DÉCRET N° 2010-727 fixant les conditions dans lesquelles des navires battant pavillon d'un État étranger peuvent être autorisés à pêcher dans la zone économique située au large des côtes de Mayotte
Du 29 juin 2010NOR O M E O 1 0 1 1 2 6 4 D
Le Premier ministre,
Sur le rapport du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales,
Vu l'accord portant création de la commission des thons de l'océan Indien adopté le 25 novembre 1993 ;
Vu l'accord aux fins de l'application des dispositions de la convention des Nations unies sur le droit de la mer du 10 décembre 1982 relatives à la conservation et à la gestion des stocks de poissons dont les déplacements s'effectuent tant à l'intérieur qu'au-delà de zones économiques exclusives (stocks chevauchants) et des stocks de poissons grands migrateurs ouvert à la signature à New York le 4 décembre 1995 ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu la loi n° 76-655 du 16 juillet 1976 modifiée relative à la zone économique au large des côtes du territoire de la République ;
Vu la loi n° 83-582 du 5 juillet 1983 relative au régime de la saisie et complétant la liste des agents habilités à constater les infractions dans le domaine des pêches maritimes ;
Vu le décret du 9 janvier 1852 sur l'exercice de la pêche maritime, modifié notamment par la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, en particulier les articles 9 et 13 de ce décret ;
Vu le décret n° 77-1067 du 12 septembre 1977 définissant les lignes de base droites servant à la détermination des lignes de base à partir desquelles est mesurée la largeur des eaux territoriales françaises adjacentes à la collectivité territoriale de Mayotte ;
Vu le décret n° 78-149 du 3 février 1978 portant création, en application de la loi du 16 juillet 1976, d'une zone économique au large des côtes de la collectivité territoriale de Mayotte ;
Vu le décret n° 78-963 du 19 septembre 1978 modifié fixant les conditions dans lesquelles certains navires étrangers pourront obtenir des droits de pêche dans les zones économiques qui ont été créées au large des côtes des territoires d'outre-mer et de la collectivité territoriale de Mayotte ;
Vu le décret n° 84-846 du 12 septembre 1984 fixant les modalités d'application de la loi n° 83-582 du 5 juillet 1983 relative au régime de la saisie et complétant la liste des agents habilités à constater les infractions dans le domaine des pêches maritimes ;
Vu le décret n° 89-1018 du 22 décembre 1989 portant application du décret du 9 janvier 1852 modifié sur l'exercice de la pêche maritime en ce qui concerne la détermination de la taille minimale de capture de certains poissons et autres animaux marins ;
Vu le décret n° 90-95 du 25 janvier 1990 modifié fixant les conditions générales d'exercice de la pêche maritime dans les zones de pêche non couvertes par la réglementation communautaire de conservation et de gestion ;
Vu le décret n° 97-156 du 19 février 1997 portant organisation des services déconcentrés des affaires maritimes,
Décrète :
Article 1er
L'exercice de la pêche par des navires battant pavillon d'un État étranger dans la zone économique de Mayotte est subordonné à l'octroi d'une licence dans les conditions prévues aux articles suivants.
Les navires d'assistance étrangers opérant dans la zone économique de Mayotte doivent également disposer d'une licence et sont soumis aux mêmes obligations.
L'exercice de la pêche par d'autres navires étrangers que ceux disposant d'une licence est interdite.
Article 2
Les dispositions du présent décret ne sont pas applicables à l'exercice de la pêche expérimentale ou scientifique. Celle-ci est subordonnée à l'obtention d'une licence spéciale délivrée par le préfet de Mayotte.
Le préfet de Mayotte réglemente l'exercice de cette pêche.
Article 3
Les licences sont délivrées par décision du préfet de Mayotte après avis du ministre des affaires étrangères, du ministre chargé de la pêche maritime et du ministre chargé de l'outre-mer.
Le préfet de Mayotte fixe, le cas échéant, le nombre de licences susceptibles d'être délivrées, en tenant compte notamment des capacités biologiques de la zone concernée. Il peut également fixer par arrêté une limite de capture par navire.
Lorsque le préfet de Mayotte attribue des quotas de pêche en fonction des totaux admissibles de captures prévus à l'article 8 du présent décret, il délivre aux armateurs qui en font la demande, pour chacun des navires, une licence qui est attribuée dans la limite du quota disponible.
