INSTRUCTION N° 1201745/ARM/SGA/DAF/SDPAC relative aux tranches fonctionnelles.
Du 05 juillet 2017NOR A R M S 1 7 5 1 3 0 2 J
Préambule.
La notion de tranche fonctionnelle trouve son origine dans l'article 8 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 modifiée relative aux lois de finances qui précise que « pour une opération d'investissement, l'autorisation d'engagement couvre un ensemble cohérent et de nature à être mis en service ou exécuté sans adjonction ». La loi permet ainsi de provisionner pour un projet donné une enveloppe d'autorisations d'engagement dont le montant est supérieur au montant qui sera engagé dans l'année.
Tout en permettant d'assouplir la règle d'annualité de l'autorisation budgétaire, cette possibilité donne aussi au législateur et aux instances gouvernantes une visibilité sur les engagements réels à venir, indépendamment des seuls engagements juridiques effectivement contractés sur un exercice.
Néanmoins, si elle facilite la programmation et le suivi budgétaire d'un projet, la tranche fonctionnelle n'est pas un outil permettant de suivre l'ensemble des dépenses y afférentes et d'en donner le coût complet. Elle doit donc être utilisée à des fins et dans un cadre précis, en cohérence avec les axes d'imputation et d'analyse du système d'information financière de l'État, désigné sous son appellation CHORUS dans la présente instruction.
Dans la mesure où la tranche fonctionnelle constitue une dérogation au principe d'annualité budgétaire, elle obéit à des règles particulières de gestion et de contrôle, précisées par une réglementation devenue plus précise depuis l'entrée en vigueur du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, dit décret GBCP.
Cette instruction présente les principes relatifs aux tranches fonctionnelles pour le ministère des armées (point 1.), leurs modalités et règles de gestion (point 2.), les particularités propres à chaque opération stratégique (point 3.) et le traitement des tranches fonctionnelles techniques et historiques (point 4.).
1. Définition et champ d'application des tranches fonctionnelles.
1.1. Définition.
La tranche fonctionnelle est le support de l'affectation dans CHORUS. Selon les termes de l'article 156 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 cité en référence, « l'affectation est l'acte par lequel, pour une opération d'investissement […] un ordonnateur réserve un montant d'autorisations d'engagement, préalablement à leur consommation ». Cette affectation constitue la limite supérieure des autorisations d'engagement pouvant être consommées au titre de cette opération.
La tranche fonctionnelle est donc un outil de programmation budgétaire qui fixe un montant maximum d'autorisations d'engagement pluriannuelles ayant pour objet la réalisation à une échéance déterminée d'un ensemble cohérent et de nature à être mis en service ou exécuté sans adjonction.
1.2. Champ d'application.
Les opérations éligibles à la création d'une tranche fonctionnelle doivent respecter, de manière cumulative, les critères suivants :
-
opération correspondant à un projet précis, cohérent et homogène ;
-
opération d'investissement identifiable par une dépense en titre 5, mais pouvant comprendre des dépenses accessoires de titre 3 ;
-
opération donnant lieu à des engagements sur plusieurs années ;
-
capacité de l'investissement réalisé par l'opération à pouvoir être mis en service ou exécuté sans nécessiter de compléments de dépenses, hors frais de fonctionnement, pour fournir son service ;
-
certitude raisonnable que l'opération parvienne effectivement à achèvement.
Au ministère des armées, une tranche fonctionnelle correspond notamment à un stade d'un programme d'armement ou d'un programme d'infrastructure, tels que définis dans les instructions qui les concernent. Elle peut aussi s'appliquer à d'autres opérations stratégiques dans les conditions définies par la présente instruction.
La nature principale de dépenses autorisées sur une opération d'investissement est celle des dépenses de titre 5. Par exception, peuvent être exécutées dans le cadre d'une opération d'investissement les dépenses de toute nature dès lors qu'elles trouvent leur cause et leur finalité dans cette opération (c'est le cas notamment des matériels, accessoires et prestations associés).
