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Archivé DIRECTION GÉNÉRALE DE LA GENDARMERIE NATIONALE : cabinet

CIRCULAIRE N° 4650/DEF/GEND/CAB/SANT relative à la maladie alcoolique.

Abrogé le 19 octobre 2016 par : CIRCULAIRE N° 86192/DEF/GEND/CAB portant abrogation de textes. Du 20 février 1980
NOR D E F G 8 0 5 6 0 0 0 C

Classement dans l'édition méthodique : BOEM  531.1.

Référence de publication : BOC n°20 du 12/6/2009

La présente circulaire destinée aux chefs de corps et aux médecins militaires servant dans la gendarmerie a pour objet de rappeler :

  • les modes de dépistage de la maladie alcoolique en vue d'appliquer une thérapeutique adaptée à chaque sujet ;
  • les décisions médico-militaires qui peuvent être proposées au commandement par les médecins traitants, éventuellement après avis des spécialistes hospitaliers.

1. La maladie alcoolique.

La maladie alcoolique est l'ensemble des troubles de toute nature dont souffrent ceux qui font une consommation exagérée d'alcool.

L'organisation mondiale de la santé (OMS) retient quatre types principaux d'alcoolisme.

L'alcoolisme alpha. Il est caractérisé par une dépendance purement psychologique. Le sujet éprouve un désir pathologique d'alcool pour soulager sa tension nerveuse. La boisson est « indisciplinée » mais il n'y a ni « perte de contrôle » ni impossibilité de s'abstenir, qui traduirait une dépendance physique. Ce type d'alcoolisme à caractère psychonévrotique peut, à la longue, évoluer vers l'alcoolisme gamma.

L'alcoolisme bêta. C'est celui des buveurs excessifs par habitude, par entraînement social. Les complications (gastrite, polynévrite, cirrhose, etc) surviennent sans qu'aucune dépendance physique ou psychologique ne se soit manifestée. C'est le type d'alcoolisme des pays à production viticole. L'évolution est fréquente vers l'alcoolisme delta.

L'alcoolisme gamma. Il comporte une évolution progressive de la dépendance psychologique à la dépendance physique, avec « une perte de contrôle ». Le sujet, initialement décidé à ne boire qu'un verre ou deux, est incapable de s'arrêter et boit verre sur verre jusqu'à l'ébriété. Par ailleurs, on observe déjà des phénomènes de tolérance à l'alcool. C'est le type d'alcoolisme fréquemment rencontré dans les pays anglo-saxons.

L'alcoolisme delta. À la « perte de contrôle » se substitue l'impossibilité de s'abstenir. Le sujet ne peut cesser de boire, sans présenter des symptômes de sevrage. Il peut cependant limiter chaque ingestion d'alcool, et par conséquent, se trouve rarement en état d'ivresse.

2. Intérêt du dépistage précoce dans la prévention de la maladie alcoolique chronique.

Le nombre considérable d'hommes et de femmes victimes de l'alcoolisme est connu depuis longtemps. Il augmente au fil des années.

Le rôle du médecin s'est, pendant longtemps, limité au traitement des complications tardives de l'alcoolisme. Une telle attitude n'est plus suffisante aujourd'hui.

Dès le stade initial de l'intoxication, en particulier chez les buveurs excessifs par habitude, il est essentiel de faire le diagnostic précoce d'éthylisme chronique, pour prévenir, si possible, l'évolution progressive vers l'alcoolodépendance et ses complications terminales. Ce diagnostic est difficile car il repose sur un faisceau de symptômes disparates dont aucun n'est spécifique.

Les méthodes de dépistage peuvent être utilisées pour tous les personnels sans exception, au cours des visites médicales d'engagements, d'admission dans le corps des sous-officiers de carrière lors des visites périodiques systématiques (1). La décision de faire ces examens est laissée à l'initiative du médecin.

Trois méthodes peuvent être utilisées :

  • l'interrogatoire ;
  • l'examen clinique ;
  • les examens biologiques.

2.1. L'interrogatoire.

Du malade : il est très important car il doit permettre :

  • d'apprécier la quantité d'alcool ingérée par 24 heures dans un laps de temps prolongé ;
  • de connaître les habitudes alimentaires et le contexte social de l'intéressé.