Les informations qui doivent être communiquées par l'armement lors de la demande de licence ainsi que la procédure de délivrance sont définies par arrêté du préfet de Mayotte, après avis du ministre des affaires étrangères, du ministre chargé de la pêche maritime et du ministre chargé de l'outre-mer.
Chaque licence détermine, en particulier, la période et les zones de pêche autorisées, les espèces ou groupes d'espèces concernés et les engins de pêche autorisés.
Un navire détenteur d'une licence doit, pour pouvoir pêcher, se conformer à la réglementation applicable, aux prescriptions techniques annexées à la licence et aux mesures de conservation ou de gestion applicables adoptées par une organisation régionale de gestion des pêches compétente.
Ces prescriptions techniques fixent notamment les modalités :
-
de déclaration des captures des espèces principalement ciblées et des prises accessoires ;
-
d'atténuation des captures accidentelles d'oiseaux, de reptiles et de mammifères marins ;
-
d'interdiction de rejet en mer d'objets en matière non dégradable ;
-
de déclaration d'entrée et de sortie de la zone économique de Mayotte ;
-
d'identification et de suivi par tout moyen des navires autorisés ;
-
d'embarquement ou de transfert et d'accueil d'un contrôleur de pêche ou d'un observateur scientifique.
Article 4
Les licences de pêche sont délivrées après vérification de la capacité juridique, économique, financière et technique de l'armement du ou des navires bénéficiaires et en tenant compte notamment :
1° D'un lien économique réel du navire avec le territoire de l'État dont il bat le pavillon, notamment de la direction et du contrôle des navires à partir d'un établissement stable situé sur le territoire de l'État dont le navire bat le pavillon ;
2° Des antériorités dans la pêcherie ;
3° Des orientations du marché ;
4° Des équilibres socio-économiques ;
5° De la participation de l'armateur à des campagnes expérimentales visant à atténuer l'impact des activités de pêche sur l'environnement ou à des initiatives tendant à la protection de la ressource et de l'environnement ;
6° Des infractions éventuellement commises lors des années précédentes ;
7° De l'engagement d'embarquer un contrôleur de pêche ou un observateur scientifique, si le préfet en fait la demande ;
8° De l'éventuelle inscription du navire ou de l'armateur sur une liste de navires ou d'opérateurs impliqués dans des activités de pêche illégale (pêche illicite, non déclarée et non réglementée) établie par l'Union européenne ou par une organisation régionale de gestion des pêches.
Article 5
La durée de validité de la licence de pêche qui ne peut excéder une année cesse au 31 décembre de l'année de délivrance.
La licence doit être conservée à bord en permanence, elle ne peut être ni cédée ni vendue.
Le refus opposé à une demande de licence doit être motivé et notifié au demandeur.
Article 6
La délivrance d'une licence donne lieu au versement d'une contrepartie financière annuelle par l'armement, selon des modalités fixées par arrêté du préfet de Mayotte, après avis du ministre des affaires étrangères, du ministre chargé de la pêche maritime et du ministre chargé de l'outre-mer.
La contrepartie financière annuelle comprend une part fixe, qui doit être réglée avant la délivrance des licences, et une part variable.
La part fixe comprend un montant couvrant un poids forfaitaire de captures dans la zone économique de Mayotte. Elle peut également comprendre une redevance pour frais de surveillance et d'observation.
La part variable s'applique pour les captures au-delà d'un certain tonnage et doit être payée dans un délai de deux mois après la fin de la campagne et au plus tard le 1er novembre de l'année en cours.
Les captures accessoires, dont la comptabilité doit être tenue, font également l'objet d'une contrepartie financière.
Tout manquement des armements aux obligations du présent article entraîne la suspension immédiate de la licence par le préfet de Mayotte.
Article 7
La licence peut être retirée sans indemnité par le préfet de Mayotte après que l'armement concerné a été mis en mesure de présenter ses observations, dans les cas où :
1° Les dispositions du présent décret ou prises en application du présent décret n'ont pas été respectées ;
2° Le contrôleur de pêche ou l'observateur scientifique embarqué a été entravé de quelque manière que ce soit dans l'exercice de ses fonctions ou missions, y compris du fait d'un manque de coopération de la part de l'équipage ;
3° Les caractéristiques ou le mode d'exploitation du navire ont été modifiés et ne répondent plus aux conditions fixées pour la délivrance de la licence ;
4° Le navire a été vendu ou cédé à un titre quelconque.