2. Administration et gestion des tranches fonctionnelles.
La gestion des tranches fonctionnelles s'effectue dans le respect de la réglementation et repose sur des acteurs et des processus formalisés.
2.1. Les acteurs.
La gestion des tranches fonctionnelles relève au premier chef de la responsabilité des responsables de programme en lien avec leurs responsables de budget opérationnel de programme et d'unité opérationnelle, selon les procédures précisées dans les chartes de gestion des programmes ainsi que, le cas échéant, dans les protocoles et conventions de gestion. Elle s'inscrit dans une organisation animée par la direction des affaires financières, responsable de la fonction financière ministérielle et administrateur du référentiel des tranches fonctionnelles. Cette gestion est placée sous le contrôle du contrôleur budgétaire et comptable ministériel.
2.1.1. Le responsable de programme loi organique relative aux lois de finances.
En application des dispositions de l'article 70 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 précité, le responsable de programme :
-
établit sa programmation budgétaire, laquelle intègre notamment la création, le montant des affectations et la clôture des tranches fonctionnelles conformément à la réglementation, aux règles édictées dans la présente instruction et, pour les opérations d'investissement en relevant, à celles définies par l'instruction n° 31475 du 5 août 1998 (1) relative au contrôle interne ministériel de la cohérence physico-financière des activités budgétaires d'investissement ;
-
fait exécuter dans CHORUS les décisions de création et de clôture des tranches fonctionnelles ainsi que les décisions d'affectation et de retraits d'affectation.
Il suit l'exécution de sa programmation en mettant en place les actions de contrôle interne nécessaires.
2.1.2. Le responsable de budget opérationnel de programme.
Ses attributions sont définies à l'article 71 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012. S'agissant plus particulièrement des tranches fonctionnelles, le responsable de budget opérationnel de programme :
-
propose au responsable de programme la programmation des crédits ;
-
veille au respect des règles de la gestion budgétaire, notamment en ce qui concerne la consommation des autorisations d'engagement avec une attention particulière portée à la réutilisation des autorisations d'engagement d'années antérieures rendues disponibles par un retrait d'affectation ou d'engagement.
2.1.3. Le responsable d'unité opérationnelle.
Conformément à l'article 72 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012, le responsable d'unité opérationnelle est chargé de l'exécution des dépenses et des recettes dont il rend compte au responsable de budget opérationnel de programme.
En ce qui concerne les tranches fonctionnelles, le responsable d'unité opérationnelle :
-
saisit dans CHORUS les éléments nécessaires à la création, la modification et la clôture des tranches fonctionnelles ainsi que ceux relatif aux affectations et retraits d'affectation ;
-
référence la tranche fonctionnelle appropriée lors de la saisie d'un engagement juridique.
Le responsable d'unité opérationnelle peut déléguer les opérations dans CHORUS dont il a la charge.
2.1.4. La direction des affaires financières.
Par arrêté du 18 février 2013 cité en référence, le directeur des affaires financières a été désigné responsable de la fonction financière ministérielle. Il exerce à ce titre les attributions figurant à l'article 69 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012. S'agissant des tranches fonctionnelles, la direction des affaires financières :
-
assure un rôle de conseil auprès de leurs gestionnaires et utilisateurs ;
-
valide la programmation des responsables de programme et, à ce titre, les demandes relatives aux tranches fonctionnelles figurant dans le document prévisionnel de gestion ou les comptes-rendus de gestion ;
-
valide la création des tranches fonctionnelles et les affectations demandées en dehors de ces exercices au moyen du document figurant en annexe à la présente instruction ;
-
suit la mise en œuvre de ces demandes une fois celles-ci validées ;
-
assure le suivi des recyclages, du rechargement en autorisations d'engagement ainsi que des demandes de report d'autorisations d'engagement annuelles non engagées ;
-
contrôle la cohérence de la programmation dans le module de programmation de CHORUS par rapport aux derniers documents de référence connus ;
-
contrôle la qualité du référentiel des tranches fonctionnelles des programmes ;
-
s'assure du respect des règles rappelées et édictées dans la présente instruction.
