données sur le terrain. Elles sont ensuite retranscrites sur le logiciel transfusionnel du CTSA.

Le correspondant de l'hémovigilance au CTSA suit tous les évènements indésirables en lien avec l'utilisation des PSL préparés par le (ou avec l'aide du) CTSA.

Le devenir (transfusion, destruction ou retour) de tous les produits sanguins distribués par le CTSA et de toutes les poches de ST collectées sur le terrain est saisi dans le progiciel du CTSA dédié au soutien transfusionnel des forces. Un suivi spécifique est appliqué aux transfusions de plasma lyophilisé.

9.2. Responsabilité du praticien en charge de l'hémovigilance sur le théâtre d'opérations.

Le nom du praticien en charge de l'hémovigilance, décrit au point 3.1., ainsi que ses coordonnées téléphoniques et mails, doivent être communiqués au directeur du CTSA en début de mission par le DIRMED.


Ce praticien est le correspondant privilégié du CTSA pour :

  • relayer le conseil transfusionnel ;

  • assurer la traçabilité de tous les produits sanguins délivrés par le CTSA ou collectés sur le théâtre. Il s'assure que cette traçabilité est effective dans le dossier du patient pour les produits transfusés et vis-à-vis du CTSA pour tous les produits sanguins (transfusés, détruits ou retournés) ;

  • signaler les effets et évènements indésirables et les incidents graves à l'aide des fiches techniques correspondantes.

En cas d'évènement indésirable, ce praticien s'assure de la demande d'inscription au registre des constatations du théâtre.

9.3. Responsabilité du service hospitalier d'accueil et du centre médical des armées de rattachement.

Au retour sur le territoire national, le receveur de ST ou de tout autre PSL collecté sur place (exemple : concentré de plaquettes d'aphérèse) doit bénéficier d'un suivi spécifique :

  • recherche d'agglutinines irrégulières un mois après la transfusion ;

  • sérologies post-transfusionnelles un et trois mois après la transfusion ;

  • inscription des résultats des examens de contrôles dans le livret médical militaire ;

  • vérification, le cas échéant, de l'inscription au registre des constatations.

10. PUBLICATION.

La présente instruction sera publiée au Bulletin officiel des armées.

Pour le ministre de la défense et par délégation :

Le médecin général inspecteur,
adjoint « emploi » au directeur central du service de santé des armées,

Philippe ROUANET.

Annexe

Annexe. LISTE DES ABRÉVIATIONS.

AMP

:

aide médicale aux populations.

ANSM

:

agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.

CGR

:

concentrés de globules rouges.

CMA 

:

centre médical des armées.

CSOA

:

centre du soutien des opérations et des acheminements.

CTSA

:

centre de transfusion sanguine des armées.

DAPSA

:

direction des approvisionnements en produits de santé des armées.

DASRI 

:

déchets d'activité de soins à risque infectieux.

DIRMED

:

directeur médical.

DCSSA

:

direction centrale du service de santé des armées.

EDTA 

:

éthylène diamine tétra acétique. 

EIR

:

effets indésirables receveurs.

EMO santé

:

état-major opérationnel santé.

ERSA

:

établissement de ravitaillement sanitaire des armées.

FT

:

fiche technique.

GMC

:

groupement médico-chirurgical.

GR

:

globules rouges.

GS

:

groupage sanguin.

INR 

:

international normalized ratio.

MAR

:

médecin anesthésiste-réanimateur.

MEDEVAC

:

medical evacuation [regroupe les anciennes appellations d'évacuation sanitaire (EVASAN) et de rapatriement sanitaire (RAPASAN)].

MEXT

:

missions extérieures.

MORPHÉE

:

module de réanimation pour patient à haute élongation d'évacuation.

OPEX

:

opérations extérieures. 

OTAN

:

organisation du traité de l'Atlantique Nord.

PLYO

:

plasma lyophilisé.

PSL

:

produits sanguins labiles.

QBD

:

qualification biologique du don.

SNLE

:

sous-marin nucléaire lanceur d'engins.

SSA

:

service de santé des armées.

STR1

:

sang total pour rôle 1.

STR2/3

:

sang total pour rôle 2/3.

TAAF

:

terres antarctiques et australes françaises.

TLAB

:

technicien de laboratoire.

UMO

:

unité médicale opérationnelle.

UDPS

:

unité de distribution en produits de santé.

VHB

:

virus de l'hépatite B.

VHC

:

virus de l'hépatite C.

VIH

:

virus de l'immunodéficience humain.