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DIRECTION CENTRALE DU SERVICE DES ESSENCES DES ARMÉES :

INSTRUCTION N° 3100/DEF/DCSEA/SDE/1/TD relative au contrôle et à l'ajustement de la conductivité des carburéacteurs.

Du 11 juin 2009
NOR D E F E 0 9 5 1 9 9 8 J

1. GÉNÉRALITÉS.

1.1. Objet de l'instruction.

La présente instruction a pour objet de définir les modalités d\'exécution du contrôle de la conductivité des carburéacteurs approvisionnés et distribués par le service des essences des armées (SEA), ainsi que les actions qui doivent être entreprises en cas d\'anomalie.

Elle s\'applique à tous les carburéacteurs, codifiés OTAN (F-34, F-35, F-44) ou non [XF-43, TS1 (1), ...].

1.2. Enjeux.

Le contrôle et l\'ajustement de la conductivité des carburéacteurs font partie intégrante des opérations de contrôle de la qualité des carburants réalisées aux différentes étapes de la chaîne d\'approvisionnement et de distribution.

La conformité de cette caractéristique avec les exigences des spécifications conditionne :

  • la sécurité de la manipulation des carburants au cours de leur exploitation, en particulier lors des opérations d\'avitaillement. Des problèmes sont susceptibles d\'apparaître dans le cas d\'une conductivité insuffisante ;
  • l\'exactitude des informations sur l\'état de remplissage des réservoirs d\'aéronefs transmises par l\'intermédiaire de jauges capacitives. Des problèmes affectant la sécurité des vols peuvent apparaître dans le cas d\'une conductivité excessive.

1.3. Principes fondamentaux.

Le contrôle et l\'ajustement de la conductivité reposent, au SEA, sur les trois principes fondamentaux suivants :

  • la conductivité électrique du carburéacteur est contrôlée au cours des opérations d\'approvisionnement, de stockage et de distribution. La dernière mesure est effectuée au plus près de l\'opération de mise bord aéronef ;
  • la conductivité est toujours déterminée à température ambiante. Cependant, dans certains cas, il peut être nécessaire de disposer d\'une valeur de la conductivité à la température conventionnelle de 20 degrés Celsius ;
  • il est interdit de délivrer un carburéacteur dont la conductivité est supérieure à la limite supérieure définie dans les spécifications de références (sauf décision contraire de la direction centrale du SEA).

1.4. Organismes concernés.

La présente instruction s\'applique à tous les organismes du service des essences des armées (SEA) en métropole ou dans les départements et collectivités d\'outre-mer, ainsi qu\'aux détachements du SEA ; ces derniers sont concernés quelles que soient les circonstances de leur intervention :

  • en exercice sur le territoire français ;
  • dans le cadre d\'une mission intérieure ;
  • en mission à l\'étranger ;
  • dans le cadre d\'une opération extérieure (OPEX).

Elle peut également servir de référentiel réglementaire aux clients du SEA qui exploitent des capacités de stockage (fixes ou mobiles) et/ou de distribution de carburéacteur (ex : sections aériennes de la gendarmerie, unités de la direction de la sécurité civile, ...).

1.5. Responsabilités.

L\'instruction de 1re référence définit les modalités d\'exécution des différents contrôles de la qualité du produit, tout au long de la chaîne d\'approvisionnement, de stockage et de distribution. En plus des types d\'analyse qui doivent être appliqués aux carburants, elle définit les acteurs chargés de la mise en œuvre des contrôles qualité dont la mesure de la conductivité fait partie.

Les directeurs d\'exploitation de tutelle (2) (DET) décident des actions à mener en cas d\'anomalie.

Les chefs d\'établissement sont responsables de la mise en œuvre des mesures décidées par les directeurs locaux.

2. NOTIONS RELATIVES À LA CONDUCTIVITÉ.

2.1. Définition.

La conductivité et les phénomènes associés, notamment en matière de sécurité lors des manipulations de carburant ou de sécurité des vols sont brièvement rappelés en annexe I.

2.2. Valeurs limites de la conductivité.

La qualité des carburéacteurs est définie par une spécification ou norme de référence (spécifications militaires étrangères, spécifications ou normes établies par des organismes civils de normalisation). Pour le SEA, il s\'agit, préférentiellement, des spécifications de 5e et 6e références.

Parmi les exigences imposées par les spécifications, le carburéacteur doit avoir une conductivité minimum (appelée limite inférieure de conductivité) et une conductivité maximum (appelée limite supérieure de conductivité).

