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Direction des affaires juridiques : sous-direction du droit public et du droit privé ; bureau de l'expertise générale et de la légistique

INSTRUCTION N° 10610/DEF/CAB relative à l'ouverture et au contrôle des moyens de rangement personnels des militaires.

Du 26 juillet 2006
NOR D E F D 0 6 5 1 7 6 5 J

Texte(s) abrogé(s) : Instruction N° 10075/DEF/DFAJ/AA/2 du 23 janvier 1984 relative au contrôle des casiers personnels des militaires du rang.

Classement dans l'édition méthodique : BOEM  130.1.2., 200.6.1.2., 142.1., 150.1.1.

Référence de publication : BOC n°24 PP du 18/10/2006

Préambule.

Chaque militaire est attributaire, pour la durée de son service ou de son engagement, d'un moyen de rangement personnel (casier, caisson ou armoire).

Ce rangement, qui peut être de faible volume, est mis à la disposition du militaire pour qu'il en dispose à des fins personnelles afin de bénéficier, dans des limites compatibles avec les dispositions législatives en vigueur dans les armées, d'une certaine intimité.

La hiérarchie militaire peut parfois être amenée à solliciter l'ouverture d'un rangement, en particulier lorsqu'elle désire opérer certaines inspections ou lorsqu'un militaire s'absente, déserte ou qu'il décède. L'ouverture d'un rangement peut également intervenir dans le cadre d'investigations judiciaires.

La présente instruction a pour objet de préciser les modalités d'ouverture des rangements personnels des militaires dans ces différentes situations. Elle abroge l'instruction n°10075/DEF/DFAJ/AA/2 du 23 janvier 1984 relative au contrôles des casiers personnels des militaires du rang .

1. ouverture des rangements personnels en dehors de la connaissance d'un crime ou d'un délit et de toute procédure judiciaire en cours.

1.1. Motifs des contrôles.

Le contrôle des rangements personnels se rattache au pouvoir d'inspection dévolu au chef.

Ces inspections ont pour objet exclusif de vérifier:

  • si les militaires résidant dans une enceinte militaire respectent les dispositions des articles 18 à 20 du décret 2005-796 du 15 juillet 2005 (JO n°165 du 17, texte n°9; BOEM 144 et 300*) relatif à la discipline générale militaire (dispositions concernant l'introduction de spiritueux, de substances ou plantes classées comme stupéfiants par le ministère de la santé, de toxiques, matières inflammables ou explosives, la détention d'appareils ou de produits dont l'usage est soumis à l'autorisation du commandement, la détention d'une arme personnelle sans autorisation préalable);

  • si les militaires prennent soin du matériel appartenant aux armées qui leur est confié (article 5 du décret 2005-796 du 15 juillet 2005 relatif à la discipline générale militaire).

1.2. Autorités responsables.

Seuls peuvent décider de contrôler les rangements personnels des militaires:

  • les commandants de formation administrative;

  • les officiers, commandants d'unités isolées.

Ces contrôles peuvent avoir lieu soit de leur propre initiative pour l'application des articles 18 à 20 du décret 2005-796 du 15 juillet 2005 relatif à la discipline générale militaire, soit sur demande du médecin-chef pour des raisons d'ordre prophylactique.

1.3. Choix du moment des contrôles.

Ce choix appartient aux autorités responsables citées au point 1.2.

Pour concilier l'exigence de ces contrôles avec le respect de la vie privée, ceux-ci doivent correspondre à une véritable nécessité.

1.4. Procédure.

Lorsqu'il est demandé par le chef dans le cadre de son pouvoir d'inspection, le contrôle porte uniquement sur l'observation par les militaires des prescriptions indiquées au point 1.1 ci-dessus. En aucun cas, le secret des correspondances ne peut être violé.

Les autres inspections (couchage, ameublement, literie, équipements militaires, etc) ont toujours lieu sans ouvrir les rangements personnels.

