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Direction du renseignement militaire : échelon de direction ; section « pilotage et maîtrise des risques »

CIRCULAIRE N° 8834/DEF/DRM/ED-PIL relative aux modalités de direction de la fonction interarmées du renseignement par la direction du renseignement militaire.

Du 14 juin 2013
NOR D E F E 1 3 5 0 9 5 4 C

Référence(s) : Code du 03 mai 2024 de la défense - Partie réglementaire III. Le ministère de la défense et les organismes sous tutelle. (Dernière modification le 12 mars 2016 - Document consolidé le 28 mars 2016).

Instruction n° 1/DEF/EMA/LORH1/-- - n° 217/DEF/DRM/DIR-- du 4 janvier 2005 (n.i. BO).

Concept interarmées 2 (CIA 2) n° 170/DEF/CICDE/NP du 15 septembre 2009 (n.i. BO).

Doctrine interarmées 2 (DIA 2) n° 240/DEF/CICDE du 7 octobre 2010 (n.i. BO).

Publication interarmées 7.7. (PIA 7.7.) n° 0427/DEF/EMA/EMP.1/NP du 18 mars 2008 (n.i. BO).

Publication interarmées 2 (PIA 2) n° 18715/DEF/DRM du 7 décembre 2011 (n.i. BO).

Protocole n° 7459/DEF/DRM/SDO/CDT - n° 42018/CDAOA/CDT/-- du 27 août 2009 (n.i. BO).

Protocole n° 6601/DEF/DRM/SDO - n° 0-38328-2010/DEF/EMM/EMO/-- du 5 août 2010 (n.i. BO).

Protocole n° 06/DEF/DRM/SDO/-- - n° 1/DEF/EMAT/B.EMP/ES/14/-- du 28 janvier 2013 (n.i. BO).

Classement dans l'édition méthodique : BOEM  110.3.5.1.

Référence de publication : BOC n°30 du 12/7/2013

La présente circulaire a pour objet de définir les principes de direction de la fonction interarmées du renseignement (FIR) par la direction du renseignement militaire (DRM).

1. PRINCIPES ET GÉNÉRALITÉS.

Conformément à l'instruction citée en deuxième référence (1), la DRM assure la direction de la FIR. Elle constitue la tête de chaîne du renseignement d'intérêt militaire (RIM) et, à ce titre, garantit la cohérence d'ensemble de l'action de renseignement des armées. Le présent document décrit les modalités pratiques de cette direction ainsi que ses principaux domaines d'action.

La doctrine interarmées (DIA) visée en quatrième référence (1) définit la FIR ainsi : « l'action des armées dans le domaine du renseignement d'intérêt militaire est organisée en mettant en oeuvre une fonction interarmées transverse aux chaînes opérationnelles et organiques, la FIR, communément appelée fonction renseignement.

La FIR repose sur des structures permanentes et d'autres de circonstance, articulées sous forme de chaînes, ainsi que sur un réseau de partenaires. Ces structures peuvent être dédiées au renseignement ou avoir d'autres missions principales. Cette fonction est constituée de l'ensemble du personnel, moyens (matériels, doctrines et textes réglementaires) et organisations relevant de l'autorité du chef d'état-major des armées (CEMA), qui concourent aux processus d'élaboration du renseignement d'intérêt militaire ».

Pour assurer la direction de la FIR, le directeur du renseignement militaire (DRM) dispose d'une structure dont la mission est définie par les articles du code de la défense cités en première référence et les attributions précisées par l'instruction de seconde référence (1).

La DRM est chargée :

  • d'élaborer et mettre en oeuvre les orientations en matière de RIM. Elle exerce en ce domaine une fonction d'animation et de coordination ;
  • de garantir la cohérence d'ensemble de l'action de renseignement des armées ;
  • de définir, en liaison avec les états-majors et les autres organismes concernés du ministère, la formation spécialisée du personnel concourant directement à la fonction renseignement et de contribuer à la gestion de cette formation ;
  • de participer au processus de réalisation des capacités et de préparation de l'avenir, via les études amont [plan études amont (PEA), études technico-opérationnelles (ETO), études délégation aux affaires stratégiques (DAS), etc.] et la recherche-développement avec d'autres services.