Par ailleurs, elle s'assure que chaque responsable de programme concerné met en œuvre des dispositifs auditables liés à la gestion des tranches fonctionnelles.
2.1.5. Le contrôleur budgétaire et comptable ministériel.
Conformément à l'article 99 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012, « les décisions d'engagements et les décisions d'affectation de crédits à une opération d'investissement mentionnées à l'article 156. peuvent, eu égard à la nature ou au montant de la dépense, être soumises au visa ou à l'avis préalable du contrôleur budgétaire, dans des conditions et selon des modalités prévues par l'arrêté mentionné à l'article 105. Lorsqu'ils sont soumis à son visa ou à son avis préalable, le contrôleur budgétaire examine les projets d'actes au regard de l'imputation de la dépense, de la disponibilité des crédits, de l'exactitude de l'évaluation de la consommation de crédits associée et de leur compatibilité avec la programmation pluriannuelle définie à l'article 66., à l'exclusion de tout motif tenant à la légalité de l'acte ».
L'article 102 de ce décret précise en outre que « dans la mise en œuvre des dispositions des articles 99, 100 et 101, le contrôleur budgétaire s'assure de la qualité des éléments de la comptabilité budgétaire relevant de l'ordonnateur. Dans le cadre de ses contrôles, le contrôleur budgétaire s'assure de la réalité, de l'exhaustivité, de la correcte évaluation et du bon rattachement des affectations et des engagements. Il s'assure également, en liaison avec le comptable public, de leur correcte imputation. Le cas échéant, il saisit l'ordonnateur, à des fins de correction, des erreurs ou insuffisances dont il a connaissance ».
Conformément à l'article 105 de ce décret, l'article 18-III. de l'arrêté du 26 décembre 2013 relatif à la gestion budgétaire et au contrôle budgétaire du ministère de la défense précise que les affectations d'un montant supérieur à cinquante millions d'euros font l'objet d'un visa, à l'exception de celles approuvées dans le cadre du comité financier interministériel lesquelles sont réputées visées.
Dès lors que l'acte initial a été visé par le contrôleur budgétaire, les affectations et engagements complémentaires sont soumis au visa à l'exception des engagements de révisions de prix qui résultent des clauses du contrat.
2.2. Les processus de programmation et de suivi des tranches fonctionnelles.
2.2.1. Dans le cadre de l'élaboration du projet de loi de finances.
La création des tranches fonctionnelles s'inscrit dans le processus de programmation budgétaire et en tout premier lieu dans la phase de construction du projet de loi de finances de l'année N +1 qui doit s'accompagner des prévisions de création des nouvelles tranches fonctionnelles et des prévisions d'affectations et d'engagements d'autorisations d'engagement pour celles existantes.
Les responsables de programme présentent ainsi pour chaque tranche fonctionnelle à créer ou existante :
-
une programmation complète comportant, sur un horizon pluriannuel de quatre annuités (N à N +3) et de la somme de l'ensemble des années ultérieures restantes, le montant total de la tranche fonctionnelle, le plan prévisionnel d'affectation et le plan prévisionnel d'engagement ;
-
le cas échéant, pour les années antérieures à N, les montants cumulés des affectations, des engagements et des paiements réalisés. Pour les programmes d'armement et les opérations d'infrastructures (INFRA), le stade en cours et la date de passage au stade suivant sont également précisés.
Les tranches fonctionnelles sont en principe rattachées à une seule activité budgétaire. Elles sont en revanche indépendantes de l'axe projet qui est suivi de manière distincte dans CHORUS au moyen des éléments d'organigramme technique de projet.
Les éléments à fournir sont rappelés par la direction des affaires financières dans la note adressée aux responsables de programme avant chaque exercice.
