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Direction générale de l'armement : direction des opérations

INSTRUCTION N° 52607/DEF/DGA/DO - N° 103/DEF/EMA/PLANS relative à la procédure d'urgence opérationnelle.

Du 25 mars 2014
NOR D E F A 1 4 5 0 4 7 8 J

1. OBJET.

L'urgence opérationnelle (UO) est une procédure particulière de réalisation d'une opération d'armement, autorisée par l'instruction citée en référence, permettant de répondre à un besoin impérieux en opérations dans des délais très courts. Le délai de traitement de l'UO est primordial et doit être considéré avec une gestion des risques adaptée à une telle démarche. L'objet de la présente instruction est de décrire cette procédure, de l'expression du besoin jusqu'à la prise en compte des équipements par les forces, et le rôle précis des principaux acteurs qui y participent.

2. DOMAINE D'APPLICATION.

Les modalités d'instruction décrites infra s'appliquent à toute demande d'acquisition candidate à un traitement en UO.

En revanche, les modalités de conduite et de suivi ne s'appliquent qu'aux UO financées au titre du programme 146 ou conduites par la direction générale de l'armement (DGA).

Cette instruction ne s'applique pas au traitement par les armées de leurs besoins opérationnels urgents, dès lors qu'il est mené sur leurs seules ressources, budgétaires et techniques (adaptation réactive).

L'état-major des armées, la direction générale de l'armement, les états-majors d'armées, l'état-major du commandement des opérations spéciales (COS), les structures de soutien, et toute autre entité du ministère sollicitant une UO ou contribuant à la réaliser, doivent appliquer la présente instruction.

3. Acteurs spécifiques.

Une commission d'instruction et de suivi des urgences opérationnelles (CISUO) assure l'instruction des projets d'urgence opérationnelle et est informée de l'avancement des UO en cours.

Elle est présidée par l'état-major des armées (EMA)/sous-chefferie plans/division cohérence capacitaire (COCA).

En sont membres de droit :

  • la sous-chefferie opérations de l'EMA [centre de planification et de conduite des opérations (CPCO) et division emploi], la division plans, programmes et évaluations de la sous-chefferie plans, et la sous-chefferie soutien (maintien en conditions opérationnelles) ;

  • la DGA ;

  • les états-majors d'armée.

En est membre permanent :

  • l'état-major du COS.

D'autres entités susceptibles de présenter une demande à l'EMA en urgence opérationnelle sont représentées en tant que de besoin.

Toute personne compétente pour éclairer un point à l'ordre du jour peut également y être invitée. 

La CISUO se réunit en fonction du rythme des opérations en cours et au minimum une fois par trimestre pour le suivi des UO en cours, dont elle tient à jour la liste.

Elle analyse les demandes d'UO adressées à l'EMA selon les modalités décrites au point 4.2.

Elle s'assure du bon avancement des UO en cours d'exécution, et engage si besoin toutes les actions nécessaires auprès de leurs instances de pilotage.

Elle prend en compte les propositions de clôture d'UO qui lui sont soumises, selon les modalités décrites au point 5.3.

Elle rend compte de son activité aux chefs de divisions « cohérence capacitaire », « emploi », et au chef du CPCO, en fonction de l'actualité opérationnelle ou des besoins d'arbitrage.

Elle assure l'archivage de l'ensemble des enregistrements liés à la présente instruction pendant la durée de vie de l'équipement objet de l'UO.

4. Lancement de la procédure.

La procédure d'urgence opérationnelle doit rester exceptionnelle.

Elle est destinée à fournir le plus rapidement possible aux forces déployées ou devant l'être les équipements ou améliorations ou services adaptés pour faire face à un besoin impérieux en opération.

Elle doit concerner un besoin dont l'urgence est avérée, et dont la prise en compte ne pourrait être assurée dans le cadre d'une démarche programmatique normale.

L'annexe I. présente quelques éléments permettant d'analyser la pertinence du recours à une urgence opérationnelle.

4.1. Identification et expression d'un besoin urgent.

Un besoin urgent est identifié par la chaîne de commandement d'un théâtre d'opérations, un état-major d'une armée (EMx), ou une autre entité susceptible d'émettre un besoin vers l'EMA, par exemple le COS, la direction du renseignement militaire (DRM), la direction centrale du service de santé des armées (DCSSA) ou la direction centrale du service des essences des armées (DCSEA).