La DRM exerce son rôle de direction en liaison étroite avec l'état-major des armées (EMA) sur la plupart des sujets mais plus particulièrement dans le domaine des opérations, de la formation spécialisée du personnel, des capacités et de la doctrine relevant de la FIR. Pour cela, elle se fonde sur :

  • le plan national d'orientation du renseignement (PNOR), préparé par le coordonnateur national du renseignement (CNR) ;
  • les orientations retenues tous les six mois par le groupe d'anticipation stratégique (GAS), conduit par le CEMA ;
  • les contrats opérationnels fixés par l'EMA (contrat opérationnel de la DRM, contrat opérationnel de la FIR, contrats opérationnels des trois armées).

La DRM s'appuie également sur des enceintes spécifiques :

  • le comité directeur de la FIR, présidé annuellement par le sous-chef opérations de l'EMA ;
  • le comité exécutif de la FIR, au rythme de réunion bisannuel, sous la présidence du directeur adjoint de la DRM.

2. OPÉRATIONS.

Direction et non commandement, la DRM partage avec les armées l'emploi des moyens de renseignement. Elle s'assure de la coordination des moyens afin de faire coexister renseignement de long terme et renseignement de crise.

2.1. Répartition des moyens de recherche.

2.1.1. Niveau stratégique.

La DRM possède des centres spécialisés [centre de formation et d'interprétation interarmées de l'imagerie (CFIII), centre de formation et d'emploi relatif aux émissions électromagnétiques (CFEEE), centre interarmées de recherche et de recueil du renseignement humain (CI3RH)] et ses propres capteurs, engagés pour surveiller des zones de crise, potentielles ou déclarées. Elle dispose pour cela :

  • de satellites d'observation [dont elle assure le contrôle opérationnel via le centre militaire d'observation spatiale, également sous OPeratial CONtrol (OPCON) de la DRM] ;
  • de centres d'interception électromagnétique ;
  • d'équipes de recherche humaine spécialisée.

Elle bénéficie de l'appui des attachés de défense et utilise également des capteurs placés pour emploi permanent à son profit par les armées. En revanche, lors de leur engagement en opérations, la DRM confie le contrôle opérationnel de ses équipes armement technologie (ARTEC) au commandant de la chaîne nationale.

2.1.2. Niveau opératif.

Sur le terrain, au niveau opératif, la DRM contribue à la mise en condition opérationnelle des moyens de renseignement des armées en fournissant les données techniques nécessaires. Elle veille à la prise en compte des besoins du niveau stratégique en liaison avec le commandant de l'opération, à qui est confié le contrôle opérationnel des moyens.

Dans ce cadre, les aéronefs comme les bâtiments de la marine assurent plusieurs missions simultanées (dont des missions de renseignement) et constituent autant de moyens d'appoint à la main du commandant d'opération. En fonction de l'organisation de la chaîne renseignement de l'opération, les données recueillies par ces capteurs peuvent être exploitées localement et dans les centres spécialisés de la DRM.

2.1.3. Niveau tactique.

Les armées disposent de leurs capacités de recueil, déployées en coordination avec le bureau « J2 » du centre de planification et de conduite des opérations (CPCO/J2) et en s'appuyant sur l'expertise de la DRM si nécessaire.

2.2. Participation de la direction du renseignement militaire au processus décisionnel.

La DRM est tête de chaîne du RIM et pilote la FIR au profit du CEMA, tant pour ce qui relève de la veille stratégique permanente, que de l'appui aux opérations.