2.2.2. Dans le cadre de la gestion annuelle.
La programmation des affectations, des engagements et des paiements sur tranches fonctionnelles à créer ou existantes s'effectue dans le cadre du document prévisionnel de gestion, en cohérence avec la programmation présentée en projet de loi de finances. Les éventuels écarts devront être justifiés. Cette programmation est actualisée dans le cadre des deux comptes-rendus de gestion. Le cas échéant, les évolutions depuis le document prévisionnel de gestion ou le premier compte-rendu de gestion seront également justifiées.
Il est possible lors du document prévisionnel de gestion et des comptes-rendus de gestion d'utiliser la tranche fonctionnelle de programmation pour présenter et soumettre à validation les projets de création de tranche fonctionnelle au cours de la gestion ainsi que les affectations correspondantes. Chacun de ces projets doit toutefois être identifié précisément au sein de la tranche fonctionnelle de programmation, en indiquant notamment l'activité et le cas échéant le stade auquel il se rattache, afin de pouvoir en assurer le suivi ultérieur.
2.2.2.1. Création d'une tranche fonctionnelle.
Deux cas de figure sont distingués.
Dans le cas général, la création de tranche fonctionnelle avec l'affectation correspondante est programmée dès le document prévisionnel de gestion qui doit être soumis au visa du contrôleur budgétaire et comptable ministériel.
À cette occasion, la programmation des tranches fonctionnelles est examinée par la direction des affaires financières qui peut la valider ou émettre un avis suspensif sur une ou plusieurs tranches fonctionnelles en cas de non-respect de la réglementation ou de la présente instruction ou pour des raisons de soutenabilité budgétaire. La direction des affaires financières notifie formellement aux responsables de programme sa validation ou son avis.
Cette programmation est ensuite confirmée ou actualisée lors des suivis de gestion. Les écarts significatifs avec la programmation validée en document prévisionnel de gestion seront commentés par les responsables de programme afin de permettre à la direction des affaires financières de valider ces changements de montant des tranches fonctionnelles programmées.
La validation de la direction des affaires financières n'implique pas que la tranche fonctionnelle soit immédiatement créée par le responsable de programme, celui-ci précisant dans sa programmation à quelle échéance cette création interviendra.
Il est par ailleurs possible de créer une tranche fonctionnelle en dehors de l'exercice d'établissement du document prévisionnel de gestion. La programmation de cette création lors de l'un de deux comptes-rendus de gestion doit être privilégiée afin de conserver une vue d'ensemble des besoins à soumettre au visa du contrôleur budgétaire et comptable ministériel.
La direction des affaires financières dispose d'un délai d'une semaine pour examiner les éléments relatifs aux tranches fonctionnelles présentés dans le cadre du document prévisionnel de gestion et des comptes-rendus de gestion.
Dans l'hypothèse où il serait nécessaire de créer une tranche fonctionnelle en dehors de ces exercices, il reste possible de le faire au moyen de l'annexe à la présente instruction. Dans ce cas de figure, la direction des affaires financières dispose également d'un délai d'une semaine pour examiner les demandes de création de tranche fonctionnelle et d'affectation au terme duquel elle aura fait part de ses observations au responsable de programme ou validé sa demande et si nécessaire transmis celle-ci au contrôleur budgétaire et comptable ministériel pour visa.
En effet, la demande de création et d'affectation est systématiquement transmise pour visa au contrôleur budgétaire et comptable ministériel lorsque son montant excède celui fixé par l'arrêté du 26 décembre 2013 relatif au cadre de la gestion budgétaire et au contrôle budgétaire du ministère de la défense précité. Cette transmission se fait au moyen de l'annexe mentionnée ci-dessus, que la tranche fonctionnelle soit prévue ou non dans le document prévisionnel de gestion ou dans un compte-rendu de gestion.
Lorsque la demande de création et d'affectation est soumise à l'avis du comité financier interministériel ou du comité ministériel d'investissement, l'accord de la direction des affaires financières est réputé acquis. Le responsable de programme n'a donc pas à lui adresser de demande.