Ces valeurs définissent une plage de conductivité du carburéacteur dans laquelle l\'opérateur peut effectuer les opérations de distribution du carburéacteur en toute sécurité. En dehors de cette plage, l\'opérateur doit se conformer aux prescriptions détaillées dans le point 4.

2.3. Paramètres influents.

Les valeurs de la conductivité, ainsi que la fidélité de la méthode de mesure (répétabilité et reproductibilité) dépendent de nombreux paramètres :

  • des conditions atmosphériques, et, en particulier, de la température ;
  • de la nature et de la densité du produit ;
  • de l\'exposition de l\'échantillon à la lumière ;
  • du temps de relaxation du produit après manipulation ;
  • de la nature du récipient dans lequel le produit est prélevé.

3. MESURES DE LA CONDUCTIVITÉ.

3.1. Généralités.

Conformément aux dispositions de l\'instruction de 2e référence, la mesure de la conductivité est réalisée :

  • par le laboratoire du SEA (LSEA) dans le cadre des analyses de type A, B1, B2 ou de toute analyse d\'opportunité ;
  • par les opérateurs du SEA dans le cadre des analyses de type C.

3.2. Mode opératoire.

3.2.1. Établissements et détachements du service des essences des armées.

Le contrôle de la conductivité d\'un carburéacteur comprend deux actions successives :

  • une mesure au moyen d\'un conductimètre ;
  • une mesure de la température du produit, au moyen d\'un thermomètre.

Le mode opératoire est le suivant :

  • prélever un échantillon tous niveaux (3) dans les capacités fixes, au bas du réservoir pour les capacités mobiles ;
  • verser le produit dans un seau en aluminium ;
  • après 5 minutes (équivalent au temps de relaxation du produit dans le seau), procéder aux mesures de la conductivité et de la température, en plongeant le conductimètre, puis le thermomètre au centre de la surface libre ;
  • si la valeur mesurée est proche (±10 pS/m) des limites inférieures et supérieures de conductivité autorisées, renouveler la mesure une fois ;
  • noter la valeur mesurée (ou la moyenne des 2 valeurs mesurées) ;
  • lorsque le carburant doit faire l\'objet d\'une analyse par le LSEA, noter les valeurs de la conductivité à température ambiante et à 20 degrés Celsius sur la demande d\'analyse (la conversion est effectuée à l\'aide de la formule ou des tables des annexes II et III).

3.2.2. Laboratoire du service des essences des armées.

Le LSEA effectue systématiquement les mesures de conductivité à la température conventionnelle de 20 degrés Celsius sur les échantillons de carburéacteur qui lui sont envoyés (4).

3.3. Conclusions à la mesure de la conductivité.

À l\'issue de la mesure, l\'opérateur peut conclure à une conductivité :

  • « conforme » si la conductivité électrique est incluse dans la plage définie dans les spécifications de référence ;
  • « non conforme » dans les autres cas.

4. MESURES CORRECTIVES.

4.1. Généralités.

Dans le cas où la conductivité d\'un carburéacteur est jugée «  non conforme », l\'opérateur est autorisé à mener les actions correctives suivantes :

  • pour une conductivité faible :
    • dilution dans un produit aux caractéristiques conformes aux spécifications de références ;
    • ajout d\'additif anti-statique ;
    • application de mesures d\'exploitation particulières au point 4.2.3. ;
  • pour une conductivité forte :
    • dilution dans un produit aux caractéristiques conformes aux spécifications de références ;
    • maintien en stockage long du produit.

Tout échantillon de carburéacteur envoyé au LSEA pour analyse est réputé avoir une conductivité conforme aux exigences des spécifications de référence. Ceci implique que, préalablement à l\'envoi des échantillons vers le LSEA, les éventuelles mesures correctives relatives à l\'ajustement de la conductivité ont déjà été réalisées par l\'établissement/détachement.

À l\'issue de l\'analyse par le LSEA, il est cependant possible que le rapport d\'analyse fasse état d\'une conductivité « non-conforme ». Dans ce cas, dès réception des résultats du LSEA, si le carburant n\'a pas été consommé, le chef d\'établissement met en œuvre, à nouveau, les mesures correctives décrites au point 4, selon le cas et les possibilités du dépôt.

Le choix de l\'action corrective dépend notamment des possibilités de l\'établissement/détachement en termes d\'infrastructure et de matériels. Les synoptiques des différentes procédures décrites ci-après sont données en annexes IV et V.

Lors des opérations d\'approvisionnement ou de contrôle périodique, les mesures à prendre sont décidées par les DET (mesures correctives, litige avec fournisseur, etc.), le cas échéant en collaboration avec la DCSEA et le LSEA.