Article 8
Afin d'assurer la conservation à long terme et l'exploitation optimale des ressources halieutiques, le préfet de Mayotte peut fixer par arrêté, pour une durée maximum de trois ans, des totaux admissibles de captures par espèce ou groupe d'espèces pour des zones, des périodes d'activité et des engins donnés, après avis du ministre des affaires étrangères, du ministre chargé de la pêche maritime et du ministre chargé de l'outre-mer.
Lorsqu'un total admissible de captures est réputé épuisé, la poursuite de la pêche de l'espèce ou du groupe d'espèces par les armements concernés est interdite par arrêté du préfet de Mayotte.
Article 9
Le préfet de Mayotte détermine par arrêté, après avis du ministre des affaires étrangères, du ministre chargé de la pêche maritime et du ministre chargé de l'outre-mer, les règles relatives à :
1° L'interdiction permanente ou temporaire et la réglementation de l'exercice de la pêche de toutes ou de certaines espèces dans certaines zones ;
2° La taille ou le poids des captures en dessous desquels celles-ci doivent être aussitôt rejetées ;
3° La proportion de captures inférieures à la taille ou au poids minimaux mentionnés au 2° au-dessus de laquelle les opérations de pêche peuvent être interrompues ;
4° Les règles relatives au traitement des espèces non commercialisées ;
5° Les règles encadrant la mise en œuvre de procédés expérimentaux ;
6° Les obligations et interdictions relatives à l'atténuation des captures accidentelles d'oiseaux, de reptiles et de mammifères marins ;
7° Les règles relatives aux engins, instruments et appareils utilisés à des fins de pêche, à la dimension du maillage des filets et aux caractéristiques techniques des navires ;
8° Les règles relatives aux heures et aux saisons ouvertes à la pêche ;
9° Les profondeurs de pêche autorisées ;
10° L'autorisation ou l'interdiction de certains types ou procédés de pêche ;
11° La définition du pourcentage maximal de prises accessoires de certaines espèces pour certains types de pêche ou avec certains engins ;
12° La réglementation de l'emploi des appâts ;
13° Les conditions d'exécution d'opérations accessoires à la pêche à bord des navires ;
14° Les règles relatives aux rejets de captures, principales ou accessoires, et aux rejets de résidus d'usine ou d'appâts ;
15° Les obligations en matière de marquage et de recapture ;
16° Les obligations à l'égard des observateurs et inspecteurs des pêches, et du matériel qui est mis à leur disposition ;
17° Le lieu de débarquement des captures ;
18° L'interdiction de la mise en vente, de l'achat et du transport des produits dont la pêche est interdite ;
19° L'obligation de signalement à l'entrée et à la sortie de la zone économique exclusive ;
20° La définition de zones ou de mesures de restriction de pêche destinées à favoriser l'implantation de structures artificielles aux fins d'exploitation et de mise en valeur des ressources biologiques ;
21° L'enregistrement des captures, l'établissement de documents obligatoires par le producteur ou, le cas échéant, l'acheteur des produits de la pêche, les délais de transmission de ces documents à l'autorité compétente ;
22° L'enregistrement et la communication des données requises dans le cadre du système de surveillance des navires de pêche par satellite ou de tout autre moyen de repérage ;
23° La détermination des conditions de conservation, de reproduction, de reconstitution des ressources de pêche et d'enrichissement ou de repeuplement des fonds ;
24° La détermination des secteurs et sous-secteurs de pêche à l'intérieur d'une même zone économique exclusive et les règles de fréquentation de ces secteurs et sous-secteurs ;
25° Les interdictions de rejets en mer d'objets en matière non dégradable.
Article 10
Les articles 2 et 6 du décret n° 78-963 du 19 septembre 1978 modifié fixant les conditions dans lesquelles certains navires étrangers pourront obtenir des droits de pêche dans les zones économiques qui ont été créées au large des côtes des territoires d'outre-mer ne sont pas applicables à Mayotte.
Article 11
Le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, le ministre des affaires étrangères et européennes, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, le ministre de la défense, le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État, le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche et la ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, chargée de l'outre-mer, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 29 juin 2010.
François Fillon
Par le Premier ministre :
La ministre auprès du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, chargée de l'outre-mer,
Marie-Luce Penchard
Le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat,
Jean-Louis Borloo
Le ministre des affaires étrangères et européennes,
Bernard Kouchner
Le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales,
Brice Hortefeux
Le ministre de la défense,
Hervé Morin
Le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État,
François Baroin
Le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche,
Bruno Le Maire