Une fois les demandes de création et d'affectation validées, le responsable de l'unité opérationnelle ou son délégataire crée la tranche fonctionnelle dans CHORUS. Dans le module de programmation de CHORUS, chaque tranche fonctionnelle doit comporter :
-
une affectation d'autorisations d'engagement ;
-
l'écoulement détaillé des engagements et des crédits de paiement sur la durée de la tranche fonctionnelle.
Pour assurer une meilleure lisibilité et éviter les doubles comptes dans les restitutions, la programmation des affectations, engagements et paiements sur tranche fonctionnelle doit être saisie dans CHORUS concomitamment à la programmation des engagements à l'activité. La saisie d'une date de début de validité de la tranche fonctionnelle ultérieure à sa date de création permet par ailleurs d'éviter toute affectation intempestive.
2.2.2.2. Alimentation initiale d'une tranche fonctionnelle.
Généralement concomitante à la création de la tranche fonctionnelle, l'affectation est l'acte par lequel un ordonnateur réserve un montant d'autorisations d'engagement en vue de leur consommation. Elle constitue la limite supérieure des autorisations d'engagements pouvant être consommées pour l'opération qu'elle concerne.
Elle n'a pas pour effet de consommer ces autorisations mais seulement de les rendre indisponibles pour tout autre usage et diminue d'autant le disponible de l'unité opérationnelle. Elle ouvre la possibilité du report des autorisations d'engagement sur l'année N +1 et sur les années suivantes par arrêté du ministre chargé du budget tant qu'elles ne sont pas engagées.
L'affectation initiale doit couvrir la totalité du montant en euros courants de l'investissement dès l'année de lancement de l'opération ou du stade. Elle doit être accompagnée d'un échéancier prévisionnel d'engagements et de paiements.
Le montant de cette affectation initiale doit également intégrer les hausses prévisibles de coût correspondant aux aléas provisionnés et aux révisions de prix.
Il pourra être admis que l'affectation initiale soit partielle et ne corresponde pas au coût prévisible du programme dans les trois cas de figure suivants :
-
pour des raisons de confidentialité, il est possible d'indiquer une affectation initiale partielle lorsque la demande d'ouverture d'autorisations d'engagement au projet de loi de finances pour une couverture totale de la tranche fonctionnelle conduirait à produire une information susceptible de nuire au bon déroulement du processus de négociation des actes contractuels. Dans ce cas, l'affectation initiale se limite au montant des engagements pris dans l'année, le complément d'affectation intervenant ultérieurement ;
-
en anticipation du lancement d'un stade afin d'acquérir des approvisionnements à long délai ou de lancer des développements ou des travaux anticipés dans les cas où le besoin est avéré et ne peut attendre le stade concerné. À l'occasion de la décision de lancement du stade pour lequel il y aura eu une anticipation, il conviendra alors de compléter la tranche fonctionnelle pour couvrir les besoins en autorisations d'engagement dudit stade, dont le devis sera stabilisé. Dans ce cas, il ne sera plus possible d'engager des dépenses hors tranche fonctionnelle pour ce projet ;
-
pour mettre en œuvre en urgence la décision d'une autorité politique, imprévisible lors des travaux d'élaboration de la loi de finances et pour laquelle, de ce fait, la ressource budgétaire nécessaire n'a pas été programmée, contraignant à la mobilisation des seules autorisations d'engagement disponibles.
Dans ces trois cas de figure, le responsable de programme doit toutefois communiquer à la direction des affaires financières le montant prévisible total de la tranche fonctionnelle afin de donner une visibilité suffisante des dépenses qu'il prévoit d'engager pour le projet et permettre de s'assurer de sa soutenabilité budgétaire.