L'ouverture d'un rangement personnel, demandée par le chef dans le cadre de son pouvoir d'inspection, ne peut avoir lieu qu'avec le consentement écrit du militaire intéressé et en présence de ce dernier.

Si le chef se heurte à un refus du militaire, l'ouverture du rangement personnel ne peut avoir lieu que dans le cadre d'une procédure judiciaire.

En cas d'absence prolongée et au cas où il n'y aurait aucune procédure pénale en cours ni aucune suspicion de crime ou de délit, il sera procédé conformément au point 1.5.1 ci-dessous.

1.5. Cas particuliers.

1.5.1. Absence prolongée.

En cas d'absence prolongée, clef ou combinaison est déposée dans une armoire de sécurité sous la responsabilité du commandant d'unité. Cette clé ou combinaison ne peut être remise qu'à un mandataire du militaire, ou à son représentant légal, ou à un officier de police judiciaire agissant conformément aux dispositions du code de procédure pénale.

En l'absence de procédure judiciaire en cours ou de suspicion de crime ou de délit, si aucun mandataire ou représentant légal du militaire ne se présente immédiatement après en avoir été avisé pour procéder à l'ouverture du rangement et dans les cas prévus au point 1.5.4, les autorités responsables désignées au point 1.2 pourront faire procéder, si cela s'avère nécessaire, à l'ouverture du casier en présence de deux témoins.

1.5.2. Absence prolongée aboutissant à une procédure de désertion.

L'ouverture du rangement personnel d'un militaire déclaré déserteur à l'expiration du délai de grâce dont il dispose pour rejoindre son affectation nécessite l'intervention d'un officier de police judiciaire qui sera sollicité à cet effet et agira dans les conditions fixées au point 2.

Si cet officier de police judiciaire chargé de l'enquête de désertion estime qu'il n'est pas nécessaire de faire une perquisition du rangement personnel du militaire absent, les autorités responsables désignées au point 1.2 pourront faire procéder, si cela s'avère nécessaire, à l'ouverture de ce rangement en présence de deux témoins. Le procès-verbal d'ouverture précisera les démarches qui ont été effectuées auprès de cet officier de police judiciaire.

1.5.3. Décès.

Sur le territoire de la République, l'ouverture du rangement personnel d'un militaire décédé doit avoir lieu en présence du conjoint successible et des héritiers.

La qualité d'héritier doit être prouvée au moyen d'un acte de notoriété délivré soit par un notaire, soit par le greffier en chef du tribunal d'instance du lieu d'ouverture de la succession (ce lieu correspond au dernier domicile du défunt).

A défaut, le greffier en chef du tribunal d'instance du lieu où se trouve le rangement personnel a seul compétence pour procéder à son ouverture et décider à l'apposition éventuelle de scellés. Un gardien des scellés sera désigné par ce greffier en chef si la consistance et la valeur des objets contenus dans le rangement le justifient. Avant d'apposer les scellés, le greffier en chef pourra également, si cela s'avère nécessaire, dresser un inventaire sommaire des objets et des documents contenus dans le rangement personnel. Il devra emporter les titres, sommes, valeurs, bijoux ou autres objets précieux pour lesquels l'apposition des scellés ne paraîtrait pas une précaution suffisante. Ces objets seront déposés soit dans un coffre du greffe, soit entre les mains d'un notaire ou d'un établissement bancaire. Il ne pourra par la suite procéder à l'ouverture du rangement personnel qu'en présence de tous les héritiers ou de leurs représentants.

Hors du territoire de la République, si les ayants-droits du militaire décédé ne sont pas en mesure de reprendre directement possession des effets personnels du défunt, attache est prise auprès de la représentation diplomatique ou consulaire française territorialement compétente. Un agent désigné par le chef de poste diplomatique ou consulaire pourra procéder à l'ouverture du rangement personnel du défunt, rédiger un inventaire des effets qui s'y trouvent et procéder éventuellement à l'apposition des scellés.

A défaut de représentation diplomatique ou consulaire française, ces formalités sont effectuées par un représentant du commissariat accompagné de deux témoins appartenant à la même unité que le défunt.