De l'entourage : il revêt un intérêt non négligeable car le malade a souvent tendance à minimiser, voire à
cacher son intoxication.

En cas d'imprégnation alcoolique marquée, un rapport sur le comportement, très utile au médecin, sera demandé au commandant d'unité lorsqu'il s'agira notamment d'une visite périodique.

2.2. L'examen clinique.

C'est à Le Go que l'on doit la mise au point d'une grille cotée permettant d'apprécier de façon simple, sûre, précise et reproductible, les signes cliniques de l'intoxication éthylique chronique. L'intérêt principal de cette grille, surtout si elle est employée par le même praticien, est de permettre de suivre le plus objectivement possible l'évolution du malade dans le sens de la détérioration ou au contraire de la récupération.

Les éléments retenus dans la grille de Le Go (voir le tableau qui figure ci-dessous) sont :

  • des signes d'inspection
    • V = visage : couperose, faciès cyanosé, cireux, oedémateux, etc ;
    • C = conjonctives : jaunes, injectées, etc ;
    • L = langue : jaune ou blanchâtre des buveurs de bières ; tannée, striée, dépapillée par le vin, etc ;
  • des troubles subjectifs
    • N = nerveux : troubles du sommeil, du caractère, etc ;
    • D = digestif : appétit, pituites, gastralgies, etc ;
    • M = moteur : douleurs musculaires, crampes, etc ;
  • des tremblements
    • B = buccal ;
    • L = lingual ;
    • E = des extrémités ;

Chacun de ces éléments est coté de 0 à 5 :

    • 0 = négatif ;
    • 1-2 = anomalie modérée ;
    • 3 - 4 - 5 = anomalie importante ;
  • le retentissement viscéral et général.

Au cours de l'examen médical, on notera aussi le volume du foie et sa consistance, le poids du sujet et sa tension artérielle.
Le Go considère que l'absence de toute anomalie sur la grille élimine pratiquement l'intoxication éthylique.

ASPECT

TREMBLEMENT

V

C

L

B

L

E







TROUBLES SUBJECTIFS

RETENTISSEMENT

N

D

M

FOIE

POIDS

TA







2.3. Les examens biologiques.

Il existe des tests biologiques, bien standardisés facilitant le dépistage de l'imprégnation éthylique et particulièrement précieux pour suivre l'évolution d'un sevrage ou contrôler l'abstinence.

Pour un dépistage systématique de la consommation excessive d'alcool, le volume globulaire moyen (VGM) suffit en première approche, d'autant qu'il figure couramment dans les bilans sanguins de routine.

Une mesure de la Gamma GT avec un test de décroissance après cinq jours d'abstinence est indispensable pour confirmer le diagnostic.

Par ailleurs un bilan métabolique comprenant glycémie, cholestérolémie et uricémie est très utile cas on connaît l'impact de l'alcool sur ces différents métabolismes.

  • VGM : l'augmentation du VGM se trouve fréquemment chez les alcooliques chroniques (chez la plupart des sujets buvant environ 1 litre de vin par jour et chez 85 p. 100 des sujets en buvant un peu plus d'un ¿ litre dans le même temps). Ces pourcentages doivent être « modulés » en raison de l'existence de faux positifs. Il certain que des facteurs comme la dénutrition, voire le facteur Biermérien ou para-Biermérien, interfèrent dans l'évaluation de ces taux et ne sauraient donner à l'augmentation du VGM un caractère spécifique de l'intoxication par l'alcool. Malgré tout, il est souvent constaté une normalisation significative du VGM après sept jours de sevrage.
  • Gamma GT : le dosage de la Gamma GT est un bon test de dépistage des buveurs excessifs d'alcool. Les faux positif (chlostase, cancer du foie, prise de médicaments) doivent pouvoir être facilement décelés. Il existe en revanche 15 p. 100 de faux négatifs.

Une certitude est obtenue en demandant au sujet à Gamma GT élevée de s'abstenir de toute ingestion d'alcool pendant une période de cinq jours. À l'issue de cette période, une diminution de la Gamma GT est absolument pathognomonique d'une consommation excessive d'alcool.