La validation du montant de l'affectation initiale par la direction des affaires financières et le contrôleur budgétaire et comptable ministériel se fait selon les mêmes modalités et délais que ceux définis pour la création de la tranche fonctionnelle au point 2.2.2.1., sauf pour les dossiers passant en commission exécutive permanente puis en comité ministériel d'investissement pour lesquels l'affectation ne peut être effectuée qu'après l'avis favorable de ces deux instances.
Pour les tranches fonctionnelles dont la création est demandée en dehors du document prévisionnel de gestion ou d'un compte-rendu de gestion, la demande d'affectation initiale doit être concomitante.
2.2.3. Modification des affectations.
Les modifications d'affectation sont retracées dans les comptes-rendus de gestion.
2.2.3.1. Complément d'affectation.
Comme indiqué ci-dessus, une tranche fonctionnelle donne lieu à une seule affectation qui doit couvrir l'ensemble du projet. Néanmoins, conformément à l'arrêté du 16 juillet 2014 (A) modifié cité en référence, cette affectation initiale peut être suivie d'affectations complémentaires pour faire face à un besoin de financement supplémentaire, indépendamment des cas prévus au point 2.2.2.2 ci-dessus, consécutif à des éléments qui n'étaient pas prévisibles lors du lancement du projet.
Cette possibilité est ouverte dans les cas de figure suivants :
-
pour payer des intérêts moratoires ainsi que des frais de justice ou de transaction ;
-
pour répondre à des évolutions non prévues des coûts ;
-
pour faire face aux évolutions des conditions économiques, différentes de celles initialement programmées.
Par ailleurs, une affectation complémentaire pourra être envisagée pour s'adapter à des sujétions techniques imprévues impactant le calendrier ou le périmètre du projet, à la condition que celles-ci ne modifient pas son objet.
Les demandes de complément d'affectation doivent être justifiées de manière exhaustive.
Les affectations complémentaires rendues nécessaires par les révisions de prix qui résultent des clauses du contrat, le paiement d'intérêts moratoires, de taxes, de décisions de justice, de variations de taux de change et d'une manière générale par toute mesure d'ajustement technique n'ayant pas pour objet de modifier l'équilibre physique et financier de l'opération d'investissement ne sont pas soumises à la validation de la direction des affaires financières.
2.2.3.2. Retrait d'affectation et d'engagements.
Les retraits d'affectation ont lieu à la clôture d'un projet ou, éventuellement, lorsque les conditions de réalisation évoluent à la baisse. Les conséquences de ces retraits varient en fonction de l'ancienneté des autorisations d'engagement :
-
concernant les autorisations d'engagement affectées dans l'année en cours, les retraits d'affectation rendent ces autorisations d'engagement de nouveau disponibles au niveau de l'unité opérationnelle et réutilisables sous réserve de ne pas modifier l'économie générale du plan d'engagement ;
-
concernant les autorisations d'engagement affectées durant les exercices antérieurs, leur réaffectation est interdite et elles doivent être remontées au niveau du responsable de programme qui est chargé de bloquer les crédits correspondants en vue de leur annulation en fin d'exercice. Cependant, conformément à l'article 157 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012, le responsable de programme a la faculté de les remettre à disposition d'un budget opérationnel de programme pour une utilisation dans les trois cas suivants :
-
correction d'une erreur d'imputation budgétaire de l'affectation ;
-
lorsque l'autorisation d'engagement concernée a été ouverte par la voie d'un fonds de concours, en vue du remboursement de la partie versante ou du réemploi pour le même objet conforme à l'intention de la partie versante ;
-
en cas de fusion de tranches fonctionnelles au titre d'une même opération d'investissement dont le périmètre global est inchangé.
-
Le non-respect de l'interdiction de recyclage des autorisations d'engagement désaffectées, en dehors des exceptions prévues par la présente instruction, donne lieu à une réduction des autorisations d'engagement reportées sur l'exercice suivant à due concurrence.
S'agissant des retraits d'engagement, il convient de se référer au 5.2 de la quatrième partie du recueil des règles de comptabilité budgétaire de l'État, lequel détaille exhaustivement les cas dans lesquels ces retraits rendent disponibles les autorisations d'engagement pour de nouvelles affectations ou de nouveaux engagements.