Si le besoin urgent ne relève pas d'un traitement sur les ressources propres de l'entité qui l'a identifié, l'état-major d'armée concerné, en liaison avec cette entité, le transcrit sous la forme d'une demande d'UO (modèle fourni en annexe II. ), constituée d'une fiche de synthèse et d'une expression de besoin détaillée.

Il consulte systématiquement la DGA pour constituer les éléments du dossier relevant de sa compétence (estimation du coût notamment) et donner un avis sur sa complétude. Il fait de même pour toute autre entité qui pourrait être pressentie pour traiter l'UO (cf. annexe I. ).

Une fois que le périmètre technique du besoin à satisfaire et la démarche de réalisation associée sont identifiés, la demande d'UO est transmise à l'EMA par l'entité qui l'a formalisée. 

Nota. Les besoins des forces spéciales sont exprimés par l'état-major du COS ou les états-majors des armées concernées par le besoin. L'état-major du COS, responsable de la cohérence et l'harmonisation des équipements  des forces spéciales, est chargé de la validation de ce besoin.

Une attention particulière doit être portée sur l'élaboration de l'échéancier de livraison des matériels en tenant compte des délais de réalisation prévisibles (fonction notamment de la procédure contractuelle retenue) et des délais d'obtention de la qualification ou de l'avis technique par la DGA.

Les conséquences éventuelles sur le déroulement d'autres opérations d'armement sont examinées.

4.2. Préparation de la décision du chef d'état-major des armées.

Le président de la CISUO diffuse à ses membres les demandes d'UO reçues par l'EMA pour instruction.

Lors de ses réunions, la CISUO examine la pertinence des demandes en matière d'emploi opérationnel, de cohérence capacitaire, de cohérence technique, de démarche d'acquisition, de maîtrise des risques et de ressources budgétaires.

Elle peut demander des compléments d'information et amender le dossier.

Elle prend en compte les éléments financiers et les arbitrages éventuels, qui relèvent de la responsabilité des officiers de cohérence programme (OCP) en liaison avec les états-majors concernés et des responsables de budget opérationnel de programme (RBOP).

Considérant l'avis des membres de la CISUO, son président peut retenir les orientations suivantes :

  • proposer le lancement de l'urgence opérationnelle au chef d'état-major des armées (CEMA) ;

  • indiquer que l'urgence opérationnelle n'est pas la procédure adaptée pour la satisfaction du besoin ;

  • ou demander des compléments d'information.

Ces orientations sont soumises à l'approbation des sous-chefs d'état-major « opérations » et « plans », avant présentation au CEMA pour décision finale pour les demandes qui seraient retenues.

Les orientations ainsi approuvées sont diffusées à chacun des participants de la CISUO.

La fiche de demande d'UO est mise à jour en fonction des amendements retenus.

4.3. Demande d'acquisition en urgence opérationnelle.

Conformément à l'instruction citée en référence, l'EMA adresse à la DGA une demande d'acquisition en urgence opérationnelle signée par le CEMA. Sont également en copie de cet envoi le demandeur et les autres entités contribuant à la réalisation de l'urgence opérationnelle.

La précision de la demande étant un facteur clé de succès de la réalisation de l'UO, les informations utiles de la fiche de demande d'UO mise à jour lui sont attachées, dont en particulier :

  • la caractérisation du besoin impérieux ;
  • le montant estimé et le budget opérationnel de programme (BOP) concerné, ainsi que les gages correspondants (identification à charge de l'EMA/COCA) ;
  • la date souhaitée pour la livraison, compte tenu des contraintes identifiées lors de l'instruction ;
  • l'expression de besoin détaillée, éventuellement dans une version provisoire.

La DGA répond à l'EMA pour  préciser les modalités suivant lesquelles le besoin sera pris en compte. Elle peut éventuellement proposer ou demander un arbitrage à l'EMA en cas d'incompatibilité avec son plan de charge.

5. Réalisation et clôture des urgences opérationnelles.

5.1. Conduite et supervision des urgences opérationnelles.

Suite à la réception de la lettre du CEMA, la DGA et l'état-major concerné désignent les manager et correspondant d'état-major de l'UO. Leurs attributions sont semblables à celles du directeur de programme et de l'officier de programme, définies dans l'instruction citée en référence.

Ils informent de l'avancement et de toute évolution de l'UO les représentants de leur entité à la CISUO, qui tient à jour l'état courant de l'ensemble des UO.

5.2. Principes de la réalisation.

Une UO est prioritaire : l'équipe chargée de sa réalisation peut s'en prévaloir auprès de tous ses interlocuteurs, notamment en matière d'essais et de mise à disposition de moyens.

