ORDONNANCE N° 2005-883 relative à la mise en place au sein des institutions de la défense d'un dispositif d'accompagnement à l'insertion sociale et professionnelle des jeunes en difficulté.
Du 02 août 2005NOR D E F X 0 5 0 0 1 9 1 R
LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE,
Sur le rapport du Premier ministre, de la ministre de la défense et du ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement,
Vu la Constitution, notamment son article 38 ;
Vu le code de la défense ;
Vu le code du service national ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 2005-846 du 26 juillet 2005 habilitant le Gouvernement à prendre, par ordonnance, des mesures d'urgence pour l'emploi, notamment le 6° de son article 1er ;
Vu l'avis du conseil d'administration de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale en date du 22 juillet 2005 ;
Vu l'avis du conseil de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés en date du 20 juillet 2005 ;
Vu la saisine pour avis de la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés en date du 13 juillet 2005 ;
Le Conseil d'État entendu ;
Le conseil des ministres entendu,
ORDONNE :
1. Dispositions relatives à l'établissement public d'insertion de la défense.
1.1.
Au titre Ier du livre IV de la troisième partie du code de la défense, il est ajouté un chapitre IV ainsi rédigé :
« CHAPITRE IV.
« Établissement public d'insertion de la défense.
« Art. L. 3414-1. L'établissement public d'insertion de la défense est un établissement public de l'État placé sous la tutelle du ministre de la défense et du ministre chargé de l'emploi.
« Il a pour objet l'insertion sociale et professionnelle des jeunes sans diplômes ou sans titres professionnels ou en voie de marginalisation sociale.
« L'établissement public d'insertion de la défense :
- «
1. Organise des formations dispensées dans des institutions et par un encadrement s'inspirant du modèle militaire ;
« 2. Accueille et héberge des jeunes dans le cadre de ces formations ;
« 3. Peut développer des actions de coopération nationale ou internationale avec des collectivités publiques, des entreprises, des organismes publics ou privés de formation ou intéressés à ce type d'action, notamment par voie de convention ou de prise de participation.
« Art. L. 3414-2. L'établissement public d'insertion de la défense est administré par un conseil d'administration qui comprend des représentants de l'administration ainsi que des membres nommés à raison de leur compétence. Le président est nommé par décret.
« Art. L. 3414-3. L'établissement public d'insertion de la défense est dirigé par un directeur général nommé par décret.
« Art. L. 3414-4. L'établissement public d'insertion de la défense peut recruter des agents sur contrat et accueillir des agents publics par voie de détachement ou de mise à disposition.
« Art. L. 3414-5. Les ressources de l'établissement public d'insertion de la défense sont constituées par :
- «
1. Les subventions, avances, fonds de concours, dotations et participations de l'État, de la Communauté européenne, des collectivités territoriales, des établissements publics ou de toute autre personne morale ;
« 2. Les dons et legs ;
« 3. Le produit de la taxe d'apprentissage et les ressources provenant de l'application de la législation sur la formation professionnelle continue ;
« 4. Les produits des activités de l'établissement ;
« 5. Les produits des contrats et conventions ;
« 6. Les revenus des biens meubles et immeubles, fonds et valeurs ;
« 7. Les produits des aliénations ;
« 8. Le produit des emprunts ;
« 9. Les immeubles qui lui sont apportés en dotation.
« Art. L. 3414-6. I. L'établissement public d'insertion de la défense n'est pas soumis aux dispositions du 5° de l'article 206 du code général des impôts.
« II. Les transferts et apports d'actifs mobiliers et immobiliers au profit de l'établissement public d'insertion de la défense ne donnent lieu à la perception d'aucun impôt, droits, taxes, émoluments et débours divers.
« III. Les immeubles dont l'établissement public d'insertion de la défense est propriétaire sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties et de taxe foncière sur les propriétés non bâties.
« IV. L'établissement public d'insertion de la défense est exonéré de la taxe d'habitation.
« Art. L. 3414-7. - Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'organisation et de fonctionnement de l'établissement public d'insertion de la défense. »
2. Dispositions relatives au volontariat pour l'insertion.
2.1.
Au titre II du livre Ier du code du service national, il est ajouté, après le chapitre II, un chapitre III ainsi rédigé :
« CHAPITRE III
« Le volontariat pour l'insertion
« Art. L. 130-1. Il est créé un contrat de droit public intitulé : « contrat de volontariat pour l'insertion », qui permet de recevoir une formation générale et professionnelle dispensée par l'établissement public d'insertion de la défense.
