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DIRECTION DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE : Commission permanente de publication et de refonte du Bulletin officiel des armées

CIRCULAIRE N° 3387/SG du Premier ministre relative à l'action du gouvernement dans le contexte européen.

Du 22 septembre 1988
NOR D E F D 8 8 5 3 0 5 8 C

Classement dans l'édition méthodique : BOEM  120-0.1.2., 530.2., 120-1.1., 111.1., 700.2.3.4.

Référence de publication : BOC, p. 5089.

Par ma circulaire du 25 mai 1988 (BOC, p. 3077), je vous ai demandé de veiller personnellement au respect des principes fondamentaux qui doivent inspirer l'action du gouvernement et j'ai rappelé quelques règles élémentaires de bonne administration.

L'action du gouvernement prend place aujourd'hui, pour sa plus grande part, dans un contexte européen. Il nous reste peu de temps pour nous préparer à l'établissement du marché intérieur. Tous nos efforts doivent tendre à adapter le pays à cette échéance. En outre, dans bien des domaines, la politique de l'État ne peut être fixée qu'en fonction de la politique menée au niveau européen.

J'appelle donc votre attention sur la nécessité de tenir compte systématiquement de la dimension communautaire dans la réflexion et la détermination de la politique de notre pays.

1.

Le respect du droit communautaire est lui-même une exigence constitutionnelle. Le droit communautaire est partie intégrante de l'État de droit. Vous veillerez donc à ce que les textes et les projets d'action de vos administrations soient conformes aux engagements communautaires de l'État (traités, droit communautaire dérivé, jurisprudence de la Cour de Justice de Luxembourg). En cas de doute vous saisirez le secrétariat général du comité interministériel pour les questions de coopération économique européenne (SGCICEE).

En outre, le bon fonctionnement du marché intérieur européen exigera de renforcer le contrôle du respect de la règle du jeu par les États membres ; ce rôle incombe aux autorités communautaires et particulièrement à la commission. Aussi je vous demande de veiller à éviter de placer les autorités françaises en situation d'infraction et de prêter une attention particulière aux manquements que la commission pourrait constater. Vous suivrez aussi avec attention les contentieux dans lesquels les autorités françaises sont impliquées.

Vous veillerez à la transposition adéquate en droit interne des directives communautaires dans les délais imposés. Vous poursuivrez l'adaptation des procédures régissant les interventions financières de l'État aux exigences du droit communautaire.

2.

J'ai souligné l'importance que chacun d'entre vous devait attacher à l'exigence de cohérence de l'action gouvernementale. Cette cohérence s'impose avec une rigueur particulière dans les relations des autorités nationales avec les institutions communautaires. L'unité des positions françaises est une condition de l'efficacité de notre action : tout ministre ou délégué français s'exprimant à Bruxelles engage le gouvernement.

La position que les représentants français sont chargés d'exprimer au nom du gouvernement est définie de manière interministérielle par le SGCICEE, placé sous l'autorité du Premier ministre. Il appartient au secrétariat général, en cas de désaccord persistant entre deux membres du gouvernement, de me saisir des difficultés rencontrées dans cette tâche. Je souhaite cependant n'avoir à intervenir que de façon exceptionnelle.

Toute instruction adressée à notre représentation permanente auprès des communautés doit être transmise par l'intermédiaire du SGCICEE. Les correspondances écrites des autorités françaises destinées aux institutions communautaires, en particulier la commission, doivent être acheminées par notre représentation permanente sur instruction du SGCICEE. Il incombe à ce dernier, saisi d'un projet de message émanant d'une administration, de s'assurer que celui-ci fait l'objet d'un accord interministériel avant sa transmission. Le SGCICEE devra en outre veiller à la diffusion auprès des administrations intéressées de toute demande d'information ou sollicitation émanant de la commission et de ses services.

3.

Des règles précises ont été définies pour la composition de la délégation française dans les réunions communautaires, notamment le conseil des ministres ; elles ont été rappelées dans une circulaire du 02 juin 1986. Je vous invite à respecter ces prescriptions qui sont inspirées par un impératif de rigueur budgétaire et un souci d'efficacité.

La préparation des rencontres entre les membres du gouvernement et les membres de la commission ou la présidence en exercice du conseil, doivent faire l'objet d'une concertation adéquate, dans le cadre du SGCICEE, sous l'égide du cabinet du Premier ministre.

En règle générale, il appartient aux membres de notre représentation permanente, sous l'autorité de l'ambassadeur, représentant permanent de la France auprès des communautés, d'entretenir tous les contacts nécessaires avec les institutions communautaires et en particulier avec la commission. Les rencontres directes entre des membres de l'administration et les services de la commission doivent rester l'exception.

Le SGCICEE doit être informé de tout projet de rencontre de ce type. Il est chargé, le cas échéant, en provoquant les réunions appropriées, d'assurer la coordination de ces démarches et de vérifier l'accord des départements ministériels intéressés sur leur contenu.

J'ai demandé au SGCICEE de veiller au respect de ces règles, auquel ne doit pas faire obstacle le développement des rencontres « informelles » ou des contacts « officieux » entre les autorités françaises et leurs partenaires des autres États membres ou de la commission.

4.

Une part croissante de notre action extérieure doit être articulée avec la politique européenne. En effet, les compétences des communautés s'étendent et de nombreuses occasions se présentent de renforcer les manifestations des communautés à l'égard des autres États.

Pour ce qui concerne les rapports entre la France et l'organisation de coopération et de développement économique (OCDE), le SGCICEE est chargé du même rôle qu'à l'égard des communautés. Les relations avec le General agreement on tariffs and trade — Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT), qui traite de questions qui sont pour l'essentiel de compétence communautaire, doivent évidemment tenir compte de la position des communautés. Il doit en être de même à l'égard de négociations, notamment l'élaboration de certaines conventions intergouvernementales, par exemple dans le cadre du conseil de l'Europe, voire de certains accords bilatéraux, qui interfèrent avec des discussions en cours dans la communauté ou concernent des sujets qui sont partiellement de compétence communautaire.

Dans tous ces domaines, le SGCICEE est chargé de veiller à ce que la position exprimée par la France soit cohérente et conforme à ses engagements communautaires.

5.

Enfin, il va de soi que la France doit toujours être représentée par un membre du gouvernement lors des sessions du conseil des ministres des communautés, et normalement, sauf cas de force majeure, par le ministre compétent. J'attache une importance toute particulière à cette règle, inspirée à la fois par le souci d'attester l'engagement européen du gouvernement et par la nécessité de donner à l'expression des positions françaises tout le poids politique que requièrent la défense de nos intérêts et l'illustration de nos vues.

Michel ROCARD.