La prédominance du délai dans le triptyque coût/délai/performance peut conduire à faire des choix sur la base d'hypothèses potentiellement restrictives : lorsqu'elle est envisagée (1), la qualification d'un équipement acquis en UO peut ainsi comporter des restrictions sur son domaine d'emploi ou sa mise en œuvre. Les hypothèses retenues et les choix réalisés doivent être rigoureusement tracés.

Le suivi financier des urgences opérationnelles est assuré dans le dialogue de gestion entre l'EMA et la DGA.

5.3. Clôture de la procédure.

Le traitement en procédure d'urgence opérationnelle d'une opération d'armement peut être clôturé dans les cas suivants :

  • le besoin est satisfait, c'est-à-dire que les équipements demandés ont été livrés et sont utilisables en opérations ;
  • le caractère urgent du besoin n'est plus avéré ;
  • la satisfaction du besoin peut être assurée suivant les modalités habituelles de l'instruction citée en référence.

La fin du traitement en procédure d'urgence opérationnelle ne marque pas nécessairement la fin de l'opération d'armement, celle-ci pouvant en effet inclure d'autres travaux à traiter hors de la procédure d'UO (exemple : maintien en conditions opérationnelles).

La proposition de clôture de l'UO est présentée par la DGA ou l'entité demandeuse à la CISUO.

Si la CISUO donne son accord, une fiche de clôture est produite, présentant le bilan du traitement en UO et décrivant l'organisation mise en place pour la suite de l'opération d'armement.

Si elle intervient avant la satisfaction du besoin, la clôture de l'UO est soumise à l'approbation des sous-chefs d'état-major « opérations » et « plans ».

6. Texte abrogé.

L'instruction n° 04-287/DEF/DGA/DPM - n° 693/DEF/EMA/PPE du 29 juillet 2004 relative à la conduite des achats en urgence opérationnelle est abrogée.

7. Divers.

La présente instruction sera publiée au Bulletin officiel des armées.

Pour le ministre de la défense et par délégation :

L'ingénieur général de l'armement,
directeur des opérations,

Bruno SAINJON.


Le général de corps aérien,
sous-chef d'état-major « plans » de l'état-major des armées,

André LANATA.

 

Annexes

Annexe I. Caractéristiques des achats en urgence opérationnelle.

1. Recours à la procédure d'urgence opérationnelle.

Une procédure d'urgence opérationnelle peut concerner une opération militaire en cours ou en phase de planification ou peut résulter du constat d'une lacune capacitaire qui serait devenue critique de manière imprévisible.

Un besoin peut être urgent mais ne doit conduire à une urgence opérationnelle que s'il existe une possibilité, technique et éventuellement contractuelle, de le satisfaire dans un délai sensiblement inférieur à celui d'une démarche programmatique habituelle.

La caractérisation de l'urgence peut changer pendant la réalisation de l'opération d'armement et éventuellement conduire à arrêter le traitement en urgence opérationnelle.

2. Exemples de catégories d'acquisition pouvant relever d'une procédure d'urgence opérationnelle.

Les catégories d'acquisition suivantes sont notamment compatibles avec une procédure d'urgence opérationnelle :

  • acquisitions complémentaires de produits (munitions, équipements, etc.) déjà en service opérationnel dans l'armée concernée et réputés qualifiés ;
  • acquisitions d'adaptation d'équipements (déjà en service opérationnel ou non) ou d'ouverture d'une nouvelle configuration (entraînant un besoin de qualification) ;
  • acquisitions « sur étagère » d'un nouvel équipement ;
  • anticipation des acquisitions ou des essais dans le cadre d'une opération déjà programmée.

3. Choix de l'entité traitante.

Toutes les entités du ministère de la défense peuvent prétendre conduire une UO.

Les critères suivants doivent néanmoins être considérés dans le choix de l'entité traitante :

  • l'existence préalable d'un cadre contractuel ;

  • la compétence technique nécessaire, dans le cadre de l'opération, à la maîtrise des risques tels que, par exemple :

    • la sécurité des personnes et des biens, pouvant nécessiter une qualification ou un acte technique ;

    • la maîtrise de la définition sur des opérations d'armement en interface avec l'objet de l'urgence opérationnelle.

Annexe II. Éléments du dossier de demande d'urgence opérationnelle.

Annexe III. Fiche de clôture d'urgence opérationnelle.