« Peut faire acte de candidature, en vue de souscrire ce contrat avec l'établissement public d'insertion de la défense, toute personne de dix-huit à vingt et un ans révolus, ayant sa résidence habituelle en métropole, dont il apparaît, notamment à l'issue de la journée d'appel de préparation à la défense, qu'elle rencontre des difficultés particulières d'insertion sociale et professionnelle.
« Cette formation est délivrée dans les centres de formation gérés et administrés par l'établissement public d'insertion de la défense, dont le régime est l'internat.
« Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent article.
« Art. L. 130-2. Le volontariat est souscrit initialement pour une durée de six mois à un an. Il peut être prolongé sans que la durée totale du volontariat puisse excéder vingt-quatre mois.
« Le contrat, qui comprend une période probatoire, peut notamment comporter une ou plusieurs périodes de stage en entreprise ou en administration.
« Un décret en Conseil d'État fixe les conditions d'application du présent article ainsi que les conditions de conclusion, d'exécution et de résiliation du contrat.
« Art. L. 130-3. L'accomplissement du volontariat pour l'insertion ouvre droit :
- «
1. À une allocation mensuelle, à l'exclusion de toute rémunération ;
« 2. À une prime calculée au prorata du nombre de mois de volontariat effectivement accomplis.
« Les conditions d'attribution et le montant de l'allocation mensuelle et de la prime sont fixés par décret.
« L'allocation et la prime sont exonérées de l'impôt sur le revenu et exclues de l'assiette de la contribution sociale généralisée et de la contribution au remboursement de la dette sociale.
« Art. L. 130-4. I. Le volontaire pour l'insertion bénéficie pour lui-même et ses ayants droit des prestations en nature de l'assurance maladie, maternité et invalidité du régime général de sécurité sociale.
« La couverture de ces risques est assurée moyennant le versement de cotisations forfaitaires à la charge de l'établissement public d'insertion de la défense et dont le montant est fixé par décret.
« II. Il relève, en cas de maladie ou d'accident survenu par le fait ou à l'occasion du service au titre du volontariat pour l'insertion, des dispositions du livre IV du code de la sécurité sociale.
« La couverture de ce risque est assurée moyennant le versement de cotisations forfaitaires à la charge de l'établissement public d'insertion de la défense et dont le montant est fixé par décret.
« III. Le bénéfice des dispositions de l'article L. 130-4 est maintenu durant la période de volontariat au profit du volontaire en cas de congé de maladie, de maternité ou d'adoption, ou d'incapacité temporaire de travail liée à un accident ou une maladie survenu par le fait ou à l'occasion du service.
« IV. Les volontaires pour l'insertion ne relèvent pas de l'article L. 351-12 du code du travail et ne peuvent bénéficier de l'allocation mentionnée à l'article L. 351-3 du même code. »
2.2.
L'article L. 412-8 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1. Après le 14°, il est ajouté un 15° ainsi rédigé :
« 15° Les volontaires pour l'insertion mentionnés à l'article L. 130-4 du code du service national ».
2. Au dernier alinéa, après les mots : « en vertu du livre III, ainsi que les personnes mentionnées au 13° », sont insérés les mots : « et les personnes mentionnées au 15° ».
3. Dispositions diverses.
3.1.
Un décret en Conseil d'État détermine les règles relatives à la discipline générale s'appliquant aux volontaires pour l'insertion au sein des centres de formation de l'établissement public d'insertion de la défense.
3.2.
Les établissements de formation de l'établissement public d'insertion de la défense sont assimilés à des établissements militaires ne relevant pas des dispositions des articles L. 111-7 et suivants et L. 123-2 et suivants du code de la construction et de l'habitation.
3.3.
Le contrôle de l'application des dispositions du titre III du livre II du code du travail dans les centres de formation de l'établissement public d'insertion de la défense est confié au contrôle général des armées.
3.4.
Le Premier ministre, la ministre de la défense, le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement et le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative sont responsables, chacun en ce qui le concerne, de l'application de la présente ordonnance, qui sera publiée au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 2 août 2005.