Des trois méthodes proposées pour le dépistage de l'éthylisme chronique, deux ont simplement valeur d'orientation ou de confirmation :

  • l'interrogatoire en raison de son caractère subjectif ;
  • l'examen biologique à cause du manque de spécifié de ses critères et des nombreuses interférences qui les perturbent.

L'examen clinique reste la méthode la plus fiable, à condition d'être pratiquée selon une technique rigoureuse et systématique telle que Le Go le préconise.

Seul ou associé aux résultats biologiques, cet examen doit permettre :

  • d'éliminer les candidats à l'engagement ou à l'admission dans le corps des sous-officiers de carrière, qui présentent les signes nets d'une intoxication alcoolique ;
  • de faire une approche facilement réalisable dans le dépistage précoce de la maladie alcoolique, lors des visites systématiques ;
  • de suivre l'évolution de la maladie.

Il convient d'insister sur l'importance de l'action médicale lorsque le pronostic est encore favorable ou lorsque le malade ne présente encore aucune complication. Le médecin d'unité conseiller technique du commandement joue un rôle fondamental. Par des conférences, des films, etc... il porte à la connaissance du personnel des méfaits de l'alcool.

Cependant, il ne peut se limiter à des voeux ou des mises en garde momentanées. Il doit prendre en charge tout malade. Pour chacun d'eux il lui appartient d'effectuer une enquête serrée destinée à préciser les causes de l'exo-intoxication, à découvrir la personnalité sur laquelle elle évolue et le milieu dans lequel elle se manifeste. Ses liaisons avec le commandement, l'assistance sociale, les associations de buveurs guéris, les personnels en général et la famille doivent être les plus étroites possibles afin de mener au mieux l'entreprise.

La recherche de l'action curative passe également par d'autres voies, telle la prise en charge du malade alcoolique par les services des hôpitaux.

Les hôpitaux des armées sont en mesure de traiter, de conseiller, de guider les buveurs excessifs, après consultation ou hospitalisation, suivant le cas, dans un service spécialisé (2).

3. Conséquences médico-militaire.

Les méthodes de détection biologique et clinique sont actuellement bien connues ; l'élimination préventive du sujet imprégné pose néanmoins beaucoup de problèmes.

L'éthylisme est une cause d'inaptitude générale par ses complications organiques ; atteintes viscérales ou neurologiques, complications psychiques, troubles du comportement. Ces troubles peuvent entraîner une inaptitude totale ou partielle à servir, par attribution d'un coefficient approprié au profit médical. L'instruction n° 3000/DEF/DCSSA/2/SA du 1er octobre 1976 traite de ces problèmes (3).

En revanche, l'imprégnation éthylique isolée, sans trouble notable physique ou comportemental, ne peut être, sur le plan médical tout au moins, un facteur d'inaptitude générale au service. Il serait difficile et même dangereux de vouloir en catégoriser et en quantifier les aspects, l'appréciation de ces aspects s'appuyant sur des éléments le plus souvent subjectifs.

Dans le domaine des aptitudes particulières à certains emplois ou à certaines missions, ces mêmes éléments cliniques permettent de prononcer les contre-indications utiles.

En l'état actuel de la réglementation, devant une manifestation pathologique liée à un état alcoolique mettant un militaire dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, il est loisible d'attribuer à ce dernier un type de congé adapté à l'affection en cause. Ce sera soit un congé de maladie, soit par la suite un congé mettant l'intéressé en position de non activité : congé de réforme temporaire ou congé pour raison de santé, éventuellement un congé de longue maladie, ou congé de longue durée pour maladie.

La guérison de la maladie alcoolique chronique dépend d'un travail de longue haleine dont les chances d'aboutir résultent d'une part de la volonté de guérir du malade, de l'aide qu'il trouve au sein de sa famille et dans son environnement professionnel, d'autre part d'un effort conjoint des services médicaux, des services para-médicaux et du commandement.

Notes

    BOC/PP du 6 décembre 1976 (n° 49 bis) page 3835. Cette instruction reprend les anciens textes qui ont fait l'objet d'une refonte complète après consultation de nombreux spécialistes et du commandement.3

Pour le ministre de la défense et par délégation :

Le médecin chef des services,
conseiller technique,

QUILICHINI.