Les dispositions de la note n° 00010/51063/DEF/SGA/DAF/SPB/SPB3 du 7 août 2015 (1) relative à la procédure de maîtrise des retraits d'engagements sur années antérieures figurant en référence à la présente instruction restent par ailleurs applicables.
2.2.4. Clôture d'une tranche fonctionnelle.
En règle générale, la clôture d'une tranche fonctionnelle intervient lorsque l'ensemble des engagements a été soldé et que plus aucun engagement n'est prévu.
Néanmoins, la clôture peut également être prononcée dans les cas où la tranche fonctionnelle ne comporte plus aucun engagement ou n'a fait l'objet d'aucune consommation d'autorisations d'engagement sur une période de deux ans.
Dès que cette demande de clôture est validée, le responsable d'unité opérationnelle ou son délégataire a la responsabilité de la clôture technique dans CHORUS.
Dans le cadre du contrôle interne, la direction des affaires financières s'assure de la clôture effective des tranches fonctionnelles soldées.
2.2.5. Contrôle a posteriori.
La direction des affaires financières met en œuvre un suivi des mouvements intervenus sur les tranches fonctionnelles afin de vérifier leur cohérence avec les éléments présentés lors des exercices de programmation budgétaire ou devant les instances de contrôle des investissements ministériels.
3. Particularités propres aux différentes opérations stratégiques.
3.1. Les programmes à effet majeur.
Chaque stade tel que défini dans l'instruction générale n° 125/DEF/EMA/PLANS/COCA n° 1516/DEF/DGA/DP/SDM du 26 mars 2010 relative au déroulement et la conduite des opérations d'armement fait normalement l'objet d'une tranche fonctionnelle unique.
Toutefois, pour les programmes s'étalant sur de longues périodes, un stade, notamment en réalisation, peut être scindé en plusieurs tranches fonctionnelles à condition que leur contenu conserve une cohérence fonctionnelle.
Une tranche fonctionnelle peut ainsi correspondre à un exemplaire dans le cas d'un équipement dont le coût et la durée de développement et de fabrication le justifient ou à une série d'exemplaires.
Une tranche fonctionnelle peut également être créée en anticipation du lancement d'un stade dans les conditions fixées au point 2.2.2.2. de la présente instruction.
Pour certains programmes, les ressources budgétaires disponibles peuvent être inférieures à celles nécessaires à une affectation complète de la tranche fonctionnelle correspondante et amener le responsable de programme à demander une affectation partielle. Ces demandes d'affectation seront examinées au cas par cas.
Les équipements communs à plusieurs projets (par exemple des postes radios destinés à équiper plusieurs types de véhicules) et identifiés comme programme à effet majeur (PEM) feront l'objet de tranches fonctionnelles indépendantes des programmes destinataires de ces équipements.
Par ailleurs, conformément au dernier alinéa du point 1.2., certains programmes à effet majeur peuvent être exécutés en titre 3.
3.2. Les autres opérations d'armement et les équipements d'accompagnement de cohérence.
En règle générale, ces opérations stratégiques ne donnent pas lieu à création de tranche fonctionnelle. Il est cependant possible au responsable de programme d'y avoir recours dans des cas particuliers (par exemple démantèlement ou développement et mise en service d'une capacité militaire cohérente et significative, système d'information d'administration et de gestion, etc.) dans le respect des règles relatives aux tranches fonctionnelles.
3.3. L'entretien programmé du matériel et du personnel.
Le recours aux tranches fonctionnelles pour ces opérations n'est pas autorisé sauf dans des cas très particuliers où l'opération de maintien en condition opérationnelle conduit à une évolution des performances ou une restauration de potentiel significatives.
Les dépenses correspondantes sont normalement programmées et exécutées en titre 5. Toutefois, compte-tenu de la nature de ces opérations stratégiques, elles peuvent conduire à ce qu'une part de celles-ci soient exécutées en titre 3.