Jacques CHIRAC
Par le Président de la République :
Le Premier ministre,
Dominique DE VILLEPIN
La ministre de la défense,
Michèle ALLIOT-MARIE
Le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement,
Jean-Louis BORLOO
Le ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative,
Jean-François LAMOUR
Annexe
ANNEXE I. Rapport au Président de la République . (1)
Monsieur le Président,
Chaque année, 60 000 jeunes sont identifiés à l'occasion de la Journée d'appel et de préparation à la défense (la JAPD intéresse chaque année 800 000 jeunes nationaux par an) comme étant en difficulté dans la maîtrise de la lecture et de l'écriture. Parmi ces jeunes en difficulté, certains sont simplement en échec scolaire. D'autres sont, en revanche, à la fois en échec scolaire et en voie de marginalisation sociale. Pour ceux-là, il n'existe que peu de structures adaptées pour les guider vers une intégration sociale et professionnelle : c'est le public auquel s'adresse l'ordonnance. Cette ordonnance vise à transposer au secteur civil les ingrédients du succès que connaissent les armées dans le domaine de l'intégration sociale et professionnelle, en assurant une formation, en liaison étroite avec les différents acteurs de l'éducation et de l'entreprise, dans les domaines du comportement, des valeurs, des acquis scolaires fondamentaux et de l'apprentissage d'un métier.
Cette ordonnance s'articule autour de trois principes : un parcours pédagogique adapté à cette catégorie de jeunes, un statut s'inspirant du volontariat de service national et un encadrement assuré par d'anciens militaires.
1. Un cursus pédagogique comportant :
un stage d'une durée d'une année incluant une première partie dédiée à la formation comportementale, aux acquis scolaires fondamentaux (avec le soutien de professeurs de l'éducation nationale) et à la pratique sportive. La seconde partie est consacrée à la poursuite de la formation comportementale (notions d'encadrement de groupes, vie en collectivité) et à une formation professionnelle (avec possibilité de séjours en entreprises) en partenariat avec les organismes spécialisés (Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, organismes consulaires...) ;
une formation sanctionnée par un certificat de formation générale (CFG) et une attestation de formation professionnelle pouvant être valorisés pour l'obtention ultérieure d'un certificat d'aptitude professionnelle (CAP). À l'issue, les jeunes peuvent soit opter pour un contrat d'apprentissage, soit directement pour un emploi en entreprise ou en administration.
2. Un statut spécifique élaboré pour les stagiaires (garçons et filles, de dix-huit à vingt-trois ans) en s'inspirant du volontariat du service national :
le projet éducatif proposé ne permet pas d'envisager un statut relevant du code du travail, notamment du fait de l'exigence de vie en internat ou des contraintes particulières en matière de discipline. Il ne justifie pas, pour autant, d'attribuer un statut militaire aux stagiaires compte tenu de la finalité du projet orientée exclusivement vers l'emploi civil et l'entreprise ;
les jeunes concernés sont recrutés sur la base d'un contrat de droit public (qui n'est pas un contrat de travail). La voie contractuelle a été retenue, en ce qu'elle repose sur un engagement personnel des jeunes pendant une durée minimale de six mois. En contrepartie de leur engagement, les volontaires recevront une allocation mensuelle ainsi qu'une prime en fin de formation, ce qui leur permettra de faire face à des besoins quotidiens et de disposer d'un petit capital les aidant au début de leur parcours professionnel. Ils bénéficieront également d'une couverture sociale classique couvrant la maladie, la maternité, l'invalidité et la vieillesse mais excluant l'indemnisation du chômage.
3. Un encadrement confié à d'anciens militaires ayant l'expérience de l'autorité et du dépassement de soi, y compris dans des situations difficiles :
cet encadrement assurera une présence continue pour les activités quotidiennes, la vie en internat et il fera respecter une discipline stricte. Ceci justifie le taux d'encadrement important qui est retenu (un cadre pour deux stagiaires) et qui conditionne la réussite du programme éducatif proposé.
La mise en œuvre de ce dispositif original en faveur des jeunes en difficulté d'insertion sera confiée à un établissement public placé sous la tutelle du ministère de la défense et associant les principaux ministères concernés.
La loi no 2005-846 du 26 juillet 2005 a autorisé le Gouvernement à « prendre par ordonnance des mesures d'urgence pour l'emploi », parmi lesquelles figure l'adaptation « en métropole [d']un dispositif d'insertion professionnelle sur le modèle du service militaire adapté qui fonctionne outre-mer ».
Tel est l'objet de la présente ordonnance que nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation. Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre profond respect.