1.5.4. Circonstances exceptionnelles d'urgence.

Certaines situations exceptionnelles d'urgence peuvent justifier l'ouverture du rangement personnel d'un militaire sans la présence et le consentement de l'intéressé, et sans l'intervention d'un officier de police judiciaire, d'un héritier, d'un greffier en chef ou encore d'un agent diplomatique ou consulaire.

Cette dérogation aux procédures prévues aux points précédents ne peut trouver à s'appliquer que si l'ouverture du rangement personnel est rendu strictement nécessaire par des circonstances graves, anormales et imprévisibles ne permettant pas d'envisager le respect des règles ordinaires (incendie, voie d'eau, nécessité de récupérer des médicaments indispensables à la survie d'une personne, nécessité de récupérer tous les effets personnels du militaire dans le cadre d'une évacuation sanitaire d'urgence...).

2. Ouverture des rangements personnels en cas de connaissance d'un crime ou d'un délit ou dans le cadre d'une procédure judiciaire en cours.

Les investigations judiciaires sont soumises, sous le contrôle du magistrat compétent, à des règles particulières contenues dans le code de procédure pénale et le code de justice militaire.

Lorsque le procureur de la République, le juge d'instruction et les officiers de police judiciaire sont amenés soit à constater, dans les établissements militaires, des infractions relevant ou non de la compétence des juridictions des forces armées, soit à rechercher, en ces mêmes lieux, des personnes ou des objets relatifs à ces infractions, ils doivent adresser préalablement à l'autorité militaire des réquisitions tendant à obtenir l'entrée dans ces établissements. Les réquisitions doivent, sauf nécessité, préciser la nature et les motifs des investigations jugées nécessaires. L'autorité militaire est tenue de s'y soumettre et se fait représenter aux opérations.

2.1. Connaissance d'un crime ou d'un délit.

En cas de connaissances de crime ou de délit commis par un militaire, il appartient au commandant de formation administrative, conformément à l'article 40 du code de procédure pénale, d'en informer sans délai le procureur de la République. Dans ce cas, un officier de police judiciaire pourra, dans le cadre de l'enquête qu'il diligentera en flagrance, ouvrir le rangement personnel du militaire, en présence de celui-ci, afin de procéder à toutes saisies utiles.

Si le militaire ne peut être présent, l'officier de police judiciaire aura l'obligation de l'inviter à désigner un représentant de son choix; à défaut, l'officier de police judiciaire choisira deux témoins requis à cet effet par lui, en dehors des personnes relevant de son autorité administrative.

2.2. Enquête judiciaire en cours.

Lorsqu'une enquête judiciaire est déjà ouverte, seul un officier de police judiciaire a qualité pour ouvrir le rangement personnel d'un militaire afin de procéder à toutes saisies utiles à la manifestation de la vérité.

Le consentement écrit de la main du militaire intéressé est requis sauf lorsque l'officier de police judiciaire agit en flagrance ou sur commission rogatoire d'un juge d'instruction ou en vertu d'une décision écrite et motivée du juge des libertés et de la détention. Cette situation peut notamment être rencontrée lorsqu'un militaire est placé en détention provisoire.

Les opérations de perquisitions et de saisies sont effectuées sous le contrôle des magistrats du parquet ou du juge d'instruction mandant.

Hors du territoire de la République, l'article 84 du code de justice militaire donne qualité, en temps de paix, aux commandants d'armes et majors de garnison, aux majors généraux des ports, aux commandants de base et aux commandants de bâtiments de la marine, aux commandants de formation administrative, aux chefs de dépôts et de détachements, ainsi qu'aux chefs des différents services des forces armées, pour faire personnellement, à l'intérieur des établissements militaires, tous les actes nécessaires à l'effet de constater les infractions relevant des juridictions des forces armées, d'en rassembler les preuves et d'en rechercher les auteurs.

L a ministre de la défense.

Michèle ALLIOT-MARIE