4.2. Modalités d'application des actions correctives.

4.2.1. Dilution.

En cas de conductivité « non conforme », la dilution a des conséquences variables. En effet, la synergie entre un produit de conductivité « conforme » et un produit « non conforme » ne suit pas une règle mathématique simple (5).

À l\'issue du temps de décantation réglementaire (conformément à l\'instruction de 3e référence), une nouvelle analyse de type C (et donc une nouvelle mesure de la conductivité) doit être réalisée selon le mode opératoire décrit au point 3.2.

4.2.2. Ajout d'additif.

Compte tenu de l\'impossibilité de connaître avec précision la quantité d\'additif anti-statique injectée dans le produit tout au long de la chaîne d\'approvisionnement et de la variabilité de la réponse des carburéacteurs à cet additif (6), il est extrêmement difficile de déterminer exactement la quantité d\'additif anti-statique (RS-93) nécessaire pour rendre le produit conforme.

Toutefois, l\'injection d\'une quantité de 0,5 mg/l de RS-93 dans un carburéacteur dont la conductivité est inférieure à la limite inférieure de conductivité, permet généralement d\'assurer sa mise en conformité.

Cette opération n\'est réalisée que si l\'établissement dispose de moyens d\'injection en ligne permettant d\'assurer l\'homogénéité du mélange.

À l\'issue du temps de décantation réglementaire (conformément à l\'instruction de 3e référence) dans la capacité ayant reçu le produit additivé, une nouvelle analyse de type C (et donc une nouvelle mesure de la conductivité) doit être réalisée selon le mode opératoire décrit au point 3.2.

4.2.3. Application de mesures d'exploitation particulières.

Ces mesures ne sont applicables que dans le cas où il serait impossible de réaliser un ajout d\'additif garantissant l\'homogénéité du mélange final. À ce titre, lors de la manipulation d\'un produit de conductivité inférieure à la limite inférieure de conductivité, les précautions suivantes sont à observer :

  • respect scrupuleux des liaisons équipotentielles et des liaisons à la terre en veillant tout particulièrement aux qualités et chronologies de connexion [les matériels utilisés devant être conformes aux directives ATEX (7) ] ;
  • chargement des avitailleurs et distribution aux parties prenantes à débit nominal réduit de moitié pour les quatre premiers mètres cubes ;
  • après remplissage d\'une capacité (fixe ou mobile), respect d\'un délai de 20 minutes avant toute manipulation de produitet avant l\'introduction de quelque objet que ce soit (instruments de prise d\'échantillon, sondes de températures, ...) afin de permettre aux charges électrostatiques de se dissiper ;
  • interdiction de vidanger complètement la capacité (fixe ou mobile) tant que le produit n\'est pas conforme. Le clapet de fond, les pompes et les vannes doivent, en outre, rester immergés dans le produit.

4.2.4. Stockage long.

La décantation du produit concourt à la diminution de la conductivité. Le produit stocké, présentant une  conductivité élevée, doit être maintenu au minimum 48 heures sans mouvement.

5. Texte abrogé.

La circulaire n° 5244/DEF/DCSEA/SDE/1/TD/180/01 du 6 août 2001 est abrogée.

Pour le ministre de la défense et par délégation :

L'ingénieur général de 1re classe,
directeur central du service des essences des armées,

Vincent GAUTHIER.

Annexes

Annexe I. Informations sur la conductivité.

1. Généralités.

La conductivité est une caractéristique physico-chimique du carburéacteur. Elle indique l\'aptitude du produit à dissiper les charges électriques créées lors de sa circulation dans ses canalisations ; elle se mesure en pico-Siemens par mètre (pS/m).

La conductivité électrique du carburéacteur est une caractéristique importante puisqu\'elle concerne directement :

  • la sécurité de la manipulation des carburants au cours de leur exploitation, en particulier lors des opérations d\'avitaillement pendant lesquelles l\'accumulation de ces charges électrostatiques peut être à l\'origine d\'étincelles spontanées. Un danger potentiel pour le personnel et les matériels en contact avec le carburéacteur est donc susceptible d\'apparaître dans le cas d\'une conductivité inférieure à la limite inférieure indiquée dans les spécifications de 5e et 6e références ;
  • la sécurité des vols dans la mesure où elle peut remettre en cause l\'exactitude des informations sur l\'état de remplissage des réservoirs d\'aéronefs transmises par l\'intermédiaire des jauges capacitives. Des problèmes affectant la sécurité des vols peuvent donc apparaître dans le cas d\'une conductivité supérieure à la limite supérieure indiquée dans les spécifications de 5e et 6e références.