Au titre de la veille stratégique, la DRM oriente ses propres capteurs pour permettre au CEMA d'anticiper les crises et de définir les capacités futures. Ce processus est formalisé par une directive annuelle des actions de renseignement (DAAR), directive permanente de renseignement, mise à jour tous les semestres et qui traduit les priorités renseignement du CEMA exprimés lors des GAS. Par ailleurs, la DRM a la responsabilité de la base nationale Electronic Intelligence (ELINT) (radar).

Quand la crise prend de l'ampleur, la DRM participe pleinement aux travaux pré-décisionnels et au processus de planification. Elle établit des plans de renseignement et de recherche servant de matrice à tous les moyens dont elle propose l'emploi au centre de planification et de conduite des opérations (CPCO). Dans les groupes de planification opérationnelle, la DRM conseille sur l'emploi des capteurs et propose l'articulation des chaînes de renseignement nationales et, le cas échéant, les moyens intégrés dans les chaînes multinationales. Par ailleurs, elle prépare une directive militaire de renseignement adaptée à l'opération en cours, qui est cosignée avec le CPCO et, par la suite, complétée par des directives techniques particulières.

Dans la conduite des opérations enfin, la DRM appuie le déploiement et l'emploi des moyens de renseignement (recherche et exploitation), autant pour une opération nationale que pour la mise en place d'une chaîne nationale spécifique dans le cadre d'une opération multinationale.

Dans ce cas, en règle générale, la conduite est animée :

  • au niveau stratégique, par le CPCO/J2, point d'entrée pour les théâtres ;
  • au niveau opératif, par différents acteurs sous OPCON du  National Contingent Commander (NCC: l'adjoint renseignement, ses cellules de coordination, la France National Intelligence Cell (FRANIC) et éventuellement les unités de soutien national renseignement.

Enfin, la DRM organise le rapatriement des données recueillies vers ses centres d'exploitation et de diffusion du renseignement, basés à Creil et à Paris, pour capitalisation et soutien spécialisé autant que nécessaire.

3. COOPÉRATION AVEC LES ARMÉES EN MATIÈRE DE RENSEIGNEMENT.

Le cadre de la coopération avec les armées en matière de renseignement est défini dans les protocoles cités de la septième (1) à la neuvième référence (1), signés entre la DRM et chacune des armées. Au delà des relations quotidiennes entre traitants, cette coopération se concrétise par des réunions bilatérales, des délégations et des échanges de retours d'expérience (RETEX).

3.1. Bilatérales d'armées.

Dans le cadre de l'organisation de la fonction renseignement, deux rencontres bilatérales formelles sont organisées annuellement entre la DRM et chaque armée afin de faire un point sur leurs relations.

La première, dite réunion « bilatérale », met en présence le DRM, accompagné de ses sous-directeurs et de certains de ses chefs de bureau, et le major général de l'armée considérée, accompagné d'intervenants renseignement majeurs. Au cours de cette réunion, sont abordées les problématiques renseignement du moment nécessitant l'arbitrage du niveau de décision des deux entités présentes.

La seconde, dite réunion « de hautes autorités » réunit le DRM et le chef d'état-major de l'armée considérée. Elle permet à ces deux autorités de faire le point des actions lancées au cours de la réunion bilatérale.

Ces réunions sont complétées, pour des besoins spécifiques, par des réunions bilatérales annuelles avec des commandements opérationnels ou organiques d'armées.

3.2. Délégations.

Compte tenu de l'expertise détenue au sein des armées et de la nécessité de mutualiser l'effort renseignement, la DRM délègue aux armées la responsabilité de la production de renseignement sur :

  • des zones ou sites géographiques ;
  • des thèmes ;
  • des domaines d'expertise.

Les termes de ces délégations (périmètre et modalités pratiques) sont précisés dans les protocoles entre la DRM et les armées.