Elles ne peuvent être programmées et imputées sur tranche fonctionnelle que dès lors que les engagements sont prévus sur plusieurs exercices.
3.4. Les opérations d'infrastructure.
L'usage des tranches fonctionnelles pour les opérations d'infrastructure doit se limiter aux opérations d'infrastructure significatives ou à enjeux constituant un projet de travaux au sens du code des marchés publics. L'usage des tranches fonctionnelles concerne uniquement des opérations donnant lieu à des engagements sur plusieurs exercices.
Une tranche fonctionnelle peut également être créée en anticipation du lancement d'un stade dans les conditions fixées au point 2.2.2.2.
3.5. Les opérations relevant de la dissuasion.
Le recours aux tranches fonctionnelles pour les opérations relevant de la dissuasion (DIS) dépend du contenu physique de l'activité concernée :
-
s'il s'agit d'activités relatives à l'acquisition d'équipements principaux, elles relèvent des mêmes règles de gestion que les programmes à effet majeur ;
-
s'il s'agit d'activités de soutien et de mise en place d'équipements d'accompagnement, elles seront gérées de la même façon que les autres opérations d'armement (AOA).
3.6. L'opération stratégique renseignement.
Compte tenu de la diversité des crédits relevant de cette opération stratégique, il est possible de créer des tranches fonctionnelles dédiées dont la gestion sera adaptée à la nature des besoins couverts.
3.7. Les autres opérations stratégiques.
Le recours aux tranches fonctionnelles n'est par principe pas autorisé pour les opérations stratégiques autres que celles mentionnées ci-dessus.
4. Les tranches fonctionnelles techniques et historiques.
4.1. Les tranches fonctionnelles techniques.
Les opérations d'investissement présentant un solde non nul à l'issue des traitements de fin de gestion 2009 dans les applications du « Palier LOLF » ont donné lieu à la création de tranches fonctionnelles lors de la bascule dans CHORUS.
Ces opérations d'investissement supportaient des dépenses de titre 3 et ont donc conduit à la création de tranches fonctionnelles dites « techniques » qui n'entrent pas dans le champ des principes édictés dans cette instruction.
Par exception, la comptabilité de ces « tranches fonctionnelles techniques » continue à s'effectuer en titre 3 dans le cadre de règles particulières définies en liaison avec la direction du budget et le contrôleur budgétaire et comptable ministériel. Une circulaire particulière (2) en précise les modalités de contrôle et de suivi.
Ces tranches fonctionnelles doivent être clôturées dès que possible et, dans cette perspective, font l'objet d'un suivi particulier de la part de la direction des affaires financières.
4.2. Les tranches fonctionnelles historiques.
Les tranches fonctionnelles antérieures à 2010 rattachées aux programmes d'armement, dites « tranches fonctionnelles historiques », ont pu avoir un niveau d'affectation initiale ne permettant pas leur couverture totale. Il est alors nécessaire de procéder à des affectations complémentaires qui peuvent prendre la forme :
-
d'une couverture au fil de l'eau à hauteur des engagements de l'année jusqu'à l'atteinte du montant nominal de la tranche fonctionnelle ;
-
d'une couverture complète ;
-
d'une couverture partielle ou complète en gestion exploitant la disponibilité des ressources.
Les « tranches fonctionnelles historiques », une fois mises à niveau, perdent leur caractère spécifique et relèvent des règles de gestion précisées dans cette instruction.
Les retraits d'affectation de l'année en cours redonnent du disponible au niveau de l'unité opérationnelle qui peut à nouveau les utiliser. Outre le cas général rappelé au point 2.2.3.2. de la présente instruction, leur report peut être autorisé, par la direction du budget, pour couvrir d'autres tranches fonctionnelles historiques, en réduction des autorisations d'engagement à demander en loi de finances.
Le directeur des affaires financières,
Christophe MAURIET.