La conductivité est une fonction croissante de la température.

Les carburéacteurs (purs) ont une conductivité théorique de zéro. En réalité, sur des produits vierges, ne contenant aucun additif, la conductivité mesurée peut varier entre 1 et 5 pS/m.

L\'additif anti-statique a la particularité de se déposer sur les parties métalliques (lors du transport par pipe-line notamment) et se dépose en fond de capacités.

2. L'apparition de charges électriques.

Toutes les manipulations de carburéacteur peuvent générer l\'apparition de charges électrostatiques qui sont un danger potentiel pour le personnel et les matériels en contact avec les hydrocarbures.

Les charges électrostatiques sont dues à la séparation des espèces ioniques chargées :

  • positivement vers les surfaces des tuyaux, des bacs et des citernes ;
  • négativement vers le centre du liquide.

L\'accumulation de ces charges électrostatiques crée une différence de potentiel qui peut être à l\'origine d\'étincelles spontanées. Les conditions suivantes sont particulièrement favorables :

  • grandes vitesses d\'écoulement dans les tuyauteries ;
  • micro-filtration ;
  • gerbes d\'éclaboussures au chargement d\'une citerne ;
  • brouillard d\'hydrocarbures au chargement, en source ou non ;
  • air pompé dans les éléments filtrants ;
  • éléments de la chaîne d\'avitaillement à des potentiels différents ;
  • non-respect, après ajout d\'additif anti-statique, des temps de relaxation prescrits dans les documents en vigueur (la relaxation participe à l\'élimination des charges électrostatiques : il n\'y a pas de formation de charges lorsque le carburant n\'est pas manipulé).

3. Les jauges capacitives.

Le carburéacteur est le diélectrique (isolant) des condensateurs des jauges capacitives. Ces dernières sont étalonnées avec un carburéacteur dont la conductivité ne dépasse pas les limites supérieures de conductivité définies dans les spécifications de références. Si la conductivité est supérieure à ces valeurs, les valeurs indiquées sur le tableau de bord peuvent être erronées. En pratique, un carburéacteur dont la conductivité est élevée peut présenter un danger pour la sécurité des vols.

4. La sécurité de manipulation.

L\'apparition d\'une étincelle peut être favorisée par l\'introduction d\'un élément conducteur (tuyau métallique, sonde, appareil de mesure, ...) à la surface du liquide.

Si l\'atmosphère au-dessus de la surface du liquide est inflammable ou explosible lors de l\'apparition de la décharge (étincelle), l\'incident peut survenir.

Pour réduire au maximum les risques, les règles élémentaires de sécurité sont à respecter scrupuleusement.

Les dangers liés à l\'électricité statique proviennent également :

  • du remplissage ou de la vidange des corps de filtres à haute pression et haut débit (1) ;
  • de l\'apparition de brouillard d\'hydrocarbures au début d\'un chargement en source.

Notes

    Valeurs nominales de fonctionnement égales à environ 4 bars et 80 m3/h.1

Annexe II. Détermination de la conductivité à 20 degrés celsius.

1. Méthode numérique.

La formule à appliquer est la suivante :

log10 (Cond 20°C) = log10 (Cond t°C) + 0.015 x (20 - t)

avec t : température du produit à laquelle est effectuée la mesure de la conductivité.

2. Méthode par utilisation de la table.

La détermination de la conductivité se fait par lecture directe à partir de la table donnée en annexe III.

La méthode d\'utilisation de la table est la suivante :

  • rechercher, dans la première ligne de la table, la valeur de la «conductivité mesurée » la plus proche de la mesure réalisée ;
  • rechercher, dans la première colonne, la valeur de la «température du carburant lors de la mesure» immédiatement supérieure à celle effectivement mesurée ;
  • la conductivité du carburéacteur à 20 degrés Celsius correspond à la valeur inscrite dans la case qui se trouve à l\'intersection de la colonne et de la ligne dans lesquelles figurent les deux valeurs précédemment retenues.

Annexe III. Table de conversion de la conductivité à 20 degrés celsius (en pico-siemens par mètre).


Annexe IV. Synoptique pour les opérations d'avitaillement (1).

Notes

    Au moyen d'un camion citerne avitailleur (CCA), d'un oléoserveur ou d'un trap system.1

Annexe V. Synoptique pour les produits en cours d'approvisionnement (1) et en cours de stockage longue durée (2).

Notes

    Par navires, wagons réservoirs, camions citernes, oléoducs.1Périodicité des contrôles en cours de stockage définie dans les spécifications de références.2