3.3. Retour d'expérience.

Au titre du retour d'expérience en matière de renseignement, la DRM et les armées entretiennent des échanges portant sur leurs RETEX respectifs. Cette coopération est menée via un réseau identifié et entretenu selon les procédures déjà en vigueur telles que définies par la division emploi de l'EMA (EMA/EMPLOI) [procédure interarmées (PIA) 7.7. de cinquième référence (1)]. Elle vise à partager les éléments d'intérêt commun ayant un impact sur les capacités (2) renseignement du niveau opératif et tactique.               

4. ÉVOLUTION DES CAPACITÉS.

4.1. Équipements.

Par son officier correspondant d'état-major (OCEM) la DRM exprime auprès de l'EMA son avis sur la cohérence capacitaire pour l'ensemble de la FIR lors des stades d'initialisation et d'orientation d'une opération d'armement. Elle veille dans les stades suivants à la cohérence d'ensemble vis-à-vis des autres opérations. Au titre de la cohérence des équipements pour l'ensemble de la FIR, elle est également associée au processus d'acquisition des « urgences opérations » coordonné par la division cohérence capacitaire de l'EMA (EMA/COCA).

Dans le domaine des systèmes d'information opérationnels, l'OCEM est responsable auprès de l'EMA de la zone fonctionnelle « renseignement » au sein des systèmes d'information opérationnelle et de communication (SIOC) du ministère de la défense. À ce titre, il tient à jour le modèle des processus de la FIR, les modèles conceptuels de données en cohérence avec l'organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) et assure la cohérence des nouveaux SIOC de la zone fonctionnelle.

4.2. Concepts et doctrine.

Afin d'améliorer l'interopérabilité du domaine renseignement (national, OTAN) et d'optimiser la formation interarmées, la DRM anime le réseau doctrinal de la FIR. À ce titre, elle :

  • participe à la réflexion conceptuelle et à l'adaptation de l'organisation de la FIR, en lien avec l'EMA ;
  • assure, sous la conduite du centre interarmées de concepts, de doctrines et d'expérimentations (CICDE), l'élaboration ou la mise à jour de doctrines et publications interarmées traitant des domaines du renseignement d'intérêt militaire (RIM) ;
  • veille à la cohérence des doctrines nationales, hors du RIM, impliquant la FIR (ciblage, cyberdéfense, actions sur les perceptions et l'environnement opérationnel, etc.) ;
  • participe à la coopération internationale en matière de doctrine du renseignement interarmées :
    • en veillant à la synergie entre les doctrines nationales sur le RIM et leurs équivalentes de l'OTAN (série AJP-2) ;
    • en développant les référentiels sémantiques et modèles conceptuels de données avec l'OTAN, permettant l'interopérabilité des systèmes et des procédures ;
    • en participant aux différents groupes de travail OTAN relevant du domaine renseignement. 

Compte tenu des ressources disponibles pour le suivi de l'ensemble des dossiers, l'enjeu réside dans le développement d'une synergie doctrinale (coordination, information) traitant du RIM. Le pilotage de cette cohérence doctrinale repose donc sur l'action de relais, par domaine spécialisé [renseignement d'origine humaine (ROHUM), renseignement d'origine électromagnétique (ROEM), renseignement d'origine image (ROIM)], au sein de la DRM et des armées.

4.3. Personnel et formation.

La DRM coordonne les travaux de la famille professionnelle renseignement en liaison avec l'EMA et la direction des ressources humaines du ministère de la défense (DRH-MD) avec pour objectifs d'harmoniser les métiers au sein du ministère et de permettre des mutualisations de formation et une mobilité interarmées et interservices. Elle assure également la présidence de la commission spécialisée pour la formation renseignement et rend compte de ses travaux à l'EMA. Elle offre enfin des stages de renseignement interarmées au centre de formation interarmées au renseignement (CFIAR) de Strasbourg et assure la formation technique des interprétateurs image au CFIII.

Le général de corps d'armée,
directeur du renseignement militaire,

Didier BOLELLI.